Un remarquable article, dans le numéro 17 de "Hardware, canard PC", juillet août 2013, p. 94. Il est intitulé "Du cresson et du wi-fi", et l'auteur, le "Doc", y examine des résultats d'une étude sur l'effet des ondes électromagnétiques sur la croissance végétale.
Dans un premier temps, l'auteur relate un petit travail de recherche bibliographique, à propos d'étudiantes danoise qui auraient montré que du cresson pousse mal quand il est exposé à des ondes. Puis il analyse l'affaire Séralini (hélas, pas besoin d'expliquer qui c'est : la presse en a beaucoup trop parlé, à commencer par le Nouvel Observateur), avec lucidité et courage avant de présenter des résultats expérimentaux... qui montrent, évidemment, que le cresson pousse très bien même en présence d'ondes intenses.
Tout cela est mené "aimablement", courageusement, précisément.
Je ne saurais trop vous inviter à vous procurer rapidement ce journal !
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
mercredi 10 juillet 2013
mardi 9 juillet 2013
Mardi 9 juilet 2013. L'évaluation des stages
De nombreux stagiaires
sont venus dans notre groupe de gastronomie moléculaire, depuis de
nombreuses années. Ils travaillent, et nous nous efforçons de les
aider à apprendre le plus possible.
À la fin de leur stage,
il y a trois évaluations. La première, c'est une fiche
d'évaluation, que j'ai déjà discutée précédemment. Cette fiche
est envoyée par l'institution dont relève les stagiaires, et elle
vise, pour cette institution, à connaître la qualité du travail
qui a été effectué. Il est donc légitime que cette évaluation
soit faite par le maître de stage, qui, seul sait - parfois
comprend-la nature des travaux effectués.
Le rapport de stage est
une autre façon de valoriser pédagogiquement les stages. Cette
fois, il s'agit de communication écrite. Là, les règles à mettre
en oeuvre sont celles de la communication écrite, et les règles
d'évaluation de ce second travail sont les règles d'évaluation
de la communuication écrite.
Autrement dit, d'une
certaine façon, ce travail n'a rien à voir avec le travail
scientifique effectué lors des stages. Il s'agit d'un travail de
communication, et il s'agit, pour les étudiants, de montrer à leurs
professeurs qu'ils connaissent et savent mettre en oeuvre les règles
de la communication écrite, dans le domaine scientifique et
technique. En corollaire, les étudiants sont en droit de demander
une formation spécifique, sur cette communication écrite, s'ils ne
l'ont pas reçue (ou se former par eux-mêmes : apprenons à
grandir!).
Enfin il y a la soutenance
orale. Cette fois le travail est de communication orale, et là, il y
a une technique différente à mettre en oeuvre, et une évaluation
différente. Là encore, rien à voir avec le travail scientifique
effectué pendant le stage.
Bref, un stage, c'est
trois travaux : le travail scientifique et technique, la
communication écrite, la communication orale.
dimanche 7 juillet 2013
De l'émerveillement partagé pour un homme extraordinaire : Michael Faraday.
Cela
fait bien longtemps que je n'ai pas eu l'occasion de dire mon
émerveillement pour le physico-chimiste extraordinaire que fut
Michael Faraday. Tout le monde ne connaît pas son histoire
exemplaire, de sorte qu'il n'est pas inutile que je la raconte une
fois de plus. Evidemment, dans un billet, je ne vais pas entrer dans
les détails, mais donner seulement les grandes lignes.
Michael
Faraday était le fils d'un maréchal-ferrant pauvre et son épouse,
qui durent quitter les campagnes anglaises pour aller à Londres,
faute de travail. Là, la vie n'était guère meilleure, et le père
de Faraday mourut alors que l'enfant était encore jeune. C'était la
misère : Faraday a raconté plus tard que, certaines semaines, il
n'avait qu'un morceau de pain à manger pour toute la semaine.
