Hier, à l'Académie d'agriculture de France, remarquable colloque sur le thème "Réconcilier le public avec son alimentation".
Des intervenants de qualité, qui ne se sont pas contentés de livrer des messages convenus, mais, au contraire, ont vraiment discuté la question !
Leurs résumés sont sur le site académique, où se trouvera bientôt le podcast des interventions.
Voici :
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« RETABLIR
LA CONFIANCE DU CITOYEN
DANS SON
ALIMENTATION »
Résumé
des interventions du colloque du 21 mars (14h00 – 17h30)
Les faits :
Il y a des fraudes,
mais cela ne signifie pas que tout le monde fraude.
Il y a des risques,
mais (1) il y a des risques à tout et (2) il faut se demander
quantitativement quels risques (relatifs).
Une partie du public
est craintif, parce qu'il ne comprend pas la science et la
technologie.
Une partie de la
presse vend de la peur (n'est-ce pas cela, le plus grand scandale
alimentaire du xxi e siècle?)
Des propositions :
Si la solution était
simple, on l'aurait mise en œuvre.
Quand on signale une
fraude :
– il faut indiquer
combien de pour cent du groupe est représenté
– il faut profiter de
chaque affaire pour vérifier que nos systèmes sont bons ; en
réalité, peu après chaque « convulsion », il est indispensable
de faire un bilan assorti d'une prise éventuelle de décisions (sans
tomber dans le resserrement des libertés, hygiénisme..)
Quand on signale des
risques :
– il faut l'assortir de
valeurs quantitatives
– il faut les
distinguer des dangers
– il faut publiquement
dire comment on les minimise.
Pour donner au citoyen
les moyens de craindre ou de ne pas craindre les diverses composantes
de son alimentation, il faut une information qui ne soit pas
partisane. Celle de l'industrie n'étant pas crédible, il faut que
l'Etat prenne ses responsabilités, et diffuse de l'information de
l'Ecole à l'âge adulte, en passant par les canaux « efficaces ».
Ici, proposition de
formations des enseignants du Premier et du Second Degré. L'INRA
pourrait aller intervenir dans les Rectorats, pour des formations
académiques.
Enfin, il faudra sans
doute aussi réfléchir aux relations entre science, technologie et
technique, fin de bien cibler les « émerveillements proposés ».
Au fond, la presse se
répartit en deux groupes : ceux qui vendent de la peur, et les
autres. On doit considérer que les sociétés ont la presse qu'ils
méritent. Il sera bien difficile de changer les méthodes des
marchands de peur, mais on peut réfléchir avec les autres pour
trouver des solutions actives.
Quoi qu'il en soit, on ne
pourra pas éviter d'être TRES présent dans le grand concert
médiatique, et de proposer des sujets.
Première Table ronde - Quelle confiance le consommateur
accorde-t-il aujourd’hui à la qualité (sanitaire, nutritionnelle,
environnementale…) de son alimentation ? Perception et
réalités.
Modérateur
– Bertrand HERVIEU, Vice-président du Conseil Général de
l’Alimentation, de l’Agriculture et des Espaces Ruraux
Questions
Comment expliquer vous la méfiance actuelle des consommateurs dans
leur alimentation ? Quelles sont, à votre avis, les principales
craintes ? A quoi sont elles dues ? Quelles sont les
principales craintes des consommateurs aujourd’hui au regard de
leur alimentation ? Pourquoi n’ont-ils pas confiance dans ce
qu’ils mangent ? Les informations dont les consommateurs
disposent (étiquetage, ou autre) sont-elles suffisantes et
adaptées ?
Il y a une vraie crise de
confiance des consommateurs envers l’industrie agroalimentaire. Ce
phénomène n’est pas nouveau : de nombreux baromètres
d’opinion montrent depuis des années que l’image de ce secteur
dans l’opinion est très dégradée.
Il faut rappeler que
cette situation n’est pas spécifique à l’agroalimentaire. Nous
sommes dans une ère du soupçon : la crise de confiance
concerne le politique, le domaine de la santé et de l’expertise en
général, du sport (dopage) et des médias.
Pour en revenir à
l’alimentation, les consommateurs ont l’impression de ne plus
vraiment savoir ce qu’ils mangent et doutent de la qualité des
produits issus de l’industrie. N’oublions pas que, pour les
consommateurs, la qualité de l’alimentation n’est pas qu’une
question sanitaire. L’utilisation d’additifs, l’artificialisation
des recettes, le recours à des ingrédients qui s’apparentent à
des « erzatz » (analogues de fromages, arômes
artificiels), tout cela ne peut que nuire à l’image des produits.
