Aujourd'hui, le New York Times parle de cuisine note à note :
http://www.nytimes.com/2015/09/17/t-magazine/herve-this-nbn-future-food.html?_r=0
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
jeudi 17 septembre 2015
Dans le New York TImes
Aujourd'hui, le New York Times parle de cuisine note à note :
http://www.nytimes.com/2015/09/17/t-magazine/herve-this-nbn-future-food.html?_r=0
http://www.nytimes.com/2015/09/17/t-magazine/herve-this-nbn-future-food.html?_r=0
dimanche 13 septembre 2015
Sur d'autres de mes blogs
Quels travaux sont-ils de la gastronomie moléculaire, et lesquels n'en sont-ils pas ?
Maisavant toute chose, je veux prendre la précaution -avec insistance- de dire que...
La suite sur :
http://www.agroparistech.fr/Quels-travaux-sont-ils-de-la.html
Sur d'autres de mes blogs
Quels travaux sont-ils de la gastronomie moléculaire, et lesquels n'en sont-ils pas ?
Maisavant toute chose, je veux prendre la précaution -avec insistance- de dire que...
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http://www.agroparistech.fr/Quels-travaux-sont-ils-de-la.html
lundi 7 septembre 2015
Non, le citral n'a pas une odeur d'herbe coupée !
Dans la revue Que choisir de septembre 2015, un article à charge contre les "arômes", que je propose de nommer des compositions ou extraits.
Il y est dit que la chimie est un "nouvel envahisseur", que les arômes sont "très rarement issus de la plante ou du fruit dont ils revendiquent la flaveur".
La flaveur ? Connais pas ! Moi, je connais le goût, comme indiqué dans plusieurs de mes textes. Et puis, l'arôme qui donnerait de la flaveur ou vice versa ? On n'y comprend plus rien.
Plus loin, on nous indique que 2800 molécules ont été isolées : je suppose, pour commencer, qu'il s'agit de composés, plutôt que de molécules, et, ensuite, je suis heureux de dire que le nombre est faux d'au moins la moitié (8000 en 2013, je tiens la référence à la disposition de qui me la demande). Evidemment, la cuisine moléculaire en prend un coup : tiens donc, tant qu'à faire dans le démagogique, pourquoi pas ?
Inversement, nos journalistes signalent que ces produits ne présentent pas de risque : c'est honnête. Hélas, dans le paragraphe suivant, ils parlent de "falsification généralisée du goût des aliments". Tiens, une question : la cuisine, qui donne du goût de poulet rôti au poulet, est-elle une méthode de falsification du goût ?
Un peu plus loin : la question des "doses homéopathiques". Surtout dans un dossier de ce type, ce serait bon de ne pas confondre des doses très petites, et des doses homéopathiques, où les préparations ne contiennent aucune des molécules actives (et on se demande bien, alors, comment elles pourraient agir, mais c'est une autre affaire).
Enfin, et c'est surtout le point qui me touche : non, il n'est pas exact que j'ai dit que du citral dans l'huile d'olive donne un arôme d'herbe coupée. Le citral a une odeur d'agrume. En revanche, le 3-cis-hexen-1-ol est merveilleux.
PS. Pour ceux qui le souhaitent, voici ma position quant à l'usage des termes, pour décrire le goût :
Il y est dit que la chimie est un "nouvel envahisseur", que les arômes sont "très rarement issus de la plante ou du fruit dont ils revendiquent la flaveur".
La flaveur ? Connais pas ! Moi, je connais le goût, comme indiqué dans plusieurs de mes textes. Et puis, l'arôme qui donnerait de la flaveur ou vice versa ? On n'y comprend plus rien.
Plus loin, on nous indique que 2800 molécules ont été isolées : je suppose, pour commencer, qu'il s'agit de composés, plutôt que de molécules, et, ensuite, je suis heureux de dire que le nombre est faux d'au moins la moitié (8000 en 2013, je tiens la référence à la disposition de qui me la demande). Evidemment, la cuisine moléculaire en prend un coup : tiens donc, tant qu'à faire dans le démagogique, pourquoi pas ?