Faraday eut la chance d'être embauché comme saute ruisseau, c'est-à-dire livreur de journaux, par un émigré français qui tenait une librairie. Il eut aussi la chance -athée ou non, il faut le reconnaître- d'être dans un environnement religieux, ses parents appartenant à une secte nommée les « Sandemaniens », qui croyaient dans la littéralité de la Bible.
Oui, ce fut une chance, parce que cet environnement le conduisit à avoir entre les mains le livre du clergyman nommé Isaac Watts, qui donnait une série de conseils pratiques. Faraday, sans père, suivit les conseils de ce livre à la lettre, à savoir : avoir des collaboration, ne pas généraliser hâtivement, vérifier ce que l'on nous dit, prendre des notes, entretenir des correspondances...
Tout cela sortait du livre intitulé L'amélioration de l'esprit, et c'est ainsi, de fil en aiguille, que Faraday fut embauché comme apprenti relieur, qu'il occupa ses temps libres à s'améliorer l'esprit et à faire diverse des expériences en chimie... parce qu'il avait eu cette autre chance, conséquence de la première (mais la chance sourit aux esprits préparés), d'avoir entre les mains un livre intitulé Conversations chimiques d'une dénommée Mme Marcet, qui fit une oeuvre de vulgarisation extraordinaire.
Faraday eut la chance d'être embauché comme saute ruisseau, c'est-à-dire livreur de journaux, par un émigré français qui tenait une librairie. Il eut aussi la chance -athée ou non, il faut le reconnaître- d'être dans un environnement religieux, ses parents appartenant à une secte nommée les « Sandemaniens », qui croyaient dans la littéralité de la Bible.
Oui, ce fut une chance, parce que cet environnement le conduisit à avoir entre les mains le livre du clergyman nommé Isaac Watts, qui donnait une série de conseils pratiques. Faraday, sans père, suivit les conseils de ce livre à la lettre, à savoir : avoir des collaboration, ne pas généraliser hâtivement, vérifier ce que l'on nous dit, prendre des notes, entretenir des correspondances...
Tout cela sortait du livre intitulé L'amélioration de l'esprit, et c'est ainsi, de fil en aiguille, que Faraday fut embauché comme apprenti relieur, qu'il occupa ses temps libres à s'améliorer l'esprit et à faire diverse des expériences en chimie... parce qu'il avait eu cette autre chance, conséquence de la première (mais la chance sourit aux esprits préparés), d'avoir entre les mains un livre intitulé Conversations chimiques d'une dénommée Mme Marcet, qui fit une oeuvre de vulgarisation extraordinaire.
Je passe la suite, mais tout s'enchaîne, et finalement, Faraday devint l'un des plus grands physico-chimistes de tous les temps. Quel destin extraordinaire !
samedi 6 juillet 2013
La communication... partout ?
Quand nous meublons notre
appartement, c'est pour nous que nous le faisons : ce n'est pas tous les jours que
l'on reçoit des amis, et les tableaux aux murs, les couleurs de ces
derniers, les matières des sols... Tout cela vise à nous rendre la
vie heureuse, parce que nous le percevons quand nous sommes chez
nous. Autrement dit, meubler un appartement, c'est organiser une
communication avec nous-même.
De même, les livres que
nous choisissons, les activités intellectuelles que nous avons, les
conversations que nous menons, également, laissent des traces dans notre esprit, des souvenirs.
Autrement dit, nos activités intellectuelles sont une façon de nous parler à nous-même. Nous nous "meublons" l'esprit. Cela a des conséquences : de même qu'une "croûte" sur les murs nous inflige la vision d'une horreur, augmentant notre inconfort, la contemplation de certaines émissions de la lucarne à décerveler nous abime l'esprit, nous salit... Il y a donc une responsabilité morale à bien choisir nos "consommations" (livres, émissions de radio ou autres, sites internet, journaux...) afin de nous élever l'esprit : souvenons-nous de Michael Faraday, l'un des plus grands physico-chimistes de tous les temps, qui allait le mercredi soir à son "club d'amélioration de l'esprit" (en plus du temple, mais c'est là une toute autre affaire, pour une autre fois).
