jeudi 10 mars 2022

Au commencement, il y a l'eau

Il faut commencer par le commencement. Et le commencement, c'est sans doute l'eau.

On sait que l'eau est un liquide incolore, inodore, insipide et transparent, dans les conditions ambiantes, mais on sait aussi que l'eau peut devenir solide quand on la refroidit, et qu'elle s'évapore quand on la chauffe.

A cette dernière addition, il faut apporter une précision à savoir que l'évaporation a lieu à toute température, mais c'est plus précisément l'ébullition qui a lieu à 100 degrés.

Comment s'assurer que l'eau s'évapore à toute température ? Laissons un peu d'eau dans un récipient, en cuisine : après quelques jours, il n'y a plus rien ; ou encore regardons le sol après la pluie et nous verrons que, même sur de la pierre ou du bitume, l'eau disparaît progressivement, alors qu'elle ne s'est certainement pas infiltré.  

Pourquoi tous ces comportements ?

Parce que l'eau est composée de minuscules objets tous identiques, que l'on nomme des molécules, et plus particulièrement des molécules d'eau. On peut se les représenter comme des billes qui collet un peu entre elles, et dont la vitesse dépend de la température : plus l'eau est chaude, plus les molécules d'eau sont rapides.

Et quand elles sont très rapides, les forces qui les "collent" ne suffisent plus à les retenir : les molécules d'eau partent dans l'air.


mardi 8 mars 2022

Les "assemblages" ? Méfions-nous de ce terme trop vague

 Les "assemblages" ? Méfions-nous de ce terme trop vague

Ici, je vois que je dois parler d' "assemblages", car c'est un terme que j'ai critiqué sous la plume d'une collègue et que je me suis vu moi-même utiliser.

Un assemblage, c'est un terme un peu flou, qui signifie simplement que l'on réunit des objets, que l'on forme un groupe.
Rien n'est dit sur la cohésion éventuelle de ces objets.

Car imaginons que l'on colle deux parties, avec de la colle :  on a donc bien fait un assemblage.
Mais imaginons que l'on visse des poutrelles pour faire la tour Eiffel, et l'on a également un assemblage, mais d'une autre nature.
Et puis, quand on dispose des cubes les uns sur les autres, on a encore un assemblage.

La nature de l'assemblage n'est pas précisée, par ce terme, et c'est ce qui fait que nous devions insister un peu.

Prenons un exemple dans l'histoire de la chimie des aliments pour montrer pourquoi la question est essentielle. Il y a un peu plus d'un siècle,  le chimiste français français Michel Eugène Chevreul étudia la constitution des graisses. Chevreul est celui qui découvrit ce que l'on sait aujourd'hui, à savoir que les principales molécules des graisses sont ce que nous nommons aujourd'hui des triglycérides. Il a parfaitement montré que l'on peut modifier ces molécules pour récupérer une molécule de glycérol et trois molécules d'acide gras, à partir d'une molécule de triglycérides (il n'utilisait pas le terme de molécules comme nous, mais cela revient à cela).  Et il a égaleemnt montré  qu'avec trois molécules d'acide gras et une molécule de glycérol, on pouvait synthétiser une molécules de triglycéride.

On est tenté de dire qu'un triglycérides serait un "assemblage" de glycérol et d'acide gras... mais ce serait faux,  et c'est là  tout l'enjeu du travail de Chevreul.
Certains, en effet, à son époque pensaient que l'on réunissait seulement les quatre entités, et que le triglycérides était un simple assemblage, vaguement collé, des quatre molécules. En revanche, Chevreul, en digne descendant de Lavoisier, faisait une chimie quantitative, à savoir qu'il pesait. Et  l'on n'a pas assez dit que les balances de nos prédécesseurs étaient tout aussi précises que les nôtres. Grâce à ces pesées, Chevreul découvrit ce fait extraordinaire que la somme des masses des quatre molécules de glycérol et d'acides gras diffère d'environ 6 % de la masse de la molécule de triglycérides que l'on obtient en partant de ces molécules. Il n'est pas possible qu'une telle différence soit due à une imprécision de mesure, surtout quand on s'est assuré de cette précision, et Chevreul découvrit qu'il y avait une réaction, plutôt qu'un simple assemblage.