Ces pratiques sont
d’ailleurs en totale contradiction avec le marketing qui ne cesse
de faire référence à une prétendue naturalité, au terroir ou à
l’authenticité des recettes. Ces contradictions manifestes, ainsi
que la réticence de l’industrie agroalimentaire à communiquer sur
ses pratiques et ses métiers, ne font qu’accroître la méfiance.
Cette situation est d’autant plus difficile à gérer
qu’aujourd’hui tout finit par se savoir (du fait des nouvelles
technologies de l’information et des réseaux sociaux notamment).
Après un scandale comme
celui de la viande de cheval, le secteur peut estimer qu’il s’agit
d’une crise de plus et continuer comme avant. Cela revient à
considérer que de toute façon les consommateurs finiront par
acheter ce qu’on leur propose. Mais peut-on construire un modèle
économique créateur de valeur sur la base de la méfiance et
du doute ? N’y-a-t-il pas un lien entre l’image négative de
l’industrie et la baisse continue de la part consacrée à
l’alimentation dans le budget des ménages ?
Il est paradoxal de
constater qu’en ce début de 21ème siècle les interrogations des
consommateurs sont de plus en plus grandes alors que l'information
est soi-disant de plus en plus accessible. On peut se demander
pourquoi plus tout le monde répète qu'il faut s'adapter à la
demande des consommateurs ou des citoyens, plus ces derniers ont
souvent la perception du contraire.
La mondialisation des
échanges, l’élaboration de plus en plus importante des produits,
la multiplicité des circuits de distribution ont conduit à
l’éloignement de la connaissance naturelle que l'on pouvait avoir
des produits par le passé, ce qui a généré des interrogations et
des inquiétudes renforcées par la mondialisation de l'information.
Parallèlement à ce phénomène, la communication du 20ème siècle
a cristallisé les positions, particulièrement à la fin du siècle,
en opposant frontalement la publicité émanant des entreprises et
des secteurs économiques à l'information qui ne pouvait, par
définition, émaner que de la presse ou d'émetteurs en capacité de
revendiquer de n'avoir aucun lien avec le domaine économique.
Facteur aggravant en ce
début de 21ème siècle, quelle que soit la volonté de donner une
information factuelle, la communication est ipso facto qualifiée de
publicité si elle est positive et ne dénonce donc pas un risque. On
pourrait caricaturer en disant que la mention « train en retard »
sur le tableau d'affichage d'une gare est une info, mais celui qui
est « à l’heure » relève de la publicité. Encore plus grave
est le fait que les mécanismes de communication de notre société
moderne ne peuvent que valoriser l'information qui se base sur le
désaccord, l'opposition, le conflit. Cela ne serait pas si grave si
cela n'était qu’un problème de sémantique. Hélas, la
conséquence est que cela met en péril la concertation. En effet, si
l'information ne peut pas exister pour démontrer que ceux qui se
sont parlés sont arrivés à faire avancer les choses, les personnes
et les organisations en présence ne peuvent exister et se valoriser
que dans le dissensus. On ne peut donc, par définition, que se
retrouver avec un consommateur qui perd le peu de repère qu’il
essaye d'acquérir par l'expérience.
La solution ne pourra
donc exister que si le duo, rôle de la publicité d'une part émanant
du secteur économique et l'information émanant du secteur non
économique, évolue.
Cette opposition dans les
mécanismes de communication ne peut que conduire à aggraver les
conflits dans un monde justement de communication.
La concertation, si
souvent demandée par tous, risque aujourd'hui d’exister encore
moins qu'il y a vingt ans. En effet, avec l'accroissement de
l'information si l'on apprend que deux entités, de domaines de
référence différents, se sont vues ou ont juste envisagé de
discuter ensemble, alors les mises en cause se déchaînent sur les
uns et les autres. Ainsi, tant que ces mécanismes de communication
hérités de la fin de notre siècle dernier n'auront pas évolué,
les changements étant de plus en plus rapides et générant des
peurs réelles ou supposées, issues de vraies problèmes ou de
problèmes virtuels, les incompréhensions voire le divorce entre les
différents acteurs ne feront que se renforcer, accroissant les
interrogations des consommateurs.