Tiens, tant qu'à me faire des ennemis : et si je signalais que le dernier numéro de la revue Pour la Science publie un article sur les arènes ? Aujourd'hui, il y a les stades. Hier comme aujourd'hui, le Prince donne au peuple (pour le calmer) du pain et des jeux. Voulons-nous vraiment tomber dans ce piège millénaire ?
Mais la morale est ennuyeuse, et Aristophane semble du meilleur côté de la vie que Sophocle. Et puis, à quel titre pourrais-je me permettre d'ennuyer mes concitoyens, alors que ma vertu n'est certainement pas à la hauteur?
Passons, donc, et revenons à la "communication", puisque c'est de cela dont ce billet discute.
Nous "parlons" aux autres, et nous parlons à nous-mêmes. Une question, de ce fait : la communication serait-elle donc la totalité de la vie ? Y a-t-il autre chose que des actes de communication ?
Autrement dit, nos activités intellectuelles sont une façon de nous parler à nous-même. Nous nous "meublons" l'esprit. Cela a des conséquences : de même qu'une "croûte" sur les murs nous inflige la vision d'une horreur, augmentant notre inconfort, la contemplation de certaines émissions de la lucarne à décerveler nous abime l'esprit, nous salit... Il y a donc une responsabilité morale à bien choisir nos "consommations" (livres, émissions de radio ou autres, sites internet, journaux...) afin de nous élever l'esprit : souvenons-nous de Michael Faraday, l'un des plus grands physico-chimistes de tous les temps, qui allait le mercredi soir à son "club d'amélioration de l'esprit" (en plus du temple, mais c'est là une toute autre affaire, pour une autre fois).
Tiens, tant qu'à me faire des ennemis : et si je signalais que le dernier numéro de la revue Pour la Science publie un article sur les arènes ? Aujourd'hui, il y a les stades. Hier comme aujourd'hui, le Prince donne au peuple (pour le calmer) du pain et des jeux. Voulons-nous vraiment tomber dans ce piège millénaire ?
Mais la morale est ennuyeuse, et Aristophane semble du meilleur côté de la vie que Sophocle. Et puis, à quel titre pourrais-je me permettre d'ennuyer mes concitoyens, alors que ma vertu n'est certainement pas à la hauteur?
Passons, donc, et revenons à la "communication", puisque c'est de cela dont ce billet discute.
Nous "parlons" aux autres, et nous parlons à nous-mêmes. Une question, de ce fait : la communication serait-elle donc la totalité de la vie ? Y a-t-il autre chose que des actes de communication ?
jeudi 4 juillet 2013
Mise au point à propos de la polémique sur l’huile de palme
L'huile
de palme a mauvaise presse. Pourquoi ? Est-ce justifié ?
Ce
qui est certain : bien rares sont les polémistes qui savent ce
dont ils parlent vraiment : on voit répétés des mots tels que
« poly-insaturés », « risque cardiovasculaire »...
mais ils sont souvent seulement répétés, et pas compris.
D'ailleurs l'expérience prouve que même la seule notion d'
« huile » est mal comprise : des individus cultivés
croient que l'huile est faite d'acides gras, car n'est-ce pas ce qui
figure sur les étiquetages ? La déloyauté de ces derniers est
le baton qu'une certaine industrie alimentaire donne pour se faire
battre.
Allons,
cherchons simplement à comprendre.
Ce
qui est clair, c'est que nos sociétés ont trop eu de connaissance
de la chimie, d'une part, et de la nutrition, d'autre part, pour
juger. A défaut de comprendre, on répète, donc, et la prudence qui
a conduit l'espèce humaine a se reproduire et évoluer jusqu'à être
présente aujourd'hui conduit à répéter les discours les plus
prudents, pour ne pas dire alarmistes.
