Hier, de jeunes amis sont venus me présenter un film qu'ils avaient produit, afin de faire la promotion d'un produit (pédagogique). Ils me demandaient ce que j'en pensais, et j'avais des raisons autres qu'esthétiques (au sens de la beauté des images ou du son) de critiquer leur travail : la critique essentielle portait sur le fait que le film restait à la surface des choses, et que le contenu n'était quasiment pas évoqué.
Or je propose toujours de partie du contenu, et de faire l'habillage ensuite. Quand nos amis sont venus, j'étais en compagnie de membres de notre équipe de recherche ; ayant à m'absenter quelques instant, avant de répondre à la question posée, j'ai proposé à mes collègues de faire la critique du film pendant ma courte absence. Il y a eu des critiques qui faisaient consensus, et d'autres qui étaient plus individuelles, de sorte que nos amis auraient pu juger que tout partait dans tous les sens et que, dans ces conditions, autant laisser le film dans l'état où ils l'avaient produit.
Toutefois on ne répétera jamais assez que, dans une telle discussion entre "auteur" et "éditeur", chaque critique doit être prise en compte ; la solution à apporter n'est pas nécessairement celle qui est proposée par ceux qui font la critique, mais les auteurs doivent modifier leur production, d'une façon ou d'une autre. Quand on est gêné, à la lecture d'un texte, à l'écoute de musique, au visionnage d'une vidéo, il demeure ce fait essentiel que l'on est gêné et que l'auteur aurait bien raison d'en tenir compte... à sa façon !
Car la communication, et c'est bien la communication scientifique qui nous intéresse ici, c'est du lien social, de l'art, de la technique.
La technique, cela consiste à faire que les images correspondent au son, qu'il n'y ait pas de fautes de français, etc. Bref, il faut que la mécanique de communication soit huilée.
Tout cela étant fait, il n'en reste pas moins que la communication n'est efficace que si elle nous parle, que si elle est "admissible". Si une musique ne nous plaît pas, nous ne l'écoutons pas. Si un texte ne nous plaît pas, nous ne le lisons pas. Or le "j'aime" relève de l'art : "j'aime parce que c'est beau", ou "c'est beau parce que j'aime", et, là, je suis bien mal placé pour donner des conseils, car bien malin celui qui aurait des recettes de l'art.
Pour le lien social, c'est essentiel pour notre espèce, et, là aussi, il y a des conseils que je ne sais pas bien donner... mais, il y a plusieurs années, il m'a semblé qu'il existait une relation entre l'art et le lien social, et j'ai proposé cette hypothèse que le construit est beau : si nos amis perçoivent la construction de notre oeuvre, il restera ce fait qu'il y a une construction perçue. Or une construction signifie implicitement "j'ai construit pour toi", et il est bien difficile de refuser un tel "je t'aime".
Cela dit, mon hypothèse n'est qu'une hypothèse. En conclusion de ce billet trop court pour un sujet si important, je propose de conserver l'idée que quand nous produisons un document, nous devons penser au lien social, à la construction, qui doit être un peu apparente, mais pas trop, sans quoi on sentirait la construction, la transpiration. La technique, elle, doit être parfaite... mais c'est le plus simple.