La communication doit
donc sortir de cette dualité entre publicité et information qui, en
fait, organise les oppositions et fait perdre à la communication
l’essence même de ce pourquoi elle doit aussi être faite, à
savoir permettre à deux entités de se parler et de se comprendre
pour construire un projet commun.
Une troisième voie, qui
ne relèverait ni de la publicité ni de l'information telle qu'on la
connaît aujourd'hui, devrait pouvoir s'installer. Cette
communication de type informative devrait permettre justement de
mettre en avant les consensus, les accords et avoir auprès de
l’opinion une visibilité au moins égale à celle qui est aussi
nécessaire lorsque l'on doit dénoncer un risque, un
dysfonctionnement ou un désaccord. Sans une réflexion dans ce
domaine, qui conduira à s'interroger sur les émetteurs de cette
nouvelle communication sur les canaux de diffusion de cette
information et sur la transparence de cette dernière, les crises et
les incompréhensions ne feront que se développer car, pour terminer
sur une notion économique, parler des risques pour certains en
matière de communication est toujours plus rentable, plus valorisant
pour celui qui alerte et même moins risqué juridiquement que de
construire le dialogue et justement prendre le risque de dire que
l’on a la volonté de dialoguer et de faire avancer un problème,
mais ça c'est de la pub !
Trois
points importants
la défiance vis à
vis des experts a conduit à un irréversible retour de l'évaluation
profane des risques. Cette évaluation n'est pas quantitative (les
citoyens ne disposent pas des informations statistiques) mais
qualitative. Il est donc important d'analyser ce que sont les
qualités d'un "bon risque" (qui peut être
quantitativement fort) et celles d'un "mauvais risque"
(qui peut, à l'inverse, être considéré comme faible par les
experts).
Par rapport à ce
retour de l'expertise profane, l'alimentation moderne et les
nouveaux risques (listerias, résidus phytosanitaires, OGM, etc.) se
caractérise par des risques "imperceptibles", qui défient
donc ces capacités d'expertise individuelle et conduisent à une
"socialisation" de l'inquiétude.
il faut se garder de
penser toutes les situations en termes de risques et s'acharner à
garantir le risque zéro (ou à clamer qu'il n'existe pas). Les
citoyens ne demandent pas le risque zéro mais le "mépris
zéro" (voir le cas récent de la viande de cheval), ce qui
ouvre peut être de nouvelles pistes pour restaurer la confiance.
Il ne m’appartient pas
de m’exprimer sur la perception des consommateurs, d’autres
intervenants sont bien plus qualifiés que moi pour le faire. Je
souhaite simplement apporter l’éclairage d’un chercheur,
nutritionniste et toxicologue, qui a aussi exercé des activités
d’expertise pendant 35 ans. C’est donc un témoignage qui va à
l’évidence manquer d’objectivité.
Mon premier constat est
celui d’un grand succès : dans un premier temps, les
nutritionnistes ont parfaitement réussi, à juste titre, à
persuader le citoyen de l’importance de son alimentation en matière
de préservation d’un bon état de santé et de prévention de
l’apparition des pathologies majeures qui nous menacent.
Le second est celui d’une
incapacité totale à persuader ce citoyen de la multiplicité des
solutions possibles pour atteindre cet objectif de prévention. Le
consommateur a été livré à la cacophonie des discours d’une
multitude d’acteurs prétendant tous détenir la vérité et
recommandant souvent, soit une alimentation sur ordonnance soit des
remèdes de gourous. Son anxiété n’a fait que croître face à la
multitude des choix qui lui sont proposés. L’éducation à
l’alimentation a été délaissée au profit d’une soit disant
éducation nutritionnelle déconnectée de la réalité de la
production des matières premières agricoles et de leur
transformation culinaire ou industrielle. Le développement de nos
sociétés urbaines n’y est pas non plus étranger. Nous sommes
ainsi passé d’une connotation positive à une méfiance
généralisée.
Au cours des 30 dernières
années, la méfiance à l’égard des scientifiques, de la science
et de la technologie n’a fait que croître. Les scientifiques, les
universitaires les plus sérieux et honnêtes sont de plus en plus
considérés comme inféodés aux industriels et accusés d’être
incapables d’impartialité, ôtant toute valeur à leurs avis. Par
contre, les « lanceurs d’alerte », les opérations
médiatiques scientifiquement les plus lamentables trouvent un écho
de plus en plus large et bienveillant dans les médias et …dans les
milieux des décideurs, en particulier politiques (et je ne fais pas
de politique politicienne !).