Evidemment,
on serait naïf de ne pas voir, aussi, derrière la polémique de
l'huile de palme, des raisons raisons politico-économiques, avec
notamment des manipulations protectionnistes fondées sur des clichés
faciles à répéter. Pour voir la paille dans l'oeil du voisin, on
sait que les Espagnols ou les Italiens vantent excessivement les
« vertus » de leur huile d'olive, tandis que d'autres
groupes feront la promotion de telle ou telle culture oléagineuse
nationale. C’est ainsi que les pays producteurs de soja du
continent américain diabolisent l’huile de palme, comme le font
également les pays producteurs de tournesol et de colza en Europe,
et le Sénégal producteur d’arachide depuis la privatisation de la
SONACOS.
En
conséquence, une description simpliste ou fausse des lipides, avec
soit une assimilation de ces derniers à des acides gras, soit (dans
les meilleurs cas) une interprétation des lipides en les seuls
termes de composition globale en acides gras. Ces deux descriptions,
fausses ou simplistes, conduisent quasi automatiquement à un
classement erroné, en termes de corps gras soit bons, soit mauvais
(pour la santé humaine, laquelle, on oublie de le dire, est
quotidiennement menacée par le tabagisme, la consommation d'alcools,
la consommation de sucres, de sodas, la consommation de viande
grillées, fumées... dont l'effet est bien supérieur).
Passons
sur les milles formes que la mauvaise foi humaine revêt, et partons
d'une bouteille d'huile raffinée.
Au
premier ordre, il s'agit d'un liquide composé d'un très grand
nombre (des millions de milliards de milliards) d'objets minuscules,
tous identiques, qui se déplacent en tous sens, et entre lesquels il
y a du vide, rien. Ces objets sont des « molécules ».
Dans
l'huile raffinée, les molécules ont quasiment toutes la même
structure : ce sont comme des peignes à trois dents souples, on
pourrait dire aussi comme des diapasons. Le manche du peigne, ou le
point de jonction du manche de diapason et des branches, est fait de
trois atomes de carbone enchaînés, et les dents ou branches sont
liés par de petits groupes d'atomes d'oxygène. Puis les dents
elles-mêmes sont faites d'enchaînement d'atomes de carbone, tous
ces atomes de carbone étant liées à des atomes d'hydrogène. Ces
molécules sont nommées des « triglycérides ».
Nous
avons vu que toutes les molécules de l'huile (ou presque) sont des
triglycérides, mais il existe des triglycérides différents. Les
dents/branches peuvent avoir des longueurs différentes, et elles
peuvent être plus ou moins « souples », déformables.
En
effet, les atomes de carbone peuvent se lier soit simplement, soit
par des liaisons « doubles », auxquels cas les
triglycérides sont dits « insaturés ». Avec une seule
liaison double, il y a une mono-insaturation ; avec plusieurs
liaisons doubles, il y a poly-insaturation.
Et
les acides gras, dans l'affaire ?
Quand
un chimiste veut « synthétiser » un triglycéride, il
peut le faire de nombreuses façons, mais la plus simple consiste à
« estérifier » du glycérol par trois acides gras. Le
glycérol ? Trois atomes de carbones attachés ensemble, avec,
sur chacun, un groupe « hydroxyle », avec un atome
d'oxygène et un atome d'hydrogène, plus des atomes d'hydrogène
pour faire le « compte » (chaque atome de carbone doit
finalement être lié à quatre autres atomes) :
Les
acides gras ? Des atomes de carbone liés de façon linéaire,
avec, à une extrémité, un groupe « acide carboxylique »,
avec un atome d'oxygène lié doublement à l'atome de carbone
terminal, et un groupe d'hydroxyle lié à ce même atome.
Autrement
dit, le chimiste de base reconnaît simplement des motifs dans les
triglycérides, et, même si la synthèse n'a pas été faite par
l'estérification précédemment décrite, beaucoup de mauvais
chimistes voient du glycérol et des acides gras dans les
triglycérides. Ce n'est pourtant pas juste : il y a seulement
des « résidus de glycérol » et trois « résidus
d'acides gras ». Mais, insistons, on pourrait très bien
décrire les molécules de triglycérides différemment, car elles
peuvent se constituer, ou de dissocier, d'innombrables façons où
les glycérol et les acides gras n'ont aucune part !