Inversement, nos journalistes signalent que ces produits ne présentent pas de risque : c'est honnête. Hélas, dans le paragraphe suivant, ils parlent de "falsification généralisée du goût des aliments". Tiens, une question : la cuisine, qui donne du goût de poulet rôti au poulet, est-elle une méthode de falsification du goût ?
Un peu plus loin : la question des "doses homéopathiques". Surtout dans un dossier de ce type, ce serait bon de ne pas confondre des doses très petites, et des doses homéopathiques, où les préparations ne contiennent aucune des molécules actives (et on se demande bien, alors, comment elles pourraient agir, mais c'est une autre affaire).
Enfin, et c'est surtout le point qui me touche : non, il n'est pas exact que j'ai dit que du citral dans l'huile d'olive donne un arôme d'herbe coupée. Le citral a une odeur d'agrume. En revanche, le 3-cis-hexen-1-ol est merveilleux.
PS. Pour ceux qui le souhaitent, voici ma position quant à l'usage des termes, pour décrire le goût :
Goût,
saveur, odeur, arôme ?
Hervé
This
Le
29 avril 2009 s’est tenue à l’Académie d’agriculture de
France une séance publique où les mots du goût ont été discutés.
A l’origine de cette rencontre, deux observations et une idée.
La
première observation : lors de journées plénières du club ECRIN
« Arômes et formulation », des collègues pourtant
spécialistes des « arômes » ou de l’analyse
sensorielle ont désigné par le même mot « arôme » des
objets différents. Pour certains, il s’agissait de l’odeur
perçue par la voie rétronasale, qui relie le nez à l’arrière de
la bouche ; pour d’autres, il s’agissait de la sensation
donnée par les molécules odorantes ; pour d’autres encore,
le terme désignait un mélange de sensations données par les
récepteurs olfactifs et par les récepteurs des papilles, sur la
langue et dans la bouche ; pour d’autres encore… Quelle
confusion !
La
seconde observation : nombre d’articles, notamment dans le
Journal of Agricultural and Food Chemistry, une des revues
importantes dans le champ de la « chimie des aliments et du
goût », étudient les saveurs en conservant le point de vue de
la théorie des quatre saveursi…
alors que l’on sait cette théorie fausse depuis des décennies :
l’acide glycirrhiziqueii,
l’éthanol, le bicarbonate de sodium, l’acide glutamiqueiii…
ne sont ni salés, ni sucrés, ni acides, ni amers ; l’aspartame
n’a pas la même saveur que le saccharoseiv,
et les cellules qui réagissent au benzoate de dénatorium (un
composé « amer ») ne réagissent pas à d’autres
composés pourtant également considérés comme amersv.
Au
total, il y a donc beaucoup de confusion, notamment parce que les
termes sont insuffisants. Or le père de la chimie moderne,
Antoine-Laurent de Lavoisier, a bien mis en avant une idée
importante dans l’introduction de son Traité élémentaire de
chimievi :
«L'impossibilité
d'isoler la nomenclature de la science, et la science de la
nomenclature, tient à ce que toute science physique est
nécessairement fondée sur trois choses : la série des faits qui
constituent la science, les idées qui les rappellent, les mots qui
les expriment (...) Comme ce sont les mots qui conservent les idées,
et qui les transmettent, il en résulte qu'on ne peut perfectionner
les langues sans perfectionner la science, ni la science sans le
langage. »
La « chimie des aliments et du goût » doit donc assainir
sa terminologie pour progresser.
Les
molécules odorantes
Évidemment,
en matière sensorielle, ce sont les récepteurs qui doivent imposer
les motsvii,
et c’est la raison pour laquelle beaucoup de science est à faire.
Depuis longtemps, on sait que le nez comporte des récepteurs
olfactifsviii,
qui peuvent se lier, directement ou indirectement, à des molécules
présentes dans l’air. Directement, par un mécanisme clé-serrure,
ou indirectement, puisque l’on a découvert des olfactory binding
proteins, auxquelles des molécules se lient avant de se lier aux
récepteursix.