Beaucoup de ces décideurs
n’informent pas complètement les citoyens sur les raisons de
leurs choix en matière de sécurité sanitaire et se refusent à
faire clairement la part entre les avis scientifiques émanant de
collectifs mis en place par leurs soins et les multiples raisons
sociales, économiques, écologiques, éthiques … qui peuvent
justifier leurs décisions de gestion des risques qui s’écartent
sensiblement de ces avis. Je ne peux que souligner la position
française qui consiste à mélanger les genres : c’est le
directeur de l’AFSSA puis de l’ANSES qui signe les avis qui ne
sont pas toujours l’exact transcription des avis d’experts ;
le HCB est organisé en deux comités, l’un scientifique, l’autre
économique et social et l’on ne sait pas qui a exprimé tel ou tel
point de vue quand le sujet est brulant. De plus les comités
scientifiques des deux instances font double emploi dans le domaine
de l’évaluation des risques sanitaires des OGM. N’est-ce pas de
nature à troubler le citoyen ? Et puis qu’il est agréable de
vouloir donner des leçons au monde entier en adoptant des positions
«originales» souvent indéfendables !
Note pays s’est doté,
il y aura bientôt 30 ans, d’une structure unique dans le monde à
l’époque, le CNA, qui permet à tous les acteurs de la chaîne
alimentaire de dialoguer et de rechercher le consensus dans tous les
domaines. Plus de 70 avis ont fait l’objet de ce consensus, or qui
en a connaissance dans la population ? Un exemple
particulièrement éclairant est celui de l’excellent avis à mon
sens, émis en décembre 2011 sur les PAT et dont je n’ai pas
entendu parler récemment à l’occasion de la décision prise par
Bruxelles au sujet de leur utilisation en alimentation des poissons.
Pourquoi vouloir à tout prix activer des débats soit disant
démocratiques à grand renfort de médias, alors que la démocratie
s’exerce dans ce parlement de l’alimentation. Redonnons lui la
place qu’il mérite et qui s’impose en cette période de gros
temps; sa représentativité, en fait une instance difficilement
manipulable par quelque acteur que ce soit.
Même
question à tous : quelle est, à votre avis, la principale
mesure à mettre en œuvre aujourd’hui pour rétablir la confiance
du consommateur dans son alimentation ?
15h45 - Deuxième
Table ronde – Quelles sont les actions mises en œuvre par les
pouvoirs publics et les acteurs privés pour garantir la sécurité
sanitaire des produits alimentaires livrés aux consommateurs, que
peut-on mettre en place ?
Modérateur
– Bernard CHEVASSUS-AU-LOUIS, Président de
l’Observatoire de la Qualité de l’Alimentation
Quelles
sont les actions mises en œuvre par les acteurs pour garantir la
sécurité sanitaire des produits alimentaires livrés aux
consommateurs ? Quelle est la principale mesure à mettre en œuvre
aujourd’hui pour rétablir la confiance du consommateur dans son
alimentation ?
La Confédération
générale de l’alimentation en détail (CGAD) est l’organisation
interprofessionnelle représentative des métiers de l'artisanat et
du commerce alimentaire de proximité et de
l'hôtellerie-restauration.
La CGAD représente plus
de 300 000 entreprises, générant un chiffre d'affaires de plus de
95 milliards d'euros chaque année et employant plus de 1,1 million
d'actifs dans 18 métiers (Boucher - Charcutier, Boucher chevalin,
Boulanger, Charcutier - Traiteur, Chocolatier - Confiseur, Crémier –
Fromager, Détaillants en Fruits et Légumes, Epicier, Glacier,
Hôtelier – Cafetier – Restaurateur, Pâtissier, Pizzaiolo,
Poissonnier, Tripier).
Ce sont des entreprises
de proximité implantées aussi bien en milieu urbain qu’en milieu
rural qui entretiennent avec leur clientèle un lien social et qui
dialoguent avec eux (information en direct…).
Les Métiers de
l’Alimentation se sont investis depuis plusieurs années déjà sur
le terrain de la maitrise de la qualité sanitaire. En effet, dès la
sortie de la directive 93/43 qui a marqué un tournant en matière de
règlementation « hygiène » en fixant avant tout des obligations
de résultats aux professionnels, la CGAD et ses organisations
professionnelles ont décidé de rédiger des guides de bonnes
pratiques d’hygiène basés sur une démarche HACCP collective. Ces
guides validés par les autorités compétentes sont là pour aider
les entreprises à satisfaire leurs obligations réglementaires en
matière d’hygiène.
