lundi 19 août 2024

dimanche 18 août 2024

On dit que l'on ne doit pas cuire les fruits rouges dans des casseroles étamées.


Jadis, on cuisait dans des pots en terre, et ces derniers cassaient fréquemment, ce qui explique que l'on retrouve des monceaux de tessons sur les sites des anciennes cuisines. Puis il y eut les chaudrons en fer, mais ce dernier rouillait, donnant un goût désagréable. Apparut ensuite le cuivre, mais il était coûteux, et le vert-de-gris dont il est parfois recouvert est vénéneux. Sauf pour les bassines à sucre des sirops et caramels, ou les bassines à reverdir pour la cuisson des légumes verts, le cuivre ne fut plus utilisé à moins d'être recouvert d'une couche d'étain : il y a un siècle environ, on allait fréquemment faire étamer les casseroles afin d'éviter le vert-de-gris vénéneux. L'étain nuit-il aux fruits rouges, pour en arriver à la question posée en titre de ce billet  ? Si l'on met des fruits rouges dans de l'étain très propre, métal brillant, alors rien ne se passe, mais si l'on met des sels d'étain sur des fruits rouges, alors on les voit prendre une couleur violette. On comprend assez bien les raisons de ce changement de couleur, mais il indique surtout que l'étain était oxydé, et il n'est pas certain que l'étain oxydé soit très bon pour la santé. On évitera donc le fer qui rouille, le cuivre qui se vert-de-grise, et l'on n'hésitera pas une seconde à utiliser de l'acier inoxydable qui, comme son nom l'indique, et inoxydable. Finies les oxydations dangereuses, finis les changements de couleurs malencontreux ou intempestifs, finis les mauvais goût. Vive la technologie bien pensée !

Les revues scientifiques doivent-elles imposer aux auteurs de déclarer leurs "conflits d'intérêts" ?


Avant toute chose, il y a ce "conflit d'intérêt" qui me déplaît, car ce sont les humains qui ont des conflits, et pas les intérêts. Ce que l'on veut dire, c'est que les auteurs d'articles scientifiques doivent déclarer des activités qui pourraient modifier leur pensée, soit consciemment, soit inconsciemment. On pense, par exemple, à un expert qui devrait statuer sur une réglementation sur le tabac... mais qui serait payé pour de la consultance auprès de l'industrie du tabac... mais les choses sont plus compliquées : un expert qui fume ne serait-il pas également enclin à être plus laxiste vis-à-vis de l'industrie du tabac ? Or on voit bien que l'on ne va pas imposer aux auteurs des articles de dire s'ils fument, s'ils boivent, s'ils aiment le chocolat, et quoi encore ? D'autre part, la question est compliquée, parce que des experts qui ne connaissent pas le monde industriel ne sont pas des experts, puisqu'ils ne savent rien des réalités du monde. On pourrait dire qu'un expert qui n'a pas d'intérêt n'est pas un expert. Enfin, il y a des cas -les cas les plus fréquents- où les experts sont très peu nombreux. Par exemple, je connais des cas où l'Agence du médicament a fait appel au seul expert d'un domaine... mais pas de chance, la belle soeur de cet expert travaillait dans l'industrie : des règles idiotes ont conduit à réfuter l'expert... de sorte qu'il n'y avait plus personne pour connaître le dossier ! Bref, la question est compliquée, et je propose surtout d'avoir un peu de grandeur, au lieu de nous comporter comme des minables. On le sait, qu'il y a des malhonnêtes, mais il y a aussi tous les autres ! Et il est inutile de faire des lois contre les "méchants", alors que ces derniers mettent toute leur énergie pour échapper aux lois... et y arrivent ! Ces dites lois, les "bons" les respectent, et elles entravent le bon fonctionnement de nos sociétés. Mon vieil ami Pierre Potier disait que chaque fois que l'on introduisait un nouveau comité, il fallait en supprimer deux anciens, et je propose qu'il en soit de même pour les lois, sans quoi nous allons mourir ensevelis sous des lois si nombreuses que nous ne pourrons ni les connaître, ni les appliquer, a fortiori. Bref, faut-il que les revues scientifiques imposent aux auteurs de déclarer leurs conflits d'intérêts ? Non, mais pourquoi pas leurs "intérêts", afin qu'il n'y ait pas d'intérêts cachés. C'est d'ailleurs ce que tout individu honnête devrait faire. Enfin, et surtout, je récuse l'idée qu'un individu loyal, droit, ne puisse faire la part des choses en son âme et conscience, en parfaite loyauté. Après tout, un boulanger qui a vendu un pain n'est pas redevable au client qui le lui a payé. De même pour un expert : s'il a travaillé un jour pour l'industrie, il n'est pas nécessairement « vendu », pour la même raison. Faisons confiance : un individu droit qui sentirait qu'il y a un problème à publier ne publierait pas.