Evidemment,
si l'on conserve cette façon simple de décrire les triglycérides,
on pourra numéroter les atomes de carbone du résidu de glycérol :
1, 2, 3. Notons que les triglycérides de lait de ruminants ont des
résidus d'acides gras différents, aux positions 1 et 3. Ces
positionnements sont fondamentaux sur le plan de la nutrition :
ils règlent le mécanisme d’absorption des acides gras (je dis
bien, cette fois, des acides gras, car divers mécanismes digestifs
conduisent à séparer des acides gras des triglycérides) à travers
la paroi intestinale pendant la digestion. Lors de cette dernière,
une enzyme nommée lipase pancréatique, sécrétée par le pancréas
(on s'en serait douté) et chargée de digérer les lipides, n'agit
pas de même sur les résidus d'acides gras des positions 1 et 3,
d’une part, et les résidus d'acides gras de la position 2, d’autre
part : seuls les acides gras des positions 1 et 3 sont libérés
et se retrouvent, lors de la digestion, sous forme d’acides gras
libres (on trouve parfois les abréviation a.g.l., ou agl, ou AGL, ou
encore A.G.L.), qui peuvent réagir avec des ions calcium présents
dans l'environnement digestif, pour former des « sels de
calcium » ; les acides gras de la position 2 restent liés
au résidu de glycérol pour former des 2- monoglycérides (tiens,
j'y pense : savez-vous que les monoglycérides sont considérés
comme des « additifs »?).
Les
sels de calcium des acides gras saturés sont insolubles, et ils sont
excrétés dans les fèces ; quant aux acides
gras poly-insaturés, après hydrolyse partielle de leurs sels
de calcium, ils traversent en partie la paroi intestinale et
alimentent les systèmes métaboliques en acides gras essentiels.
Les 2-monoglycérides, eux, traversent rapidement la paroi
intestinale : ce sont des vecteurs d'acides gras, et la
« biodisponibilité » d’un acide gras donné est
maximale lorsque ce dernier est lié au résidu de glycérol par la
position 2.
On
comprend alors aisément que, si la position 2 est riche en résidus
d'acides gras insaturés, ces derniers seront transportés sans
difficultés à travers la paroi intestinale vers le canal
thoracique ; de même, si la position 2 est riche en résidus
d'acides gras saturés, ces derniers seront transportés également
sans difficulté vers le canal thoracique. La position 2 est aussi
qualifiée de position de biodisponibilité des résidus d'acides
gras.
Tableau
1 : Composition et distribution des résidus d'acides gras de
trois matières grasses riches en résidus d'acides gras saturés, la
graisse de porc (lard), l’huile de palme et le beurre de cacao.
Dans
le tableau 1, on compare trois matières grasses saturées : la
graisse de porc (lard), l’huile de palme et le beurre de cacao,
qui contiennent respectivement 48,5, 52,0 et 60,5 % de résidus
d’acides gras saturés (arrondissons à 50, 50, 60) et 51,5, 48,0
et 39,5 % de résidus d’acides gras insaturés (arrondissons à 50,
50, 40). Les arrondis montre que la graisse de porc et l'huile de
palme sont très semblables, alors que le beurre de cacao est bien
différent.
L’analyse
des matières grasses, connue depuis presque un demi-siècle permet
de connaître la composition en résidus d'acides gras des
triglycérides, par couplage des chromatographies sur couche mince et
en phase gazeuse, après digestion ménagée in
vitro des
échantillons, soit par le bromure d’éthyl magnésium, soit par la
lipase pancréatique de porc biochimiquement identique à celle de
l’homme. La méthode à la lipase pancréatique est d’ailleurs
normalisée depuis longtemps ; on consultera utilement les
articles et normes référencées ci après :
- AFNOR: "Corps gras, graines oléagineuses, produits dérivés" 5ème édition 1993 – NF ISO 3800 nov. 1986 – Détermination de la composition des acides gras en position 2 (indice de classement T60-241)
- IUPAC: "Méthodes d'analyses des matières grasses et dérivés" 3ème édition 1979 – 1ère partie (section I et II) 2-210 – Détermination de la teneur en acides gras en position 2 dans les triglycérides
- Brockerhoff H., (1967 – Stereospecific analysis of triglycerides: an alternative method – J. Lipid Research, 8, 167-169
(AFNOR :
Association Française de Normalisations – IUPAC:
International Union for Pure and Applied Chemistry)
L’application
de la norme AFNOR a permis de déterminer la composition des résidus
d'acides gras en position 2 de ces trois matières grasses et de
constater que cette position comprend 80 % de résidus d’acides
gras saturés et 20 % d’insaturés dans le lard, alors que pour les
deux matières grasses végétales, palme et cacao, le rapport est
inversé par rapport au lard avec respectivement 80 et 90 % de
résidus d’acides gras insaturés et 20 et 10 % d’acides gras
saturés.
