Affichage des articles dont le libellé est moi. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est moi. Afficher tous les articles

samedi 15 mars 2025

À propos de questions personnelles

Hier, lors d'une présentation à des étudiants de lycée hôtelier, l'équipe qui me recevait avait organisé une discussion et préparé une série de questions. L'une d'elle était : « êtes-vous plutôt cornichon au vinaigre ou chocolat au lait ? ». 

Je préfère les cornichons au vinaigre au chocolat surtout au lait, mais évidemment j'ai répondu différemment en ajoutant que la question aurait été plus compliquée si l'alternative avait opposé des cornichons à du chocolat noir. Surtout, ne voyant pas l'intérêt de la question, j'ai ajouté que chacun a son propre goût, et ce goût personnel est parfaitement légitime ; le mien au fond n'a aucun intérêt particulier et il n'a aucun intérêt didactique  : à quoi cela servira t-il que les étudiants sachent que j'aime ou non les cornichons au vinaigre ? 

Sur mon site personnel (https://sites.google.com/site/travauxdehervethis/), il y a ainsi toute une série de réponses à des questions et notamment un groupe de questions personnelles. À quoi bon ? Faut-il vraiment faire étalage d'information qu'il est dans rien aux amis ? 

Évidemment, chaque fois que je suis mis en position de devoir répondre à de  telles questions, je réponds autre chose, et j'essaie de détourner la réponse vers des informations plus intéressantes. 

Ce fut d'ailleurs le cas pour un livre tout entier qui a finalement paru sous le nom sous le titre de Construisons un repas : il s'agissait initialement d'entretiens avec une journaliste, qui  avait voulu "incarner" la science ; mais  j'avais complètement réécrit le manuscrit en donnant de la généralité, comme je le propose ici. 

D'ailleurs, je n'oublie pas qu'il y a vraiment très longtemps, après une interview à la radio, un ami d'un de mes fils, alors encore très jeune, avait fait cette remarque : ton père parle de lui. Et cela m'avait choqué car le moi est haïssable  : ma personne n'est pas intéressante et il n'y a que ce que je fais qui peut éventuellement l'être,  ou, plus exactement qui doit le devenir de plus en plus chaque seconde 


samedi 9 avril 2016

Le moi est haïssable

Le moi est haïssable : pourquoi cette phrase sur les murs  de mon laboratoire ?

Parce que la science est un exercice de rigueur, mais aussi de créativité. Après que les phénomènes ont été caractérisés quantitativement, ce qui a produit des nombres, après que les nombres ont été réunis en lois, vient l'étape inductive de la recherche des mécanismes fondés sur ces lois. Induction : cela signifie qu'il faut faire un effort merveilleux d'introduire quelque chose de nouveau dans l'affaire. La déduction ne suffit pas, elle n'est pas créatrice.

Or qui dit "création" dit aussi créateur, et, souvent, ego : il faut  peut-être des individus suffisamment sûrs d'eux pour oser proposer quelque chose qui n'existait pas, comme les artistes ! Et la présence de personnalités puissantes dans la communauté complique évidemment la vie de ladite communauté, scientifique, donc. Dans un autre billet, j'ai discuté la question des controverses, qui est tout à fait liée à celle ci. Le moi est haïssable : la phrase est de Blaise Pascal, qui l'a dite dans le contexte de la religion. Évidemment, que vaut  notre petit moi face à Dieu ? La religion prône  l'humilité, de sorte qu'il n'est pas étonnant que Blaise Pascal ait prononcé la phrase.

Toutefois, en science de la nature, il est vrai que si notre moi est important, pour parvenir à proposer des mécanismes, des théories, ce moi est bien détestable quand vient l'évaluation des théories proposées,  car nous ne pouvons nous substituer à la nature, et les  théories en concurrence sont in fine jugées à l'aune de leur adéquation au réel, à leur bonne ou meilleure description des phénomènes.

Là, on se fiche de qui a produit ces théories, et c'est en se sens que le moi est  haïssable, dans la mesure où il entraverait nos progrès vers la recherche non pas de la vérité, mais vers la recherche de théories sans cesse meilleures.