Quel
que soit le détail de la stimulation des récepteurs, on perçoit
une « odeur », et cela justifie que les molécules qui
suscitent une odeur soient dites « odorantes ». Pas
« aromatiques », toutefois, puisque l’arôme est
l’odeur d’une plante aromatique, dite encore aromate ! De
ce fait, il faut sans doute corriger nos pratiques… et nos
législations, puisqu’elles nomment très abusivement arômes des
choses qui n’en sont pas, que l’on parle des odeurs ou bien des
produits obtenus soit par assemblage de composés (synthétisés ou
extraits de matières végétales ou animales). Insistons,
d’ailleurs, pour refuser à tous ces produits, qu’ils contiennent
ou non des composés de synthèse, le qualificatif de « naturel » :
n’est naturel que ce qui n’a pas fait l’objet de transformation
par l’être humain. Ces « compositions odoriférantes »,
ou ces « extraits odoriférants » ne sont pas naturels,
et c’est tromper le consommateur que de le lui laisser croire.
Experts, n’oublions pas que la base d’un commerce sain, ce sont
des produits « loyaux, marchands et francs » !
La
saveur, les sensations trigéminales
La
question de la saveur semble plus simple, à cela près que l’on
vient de découvrir, en plus des récepteurs des papilles, auxquelles
se lient des molécules qui peuvent se dissoudre dans la salive, des
récepteurs qui captent les acides gras insaturés à longue chaînex.
La découverte est tout à fait remarquable, parce qu’elle
s’accompagne de la mise en évidence de toute une chaîne
physiologique qui pourrait faire conclure qu’il existe une saveur
particulière des acides gras insaturés à longue chaîne. Cette
découverte impose-t-elle l’introduction d’un terme nouveau,
sachant que, contrairement aux autres molécules sapides que nous
reconnaissons plus classiquement, il n’y a pas de saveur
reconnaissable comme les autres ?
D’autre
part, comment nommer le sens correspondant à la perception des
saveurs ? On parle encore parfois de « gustation »,
mais la gustation devrait être la perception du goût… or nous
parlons ici de saveurs. Doit-on plutôt parler de « sapiction »,
par exemplexi ?
Et de papilles sapictives ?
D’autres
molécules ont des récepteurs qui ne sont ni olfactifs, ni
sapictives, mais associés à une voie nerveuse spécifique, le nerf
trijumeau. C’est ainsi que nous percevons le piquantxii,
le fraisxiii…
D’ailleurs, il faut indiquer que les molécules peuvent stimuler
les récepteurs de plusieurs façons. Par exemple, le menthol sent la
menthe, certes, mais il suscite aussi la sensation de fraîcheur.
L’éthanol a une odeur, mais pas seulement, etc.
D’ailleurs,
nous avons omis d’évoquer l’astringence, qui a fautivement été
considérée comme une saveur, pendant longtemps, et qui correspond à
une sensation d’assèchement de la bouche, notamment quand des
protéines salivaires se lient à des composés phénoliques, tels
ceux qui sont présents dans certains vins et qui sont souvent,
abusivement, nommés taninsxiv.
Le
goût, dans tout cela ? C’est un fait de langage classique de
dire que, quand on mange un aliment, on sent son goût. Le goût est
donc la sensation synthétique que nous avons quand nous mangonsxv,
et ce goût résulte donc de la stimulation de tous les récepteurs à
la fois : olfactifs, sapictifs, trigéminaux… mais aussi des
récepteurs mécaniques, qui nous donnent la sensation de la
consistance, des récepteurs thermiques, etc.
Perçoit-on
un « goût de banane » quand on boit un vin ? Ce
goût résulte à la fois des sensations olfactives, sapictives,
trigéminales, etc.
A
bas la flaveur
Faut-il
parler de « flaveur », comme cela a été proposéxvi ?
Une norme ISO la définit comme « l’ensemble complexe des
sensations olfactives, gustatives et trigéminales perçues au cours
de la dégustation »… mais nous devons critiquer la norme
ISO. Ne définit-elle pas la couleur comme « la sensation
produite par la stimulation de la rétine par des ondes lumineuses de
longueur d’onde variables » ? Quoi, des longueurs d’onde
variables ? Ce serait une belle découverte, si la lumière, en
se propageant, pouvait changer de longueur d’onde !
