jeudi 30 janvier 2025

Des questions, des questions...

Alors que je finis un article où l'on me demande de présenter la gastronomie moléculaire, je m'interroge... mais seulement maintenant ! sur la meilleure façon de le faire. Certes le texte est terminé, mais comment pourrait-il être mieux ? 

La question s'impose à moi alors que je viens de relire le texte de la leçon inaugurale de la chaire de Pierre-Gilles de Gennes au Collège de France. C'est un texte "de jeunesse", qui n'a pas la force d'autres écrits de ce physicien  qui fut lauréat du prix Nobel. Un texte amusant parce que manifestement destiné à du grand public et qui oblige l'auteur à sortir de ses équations. Bien sûr, on se souvient que Pierre-Gilles de Gennes était une personnalité grande  par la taille et par la pensée, mais aussi par le sentiment qu'il avait de ses capacités. Dans ce texte, il reste un peu plat, de façon étonnante, mais il faut se souvenir qu'il fut très jeune (moins de 40 ans) au Collège de France. Je dois ajouter, d'ailleurs, que je lis ce texte alors que j'étais lancé dans la relecture des œuvres de toute une série de très grands scientifiques : Chevreul, Lavoisier,... 

Je ne me compare évidemment pas à ces grands personnages, mais j'essaye, en analysant mes lectures, d'en tirer des idées pour améliorer mes propres écrits,  et de trouver mes manières pas trop idiotes d'intéresser les amis qui me liront. 

Pour en revenir au texte de Pierre-Gilles de Gennes, je le vois évoquer les questions de recherche. C'est une manière de partager de l'enthousiasme pour la recherche scienifique, mais, également, c'est une manière d'analyser un champ de connaissance, de trouver  les conditions d'une stratégie stratégique. 

On retrouve là quelque chose qui s'apparente au programme David Hilbert, ce mathématicien allemand qui,  au tout début du 20e siècle, identifia une vingtaine de grandes questions qui lui semblait essentielles. 

J'ai déjà dit souvent que la science est également là pour proposer des questions et non pas seulement apporter des réponses qui en réalité découlent des premières. 

Décidément, il va falloir que je reprenne mon premier jet à la lumière de ces idées.

 

mercredi 29 janvier 2025

Les rôles de l'université ?

Un ami discute les rôles de l'université et il leur attribue d'enseigner, d'apprendre, de faire de la recherche, d'innover, de conseiller et plus. 

Pourquoi pas mais il y a là une volonté personnelle et c'est cela que je veux débroussailler aujourd'hui. 

Tout d'abord, est-ce l'université qui enseigne ? Non ce sont des professeurs employés par l'université et je sais qu'il y a toujours un risque politique à confondre les individus et les ensembles point c'est ainsi que naissent notamment les paradoxes et pour ce qui nous concerne si je suis prêt à admettre que c'est bien l'université de diplômes, c'est l'assemblée des professeurs qui décide de cursus, qui fait les nominations qui organise la vie et l'activité à l'université, ce n'est pas l'université qui enseigne.

Selon ce même point de vue, ce n'est pas l'université qui apprend mais les étudiants inscrits à l'université qui sont là pour apprendre. Ce n'est pas  l'université qui fait de la recherche, mais les scientifiques qui font de la recherche au sein de l'université. 

D'ailleurs, on a bien vu encore récemment, à propos  de discussions sur l'éthique des  académiciens de l'Académie d'agriculture,combien il était important de distinguer l'institution des personnes. Un individu ne peut parler au nom d'une institution que s'il a été mandaté pour cela et sinon il doit parler en son nom personnel et il doit bien indiquer que c'est un nom personnel qu'il parle.

Mais on voit ce profiler la discussion politique : un professeur, un étudiant, un chercheur sont-ils si fondus dans l'université ils doivent en oublier leur individualité ? La question à cela de troublant que l'ami qui assigne ces tâches à l'université est membre d'un institut extrêmement élitiste, qui n'existe en réalité que par ses membres et très peu par lui-même. 

mardi 28 janvier 2025

Les rapporteurs doivent être factuels !

 J'ai reçu hier l'évaluation d'un manuscrit par un collègue. Certes le manuscrit était mauvais mais en l'occurrence c'est le collègue évaluateur que je veux critiquer parce qu'il a dépassé les faits et s'est autorisé des jugements de valeur qui n'avaient pas lieu d'être.
 

J'insiste : tout était critiquable, de la mise en œuvre des méthodes jusque dans leur justification, de la production de résultats  jusqu'à l'expression de ces derniers, notamment avec l'affichage de chiffres significatifs qui n'avaient pas lieu d'être (par exemple).