samedi 17 août 2024

Il faut être deux fois plus clair qu'on pense devoir l'être


 "Il faut être deux fois plus explicité qu'on pense devoir l'être" : je croyais avoir fait état de cette idée très juste, mais les jeunes amis du laboratoire m'ont dit que non. Je me rattrape donc aujourd'hui. Tout d'abord, il faut que j'avoue mon insuffisance : j'ai oublié d'où j'ai tiré l'idée. Ce n'est donc pas de la malhonnêteté que de donner la phrase sans référence, mais simplement que je ne trouve plus la source. La phrase provient probablement d'un livre écrit en anglais, et sans doute un livre scientifique que j'ai lu dans les deux derniers mois, mais lequel ? Pardon, donc, à l'auteur dont je distribue ainsi la pensée. Mais arrivons à cette dernière. Tous ceux qui écrivent cherchent évidemment à s'adresser clairement à leurs lecteurs ; tous ceux qui parlent (enseignent, conférencent...) cherchent évidemment à être compris... d'autant qu'on se souvient de ce "La clarté est la politesse de ceux qui s'expriment en public" du physicien François Arago. Toutefois, avec le temps, avec le travail, on ne se souvient plus de nos ignorances initiales, qui sont celles de nos interlocuteurs qui n'ont pas parcouru le même chemin que nous ; on ne se souvient plus des difficultés, sauf exception. Bref, progressivement, on tient pour évident des idées qui ne l'étaient pas, preuve que l' "évidence" est une notion bien compliquée, que nous devrions discuter longuement au lieu de l'utiliser sans précaution. Et quand on oublie les difficultés, nos interlocuteurs sont perdus, ce qui, on en conviendra, n'est pas l'objectif de personnes loyales. D'où l'intérêt du conseil : au lieu d'être simplement clair, explicite, on cherche à l'être deux fois plus que nécessaire... c'est-à-dire que, en réalité, on fait véritablement l'effort de passer par derrière le premier effort de clarté, et de s'assurer que le premier effort est suffisant. Un conseil à donner à tous les étudiants... et à tous les professeurs, bien sûr !

vendredi 16 août 2024

Le caramel ? De la chimie en cuisine (et ce n'est pas une exception)