D’ailleurs, les incohérences abondent, dans cette norme, puisque,
par exemple, les « saveurs élémentaires » seraient des
saveurs « reconnues », ou que l’on nommerait
« renforçateur de flaveur (ou de goût) les substances
intensifiant la flaveur de certains produits sans posséder cette
flaveur ». Ici, les deux mots « flaveur » et
« goût » sont confondus ! Achevons avec la
définition de « transparent », qui évoque, comme il y a
plusieurs siècles, des « rayons lumineux » !
Faut-il
vraiment supporter ces définitions idiotes ? Et devons-nous
admettre le terme de « flaveur » ? Je crois que non,
et voici les raisons. D’une part, il faut savoir que le mot
« flavour » existe en langue anglaise, où il désigne…
la sensation synthétique… qu’est donc le goûtxvii.
Pas besoin d’invoquer la flaveur, par conséquent, pour désigner
ce qui a déjà un nom en langue française. Faut-il réserver le nom
de « flaveur » à l’ensemble des « sensations
olfactives, gustatives et trigéminales » ? Il faut savoir
que cet ensemble de sensations n’est d’abord pas perceptible,
puisque l’on ne saurait les séparer des sensations de consistance
ou de chaleur, d’une part. D’autre part, cette « flaveur »
ne serait pas mesurable, puisqu’elle serait la résultante de
stimulations de récepteurs différents.
Je
propose de penser que quelque chose qui n’est ni mesurable ni
perceptible n’existe pas ! Il faut donc abattre le mot
« flaveur », le bannir de notre vocabulaire technique ou
courant.
Un
débat à organiser
Au
total, puisque je sais que les collègues sont des personnes
intelligentes auxquelles il est tout à fait maladroit de vouloir
imposer une solution, je crois qu’il n’est pas inutile de poser
la question des avantages et des inconvénients, afin que nous
décidions collectivement.
La
position qui consiste à penser que la flaveur existe, tout d’abord,
et que c’est la somme de la saveur, de l’odeur, des sensations
trigéminales, conduit à admettre que le goût serait la sensation
donnée par les papilles. Le mot « saveur » est alors
éliminé, alors que c’est un mot de la langue française.
L’avantage est que le mot « goût » est alors cohérent
avec « récepteurs gustatifs », pour parler des papilles
(mais ceux-ci sont encore mal connus : pensons aux acides gras
insaturés à longue chaîne). En revanche, l’inconvénient de
cette position, c’est que l’on élimine un mot classique, qui a
sa place, pour introduire un mot inconnu, sauf de spécialistes.
D’autre part, la flaveur désignerait alors quelque chose qui n’est
ni mesurable, ni perceptible, dans toute sa pureté.
Évidemment,
si l’on adopte maintenant la position qui stipule que le goût est
la sensation synthétique, il y a l’inconvénient que les
récepteurs des papilles doivent être nommés « sapictifs »,
ce qui est un mot nouveau, mais on retrouve alors dans « sapictif »
le mot « saveur », qui est bien attesté pour désigner
la sensation donnée par les papilles. De surcroît, on reste proche
de la langue classique et de la langue populaire.
D’autre
part, faut-il utiliser le mot « arôme » pour désigner
les odeurs, et utiliser l’expression « composé d’arôme »
pour désigner les molécules odorantes ? Il n’y a pas
d’avantage à cette solution, mais il y a beaucoup d’inconvénient,
comme on l’a vu déjà. Ajoutons seulement que, dans la discussion
précédente à ce propos, d’autre part, on a omis de signaler le
qualificatif « aromatique » qui serait alors donné aux
molécules odorantes viendrait heurter le qualificatif « aromatique »
donné par les chimistes au benzène et à ses cousins. Ajoutons
aussi que l’emploi du mot « arôme » pour le vin est…
faible, puisque le nom de l’odeur du vin est le « bouquet ».
Et signalons enfin qu’il n’existe pas d’inconvénient à
utiliser le mot « odorant », et non « aromatique »,
pour désigner les molécules qui stimulent les récepteurs
olfactifs… avec en outre une cohérence avec le monde anglo-saxon,
qui utilisent aujourd’hui, dans les publications scientifiques, le
terme « odorant », parlant de odorant molecules ,
ou simplement d’odorants.
