Note préliminaire : j'ai résolu de considérer les étudiants comme de jeunes collègues, ou, mieux, comme des collègues, mais pour les besoins de clarté, dans ces billets consacrés aux études, j'utilise l'expression "jeunes collègues" pour désigner les étudiants, et professeurs pour désigner les "professeurs", sans distinction de grade.
A propos d'évaluation, de jeunes collègues revendiquent de l'innovation, et, notamment, l'évaluation sur des cas concrets. Une bonne proposition ? Pas certain, car avant d'avoir fait le compliqué, il faut manifestement savoir-faire le simple.
Je reste donc dubitatif à propos d'une remarque de jeune collègue qui revendiquent que les évaluations de leur formation soient "innovantes". Dans une formation, il y a des connaissances, des compétences, des savoir-faire, des savoir-vivre, des savoir-être... De quoi s'agit-il ?
Une connaissance est une connaissance. Par exemple savoir l'existence de l'entropie est une connaissance utile pour la physico-chimie. Mais savoir seulement l'existence de l'entropie est une connaissance bien superficielle. On peut avoir plus de connaissance en sachant que l'entropie est égale à une forme différentielle, selon la thermodynamique classique, ou bien qu'elle est proportionnelle au logarithme du nombre de configurations microscopiques, en thermodynamique statistique. Avec ces nouvelles connaissances, on a bien avancé pour plusieurs raisons, mais notamment parce que l'on n'a pas seulement plaqué un mot, mais mis une idée, une connaissance, en relation avec d'autres : des potentiels thermodynamique dans un cas, ou la notion de configuration microscopique dans l'autre.
Une connaissance n'est pas une compétence. Une compétence, en l'occurrence, cela voudrait dire que l'on sait calculer l'entropie dans des cas pratiques, par une formule ou par l'autre. Parfois, cela n'est pas difficile, mais parfois ça l'est beaucoup, et cela fait toute la différence entre des compétences superficielles et des compétences plus profondes.
Restons-en ici, pour les besoins de l'analyse, aux connaissances et aux compétences, sans évoquer les savoir-vivre, savoir-faire savoir-être qui mériteraient un autre billet. On comprend, sur notre exemple, qu'il peut y avoir une profondeur de l'évaluation, qui va de pair avec la profondeur des connaissances.
Une évaluation devrait commencer par une évaluation simple et aller de plus en plus loin à mesure que l'on demande de plus en plus de connaissances.
Pour les compétences, il en va de même, et cette fois, le chemin d'évaluation suit celui de la complexité des problèmes où une connaissance est mise en œuvre.
Et c'est ainsi qu'il est bien légitime de proposer d'abord des exercices, avant de proposer des problèmes... et avant de proposer des cas pratiques réels, où toute la complexité du monde tombe sur le dos de l'étudiant.
Innover en matière d'évaluation ? Je veux bien, mais j'ai vraiment besoin des lumières de nos amis pour savoir comment : que proposent-ils pour que l'institution de formation qui délivre des diplômes, c'est-à-dire des certifications de connaissances et de compétences, puisse s'assurer que des connaissances et des compétences sont obtenues ?
Au fond, pour les questions difficiles, je me demande si la charge de la preuve ne revient pas à ceux qui font des propositions très difficiles et, en conséquence, je me retourne vers mes collègues plus jeune : que proposez-vous exactement, concrètement, et comment votre proposition correspond telle aux objectifs initiaux ?
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