C'est amusant, mais il y a à mon propos un malentendu avec des personnes qui sont certainement estimables... et qui me détestent, sans me connaître.
Aujourd'hui, l'affaire refait surface. Et j'analyse les faits :
1. dès le 24 mars 1980, je suis engagé dans une analyse de la cuisne française, avec la plus grande admiration pour (la meilleure partie de) cette dernière.
2. commence la gastronomie moléculaire, qui a initialement pour vocation d'éliminer les scories, et de ne garder que le très bon. Par exemple, puisqu'il n'est pas vrai que les oeufs et l'huile doivent être à la même température, pour faire une mayonnaise, ma proposition d'alors (et d'aujourd'hui) est de laisser tomber les erreurs des anciens temps, afin de faciliter le travail des praticiens. Je ne parviens pas à penser que cette entreprise (du travail, pas de la littérature) soit néfaste...
3. ... même si je me souviens d'un homme de radio, un être remarquable, qui était sceptique, parce qu'il avait le sentiment que l'on était en train de donner le feu aux hommes, et qu'il y aurait des catastrophes. Première incompréhension : de mon côté, je veux simplement arriver à des recettes un peu certaines, qui donnent les résultats escomptés.
4. Il est vrai que cette entreprise est un peu séditieuse, car, d'une part, elle vient contredire les "autorités" que sont les grands chefs. Est-ce grave ? N'ont-ils pas tout à gagner à propager des idées utiles, surtout quand ils appartiennent à des cercles pour lesquelles la "transmission" est une des valeurs principales ?
5. Et puis, les chefs ne sont pas très bons "techniquement" (vite passer au paragraphe suivant, et sourire un peu) : aucun ne sait faire, comme moi, un mètre cube de blancs en neige, ou bien 60 litres de mayonnaise avec un seul oeuf... sans compter toutes les inventions techniques que je donne chaque mois sur le site de Pierre Gagnaire
6. En revanche, ayant introduit que l'idée que la cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique, on voit que je fais bien la part des choses, et que la question principale, ce n'est donc pas la technique. Pour l'art, je suis nul, et pour l'amour, je me suis même repris en nommant cela "lien social" : pas sûr d'être très bon.
7. Tout cela étant dit, il faut quand même avouer que, dès 1980, je propose aussi d'introduire en cuisine des ustensiles utilisés dans les laboratoires de chimie : s'il faut chauffer, chauffons précisément ; s'il faut émulsionner, émulsionnons correctement, efficacement ; s'il faut broyer, broyons... C'est ce qui a engendré la "cuisine moléculaire", qui a engendré un style de cuisine nouveau. Peut-on critiquer un nouveau style, en art ? Et pourquoi le critiquerait-on ? Après tout, personne n'est obligé d'écouter Debussy, si l'on préfère Mozart ; personne n'est obligé de regarder Zao Wu Ki si l'on préfère Rembrandt... Personne n'est obligé de manger de la cuisine moléculaire si l'on préfère la cuisine française classique !
8. Autrement dit, je ne me sens pas en faute : j'ai essayé de comprendre, j'ai essayé d'aider mes amis cuisiniers à faire mieux techniquement, j'ai essayé d'aider mes amis cuisiniers à comprendre que la cuisine, c'était surtout de l'amour...
9. Alors pourquoi certains me sont-ils si opposés ? Car c'est un fait que, périodiquement, je rencontre un cuisinier, un journaliste, etc. qui me "déteste". Bien souvent, leur discours est alambiqué, à mon propos, et il y a surtout cette détestation étrange.
10. Bien sûr, je ne suis pas assez naïf pour penser que je peux être l'ami de tous, mais je trouve dommage de perdre des amis qui sont apparemment des personnes droites, intelligentes, cultivées...
11. A côté desquelles il y a bien sûr quelques malhonnêtes dont mes travaux sapent les entreprises, mais pour ceux-là, je m'en moque complètement : les chiens aboient et la caravane passe.
12. Donc revenons vite aux personnalités les plus intéressantes : comment est-il possible qu'elles me soient opposées ? Si nous partageons un émerveillement pour l'art culinaire, cela ne suffit-il pas ?
13. Car on n'oublie pas que je ne touche pas un centimes de mes initiatives, ni notoriété supplémentaire... dont je me moque, puisque ce qui m'intéresse, ce sont mes travaux, mes avancées, mes résultats, mes compréhensions.
Finalement, il y a donc des malentendus. Pourquoi ?
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