Le texte d'un entretien qu'un journaliste me soumet m'amuse : mon interlocuteur me dit vouloir garder un ton familier, souple, jeune... et je vois surtout un texte mal construit avec beaucoup de fautes de français.
J'ai de l'indulgence, car je me souviens que, après quelques temps à la revue Pour la science, j'étais allé voir le rédacteur en chef pour lui dire que notre langage était bien raide et que, pour attirer des jeunes, nous aurions intérêt à avoir une écriture plus souple.
Plus souple ? Mais comment ? S'agit-il de faire des fautes de français ? S'agit-il d'avoir un usage laxiste des mots ? S'agit-il d'avoir une construction de discours cahotique, désordonnée ? S'agit-il d'utiliser tous les tics et clichés à la mode ("voilà", "effectivement", "du coup", "zy va") ?
Dans le texte que le journaliste me soumet pour correction, je vois tout cela et je sais, puisque je me souviens de l'entretien, que les redites dont je suis responsables m'ont été imposées, parce que mon interlocuteur comprenait... difficilement. Il a retranscrit ce qui était dans le magnétophone, mais les redites ne signalent que son inattention.
Les fautes de français ? J'essaie d'en faire le moins possible, de sorte que je supporte mal que l'on m'en fasse faire. En conséquence, j'ai corrigé toutes les fautes qui m'étaient attribuées, car je ne les ai pas faites.
Et cela raidit évidemment le texte ! Les fautes d'orthographe, bien sûr je ne les ai pas faites non plus, ou, du moins j'ai essayé de les éradiquer le plus possible.
Bref, pour ce qui concerne ma partie de l'entretien, j'ai essayé de faire quelque chose de construit et de propre, comme je veux ma pensée.
Reste des fautes dans les questions que le journaliste me posait, et là, je lui laisse la responsabilité de parler médiocrement
Mais qu'est-ce qu'une écriture plus souple, plus jeune ?
Je le sais de moins en moins. Une écriture "parlée"? Je ne peux m'empêcher, à cette occasion, de penser au gueuloir de de cette question, Gustave Flaubert, cette pièce où il disait à voix haute ses texte écrits, en vue de les corriger ensuite pour leur donner plus de "souplesse".
Mais j'ajoute aussitôt que Flaubert, quand il parlait, ne faisait pas de fautes de français, et que le degré de subtilité de ses corrections dépasse l'entendement de la quasi-totalité des locuteurs.
Bref je reste perplexe et je comprends que mon rédacteur en chef l'ait été naguère.
Il va me falloir réfléchir encore beaucoup.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
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lundi 7 novembre 2022
Une écriture "plus souple" ?
dimanche 24 février 2019
Pourquoi des savoirs hasardeux ? Egalement parce que les professeurs étaient pour le moins approximatifs
On peut se demander pourquoi certains étudiants manipulent mal, calculent mal, écrivent mal, voire pensent mal. Bien sûr, il y a les insuffisances individuelles, le manque de soin, le temps passé à étudier insuffisant... mais il y a aussi la responsabilité des professeurs.
Je ne sors pas indemne d'un examen de conscience, puisque j'ai enseigné une explication fautive de la raison pour laquelle l'huile ne se dissout pas dans l'eau, mais quand même : j'ai rappelé les étudiants à qui j'avais enseigné cette idée fautive, et je les ai priés de m'excuser. Si l'huile ne se dissout pas dans l'eau, c'est une question d'entropie, et pas d'enthalpie.
Mais, là, je viens de voir le pire : dans un document relatif à la sécurité dans les laboratoires de chimie, il y avait ce schéma :
Les erreurs sont de gravités variées :
1. il manque une potence pour tenir le haut de la colonne à reflux : cela n'est pas grave si l'ensemble est bien organisé
2. le tube en caoutchouc inférieur est trop proche de la source chaude : cela n'est pas parfaitement grave, mais négligent
3. le liquide dans le chauffe ballon est un niveau supérieur au niveau de chauffe : c'est quand même parfois un détail
Mais :
4. il n'y a pas de colliers pour bien tenir les tuyaux en caoutchoux et les empêcher de glisser, ce qui mettrait de l'eau partout
5. il n'y a pas de clips, pour tenir ensemble les éléments
6. il manque absolument une garde, avec du coton de verre et un desséchant
Et le pire : le support élévateur n'est pas déplié, de sorte qu'en cas d'incident, on ne pourrait pas couper le chauffage !
Oui, montrons ce schéma extrait d'un manuel, mais pour bien montrer ce qu'il ne faut pas faire !
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