Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
mardi 5 novembre 2019
15e session des Hautes Etudes de la gastronomie !
Nous avons reçu, ces dernières semaines, les auditeurs de la 15e session des Hautes Etudes de la Gastronomie.
Ce programme aujourd'hui partagée entre l'Université de Reims et l'Ecole du Cordon Bleu reçoit des personnes du monde entier pour les mettre en contact avec les meilleurs des spécialistes de gastronomie : historiens, géographes, biologistes, chimistes, écrivains, économistes, toxicologues, nutritionnistes...
Deux semaines de cours intensifs terminés par un examen qui donne lieu à un diplôme universitaire, mais, surtout, qui conduisent le plus souvent à réorganiser une vie en fonction des données nouvelles qui ont été fournies. D'après les verbatim, pas un n'en sort autrement que bouleversé, ayant notamment compris que "la gastronomie est la connaissance raisonnée de tout ce qui se rapporte à l'être humain qui se nourrit".
lundi 4 novembre 2019
Pourquoi parler alsacien en Alsace
L'Alsace est évidemment un pays merveilleux, mais on n'oublie pas que le phénomène d'urbanisation ne l'épargne pas, d'une part, et que, d'autre part, les richesses attirent aussi les plus pauvres, créant des communautés séparées (des "ghettos"). L'envie, le choc des cultures... Tout cela engendre des conflits... Comment les éviter ?
Pour ce pays étrange qu'est l'Alsace, où tout est vrai jusqu'à son contraire, où le sud et le nord s'affrontent, sauf à regarder l'extérieur du pays, où l'on est étranger toute sa vie si l'on vient d'un village distant de moins de 100 mètres, il y a la question de la langue, qui n'est ni du français ni de l'allemand. Tout comme l'Alsace elle-même, qui n'est ni la France, ni l'Allemagne, deux pays qu'ils ont cessé de l'envahir. Aux communautés des riches et des pauvres s'ajoutent des communautés de religion et d'histoire : les catholiques, les protestants, les juifs, les musulmans... Les Alsaciens francophones, les Alsaciens germanophones... sans compter les subtilités : il y a eu les Alsaciens qui ont quitté l'Alsace en 1870, d'autres qui sont restés, ceux qui sont partis en 1939, ceux qui ont été incorporés de force...
Bref, il y a en Alsace toute une série de communautés séparés que nous devons absolument chercher à les réunir. Comment ? Le point commun pour l'instant, c'est la présence en Alsace, mais l'existence de communautés séparés démontre que ce point commun ne suffit pas à rassembler.
Non, l'existence de la langue alsacienne, qui d'ailleurs n'est pas parlée par tous, et qui est souvent reléguée au rang de dialecte par ceux qui ne voudraient pas qu'elle soit une langue, me semble être propice à un rassemblement. C'est un fait que dans mon petit village d'Alsace, on parle alsacien avant huit heures du matin chez le boulanger, et ceux qui ne parlent pas peuvent l'apprendre, afin de s'intégrer. Apprendre une langue ? Ce n'est pas difficile : un ou deux mots par jour, une tournure, une expression, et l'on devient progressivement capable de s'exprimer et de comprendre. On apprend ainsi à oublier la langue qui était la nôtre pour se retrouver avec qui on partage une terre. Et puis, on s'étonne de particularités linguistiques. Tiens, par exemple, il y des "hopla" à toutes les sauces, il y a ces tournures telles que "ils veulent du beau temps", pour dire que la météo prévoit du beau. Des jurons très spécifiques. On a la sagesse de ne pas avoir de futur, car on sait que personne ne peut le prévoir. Quand on quelqu'un vous souhaite un bon appétit , on lui répond en lui en souhaitant un encore meilleur.
Apprendre l'Alsacien, c'est accéder à une culture qu'on a pas, mais, surtout, c'est admettre qu'il y a là une possibilité de réunir des communautés. Cela me semble une raison largement suffisante pour promouvoir l'usage généralisé de la langue alsacienne en Alsace !
dimanche 3 novembre 2019
Essayer d'être charitable
Il y a quelque temps, j'ai fais la promesse de ne plus parler publiquement de nutrition, de toxicologie, et encore moins de diététique. Aujourd'hui c'est un engagement différent que je prends : essayer d'être charitable.
