Un journaliste m'interroge à propos de mon engagement dans la transmission, qu'il s'agisse de vulgarisation scientifique à l'attention du public général ou des étudiants, des élèves...
Je réponds que tout cela prend du temps sur ma recherche scientifique et que c'est en quelque sorte bien malgré moi que je me livre à ses transmissions, que je cherche pourtant à faire bien selon le bon principe que tout ce qui mérite d'être fait mérite d'être bien fait.
La vraie réponse est de nature politique : j'ai décidé il y a plus de 25 ans que je ne me tiendrai plus au courant des "actualités", ni les journaux, ni radio ni télévision ni internet, parce que je considère que cela est en quelque sorte inutile : je sais parfaitement qu'il y a dans le monde des guerres, des tyrans, des épidémies, des catastrophes naturelles, des crimes, et cetera... et de toute façon, il est bien impossible de ne pas être au courant quand nos proches nous informent.
Et tout ce temps épargné, je l'investis dans une action politique qui est celle de la transmission.
Je considère en effet que j'ai une chance extraordinaire de pouvoir faire de la recherche scientifique, et c'est une sorte de remerciement que cet engagement politique dans la transmission.
Alors oui, cela me prend du temps... et au fond pas tant que cela car voulant faire bien, j'ai aussi appris à vouloir faire efficace et les moyens modernes nous permettent de l'être bien plus que par le passé : aujourd'hui, on peut dicter et voir ses paroles écrites directement.
De sorte que l'exercice consiste plutôt à mieux penser, à organiser son discours par avance.
Et là, il y a la question de la construction du discours qui n'est pas si éloignée que cela de la réflexion scientifique : il s'agit de bien manier les concepts, de bien les penser, de bien les réfléchir bien, de bien les enchaîner et le travail est en quelque sorte le même.
Bien sûr, il n'y a pas les mêmes objets, ni l'expérimentation, ni l'aspect mathématique (il faudrait dire calculatoire) mais il y a ce raisonnement qui est essentiel, cette réflexion, cet apprentissage de l'autocritique.
Pour l'enseignement, je ne cesse de penser à Emil Borel, qui faisait sa recherche pendant ses cours, faisant prendre ces derniers en notes par des élèves, avec qui il publiait le livre du cours. Aucune perte de temps !
Sans compter que, quand je parle, quand j'écris, c'est l'occasion de surveiller ce que je dis, d'être à l'affût de ma propre pensée !
Hervé This
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
vendredi 7 novembre 2025
La question la transmission : pourquoi j'y passe du temps
jeudi 6 novembre 2025
S'accrocher à un sens bien défini des mots ?
Dans les commentaires de mon blog, il y en a un qui dit que ma volonté de m'accrocher à un sens unique des mots n'est pas tenable.
Cela me fait sourire car plus j'explore cette question, plus je crois au contraire qu'elle est tenable et utile.
Je me réfère souvent à Antoine Laurent de Lavoisier qui disait que la science s'intéresse aux phénomènes et que les phénomènes sont maniés intellectuellement à l'aide des mots, de sorte que, disait Lavoisier, on ne pourra pas perfectionner la science sans perfectionner le langage et vice et versa.
De fait, il y a toujours eu en sciences l'introduction de mots nouveaux.
Par exemple c'est Faraday qui a introduit les mots cathode, anode, électrode, et d'autres.
Et d'autres scientifiques ont introduit de nouveaux mots pour de nouveaux concepts.
Ce que je sais aussi, c'est que les mots ont éventuellement une connotation mais qui se distingue que leur signification.
Je sais aussi qu'ils ont une étymologie et que l'on a tout intérêt à être en phase avec cette dernière sans quoi on construit de drôles de chimères.
Je suis de ceux qui revendiquent que le mot rutilant signifie rouge et non pas brillant, le rutile étant un minéral rouge.
Je suis de ceux qui proposent de penser que la sophistication est du frelatage, car que mon interlocuteur le veuille ou non, on parle bien de la sophistication des vins.
Je suis de ceux qui font la différence entre les gourmets et les gourmands, parce que je sais que les gourmets sont une profession assermentée de professionnels qui vont choisir le vin pour les négociants.
Je suis de ceux qui font la différence entre la rémoulade, où la moutarde est tensioactive, et la mayonnaise...