Reste
la question des « arômes » des sociétés qui font des
extraits ou des compositions de molécules susceptibles de donner du
goût aux produits alimentaires. Je ne crois pas utile de revenir sur
l’emploi du terme « naturel », qui me semble tout à
fait condamnable, notamment parce que l’on nomme « artificiel »
(définition du dictionnaire) ce qui a fait l’objet d’une
préparation par l’être humain. Or ces produits sont des
préparations, et, de ce fait, ils ne sont certainement pas naturels,
qu’ils contiennent exclusivement des composés extraits, ou bien
qu’ils incluent des composés de synthèse.
Certes,
le mot « arôme » correspond à une réglementation…
mais je propose de changer les réglementations qui doivent l’être !
De surcroît, il y a la confusion de noms entre le produit, d’une
part, et la sensation, d’autre part. Confusion, donc possibilité
de tromperie… et le public ne s’y trompe pas, à critiquer
l’emploi de ces « arômes », supportant à peine ceux
qui sont dits « naturels ».
Quelle
terminologie employer ? L’anglais distingue la flavour, qui
est le goût, et les flavourings, qui sont ces compositions et
extraits. Au fait, pourquoi ne pas faire aussi la distinction ?
Introduire un nom nouveau et le proposer aux législateurs ? Ce
n’est pas bien difficile, si la volonté est présente, de ne pas
tromper. Je propose « compositions gustatives », et
« extraits gustatifs ». Pourquoi pas « compositions
odoriférantes » et « extraits odoriférants » ?
Parce que, on le sait, nombre de molécules ne stimulent pas
seulement les récepteurs olfactifs. Évidemment, au passage, on
bannirait le mot « naturel »… et je crois que notre
pays y gagnerait.
i
Naissance et obscolescence du concept de quatre qualities en
gestation, Annick Faurion, Journ. D’Agric. Et de Bota. Appl., vol
XXXV, 1988, 1-19
ii
Belitz and Grosch, Food Chemistry, Springer
Verlag, Heidelberg, p. 412.
iii
An amino-acid taste
receptor, Greg Nelson, Jayaram Chandrashekar, Mark A. Hoon, Luxin
Feng, Grace Zhao, Nicholas J. P. Ryba, Charles Zuker, Nature, vol
416, 14 mars 2002, pp 199-202.
iv
Faurion
A. et Mac Leod P., Sweet
taste receptor mechanisms, Progress
in Sensory Physiology, vol 8.
v
Alejandro
Caicedo and Stephen D. Roper, Taste receptor cells that discriminate
between bitter stimuli, Science, vol 291, 23 february 2001,
1557-1560.
vi
A. L. de Lavoisier, Traité élémentaire de chimie, Cuchet, Paris,
1793.
vii
A. Uziel, J. G.
Smadja, A. Faurion, Physiologie
du goût, Encycl.
Med. Chir. (Paris, France), Otorhino-laryngologie, 2-1987, 20490
C10.
viii
K. Raming, J. Krieger, J. Strotmann, I. Boekhoff,
S. Kubick, C. Baumstark, H. Breer, Cloning
and expression of odorant receptors,
Nature, 28 janvier 1993, 361, 353-356.
ix
.
Briand, Loiec; Eloit, Corinne;
Nespoulous, Claude; Bezirard, Valerie; Huet, Jean-Claude; Henry,
Celine; Blon, Florence; Trotier, Didier; Pernollet, Jean-Claude ,
Evidence of an odorant binding protein in the human olfactory
mucus : location, structural characterization, and
odorant-binding properties, Biochimie et Structure des Proteines
Unite de Recherches INRA 477, Jouy-en-Josas, Fr. Biochemistry
(2002), 41(23), 7241-7252. CODEN: BICHAW
ISSN: 0006-2960. Journal written in English. CAN 137:105377
AN 2002:360381 CAPLUS
Isabelle
Niot, Jean-Pierre Montmayeur, Philippe Besnard, CD36,
un sérieux jalon
sur la piste du goût du gras, M/S n°
4, vol. 22, avril 2006.