 
Ayant observé que je discutais plus les transformations physiques que les transformations chimiques des aliments, j'en viens naturellement à discuter maintenant une recette où la physique a peu de place et où la chimie est reine : la formation des caramels. Bien sûr, quand on fait un caramel, que l'on place du sucre dans de l'eau et que l'on chauffe, il y a d'abord la disparition des cristaux et la formation d'un sirop. En effet, le sucre est "hygroscopique", ce qui signifie qu'il capte l'eau de son entourage... de sorte que, quand on chauffe ensuite du sucre, celle-ci est ensuite disponible pour que les molécules de sucre se dissolvent. Bref, pas nécessairement besoin d'ajouter de l'eau à du sucre pour obtenir du caramel, par temps humide. Ici, il faut que je fasse une petite rectification, à propos de « sucre », car le sucre de table n'est pas le seul sucre, de sorte qu'il est parfaitement illégitime de dire que c'est "le sucre" : c'est un sucre, et un sucre particulier que la chimie nomme le saccharose. La famille des sucres est immense, mais, plus ou moins, ce sont tous des composés dont les molécules sont constituées d'un squelette fait d'atomes de carbone enchaînés linéairement, ces derniers étant liés à des atomes d'hydrogène, et, surtout, à des groupes de deux atomes : un atome d’oxygène liné à un atome d’hydrogène. De tels groupes sont nommés « hydroxyles », et c'est la raison pour laquelle il est juste de dire qu les sucres sont des composés organiques "polyhydroxylés" (désolé pour la longueur du mot, mais au moins ce dernier est explicite : poly = plusieurs, hydroxylé = groupes hydroxyle). Les chimistes, depuis un siècle ou deux, ont découvert de nombreux sucres : le glucose, le fructose, le saccharose (nommé sucrose en anglais), le lactose, l'érythrose…. A cette énumération, on pourrait penser que tous les sucres sont des « oses », mais, en réalité, la famille est plus variée, avec des composés tels l'acide galacturonique, l'acide glucuronique, etc. Je n'entre pas dans les détails chimiques, mais le redis : la famille des sucres est immense. Revenons donc au début de la transformation qui aboutit au caramel, à savoir la dissolution du saccharose dans l'eau présente initialement. Il faut considérer que nous partons de cristaux de sucre, chaque cristal étant un empilement régulier, comme les cubes d'un enfant, bien disposés en pile, de molécules de saccharose. Ces molécules s'empilent parce que les groupes hydroxyles dont nous avons parlés s'attirent, par le même type de forces qui assurent la cohésion des molécules d'eau dans l'eau. Et cette comparaison n'est pas anodine, car ces mêmes forces permettent de maintenir les molécules de saccharose entre les molécules d'eau dans les sirops. Quand on continue de chauffer, on voit bien sûr que de l'eau s'évaporer, puisque apparaît une fumée blanche au-dessus de la casserole : ce sont des molécules d'eau qui, accélérées par le chauffage, ont réussi à s'échapper du sirop, leur énergie de mouvement étant supérieure à l'énergie des forces qui les retenaient dans le sirop. Les molécules de saccharose, elles, ne s'évaporent pas, car elles sont beaucoup plus grosses, de sorte qu'il leur faudrait bien plus d'énergie. Il y a donc les molécules d'eau qui s'échappent, mais, quand elles arrivent dans l'air plus froid, au dessus de la casserole, elles ne peuvent rester en phase gazeuses, de sorte qu'elles se ré-associent en petites gouttes d'eau liquide, et la fumée est, comme les nuages dans le ciel, faite d'une multitude de très petites gouttes d'eau liquide. Ce que l'on sait moins, c'est que, simultanément, même quand on ne voit pas de changement notable dans le sirop, des transformations ont lieu, au nombre desquelles figurent ce que l'on nomme l'hydrolyse, à savoir que les molécules de saccharose se scindent en deux parties, qui sont une molécule de glucose et une molécule de fructose. Oui, les atomes du saccharose se répartissent en deux groupes, qui sont précisément ces deux sortes de molécules. Cette transformation n'est pas la seule, comme le montrent des mesures de la couleur du sirop. Les atomes des molécules de saccharose auxquels de l'énergie est donnée par le chauffage, peuvent former bien d'autres assemblages, des molécules de bien d'autres sortes, et, à ce stade, le sirop n'est déjà plus un simple sirop de molécules de saccharoses dissoutes dans l'eau. Quand le chauffage se poursuit, davantage d'eau s'évapore, de sorte que la température du sirop peut devenir supérieures aux 100 °C de l'ébullition de l'eau pure : 110, 120, 130… A ces températures, les mouvements d'atomes et de molécules deviennent très vigoureux, et les molécules de saccharose se disloquent de très nombreuses façons différentes. Notamment, un chimiste français a réussi à identifier que se libéraient, dans le sirop chauffé, des molécules instables, qui tiennent du glucose et du fructose, mais qui sont très réactives, et qui s'assemblent pour former notamment des molécules abondantes que sont des "dianhydrides de fructose". Ces derniers peuvent ensuite s'associer à des molécules de glucose qui étaient dans le sirop pour former de longues chaînes, qui, au refroidissement, feront la masse du caramel. Si cette réaction-là est essentielle, pour la formation du caramel, elle n'est pas la seule : les possibilités de dislocation de molécules sont nombreuses. Notamment se forment de petits composés et, en particulier, le 5-hydroxyméthylfurfural (pardon pour le nom à rallonge, à nouveau), qui contribue au goût de caramel. On trouve ce composé dans de nombreuses cuissons, à commencer, par exemple, par la cuisson de carottes : le goût de carottes cuites, et le goût de cuit en général, est souvent dû à ce composé dont les chimistes ne disent pas le nom en entier mais l'abrègent en HMF. Je répète que la formation du HMF ou des dianhydrides de fructose n'est pas, loin s'en faut, les seules transformations moléculaires, les seules réactions chimiques. Il y a en d’innombrables qui ont lieu lors de la formation d'un caramel, et l'on comprend que parler de « caramélisation » est seulement une façon de décrire rapidement un ensemble foisonnant de réactions simultanées ou successives. Chaque réaction particulière a un nom, mais on voit aussi que ces réactions ne sont pas isolées, lors de la caramélisation. Lors du refroidissement, on récupère une masse brune, avec beaucoup de goût. Il y a de l'odeur, de la saveur, parfois de l'âcreté. C'est cela, un caramel. Bien sûr, ces réactions diffèrent de celles qui assurent le brunissement d'une viande que l'on fait rôtir, ce qui explique pourquoi il est erroné ou fautif de parler de caramélisation d’une viande, sauf quand on ajoute du sucre dans la casserole, et que la viande se couvre de caramel, comme dans certaines recettes asiatiques, avec du porc par exemple. Toujours lors du refroidissement, on peut très bien a jouter de l'eau au caramel, de sorte que les divers composés formés se dissolvent dans cette eau et font un caramel liquide. D’ailleurs, tant que nous y sommes à évoquer des variations sur le thème du caramel, il faut signaler que l'ajout de composés spécifiques au sirop permet de changer la composition du caramel, et c'est ainsi que la réglementation reconnaît plusieurs caramels qui sont vendus avec des noms de code E150 a, E 150 b, E150c, E150 d, selon la petite quantité de composé que l'on a ajoutée pour guider la réaction dans un sens ou dans un autre, avec des résultats gustatifs différents. On peut vouloir des caramels plus bruns, sans être âcres, ou des caramels avec des goûts particuliers. Toujours lors du refroidissement, on peut bien sûr ajouter des ingrédients qui contiennent des matières grasses, tels le beurre ou la crème, et l'on aura alors des caramels mous. L'univers des caramels est immense, encore très mal connus, parce que les réactions chimiques qui ont lieu sont nombreuses, et que l'exploration de leurs mécanismes est parfois bien difficiles, mais je suis bien certain que nous avons encore beaucoup à découvrir... À condition d'aller explorer tout cela.