Ces
résultats signifient, sans ambigüité, que :
- dans le cas du lard, les 2-monoglycérides issus de l’action de la lipase pancréatique vectorisent essentiellement des résidus d'acides gras saturés à travers la paroi intestinale,
- alors que dans le cas de l'huile de palme et du beurre de cacao les 2-monoglycérides vectorisent essentiellement des résidus d'acides gras insaturés ;
- quant aux résidus d'acides gras saturés qui occupaient les positions 1 et 3, ils sont éliminés dans les fèces sous forme de sels de calcium insolubles.
Répétons :
dans le cas du palme et du cacao,
les acides gras absorbés par l’intestin sont essentiellement des
acides gras insaturés, alors que ce sont des acides gras saturés
dans le cas du lard.
L’huile
de palme et le beurre de cacao se comportent donc comme les huiles
riches en réssidus d'acides gras insaturés dont la position 2 est
exclusivement composée de résidus d'acides gras insaturés, les
résidus d'acides gras saturés étant répartis sur les positions 1
et 3 des triglycérides.
Lorsque
l’EFSA (l'Agence européenne de sécurité des aliments) fit
connaître sa réponse à la saisine de la Commission européenne, en
juillet 2004, elle souligna la relation positive entre la
concentration en résidus d'acides gras trans (il ne s'agit pas
d'OGM, mais d'une particularité chimique qu'il n'est sans doute pas
nécessaire d'expliquer ici ; je me tiens à la disposition de
ceux qui voudraient des éclaircissements) et risques
cardiovasculaires. Elle observa que cette relation n’est pas
établie pour les autres pathologies à haute prévalence, et que
cette consommation doit être rapportée à celle des résidus en
acides gras saturés – largement plus élevée que celle des
résidus d'acide gras trans et également associée à une
augmentation du risque cardiovasculaire. Enfin l'EFSA signala que la
corrélation ne valait pas pour tous les pays d'Europe, tant sont
grandes les différences de consommation entre pays.
Ce
que l'on a vu précédemment explique qu'il faut interpréter cette
déclaration : ce que visait l'EFSA, ce sont les résidus
d'acides gras trans et saturés, absorbés par la paroi intestinale
et qui, de ce fait, étaient issus de la position 2 des triglycérides
ingérés.
Il
ne faut pas faire l’amalgame entre les lipides absorbés dans la
prise alimentaire et les lipides absorbés par la paroi intestinale
après action de la lipase pancréatique.
Ainsi,
un repas contenant des lipides riches en résidus d'acides gras
saturés ne signifie pas que ces derniers traverseront
automatiquement la paroi intestinale : ils traverseront la paroi
intestinale s’ils occupent la position 2 des triglycérides ingérés
(cas des graisses animales et de porc, en particulier), mais ils ne
traverseront pas la paroi intestinale s’ils occupent les position 1
et 3 des triglycérides (cas de l’huile de palme et du beurre de
cacao), et seront alors éliminés, dans ce cas, dans les fèces sous
formes de sels de calcium.
