Je viens de lire une critique dite « gastronomique », alors qu'il s'agit de la critique de restaurant, et c'est encore fautif.
Le mot « gastronomie » est employé à tort et à travers, dans le monde culinaire, et dans le monde en général. Expliquons pourquoi.
Le mot « gastronomie » est un de ces mots récemment apparus, puisqu'il est forgé du grec par un poète, Joseph Berchoux, en 1801. Le poète n'est pas très connu, de sorte que c'est le juriste Jean-Anthelme Brillat-Savarin qui en sera vraiment à l'origine, avec une définition parfaitement explicite et claire : « la connaissance raisonnée de tout ce qui se rapporte à l'être humain en tant qu'il se nourrit » (Brillat-Savarin parle d' « homme », et non pas d'être humain, mais comme la meilleure moitié de l'humanité n'est pas masculine, autant adapter un peu la définition).
Ainsi, la gastronomie, c'est de la connaissance. Pas de la cuisine ! Dans le restaurant asiatique évoqué précédemment, il n'est aucunement question de connaissance, mais seulement de cuisine. Dans les restaurants, le client ne vient pas chercher de la connaissance, quel que soit le nombre d'étoiles Michelin, mais de la cuisine.
Comment nommer la cuisine des étoilés, alors, s'il est illégitime de la nommer « cuisine gastronomique » ?
Il s'agit de cuisine de luxe, de cuisine d'apparat, de haute cuisine, de cuisine artistique, de tout ce que l'on veut, mais pas de cuisine gastronomique. Inversement, nous avions parfaitement nommé l'Institut des hautes études de la gastronomie la structure de formation avancée que nous avions créée en 2004, et la terminologie « gastronomie moléculaire » est parfaitement juste, pour désigner la science de la nature qui explore les mécanismes des phénomènes qui surviennent en cuisine : il s'agit bien de connaissance.
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