-A-t-on déjà fait l'inventaire des notes-composés d'un aliment simple comme une carotte ? Peut-on le faire techniquement ?
L'inventaire des composés d'un ingrédient alimentaire classique ? Oui, c'est ce que fait sans cesse la chimie analytique, et ce que je fais au laboratoire, à propos de bouillons, et autres. Il existe ainsi un "Répertoire des aliments" (Ed Lavoisier, Tec et Doc).
- Le plaisir que j'éprouve en mangeant une carotte vient-il d'une note bien spécifique, ou d'une diversité de notes avec des déclinaisons ? Y-a-t-il eu des travaux là dessus ?
Le plaisir que l'on a en mangeant une carotte vient des interactions avec les récepteurs sensoriels :
- consistance
- température
- saveurs
- odeurs
- couleurs
- sensations trigéminales...
C'est très bien étudié, et depuis longtemps.
Cela dit, ce la vaut le coup de penser "par ordres de grandeur". Voir le livre "Explorer la cuisine", à paraître aux éditions Belin.
- La musique électronique peut créer ses propres sons (c'est mieux que quand elle essaye d'imiter des instruments). Mais peut on créer des notes de cuisine ? Cela signifierait que l'on créerait des composés qui n'ont pas encore été mangés ?
Créer des notes en cuisine ? Très facile. Par exemple, l'éthylvanilline n'est pas présente dans les ingrédients classiques, et elle ressemble à la vanilline de la vanille, en 1000 fois plus fort.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
vendredi 6 janvier 2012
vendredi 30 décembre 2011
Ilchimisme
On parle d'illettrisme pour désigner ceux qui ne savent pas lire ou écrire, anumérisme pour ceux qui ne savent pas calculer.
Doit-on parler d'ilchimisme pour ceux qui ignorent les rudiments de la chimie ?
Doit-on parler d'ilchimisme pour ceux qui ignorent les rudiments de la chimie ?
Une question, une réponse
Une question me vient ce matin :
"Bonjour M. This,
Vous êtes le père de la gastronomie moléculaire, qui a ensuite donné la cuisine moléculaire.
Nous souhaiterions vous demander votre avis sur l'avenir de cette cuisine moléculaire, qui semble
avoir souffert auprès du public après la polémique de 2008 concernant les additifs.
Cette cuisine a-t-elle encore de beaux jours devant elle?
Nous vous remercions et vous souhaitons une excellent année 2012."
A quoi je réponds :
Merci de votre message. La gastronomie moléculaire se développera à jamais.
J'espère, d'autre part, que la cuisine moléculaire va disparaître, parce que cela signifiera que la rénovation des techniques culinaires est faite (c'était cela, l'idée de la cuisine moléculaire: nouveaux outils, nouveaux ingrédients, nouvelles méthodes).
Et le futur sera la cuisine note à note, qui, en passant, fera disparaître cette notion idiote d'additifs.
bonne année 2012.
J'espère, d'autre part, que la cuisine moléculaire va disparaître, parce que cela signifiera que la rénovation des techniques culinaires est faite (c'était cela, l'idée de la cuisine moléculaire: nouveaux outils, nouveaux ingrédients, nouvelles méthodes).
Et le futur sera la cuisine note à note, qui, en passant, fera disparaître cette notion idiote d'additifs.
bonne année 2012.
N'ayons pas peur, et payons ce que nous devons
Intéressant commentaire reçus hier :
"Au XXe siècle, on disait qu'on mangerait des pilules en l'an 2000. Ensuite, certains ont dit qu'il fallait supprimer LE gras ou LE sucre pour lutter contre l'épidémie d'obésité. Pensez-vous qu'avec la cuisine note à note, on s'intéressera aussi au contenu des aliments et aux interactions des composés sur le plan physiologique (micro-nutrition) ? Irons-nous puiser un composé dans un aliment pour en faire quelque chose de nouveau ou optimiser son assimilation par le corps ou bien rajouterons-nous des éléments synthétiques à un produit de qualité inférieure (ex. exhausteurs de goût dans les nouilles instantanées) ?"