Notons,
en outre, qu’il n’y a pas plus de maladies cardiovasculaires en
Malaisie, où la population consomme presqu’exclusivement de
l’huile de palme, qu'au Japon, où la population consomme beaucoup
de poisson et, donc, beaucoup de lipides de poisson réputés
protecteurs contre les maladies cardiovasculaires. En revanche, en
Bretagne ou l’on consomme beaucoup de viande de porc et de
charcuteries, et, donc, beaucoup de graisse de porc, l'incidences des
maladies cardiovasculaires est nettement plus élevé que chez les
habitants du pourtour méditerranéen français.
Pour
terminer, notons que toutes les cellules qui nous constituent sont
limitées par une membrane composée de 70 % de phospholipides :
pour ces composés, il y a deux résidus d'acides gras. Le
fonctionnement correct impose une proportion convenable de résidus
d'acides gras saturés, mono-insaturés et poly-insaturés,
permettant le transfert transmembranaire de sels et de biomolécules,
par des complexes protéiques nommés transporteurs, et permettant le
bon fonctionnement des protéines logées dans les cellules
(fonctions de reconnaissance cellulaire, etc.). Le bon choix des
matières graisses est essentiel... mais la critique de l'huile de
palme mérite d'être sainement examinée. Les êtres humains ont
appris à trouver dans la nature toute une gamme d’huiles, qui,
purifiées, se caractérisent par leur composition en résidus
d'acides gras, avec des propriétés particulières :
insaturations, positions dans le triglycéride (avec la position 2
très importante, on l'a vu). D'autre part, pour ce qui concerne
les aspects politiques, observons que la plantation de palmiers à
huile (qui se fait par défrichement des forêts tropicales) conduit
à produire dix fois plus d’huile à l’hectare que le soja :
le soja est donc responsable de la disparition de dix fois plus de
surfaces riches en biodiversité que le palmier, notamment au
Brésil.
Articles
utiles à consulter :
- Effect of triglyceride structure on fat absorption. Umberto BRACCO. Am. J. Clin. Nutr. (1994), 60 (Suppl.), 1002S -1009S
- The positional distribution of fatty acids in palm oil and lard influences their biologic effect in rats. Serge C. RENAUD, Jean C. RUF and Dominique PETITHORY. J. Nutr. (1995), 125, 229 – 237
- Biodisponibilité des acides gras et apports nutritionnels conseillés. Nicole COMBE. OCL, (2002), 9, 135 – 138
- Betapol structured lipid – A close match to mother’s milk for a healthy start to life. Corey E. SCOTT. Wellness Food Europe infant nutrition. May/June 2009, 30 – 35
- Brevet : dépôt 1994, Publication 20 juin 1997, N° EP19940915542 LODERS CROKLAAN
- Huile de palme rouge de Colombie : Un équivalent tropical de l’huile d’olive. M. Pina et al. OCL, (2005), 12, 180-182
- Dietary lipids and cardiovascular disease: effect of palm oil. Gerard HORNSTRA. Oléagineux, (1988), 43, 311 – 315.
D'après
un document de Jean Graille, consultant en agroalimentaire.
mercredi 26 juin 2013
Samedi 30 juin 2013. Vive les sciences quantitatives : la réfutation
A propos de réfutation,
on ne saurait omettre de mentionner le nom de Karl Popper, ce
philosophe des sciences qui dégagea si bien cette caractéristique
essentielle du travail scientifique : la réfutation.
D'ailleurs, la réfutabilité semble être un critère suffisant pour
distinguer les sciences des fausses sciences, ou, plus exactement,
les sciences quantitatives des élucubrations, car je me résous
difficilement à accorder le nom de sciences ou de savoir, même
précédé de « pseudo », à des tromperies, à des
fraudes, à des délires...
Oublions donc la fange, la
boue intellectuelle, et consacrons-nous à nos merveilleuses sciences
quantitatives. Nous avons vu qu'elles produisent des théories,
regroupement d'explications, de mécanismes, des phénomènes
initialement isolés, en vue de leur étude. Ces théories sont
fondées sur des lois, qui expriment les mécanismes de façon
quantitative, et on peut même considérer qu'un résultat
scientifique est à la fois la théorie et les lois dont la théorie
découle. Ces deux groupes font corps.