Bref, je suis de ceux qui pensent que la bonne monnaie doit chasser la mauvaise et que ce n'est pas une sorte de laxisme paresseux qui fera grandir nos amis.
mercredi 5 novembre 2025
Comment éviter aux oignons de brûler ?
Comment éviter des oignons de brûler ?
Pour répondre à cette question, je crois qu'il suffit de savoir que tant que de l'eau est présente dans une casserole, la température n'augmente pas au-delà de 100 degrés, et l'oignon ne brûle pas.
De fait, des oignons sont des tissus végétaux emplis d'eau et si l'on chauffe doucement, l'eau qui s'évapore limite la température à 100 degrés et les oignons de brûlent pas.
Cela correspond aux observations que je fais quand je cuisine : je peux chauffer très longuement des oignons qui ne brûlent jamais à condition que le feu soit suffisamment doux pour que l'exsudation de l'eau soit plus rapide que son évaporation.
D'ailleurs, c'est le même phénomène qui commande le brunissement des viandes que l'on fait sauter : si l'on chauffe doucement, la viande se contracte, ce qui fait sortir le jus et limite la température à 100 degrés, auquel cas la viande ne brunit pas.
Mais si l'on chauffe plus vite, alors l'évaporation de l'eau qui sort de la viande qui se contracte est plus rapide que la sortie de cette eau, et la température peut augmenter : j'ai mesuré jusqu'à 360 degrés sous un steak.
Dans un tel cas, la viande brunit évidemment !
mardi 4 novembre 2025
Empoter à chaud ou à froid ?
Le pot-au-feu : à l'eau chaude ou à l'eau froide ?
Dans des conférences que je faisais, j'évoquais cette question et je donnais des citations d'auteur du passé qui, initialement, recommandaient absolument d'empoter à chaud.
C'est avec le livre de Brillat-Savarin en 1825 que l'on voit apparaître le conseil d'empoter à froid et de chauffer doucement.
Mais n'est-il pas étonnant que cela naisse sous la plume d'un juriste ? Car Brillat-Savarin n'était pas cuisinier, et son livre est pure fiction !
Après le grand succès de la Physiologie du goût, on s'est mis à empoter à chaud et l'on a donné des tas de raisons pour le faire : l'albumine aurait coagulé en surface et empêché les jeux de sortir, ce qui est complètement faux et d'autres raisons tout aussi imaginaires.
Ce que je sais de source sûre, c'est que j'ai moi-même fait l'expérience de cuire la même viande soit dans l'eau chaude, soit dans l'eau froide ; je pesais périodiquement les morceaux. Partant de la même masse, les morceaux mis dans l'eau chaude perdaient davantage, ce qui est contraire à la théorie de Brillat-Savarin !
Mais de toute façon, après 150 minutes, les morceaux à l'eau chaude et à l'eau froide avait retrouvé exactement la même masse, preuve que c'est surtout la température qui détermine l'expulsion des jus par contraction de la viande à la chaleur.
Not too late : Maple is an incredible software !
Certains d'entre vous savent peut-être que j'ai une grande passion pour Maple, qui me facilite la vie, pour écrire, pour penser, pour faire de la chimie, pour calculer, pour traiter des images, etc.
Et je reçois ceci :
Envoyé : mardi 4 novembre 2025 17:49
À : Herve This
Objet : Maple Conference 2025 Starts Tomorrow - Don't Miss Out
The Maple Conference 2025 is almost here, happening virtually from November 5-7, and we’d like your help making this our most impactful year yet.
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If you haven’t already, there’s still time to register and engage in three days of talks, workshops, and discussions examining emerging developments in mathematics technology and its impact on education and research.
With the conference kicking off tomorrow, here are some ways to stay engaged and help spread the word:
- Share the Conference Datasheet with colleagues and students who may be interested - sessions are open to all skill levels
- Take a moment to explore the full Conference Agenda and see which sessions you won't want to miss
lundi 3 novembre 2025
Qui a inventé le feuilletage inversé ?
On m'interroge : qui a inventé le feuilletage inversé ?
Et je dois ici répondre que je n'en sais rien !
Il va me falloir donc aller chercher, creuser dans les livres de pâtisserie à la recherche de cette préparation.
Comme elle me semble récente, je commencerai donc par le Larousse gastronomique avant de passer au livre de Pierre lacam et de remonter ensuite au cours du temps, mais je n'ai pas souvenir de feuilletage inversé dans les livres anciens