On le voit : en chimie, le terme "assemblage" doit être manié avec précaution. Mais... les mots ne doivent-ils pas toujours être utilisés avec précaution ? Un marteau n'est pas un tournevis, une drisse n'est pas une écoute, un troussequin n'est pas un pommeau, la phase n'est pas le neutre, le ciseau n'est pas le burin, le sel n'est pas le sucre, la mayonnaise n'est pas la rémoulade...

lundi 7 mars 2022

Les chimistes sont des empoisonneurs, mais ils font courir des risques bien moindre que ceux dus aux inconscient, c'est-à-dire à tous les autres... puisque eux, au moins, savent quel est le danger éventuel.

 Les chimistes sont des empoisonneurs, mais ils font courir des risques bien moindre que ceux dus aux inconscient, c'est-à-dire à tous les autres... puisque eux, au moins, savent quel est le danger éventuel. 

C'est évidemment une boutade, mais quand même, j'invite mes amis à y réfléchir.

Au début, il y a la chimie, cette science des réorganisations d'atomes, des "transformations moléculaires", et plus, mais c'est un détail. C'est une science, une connaissance.
Et les chimistes ne sont donc pas des empoisonneurs, mais des producteurs de connaissances.

Et il y a une dénomination abusive de "chimiste" pour des personnes qui se livrent à des applications de la chimie : des technologues ou des techniciens qui produisent des composés, en quantités variables, faibles pour les principes actifs des médicaments et à la tonne pour des engrais, peintures, etc.

En cuisine, les cuisiniers qui font des caramels, qui réduisent des vins, qui brunissent des viandes, qui rôtissent, sautent, font frire, etc. mettent en oeuvre des réactions "chimiques" que les chimistes connaissent bien... et dont ils connaissent les dangers.

Mais on est bien d'accord, c'est moins le danger que le risque qu'il faut considérer : à ne pas traverser une route, il n'y a aucun risque, même ci cette route est très dangereuse. Et il en va de l'action éventuelle sur la santé des composés des aliments, initialement présents ou finalement produits.

De ces risques, les cuisiniers (sauf exceptions, bien sûr) ne savent rien, sauf à dire -très péremptoirement et sans en avoir aucune certitude- que la tradition n'a empoisonné personne... ce qui est inexact, car j'ai des recettes terribles de pissala où les cuisiniers provençaux utilisaient du cinabre  (un terrible sulfure de mercure) : pas étonnant que les micro-organismes ne se soient pas développés en présence d'un tel composé. Et il y a aussi des plantes assez nombreuses que l'on consommait naguère et qui figurent maintenant sur la liste des plantes toxiques établie par l'Agence européenne de sécurité des aliments.

Bien sûr, des cuisiniers peuvent se renseigner, apprendre les travaux consacrés aux risques alimentaires, mais ce sont surtout les toxicologues ou les chimistes qui savent tout cela.

Et, en tout cas, les chimistes peuvent bien envisager les risques chimiques, puisque c'est là leur métier. Le hic, c'est qu'ils ne savent pas toujours bien cuisiner (avec bien sûr des exceptions).

Mais, au fait, et si, au lieu d'opposer les groupes, on proposait une belle coopération, utile à tous ?

Un groupe n'est pas un individu, une catégorie n'est pas un objet particulier de la catégorie

 Les éléments, les espèces chimiques, les molécules, les composés

Je crois comprendre qu'une difficulté essentielle de la chimie est sa terminologie, ses mots, car une certaine façon ancienne de dire la chimie conduit à des confusions, à des incompréhension.

Prenons par exemple l' "oxygène". C'est un "élément chimique", c'est-à-dire une espèce d'atomes :  les atomes d'oxygène on tous un noyau constitué de huit protons et de huit neutrons, avec, autour, huit électrons qui tournent comme des planètes autour du Soleil.  Tous les atomes d'oxygène sont exactement pareils, et le mot "oxygène" désigne donc l'espèce d'atomes ainsi faite.

Dans l'air, on disait -et certains le disent encore, hélas- qu'il y avait de l'oxygène,  mais ce n'est pas une bonne façon de faire comprendre à ses amis,  car en réalité, il y a principalement des molécules de diazote et, ensuite, des molécules de dioxygène  : le dioxygène est une "espèce chimique", ce qui signifie que toutes les molécules de dioxygène sont identiques et, en particulier, ces molécules sont faites de deux atomes d'oxygène collés l'un  à l'autre.