D'abord, il faut savoir que si l'on a dit que l'on mangerait des pilules, c'était une erreur, parce que c'est IMPOSSIBLE : avec le composé le plus énergétique (les triglycérides), il faut plus de 300 grammes pour faire une ration alimentaire quotidienne... à quoi il faudrait ajouter de l'azote, absent de ces triglycérides, et tous les autres éléments indispensables à la vie. Bref, ne cédons pas aux fantasmes.
D'ailleurs, il faut ajouter que les pilules et tablettes nutritives ont été promues par un individu que je crois avoir été malhonnête intellectuellement (voir le livre de Jean Jacques : Marcellin Berthelot, autopsie d'un mythe, Ed Belin). C'était "le chimiste du parti laïc", mais un homme ou une femme de science peut-il être vraiment d'un parti ?
Bref, nous n'aurons jamais de pilules ni de tablettes.
Pour la cuisine note à note, je ne fais pas plus de prescription diététique que le fabricant de synthétiseur de musique ne stipule qu'il faille jouer classique ou moderne !
Oui, il faut absolument explorer les graves questions nutritionnelles qui se posent à nous, mais rationnellement, méthodiquement. En ce XXIe siècle peureux, nous n'avons pas trop de science, mais, au contraire, nous en manquons cruellement !
"Au XXe siècle, on disait qu'on mangerait des pilules en l'an 2000. Ensuite, certains ont dit qu'il fallait supprimer LE gras ou LE sucre pour lutter contre l'épidémie d'obésité. Pensez-vous qu'avec la cuisine note à note, on s'intéressera aussi au contenu des aliments et aux interactions des composés sur le plan physiologique (micro-nutrition) ? Irons-nous puiser un composé dans un aliment pour en faire quelque chose de nouveau ou optimiser son assimilation par le corps ou bien rajouterons-nous des éléments synthétiques à un produit de qualité inférieure (ex. exhausteurs de goût dans les nouilles instantanées) ?"
D'abord, il faut savoir que si l'on a dit que l'on mangerait des pilules, c'était une erreur, parce que c'est IMPOSSIBLE : avec le composé le plus énergétique (les triglycérides), il faut plus de 300 grammes pour faire une ration alimentaire quotidienne... à quoi il faudrait ajouter de l'azote, absent de ces triglycérides, et tous les autres éléments indispensables à la vie. Bref, ne cédons pas aux fantasmes.
D'ailleurs, il faut ajouter que les pilules et tablettes nutritives ont été promues par un individu que je crois avoir été malhonnête intellectuellement (voir le livre de Jean Jacques : Marcellin Berthelot, autopsie d'un mythe, Ed Belin). C'était "le chimiste du parti laïc", mais un homme ou une femme de science peut-il être vraiment d'un parti ?
Bref, nous n'aurons jamais de pilules ni de tablettes.
Pour la cuisine note à note, je ne fais pas plus de prescription diététique que le fabricant de synthétiseur de musique ne stipule qu'il faille jouer classique ou moderne !
Oui, il faut absolument explorer les graves questions nutritionnelles qui se posent à nous, mais rationnellement, méthodiquement. En ce XXIe siècle peureux, nous n'avons pas trop de science, mais, au contraire, nous en manquons cruellement !
jeudi 29 décembre 2011
La cuisine note à note
De la gastronomie moléculaire à ses applications :
la « cuisine moléculaire » (dépassée)
et la « cuisine note à note » (ne manquez pas la prochaine tendance culinaire mondiale!)
Hervé This
1. Le travail scientifique
En 1988 était officiellement créée la discipline scientifique qui a été nommée « gastronomie moléculaire » (on rappelle que le mot « gastronomie » désigne une « connaissance raisonnée », et non pas de la cuisine fine ; de la même façon, la gastronomie moléculaire ne désigne en aucun cas une façond e cuisiner !).
Son objet est : la recherche des mécanismes des phénomènes qui surviennent lors de la production et de la consommation des aliments.
2. Une application en cuisine
A la même époque, nous introduisions la « cuisine moléculaire », dont la définition est :
« La production d'aliments (la cuisine, donc) par de « nouveaux » outils, ingrédients, méthodes ».
Dans cette définition, le terme « nouveau » désigne plus ou moins tout ce qui n'était pas dans les cuisines des cuisiniers français en 1980.
