Alors qu'une nouvelle promotion du master Erasmus Mundus FIPDes (food innovation and product design) est lancée, il semble important de donner aux étudiants une excellente bibliographie.
C'est important pour de nombreuses raisons, mais, en particulier, parce que c'est la condition pour que les étudiants puissent apprendre par eux-mêmes, puissent considérer l'enseignant comme un soutien et un guide, plutôt que comme un gaveur d'oies, un salaud de patron contre lesquels les bons ouvriers organisent une lutte des classes.
J'insiste un peu : ma proposition est de réformer l'enseignement, en vue de conduire les étudiants à l'autonomie, en vue de les rendre capables d'apprendre par eux-mêmes, sans « maître », sans « professeur », parce que, plus tard, ils n'auront pas ces soutiens.
Cela a évidemment des conséquences sur l'enseignement lui-même, ses objectifs, et donc ses moyens, ses méthode, ses pratiques...
La tentation est grande, même dans cette idée, d'enseigner, au sens de dérouler l'ensemble du cours ; je crois que nous devons résister, tout comme nous devons faire attention à des détails.
Par exemple, les enseignants en viennent souvent à dire « mes étudiants », alors que ces étudiants ne leur appartiennent pas. Voilà un symptôme, un symptôme léger certes, mais un symptôme, une volonté de pouvoir de l'enseignant sur des étudiants.
Il y a aussi la tentation de "faire cours", dérouler l'ensemble des informations, mais pourquoi, au fait ? Pour être en position d'étaler son savoir personnel insuffisant ? Pour une sorte de compassion pas toujours bien comprise (on voit que je prends des tas de précautions oratoires, notamment parce que les idiosyncrasies et les généralisations sont des fautes) ?
Bref l'enseignement des sciences ne semble devoir être rénové... et cela passera en particulier par l'usage de livres, d'articles, et aussi par usage d'Internet, dont nous disposons aujourd'hui, et qu'il serait une faute de ne pas utiliser.
D'ailleurs, à ce sujet, les enseignants feraient bien de se méfier, car les étudiants sont souvent plus habiles qu'eux, voire plus expérimentés, pour aller dénicher les informations dont ils ont besoin.
En revanche, je ne vois pas d'inconvénient (mais dites moi s'il vous plaît si vous en voyez) à ce que les enseignants fassent état de leur admiration pour certains documents, livres, articles, sites...
Pour l'enseignement de la physico-chimie, le livre de Jacob Israelachvili (Academic Press) m'a été proposé il y a longtemps, comme un remarquable ouvrage, et il est vrai que, à l'époque, je l'avais beaucoup apprécié, parce qu'il était un peu au-dessus de mes connaissances.
Le relisant ces jours-ci, je me vois capable d'en dégager la stratégie, laquelle est intelligente : l'auteur montre la voie du calcul de physico-chimie par des ordres de grandeur, montre des méthodologies de calcul, entre peu dans les détails, et donne nombre d'enseignements sous forme d'exercices.
Connaissances et compétences : voilà deux notions que je crois utile de bien distinguer pour l'enseignement, les connaissances étant... des connaissances, alors que les compétences sont la capacité de mettre en oeuvre les connaissances.
Dans le cas de ce livre, on n'est guère embarrassé des détails, de sorte que l'on voit mieux les articulations, ce qui est utile pour un enseignement.
La stratégie de l'auteur n'est pas complètement explicite (sauf avec cette introduction très anglo-saxonne, où l'on se débarrasse d'une explicitation du sommaire), et elle pourrait l'être, ce qui améliorerait encore l'ouvrage. Relisant donc ce livre, je le vois utile, parce qu'il invite à aller chercher par soi-même, et c'est cela qui me plaît le plus.