Vient alors l'étape de la
réfutation, la tentative de réfutation. Il s'agit de partir des
théories, d'en chercher des conséquences qui n'ont pas été
examinées auparavant. On se souvient que l'induction est un
mécanisme essentiel de la troisième étape de la méthode des
sciences quantitatives, et que, par conséquent, ces inductions nous
conduisent en des endroits qui n'ont pas été validés, qui ont pas
été explorés, même. Il y a donc lieu d'aller voir de plus près.
C'est cela que l'on cherche à faire ; on teste la théorie dans
des parties qui ont été induites, et non déduites. N'est-ce pas
légitime ?
Le statut de ces
explorations réfutabilistes est extraordinaire, car il y a bien du
chemin entre le test d'une loi en des points (en nombre infini) ou
cette loi n'a pas été testée, et les tests de la théorie dans des
champs de conditions particuliers, par exemple près de zéro, ou
près de l'infini, ou à côtés des lois...
Il y a donc beaucoup
d'intelligence à mettre dans la recherche des réfutations à
envisager. Une fois de plus, la science n'est pas l'application
automatique d'une méthode, mais, au contraire, un travail d'une
finesse constante, du début à la fin... Et nous verrons plus loin
que cette fin existe pas...
Vendredi 28 juin 2013. Vive les sciences quantitatives. La troisième étape en de la méthode scientifique, la réunion des données en lois.
La troisième étape de la
méthode des sciences quantitatives consiste à faire bon usage de
ces innombrables données qui ont été réunies lors de la deuxième
étape, à savoir la quantification du ou des phénomènes
sélectionnés initialement.
Nous avons vu que la
deuxième étape consistait à caractériser quantitativement les
phénomènes. Les mesures ont conduit à des données nombreuses,
généralement, et il faut imaginer avoir devant soi d'immenses
tableaux de nombres. C'est immangeable ! Comment faire ? Les « lois
» en sont des choses merveilleuses, puisqu'elles résument, qu'elle
synthétisent, de très nombreux résultats de mesures, de résultats
expérimentaux.
Par exemple, nous avons vu
que, à propos d'électricité, le physicien allemand Georg Simon Ohm
s'était illustré en mesurant la différence de potentiel électrique
et l'intensité du courant qui passe dans un fil conducteur. Il fit
de nombreuses mesures, pour de nombreux conducteurs particuliers,
mesurant chaque fois la différence de potentiel appliquée et
l'intensité du courant, et il découvrit que le rapport de ces deux
grandeurs est constant, pour un conducteur donné : c'est la
résistance électrique. Dans un tel cas, on a une égalité toute
simple entre dans la différence de potentiel, d'une part, et le
produit de la résistance du conducteur par l'intensité du courant,
d'autre part. C'est une loi, une relation que l'on établit à partir
des données d'expérience, de mesures, et dont on propose une
généralisation. On clame au monde, en quelque sorte, que cette loi
reste vraie même pour des valeurs particulières des paramètres qui
n'ont pas été mesurées ; on propose de penser que cette loi est
vraie en tous temps et en tous lieux (sauf indication du contraire,
bien sûr). Les lois sont d'une puissance inimaginable, d'une audace
extraordinaire, puisqu'on leur prête la capacité de s'appliquer à
des cas qu'on n'a pas envisagés en pratique.
Bien sûr, la loi d'Ohm
n'est qu'un des exemples les plus simples, simpliste même, et il y
aurait lieu d'examiner plus en détail des exemples plus complexes.
Toutefois cela ferait un gros traité, et je propose plutôt de
considérer le livre La science et l'hypothèse
du mathématicien Henri Poincaré pour comprendre que derrière
tout le travail d'établissement des lois, il y a toujours de
l'induction, plutôt que de la déduction. Autrement dit, comme pour
la première étape de la méthode des sciences quantitatives, comme
pour la deuxième étape de la méthode des sciences quantitatives,
il faut beaucoup d'intelligence pour mener à bien la troisième
étape des sciences quantitatives.
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