Donc oui, il y a de l'oxygène dans l'air, mais sous la forme d'atomes d'oxygène indépendants. Non, il y a  de l'oxygène sous la forme d'atomes d'oxygène groupés par deux pour faire des molécules de dioxygène.

Je vois dans l'emploi du mot "oxygène" pour désigner l'élément, l'atome et la molécules  l'origine de la confusion fréquente, et surtout de l'incompréhension.
Car une catégorie d'objets identiques n'est pas un objet particulier. C'est une catégorie, un groupe.

dimanche 6 mars 2022

La "catalyse"


Dans la famille "chimie", je voudrais la "catalyse" !

Oui, fois-ci, je me propose d'expliquer ce qu'est une catalyse.

On pourrait dire que c'est l'action d'un composé, qui provoque une réaction, sans être modifié dans l'opération. Mais ça reste abstrait !

Un exemple, en partant d'eau et d'une pile : si on met dans l'eau des fils conducteurs reliés aux deux poles d'une pile, on peut récupérer deux gaz, qui ont pour nom dihydrogène et dioxygène. L'eau est dissociée, les atomes de ses molécules se réorganisent différemment, sous l'action du courant électrique (incroyable, non  ?).

Puis quand on mélange ces deux gaz que sont le dioxygène et le dihydrogène, on obtient un mélange gazeux, transparent, incolore, sans odeur... Et ce mélange peut subsister très longtemps ainsi.

Mais si l'on approche du mélange de la poudre de ce métal qu'est le platine, alors cela déclenche une explosion... et les atomes des deux gaz se réorganisent, sur le métal, et forment à nouveau des molécules d'eau. On dit que le platine a "catalysé" la réaction : il était platine, avant, et il reste platine après. On voit qu'il a participé à la réaction, mais qu'il n'a pas été consommé par la réaction.

Un cas où un corps serait consommé ? Et bien, dans la réaction précédente, le dihydrogène est consommé, puisqu'il disparaît. Et le dioxygène aussi.

En cuisine


Mais si tout cela peut se faire dans une cuisine, il ne s'agit pas de cuisine : on n'est pas nourri avec du dioxygène ou du dihydrogène, et  l'eau  ne nourrit pas, même si elle désaltère !

Plus en cuisine, on peut voir une catalyse amusante, avec un morceau de sucre, un petit bout de papier, une tasse et un briquet.

Commençons à mettre le sucre dans la flamme du briquet : nous le voyons devenir marron et se mettre à couler.

Puis, faisons brûler le petit morceau de papier dans la tasse pour tenir des cendres,  trempons le sucre dans ces dernières, avant de le mettre dans la flamme : cette fois, le morceau de brune de sucre brûle, avec une flamme.

C'est que les cendres contiennent des matières, notamment des métaux, qui catalysent la réaction de combustion : au lieu que le saccharose du sucre soit simplement décomposé par la chaleur, il peut réagir avec le dioxygène qui se trouve dans l'air, et cela fait une combustion comme nous en avons l'habitude avec du bois.

La cendre n'est pas modifiée dans la réaction :  il y avait la cendre et il y aura la cendre. Or  si un corps participe à une réaction sans être modifié par celle-ci, c'est un catalyseur. Les cendres contiennent un catalyseur.


vendredi 4 mars 2022

La polymérisation, c'est quoi ?

  
Nous avons tous entendu parler de polymérisation,  mais nous ne savons pas tout ce que cela signifie  :  polymérisation, polymère, de quoi s'agit-il ?

Je propose de partir des végétaux, qui sont des "usines de synthèse moléculaire" : les racines absorbent l'eau et des minéraux ; cette "sève brute" monte vers les feuilles, en raison de la "capillarité" et de l'évaporation (contrôlée) de l'eau par les feuilles ; et, dans les feuilles,  avec l'énergie du soleil et le dioxyde de carbone de l'atmosphère, les plantes synthétisent des composés variés, parmi lesquels sucres et acides aminés sont prépondérants.

Pour les sucres, les trois principaux que les plantes synthétisent sont le glucose et fructose et le saccharose.

Pour le saccharose, on le connaît  : c'est le sucre de table.
Le glucose, lui, peut également se présenter sous la forme d'une poudre blanche, mais sa saveur et beaucoup moins sucrée ; elle est seulement douce, avec de la longueur en bouche. C'est ce que les chimistes nomme une "petite molécule", parce qu'effectivement les molécule de glucose contiennent moins d'une centaine d'atomes.
Et le fructose est un sucre bien plus sucré (deux fois et demie environ) que le saccharose.