Par exemple : le siphon (pour faire des mousses), l'alginate de sodium (pour faire des perles à coeur liquide, des spaghettis de légumes, etc.) et les autres gélifiants (agar-agar, carraghénanes, etc.), l'azote liquide (pour la production de sorbets et de bien d'autres préparations), l'évaporateur rotatif, et, plus généralement, l'ensemble des matériels de laboratoire qui peuvent avoir une utilité technique ; un exemple de méthode nouvelle, enfin, la préparation du « chocolat chantilly », des beaumés, des gibbs, des nollet, des vauquelins, etc. (voir Cours de gastronomie moléculaire n°1 : Science, technologie, technique (culinaires) : quelles relations ?, Ed Quae/Belin)
Evidemment, tous ces outils, ingrédients, méthodes ne sont pas nouveau stricto sensu (bien des gélifiants « nouveaux » sont séculaires, en Asie, et utilisés par l'industrie alimentaire depuis longtemps, tandis que bien des outils sont traditionnels en chimie), mais le projet était de rénover l'activité technique culinaire.
Enfin, oui, la terminologie « cuisine moléculaire » est mal choisie, mais elle a été imposée conjoncturellement ; c'est une expression consacrée (elle est apparue dans le Robert et dans l'Encyclopedia Britannica), qui est de toute façon appelée à disparaître... en raison de la proposition suivante.
- La prochaine tendance culinaire : la Cuisine Note à Note
La proposition suivante, bien plus enthousiasmante, est celle de la CUISINE NOTE A NOTE.
Elle est née en 1994 (publiée dans la revue Scientific American) alors que nous nous amusions à introduire des composés définis dans des aliments : du paraéthylphénol dans des vins ou dans des whiskys, du 1-octène-3-ol dans des plats, du limonène, de l'acide tartrique, etc.
La proposition initiale était d'améliorer des aliments... mais s'est introduit tout naturellement, en prolongement de la pratique précédente, l'idée de composer des aliments entièrement à partir de composés.
Autrement dit, la cuisine note à note ne fait plus usage de mélanges traditionnels de composés alimentaires (viandes, poissons, fruits, légumes), mais seulement de composés... tout comme la musique électroacoustique ne fait pas usage de trompettes, violons, etc. mais seulement d'ondes sonores pures que l'on combine.
Le cuisinier doit donc :
- concevoir les formes des éléments constitutifs du mets
- concevoir leurs couleurs
- concevoir leur saveur
- concevoir leur odeur (ante et rétronasale)
- concevoir l'action trigéminale
- concevoir les consistances
- concevoir les températures
- concevoir la constitution nutritionnelle
- etc.
A ce jour, la faisabilité de cette cuisine nouvelle a été démontrée par plusieurs réalisations :
- premier plat, présenté à la presse par Pierre Gagnaire à Hong Kong, en avril 2009
- plat présenté à des rencontres scientifiques (JSTS) franco-japonaises à Strasbourg, en mai 2010
- repas Note à Note par les chefs de l'Ecole du Cordon bleu Paris en octobre 2010
- repas Note à Note servi le 26 janvier 2011, en lancement de l'Année internationale de la chimie, à l'UNESCO, Paris, par l'équipe de Potel&Chabot
- cocktail Note à Note servi en avril 2011 à 500 nouveaux étoilés du Michelin + la presse à l'Espace Cardin, Paris
- repas Note à Note servir en octobre 2011 par l'équipe de chefs de l'Ecole du Cordon bleu Paris.
La construction de cette cuisine pose de très nombreuses questions :
- aménagement rural
- économique
- sensoriel
- technique
- artistique
- politique
- nutritionnel
- toxicologique
- etc.
Mais :
- une crise de l'énergie s'annonce : il n'est pas certain que la cuisine traditionnelle (laquelle?) soit durable
- les Anciens sont toujours battus par les Modernes, lesquels veulent des objets de leur génération
- le craquage des produits de l'agriculture et de l'élevage existe déjà pour le lait et le pain ; pourquoi pas pour la carotte, la pomme, etc. ?
- Les objections qui sont faites contre la cuisine note à note ont été le plus souvent faites pour la musique moderne... mais toutes les radios diffusent de la musique électronique
Autrement dit, n'en serions-nous pas à l'équivalent de 1947, quand Varèse et quelques autres lançaient la musique électronique ?
mercredi 28 décembre 2011
Quelques fautes fréquentes mais faciles à corriger (utiliser la fonction rechercher remplacer de l'ordinateur)
Des décennies de travail à la revue Pour la Science, notamment comme éditeur et comme rédacteur en chef, m’ont montré que les fautes d’écriture sont majoritairement les suivantes.