Pour suivre l’évolution
des pratiques professionnelles et prendre en compte l’arrivée du
Paquet hygiène, non seulement d’autres guides sont en cours de
rédaction mais les guides anciennement validés subissent une
réactualisation pour intégrer, par exemple, les notions de plan de
maitrise sanitaire, de traçabilité, de gestion des non conformités
ou pour intégrer des outils d’auto-contrôle (contrôle à
réception, contrôle des températures, analyses microbiologiques…).
Ces guides expertisés par l’Anses s’accompagnent de formations
des chefs d’entreprise et de leurs salariés.
Par ailleurs, la création
de l’Observatoire de l’alimentation, dans lequel la CGAD est
impliquée en particulier sur le volet sanitaire, doit conduire à
une communication par les pouvoirs publics vers les consommateurs sur
la qualité sanitaire « réelle » de l’alimentation en France qui
reste satisfaisante et a progressé au fil du temps malgré
l’impression contraire qu’en ont les consommateurs. Il faut une
communication publique rassurante qui montre les efforts réalisés
par la filière
Nous vivons dans un monde
de paradoxes :
Notre monde est plus
sur, et pourtant, il y a une augmentation des peurs, notamment
alimentaires, avec une amplification des risques liés à
l’alimentation, par rapport à la réalité et une
surmédiatisation.
Alors qu’il y a
quarante ans l’alimentation moderne était valorisée, elle est
aujourd’hui synonyme de danger.
Alors que les
produits alimentaires n’ont jamais été aussi surs, il y a une
perte de confiance du consommateur.
Alors qu’à
l’étranger, notre modèle alimentaire et les produits
alimentaires ont une très belle image, en France, ils sont trop
souvent critiqués.
Dernier paradoxe,
celui qui oppose le français consommateur – à la recherche du
prix toujours plus bas - au français producteur, qui veut maintenir
son emploi et voir sa rémunération augmenter : la qualité a un
coût…..
Quel est l’enjeu pour
l’ANIA, dans ce contexte compliqué ? Restaurer la confiance du
consommateur. Il s’agit clairement d’un enjeu de compétitivité
pour les entreprises de l’alimentaire.
Quelles sont les actions
que nous mettons en place ?
L’alimentation-santé
est la première priorité de l’ANIA. Nous travaillons autant sur
les aspects de qualité et de sécurité que sur le volet
nutritionnel.
Dans le domaine de
la nutrition, nous avons recensé plus de 300 démarches de
progrès, réalisées par les entreprises et les professions, en
matière d’optimisation nutritionnelle, d’éducation et
d’information du consommateur, de communication responsable et de
programmes de recherche. Nous soutenons dans ce cadre le Fonds
français pour l’alimentation et la santé.
En matière de
sécurité sanitaire, nous avons en Europe la réglementation la
plus sévère au monde, qui nous impose de mettre sur le marché des
denrées saines et sûres, avec des obligations en matière de
résultat et de traçabilité…. Et nous accompagnons les
entreprises avec des outils d’application pratiques.
Pour restaurer la
confiance du consommateur, nous avons également adopté une
doctrine professionnelle qui encourage la communication positive sur
les produits et encadre strictement la communication péjorative. Le
« sans » ne doit pas être un argument de vente.
Enfin, nous allons
lancer une campagne de valorisation autour de 2 idées fortes, la
qualité et la sécurité des aliments et la « trame alimentaire »,
avec un parti-pris de transparence.
Notre objectif est bien
de recréer de la valeur autour de l’alimentation, de « ré
enchanter l’alimentation ».
(Texte à venir)
Jérôme BEDIER, Secrétaire général du groupe Carrefour
Gérard LALOI, Président de la Commission « Alimentation »
de la Société des agriculteurs de France (SAF)
Baisser les coûts à
tous prix… et en payer le prix !
Vivons-nous une nouvelle
crise alimentaire sanitaire ? Après les risques pour la santé du
prion avec la vache folle, de la dioxine, de la listéria, de la
mélamine… connaissons-nous aujourd’hui avec le scandale de la
tromperie sur la viande de bœuf un empoisonnement à large échelle
potentiellement grave ? Non ! Nous parlons là d’une « simple
affaire » de substitution de viande, frauduleuse certes, mais sans
conséquence aucune pour la santé… Une innocuité d’ailleurs
reconnue par les pouvoirs publics eux-mêmes avec leur autorisation
donnée de distribuer les produits incriminés aux organisations
caritatives !