Mais j'arrive au point épineux : le collègue évaluateur a écrit dans son rapport que ce manuscrit était du niveau d'un étudiant médiocre, et cela n'est pas acceptable.

Je sais, nous savons tous, que les auteurs du manuscrit auraient été froissés d'une telle déclaration. Nécessaire ? Judicieuse ? Pertinente ? Non.
Éditeur de la revue, je me suis permis de proposer à l'auteur de ces mots de les supprimer.

Ce cas se produit souvent, notamment avec les mauvais articles, parce que leur lecture irrite, donne progressivement envie d'en interdire la publication. C'est légitime mais il n'y a pas lieu de charger la barque, et la simple description, factuelle, de la médiocrité du texte suffit à faire  comprendre à tous  l'ampleur du travail nécessaire pour que le manuscrit soit publiable. A tous, et notamment aux auteurs... qui retireront sans doute leur manuscrit.

Oui interdisons les cartouches de protoxyde d'azote

 Les cartouches de protoxyde d'azote pour les siphons ? Oui, c'est bien de la "cuisine moléculaire", mais dès les années 1980, j'avais proposé que l'on utilise plutôt des pompes pour faire des mousses ou des émulsions. Avec des systèmes tels que les aérographes des pâtissiers.

lundi 27 janvier 2025

L'université doit être doit-elle faire du conseil ?

 L'université doit être doit-elle faire du conseil ?  Oui, mais correctement !

Il ne faut pas se méprendre et limiter le mot "conseil" à celui que des scientifiques peuvent accorder à entreprises,  car il peut tout aussi bien y avoir du conseil à des particuliers et du conseil à des institutions.

 Le conseil, dans ce dernier cas, se rapproche de l'expertise, et l'État a raison, par ses agents, de solliciter des experts très au courant des sujets sur lesquels il doit prendre des décisions.
 

On a écrit 1000 choses à propos de l'expertise, du devoir de réserve, de l'éthique de l'expertise, et cetera,  mais on pourrait en réalité sans tenir à une idée simple qui est que l'énoncé de faits établis par un travail scientifique doit être bien distingué de conclusions politiques que l'on pourrait en tirer,  d'application que l'on déciderait en se fondant sur les faits bien établis.
 

C'est une grande faute que de mettre de l'idéologie dans la sélection des données que l'on transmet pour le débat, lors des "expertises", et les scientifiques ne doivent pas participer aux prises de décisions. 

J'écris cela, parce que l'on voit trop de collègues se donner de l'importance en dépassant les limites du discours qu'ils sont autorisés à faire. En tout cas, dans l'expression publique, c'est un minimum éthique que les faits soient bien séparés de leurs interprétations, et que des jugements de valeur soient signalés comme tels.

Le prix Sonning 2025

 

L'université de Copenhague annonce le prix Sonning 2025 (voir le communiqué de presse, en pj).

French Hervé This, who invented molecular gastronomy, has fundamentally changed European food culture and put gastro experiences at the top of many people's bucket lists. Now, he receives Denmark’s biggest cultural award at the University of Copenhagen.


dimanche 26 janvier 2025

Stratégie d'enseignement

Supposons que nous voulions expliquer quelque chose. Tout d'abord le voulons-nous vraiment ? Ou bien préférerions-nous que nos amis le découvre par eux-mêmes ? Qu'ils aient ce plaisir de chercher, de trouver et de comprendre...

 

Mais supposons que nous devions donc expliquer quelque chose. 

Il y a lieu de n'expliquer que ce qui est nécessaire, sans quoi nos amis sont perdus : ce qui n'est pas indispensable à la compréhension est gênant, car nos amis ont en vue l'explication de ce que nous avons annoncé que nous donnerions, et un élément étranger à cette explication les rendra bien perplexes : quel rapport avec la question posée ?

 

Cela nous conduit à répéter que pour des explications, il y a eu toujours lieu : 

- d'annoncer la couleur 

- avant de tirer les fils. 

 

Annoncer la couleur, c'est donner l'objectif, dire ce que l'on veut expliquer. Dire la destination du chemin que nous allons emprunter. 

 

Tirer les fils, cela signifie expliquer pas à pas ce qui est nécessaire pour arriver jusqu'à la fin de l'explication. 

On voit ici que si l'on emprunte un chemin de traverse, on n'est plus dans ce schéma logique de tirer les fils mais au contraire, on ajoute des ramifications qui risquent d'égarer nos amis.

 

Dans cette comparaison, il y a l'hypothèse selon laquelle on peut progresser de notion en notion, linéairement, mais l'expérience montre que, parfois, il faut converger, partir de plusieurs notions pour arriver à la notion que l'on veut expliquer. 

 

Et l'on voit bien l'intérêt d'une carte, une véritable carte sur laquelle on représente le chemin qui sera parcouru.