Il ne s'agit pas d'une grande conversion, mais de répondre à une remarque que me fait un ami à propos de la peau des pommes de terre.
Car c'est un fait que les trois premiers millimètres sous la peau des pommes de terre contiennent des glycoalcaloïdes toxiques, qui ont pour nom solanine, solanidine ou chaconine, par exemple. Et, c'est un fait que, de tout le temps, on a donc pelé les pommes de terre pour éviter de s'empoisonner. Augustin Parmentier, quand il a promu l'utilisation alimentaire des pommes de terre, peu avant la Révolution, avait bien observé que les infusions de peaux de pommes de terre faisaient un liquide "brûlant", manifestement parce qu'il était chargé de glycoalcaloïdes. Naguère encore, on savait bien qu'il fallait conserver les pommes de terre à l'obscurité et dans un lieu frais, afin d'éviter qu'elle ne verdissent et que ne s'accumulent ces glycoalcaloïdes toxiques.
Bref je disais donc à mon ami que cela me paraissait être le comble de l'incohérence que de servir des pommes de terre bio avec leur peau, comme c'est la mode aujourd'hui, mais mon me répondit que personne n'avait l'information pour comprendre cela.
Comment cela, cette information n'est-elle pas partout dans les campagnes ? Oui, mais peut-être plus dans les villes : l'urbanisation à fait des déracinés qui ont oublié à la fois la boue sur les chaussures quand il pleut, mais aussi des données importantes à propos de leur alimentation.
Certes, je sais bien, puisque je le répète partout, que la France n'est pas réduite au 5e arrondissement de Paris, mais je ne dois certainement pas oublier que tous ne lisent pas les bonnes publications scientifiques. Et d'ailleurs, c'est peut-être une mission des scientifiques que de traduire les résultats de ces publications en informations que l'on peut proposer aux citoyens, afin que la science ne soit pas une aristocratie que l'on décapite.
Oui, nous devons ouvrir nos laboratoires, présenter nos travaux, en faire des traductions technologiques tout autant que des traductions citoyennes. Je crois moins à l'idée de sciences participatives -terminologie que je juge démagogique- qu'à des efforts soutenus et constants par les institutions scientifiques, afin que les citoyens comprennent que leurs impôts ne sont pas dépensés en pure perte.
Oui, il y a lieu de ne pas être supérieur, et d'être charitable : certains n'ont pas fait le chemin qui aurait pu les mener à des connaissances que nous jugeons élémentaires. Et puis, d'ailleurs, avons-nous nous-mêmes toutes les informations que d'autres jugeraient élémentaires ?
samedi 2 novembre 2019
Comment rater des crêpes
Crêpes ? Galettes ? Les Bretons font bien la différence, à savoir que les crêpes sont de froment, avec du lait et de l’œuf, tandis que les galettes sont de blé noir, avec de l'eau et du lait, sans œuf.
On a supposé que ces préparations étaient nées de la cuisson prolongée de farine et d'eau, comme quand on fait une bouillie. L'évaporation aurait laissé une mince couche qui se tenait : la crêpe était née.
Puis, bien sûr, il y eut des ajouts, tel l’œuf, qui fait tenir parce que ses protéines coagulent, mais donne aussi du goût. Mais c'était déjà une préparation de riche. Puis, dans certaines régions, il y eut la bière, qui apportait du moelleux ; ou du blanc d’œuf battu en neige, pour augmenter le volume et changer la consistance. Bref, mille crêpes différentes sont nées.
Ce qui reste, c'est que la crêpe est une mince couche, avec de l'amidon empesé dans un liquide (eau, lait, bière), et, parfois, de l’œuf qui donne de la consistance à l'ensemble.
Rater une crêpe ? Il y a les crêpes qui cassent quand on les tourne, ou encore les crêpes qui brûlent par endroits et restent insuffisamment cuite ailleurs... Pour les crêpes qui cassent, c'est que leur tenue n'est pas suffisante, évidemment, ou, autrement dit, que leur tenue n'est pas suffisante par rapport à leur poids. Ainsi, quand l'instrument de cuisson n'est pas parfaitement plat, il peut y avoir un centre épais et des bords trop minces, ou un centre trop mince et des bords épais. Dans le premier cas, les bords seront brûlés quand le centre restera insuffisamment cuits, et la crêpe cassera quand on voudra la retourner. Dans le second cas, le centre ne tiendra pas la couronne épaisse autour, à moins que celle ci ne se soutienne seule... mais comme on aura retourné pour éviter que le centre ne soit brûlé, il y a fort à parier que la crêpe ne se tiendra pas.