mercredi 14 août 2024

En cuisine, de la physique et de la chimie


Alors que je suis lancé dans la confection quotidienne de billets plus techniques que moraux, où j'examine la confection de certains plats, je vois, après quelques jours, que j'ai plus décrit les phénomènes physiques que les phénomènes chimiques. Par exemple, c'est la densité qui m'a intéressé à propos de cocktail, ou l'évaporation de l'eau à propos de soufflés, ou l'entrée de la matière grasse dans des viandes que l'on confit… Il y a plus là des phénomènes physiques que des phénomènes chimiques… apparemment. Est-ce une impression ? Est-ce que la chimie qui s'opère est si complexe que je me rabats sur des phénomènes plus simples ? Et est-ce qu'il y aurait lieu de plus focaliser sur de la chimie ? Prenons le cas d'un soufflé. Certes, son gonflement est dû à l'évaporation de l'eau, ce que l'on nomme une transition de phase, phénomène physique pour lequel il n'y a pas de changement de nature des composés présents (les mêmes molécules sont présentes avant et après). L'évaporation de l'eau, ce n'est donc pas de la chimie, mais de la physique. Toutefois réduire le soufflé à l'évaporation de l'eau serait une erreur, car le soufflé, qui est liquide initialement se voit finalement solidifié (relativement) par la coagulation des protéines de l'oeuf. Or la coagulation est un phénomène véritablement chimique, puisque les protéines individuelles, sortes de pelotes, sont déroulées par la chaleur et, une fois déroulées, elles s'attachent par des liaisons chimiques que l'on nomme des ponts disulfure, formant un réseau qui s'étend dans toute la masse du soufflé. Le soufflé ne se ferait pas sans cette transformation chimique, et il est bon de s'en apercevoir. Pour un tel cas, c'était donc vraiment une impression que de penser la confection du soufflé comme une transformation physique. En réalité, il faut de la physique et de la chimie, c'est-à-dire en réalité de la physico-chimie, qui est une science merveilleuse, en ce qu'elle considère les phénomènes physiques et chimiques en relation. Continuons avec le soufflé. La croûte du soufflé ? Bien sûr, l'eau de surface s'évapore quand la température est supérieure à 100 degrés, mais on voit bien que la couleur change : la surface supérieure du soufflé brunit. Pourquoi ? Ayant d'abord observé que le goût de cette croûte est puissant, différent de celui de l'intérieur du soufflé, on peut s'interroger, et l'on doit considérer que l'appareil est fait d'eau, de matières grasses, de protéines, de quelques « polysaccharides », et que c'est l'échauffement de cette matière, au-delà de 100 degrés, qui conduit à ce brunissement. Les lipides ? Bien sûr, ils peuvent réagir, mais ils sont assez inertes, et la réaction est lente. Les polysaccharides ? Ils étaient initialement empesés dans l'appareil à soufflé, de sorte que les grains d'amidon ont pu s'interpénétrer avant que l'eau soit évaporée. Mais l'expérience qui consiste à placer de la farine dans une poêle chauffée, ou dans un four à côté d'un soufflé que l'on cuit, montre qu'il n'y a guère de brunissement. Les protéines, elles, sont bien plus sensibles, comme on le voit quand on produit un beurre noisette : tant qu'il y a des bulles, la température est de 100 degrés, et la couleur reste celle d'un beurre fondu, mais quand les bulles disparaissent, et que la température augmente, la préparation brunit, prend du goût. Manifestement la pyrolyse des protéines est importante. Bien sûr il y a aussi des réactions de Maillard entre le lactose et les protéines, mais ces réactions sont bien secondaires. Pyrolyse des protéines : voilà des réactions qu'il faudra bien explorer pour mieux comprendre les changements de goût des aliments en cours de cuisson. Que ferons-nous de telles informations ? Les chimistes ont découvert que les réactions de Maillard produisent des goûts différents quand elles sont en présence de matières grasses, et que ce ne sont plus stricto sensu des réactions de Maillard. Quand on comprendra mieux ces différences, alors ont pourra faire une cuisine plus précise, avec des goûts plus assurés. Il est donc essentiel de se préoccuper un peu plus de chimie dans la transformation des aliments.