C’est très encourageant !
En effet, il suffit de les corriger pour écrire mieux que la très grande majorité de deux qui doivent prendre la plume !!!!!
Un infinitif ou un participe présent doivent avoir le même sujet que celui de la principale. Chercher les "ant" et les "er"
chercher les "rendre" plus adjectif : "rendre possible" = "permettre" : recherche systématique de "rend"
remplacer "semble probable" par "est probable" (pléonasme)
De même, « faire obstacle », c’est « gêner » ; etc.
"il semble qu'il fasse" = "il semble faire" : recherche systématique de "il semble" ; plus généralement, les il impersonnels poussent à la faute.
éviter les adverbes, c’est le commencement du style : recherche systématique de "ment", et suppression des adverbes inutiles
Pas de "mais" ni de conjonction de coordination (et, ou , car ...) en début de phrase : rechercher les .Mais, .Car, .Et, .Ou et les ", et", ", ou"
Attention à l’inflation des "très" ; on peut généralement les éliminer
Attention à "impliquer" (contamination de « to imply »)
« Sophistiqué » signifie « frelaté », pas « complexe » ni « évolué »
« Brutalement » n'est pas « brusquement »
Attention à "véritable" (« véritable révolution » !)
Attention à « influer » sur et « influencer »
Attention aux anglicismes : les plus fréquents sont : « se baser sur », « des douzaines »,
Remplacer « par contre » par « en revanche »
« réaliser » n'est pas « comprendre »
Remplacer « contrôler » par « commander » ou « déterminer » (contrôler, c’est faire une vérification)
attention aux usage exagérés de « permettre »
« compléter » n'est pas « achever »
Rechercher « suggérer » : normalement, la suggestion, c’est l’hypnose
Rechercher « affecter »
Rechercher « processus » : un processus n’est une réaction, ni une série de réactions
Rechercher « développer » au sens de « mettre au point » ; idem pour « développement »
Rechercher induire
Attention à la distinction entre « technologie » et « technique » (et « science »)
Remplacer systématiquement (ou presque) les "a pu" montrer, observer, etc. par « a montré, observé, etc »
Rechercher emmener/emporter
Rechercher le verbe pouvoir et chercher à l'éliminer
"Après que" est suivi de l'indicatif
Ne pas chercher la rallonge : "dans lequel" peut souvent devenir "où".
on ne dit pas "débute" mais "commence" (sauf au théatre)
on ne dit pas "en dessous de ", mais "au-dessous de" ;
on dit plutôt "chaque fois" que "à chaque fois" ;
éviter "au niveau de" et faire attention au mot « niveau »
quand on rencontre "entre eux", "entre elles", vérifier que c'est utile ; de même, « les uns des autres », « les uns aux autres », etc. sont souvent inutiles
« ceci » annonce alors que « cela » se rapporte à ce qui a déjà été énoncé (le plus souvent, on peut se débarrasser de ces mots faibles)
"en fait" est rarement utile
un point suivi de "en effet" peut être avantageusement remplacé par deux points
« plus petit » est « inférieur », « plus grand » est « supérieur »
« très inférieur » est fautif (« bien inférieur ») ; de même pour « très supérieur » ;
« être différent » donne « différer » ;
second (pour deux possibilités seulement) et deuxième pour plus de deux
Examiner si les "simples", "compliqués", "facile" sont indispensables.
Souvent remplacer « appelé » par « nommé »
Les verbes présenter et constituer peuvent souvent être remplacés par être ou avoir
Attention : "plus important" doit signifier qu'il y a une importance plus grande ; souvent on doit le remplacer par supérieur
Ce ne sont là que des fautes statistiquement courantes. Bien d'autre sont signalées dans les Difficultés de la langue française, qu'il n'est pas inutile de (re)lire.
Plus généralement, celui qui écrit devrait avoir quatre outils : un ordinateur équipé d’un traitement de texte avec correction orthographique, un dictionnaire (pour le vocabulaire, les Difficultés de la langue française (pour la grammaire), le Gradus (pour la rhétorique)
Inscription à :
Articles (Atom)