→ Et pourtant, notre
chaine alimentaire se trouve confrontée à la pire crise jamais
endurée par tous les acteurs concernés : la perte de confiance,
alors même que les progrès réalisés lors de ces dernières
décennies n'ont jamais garanti une telle sécurité en matière
d'alimentation (contrôles sanitaires exigeants de fiabilité,
traçabilité d'une performance exceptionnelle…). En fait plus,
peut-être que la fraude, que le bon sens du consommateur peut
comprendre sans l’admettre, c'est l’extraordinaire complexité du
circuit agri-agroalimentaire, qui avec de mauvais relents de
mondialisation et de finances malsaines, sème un trouble profond
chez les citoyens. Le doute naît de la mise en lumière de ce dédale
tortueux générateur de toutes les incompréhensions d’abord, de
toutes les suspicions ensuite !
→ Voilà le vrai
risque, ce climat purulent, qui exige notre examen de conscience et
requiert notre réflexion. N’avons-nous pas finalement oublié les
principes ? A l’origine, le fameux « triangle d’or », qualité
organoleptique, équilibre nutritionnel, garantie sanitaire, se
travaillait pour démontrer la validité d’un prix, d’un coût,
d’un investissement, matériel pour nos industries, immatérielle
pour nos marques. Progressivement, le « socle » s’est retourné :
le prix, d’argument à justifier est devenu le cadre de référence
incontournable dans lequel doivent s’insérer les critères de
qualité. Le fameux principe « d’analyse de la valeur » des
années 80 : « à coût égal, comment augmenter la qualité »,
s’est insidieusement mué en : « à qualité égale comment
baisser les coûts »; avec les risques et les tentations qu’une
telle démarche peut susciter.
Retrouver la confiance du
consommateur exige à tous les stades de la chaîne alimentaire, et
en commun : de l’humilité (acceptons le diagnostic), de la
détermination (faisons bouger ensemble les lignes du paradigme
qualité/prix), de la patience et enfin et surtout la réaffirmation
d’une attitude profonde pour remettre le produit au centre de notre
vocation : le plaisir de nourrir !
→ Le Haut Comité à la
Réputation Alimentaire, recommandé par notre think tank
SAF-agriculteurs de France pour rassembler tous les acteurs au
service de ce projet, trouve plus que jamais sa nécessaire raison
d'être.
→ Dans la même lignée,
le futur Colloque « Pourquoi une éthique alimentaire ? » organisé
par la SAF et Valeurs Vertes le 18 avril 2013 au Parlement Européen
de Strasbourg réunira personnalités politiques et acteurs de la
chaîne.
La restauration
collective fait face à un double défi quotidien : conserver la
confiance de ses clients (donneurs d’ordre) et des convives, à qui
nous servons 8 millions de repas par jour.
Elle se différentie des
autres formes de restauration par des obligations réglementaires
strictes qui sont autant de points de vigilance et de sensibilité
utiles :
• L’obligation de
fournir des repas équilibrés : le respect du « contrat » est au
cœur de la confiance. A l’école, l’hôpital, dans les maisons
de retraite ou l’entreprise, ce repas représente souvent le seul
repas équilibré de la journée.
• La garantie d’un
prix dit « social » : le challenge de la restauration collective
c’est de conserver un niveau de vigilance très élevé sur la
qualité et la traçabilité tout en pratiquant des prix très
modérés pour permettre au plus grand nombre de bénéficier de ses
prestations.
• Les exigences fortes
en matière de sécurité́ alimentaire et sanitaire : du fait de la
fréquence et de la récurrence de la consommation, de la taille de
certains services mais aussi parce que de nombreux secteurs de la
restauration collective concernent des convives en situation de
fragilité.
Face à cela, l’attente
des consommateurs est une information loyale, fiable et vérifiable :
• Notre première
priorité est de garantir la santé publique, la sécurité de la
consommation, avec une politique de transparence sur les contrôles,
internes et externes.
• De plus en plus, les
consommateurs s’interrogent sur la loyauté des produits que nous
leur servons. D’où deux propositions très concrètes :
1- opérer nous-mêmes
des contrôles par sondage sur les produits qui nous sont livrés,
2- exiger auprès des
distributeurs et des producteurs la garantie que les produits livrés
sont bien ceux commandés – et que cette garantie emporte leur
responsabilité.