mardi 13 août 2024

Le talent fait ce qu'il peut, et le génie fait ce qu'il doit

Hier, j'ai trouvé cette formule rigolote : le talent fait ce qu'il peut, et le génie fait ce qu'il doit. 

On sait mon attitude ambivalente pour ce qui concerne les formules et les arguments d'autorité en général. Ce n'est pas parce qu'une phrase a été dite, ce n'est pas parce qu'elle est concise et efficace du point de vue de la communication, ce n'est pas parce qu'elle a été dite par une Autorité, que je considère que l'idée portée par la phrase est juste. 

Surtout j'ai bien appris à ne pas chercher de qualités à des objets qui n'existent pas. J'ai discuté ailleurs la question de savoir si le manteau du père Noël était rouge ou bleu, et j'ai rapproché ce questionnement de celui de certains clercs du Moyen Âge, qui se demandaient combien d'anges pouvaient tenir sur la tête d'une épingle, prototype de la question contestable, car si les anges n’existent pas, il n'y a pas lieu de s'interroger sur leurs qualités, ou sur leur nombre. Le talent ferait ce qu'il peut et le génie ce qu'il doit ? Je propose de nous interroger : le talent existe-t-il ? Et le génie ? Nous avons tous des acceptions très idiosyncratiques, surtout pour les termes un peu extraordinaires, et je prends ici le mot « extraordinaire » au sens littéral. 

Qu'est ce que le talent ? Qu'est-ce que le génie ? En l’occurrence, l'auteur sous la plume de qui j'ai trouvé la formule précédente, définissait talent et génie par la formule précédente. De même, ailleurs, j'ai cité cette phrase : ne touchons pas au idoles, car ils nous restera de l'or aux doigts. Là encore, la formule permettrait de définir les idoles et l'on admettra avec un peu de réflexion qu'une idole est quelque chose d’idolâtré, mais peut-être pas pour de bonnes raisons ! Il y a donc cette possibilité de définir le talent et le génie par la formule précédente : dans cette hypothèse, il n'y a plus qu'à chercher, parmi nos amis et connaissances, si elles font ce qu'elles peuvent ou ce qu'elles doivent. Quelqu'un qui fera ce qu'il doit sera un génie ; cela ne signifie pas qu'il ait des caractéristiques supérieurs, mais seulement qu'il a cette caractéristique de faire ce qu'il doit.