Dans les plantes, ces trois sucres sont dans la sève, dissous dans l'eau de la sève,  et il y a donc le risque que la pluie les lessivent.

L'évolution biologique a résolu la question en dotant les plantes d'enzymes (des molécules de protéines particulières, qui sont comme des ouvriers), qui assemblent les molécules de glucose les unes autres pour former des chaînes, faites de  centaines ou des milliers de ces petit maillons que sont alors des morceaux de glucose, ce que les chimistes nomment des "résidus de glucose".

Dans les plantes, ces chaînes, linéaires donc (cela signifie : comme des fils) sont nommées des molécules d'amylose,  et elles sont des constituants essentiels de l'amidon.

Disons le différemment : les grains d'amidon (de la farine, par exemple) sont des assemblages de  molécules d'amylose, et aussi de molécules d'amylopectine, qui sont également des enchaînement de molécules de glucose, mais cette fois avec des ramifications, comme des arbres minuscules.

Amylose et amylopectine sont des "polymères", car leurs molécules sont des assemblages de nombreux motifs répétés, de ce "monomère" qu'est le glucose.

Et il faut ajouter qu'il existe aussi des polymères qui s'assemblent dans les trois directions  de l'espace, comme des espèces de toiles d'araignée. Par exemple, quand les protéines d'un blanc d'oeuf coagulent, elles forment un réseau à trois dimensions, et c'est un polymère.

Enfin, on terminera  en signalant qu'à côté des polymères naturels, il y a des polymères de synthèse,  tel le nylon que les chimistes ont appris à fabriquer au début du 20e siècle.

jeudi 3 mars 2022

Evitons les odeurs en cuisine... sauf quand elles sont mauvaises ;-)

 Au fond j'ai fait une erreur, récemment,  quand j'ai répondu à l'un de mes amis cuisiniers, à propos de l'entraînement à la vapeur d'eau et de la nécessité de mettre un couvercle sur les casseroles, et je veux me rattraper ici.

L'idée est la suivante : j'étais dans une cuisine de restaurant, et je voyais un bouillon en cours de confection. Il y avait une grande marmite avec de l'eau, des os, de la viande et tout cela bouillait à grands bouillons.

Au-dessus de la marmite, il y avait une belle odeur et, en passant, j'ai fait remarquer à mon ami qu'il perdait les composés odorants.

Car j'expliquais qu'il y avait en action ce qu'on nomme un "entraînement la vapeur d'eau",  c'est-à-dire que les composés odorants, qui sont peu solubles dans l'eau, passent dans l'air au-dessus du bouillon, mais que la vapeur d'eau qui s'évapore les emporte avec elle, les entraîne, de sorte que d'autres composés sortent du liquide, et ainsi de suite.

Les chimistes savent que ce procédé est très efficace pour éliminer des composés peu solubles... et c'est même ainsi que fait l'industrie des parfums pour extraire les matières odorantes.

Or l'odeur est une composante essentielle du goût : si l'on élimine de l'odeur du bouillon, on lui fait perdre du goût.

Mais j'ajoutais, dans la discussion, que j'avais fait jadis l'expérience de diviser un bouillon en deux moitiés :  l'une avait été réduite, puis allongée au volume initial, tandis que l'autre avait été laissée en l'état. Quand nous avions comparé la composition des deux moitiés, nous avions découvert qu'il y avait de nouveaux composés dans le bouillon qui avait été réduits.

Hâtivement, j'avais conclu que la réduction pouvait être utile... mais...

Mais, à la réflexion, je crois que je me suis trompé !!

Oui, je crois que je me suis trompé, car si c'est la longue réduction qui a produit les nouveaux composés, alors on les aurait si l'on prolongeait la cuisson à couvert : on aurait les composés initiaux, plus les nouveaux composés.

Bref,  je maintiens que l'usage d'un couvercle est absolument essentiel et que la présence d'une odeur une cuisine est à éviter.

Sauf à considérer que cette odeur puisse être une alarme, pour détecter des produits qui seraient dangereux, toxiques, périmés. Et là, l'odeur est un des signes qu'il ne faut pas négliger.

Il faut donc, semble-t-il, que l'odeur dans une cuisine soit nulle, ou qu'elle soit un signe d'alerte si un produit est à éviter.
Sans oublier les odeurs des fromages ou des durians, bien entendu ;-)