Cela étant, la maîtrise du feu s'impose même quand l'ustensile est plat, parce que... Avez vous observé que les crêpes ne sont pas identiques sur les deux faces, quand elles sont un peu épaisses? En effet, la première face est est très liquide, et il y a évaporation de l'eau, tandis que l'amidon s'empèse, que l’œuf coagule éventuellement. Puis vient un moment où la coagulation est faite dans toute la masse, et la crêpe commence à gonfler par endroits, malgré des cheminées. Si l'on retourne, alors la face qui arrive contre l'outil de cuisson est déjà cuite, de sorte que cette fois, l'eau sous la forme de vapeur ne peut plus s'échapper, et c'est là que de grosses cloques se fond, avec la crèpe qui n'est plus au contact de l'ustensile, par endroits, alors qu'elle y reste ailleurs... et brunit parfois trop fort. Là, ce serait bon de pouvoir réduire le feu, n'est-ce pas ?
Bref, bien des façons de rater une crêpe. Les réussir ? Avec des crêpes très minces, bien des écueils précédents disparaîtront, parce que la vapeur d'eau peut s'échapper mieux !
On a supposé que ces préparations étaient nées de la cuisson prolongée de farine et d'eau, comme quand on fait une bouillie. L'évaporation aurait laissé une mince couche qui se tenait : la crêpe était née.
Puis, bien sûr, il y eut des ajouts, tel l’œuf, qui fait tenir parce que ses protéines coagulent, mais donne aussi du goût. Mais c'était déjà une préparation de riche. Puis, dans certaines régions, il y eut la bière, qui apportait du moelleux ; ou du blanc d’œuf battu en neige, pour augmenter le volume et changer la consistance. Bref, mille crêpes différentes sont nées.
Ce qui reste, c'est que la crêpe est une mince couche, avec de l'amidon empesé dans un liquide (eau, lait, bière), et, parfois, de l’œuf qui donne de la consistance à l'ensemble.
Rater une crêpe ? Il y a les crêpes qui cassent quand on les tourne, ou encore les crêpes qui brûlent par endroits et restent insuffisamment cuite ailleurs... Pour les crêpes qui cassent, c'est que leur tenue n'est pas suffisante, évidemment, ou, autrement dit, que leur tenue n'est pas suffisante par rapport à leur poids. Ainsi, quand l'instrument de cuisson n'est pas parfaitement plat, il peut y avoir un centre épais et des bords trop minces, ou un centre trop mince et des bords épais. Dans le premier cas, les bords seront brûlés quand le centre restera insuffisamment cuits, et la crêpe cassera quand on voudra la retourner. Dans le second cas, le centre ne tiendra pas la couronne épaisse autour, à moins que celle ci ne se soutienne seule... mais comme on aura retourné pour éviter que le centre ne soit brûlé, il y a fort à parier que la crêpe ne se tiendra pas.
Cela étant, la maîtrise du feu s'impose même quand l'ustensile est plat, parce que... Avez vous observé que les crêpes ne sont pas identiques sur les deux faces, quand elles sont un peu épaisses? En effet, la première face est est très liquide, et il y a évaporation de l'eau, tandis que l'amidon s'empèse, que l’œuf coagule éventuellement. Puis vient un moment où la coagulation est faite dans toute la masse, et la crêpe commence à gonfler par endroits, malgré des cheminées. Si l'on retourne, alors la face qui arrive contre l'outil de cuisson est déjà cuite, de sorte que cette fois, l'eau sous la forme de vapeur ne peut plus s'échapper, et c'est là que de grosses cloques se fond, avec la crèpe qui n'est plus au contact de l'ustensile, par endroits, alors qu'elle y reste ailleurs... et brunit parfois trop fort. Là, ce serait bon de pouvoir réduire le feu, n'est-ce pas ?
Bref, bien des façons de rater une crêpe. Les réussir ? Avec des crêpes très minces, bien des écueils précédents disparaîtront, parce que la vapeur d'eau peut s'échapper mieux !
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