xi
Hervé This, Casseroles et éprouvettes, Pour la Science, Paris,
2003.
xii
Pourquoi le piment brûle, Bernard Calvino, Marie Conrat. Pour la
Science, N0366, avril 2008, pp. 54-61
xiv
Binding
of selected phenolic compound to proteins, Harshadari M Rawel,
Karina Meidtner, Jürgen Kroll, J. Agric. Food Chem., 14 april 2005,
DOI 10.1021/jf0480290 5021-8561 (04)08029-X
xv
A brief history of electronic nose, Julian W.
Gardner, Philip N. Bartlett, Sensors and Actuators B, 18-19 (1994,
211-20.
xvi
A. Pierson and J. Le Magnen, Etude quantitative du
processus de régulation des réponses alimentaires chez l'homme,
Physiology & Behavior, Volume 4, Issue 1, January 1969, Pages
61-67.
xvii
Julie A Mennella, Gary K Beauchamp, Early flavor
experiences : when do they start ? Nutrition Today, vol
29, N°5, Sept/oct 1994, 25-31.
Non, le citral n'a pas une odeur d'herbe coupée !
Dans la revue Que choisir de septembre 2015, un article à charge contre les "arômes", que je propose de nommer des compositions ou extraits.
Il y est dit que la chimie est un "nouvel envahisseur", que les arômes sont "très rarement issus de la plante ou du fruit dont ils revendiquent la flaveur".
La flaveur ? Connais pas ! Moi, je connais le goût, comme indiqué dans plusieurs de mes textes. Et puis, l'arôme qui donnerait de la flaveur ou vice versa ? On n'y comprend plus rien.
Plus loin, on nous indique que 2800 molécules ont été isolées : je suppose, pour commencer, qu'il s'agit de composés, plutôt que de molécules, et, ensuite, je suis heureux de dire que le nombre est faux d'au moins la moitié (8000 en 2013, je tiens la référence à la disposition de qui me la demande). Evidemment, la cuisine moléculaire en prend un coup : tiens donc, tant qu'à faire dans le démagogique, pourquoi pas ?
Inversement, nos journalistes signalent que ces produits ne présentent pas de risque : c'est honnête. Hélas, dans le paragraphe suivant, ils parlent de "falsification généralisée du goût des aliments". Tiens, une question : la cuisine, qui donne du goût de poulet rôti au poulet, est-elle une méthode de falsification du goût ?
Un peu plus loin : la question des "doses homéopathiques". Surtout dans un dossier de ce type, ce serait bon de ne pas confondre des doses très petites, et des doses homéopathiques, où les préparations ne contiennent aucune des molécules actives (et on se demande bien, alors, comment elles pourraient agir, mais c'est une autre affaire).
Enfin, et c'est surtout le point qui me touche : non, il n'est pas exact que j'ai dit que du citral dans l'huile d'olive donne un arôme d'herbe coupée. Le citral a une odeur d'agrume. En revanche, le 3-cis-hexen-1-ol est merveilleux.
PS. Pour ceux qui le souhaitent, voici ma position quant à l'usage des termes, pour décrire le goût :
Il y est dit que la chimie est un "nouvel envahisseur", que les arômes sont "très rarement issus de la plante ou du fruit dont ils revendiquent la flaveur".
La flaveur ? Connais pas ! Moi, je connais le goût, comme indiqué dans plusieurs de mes textes. Et puis, l'arôme qui donnerait de la flaveur ou vice versa ? On n'y comprend plus rien.
Plus loin, on nous indique que 2800 molécules ont été isolées : je suppose, pour commencer, qu'il s'agit de composés, plutôt que de molécules, et, ensuite, je suis heureux de dire que le nombre est faux d'au moins la moitié (8000 en 2013, je tiens la référence à la disposition de qui me la demande). Evidemment, la cuisine moléculaire en prend un coup : tiens donc, tant qu'à faire dans le démagogique, pourquoi pas ?
Inversement, nos journalistes signalent que ces produits ne présentent pas de risque : c'est honnête. Hélas, dans le paragraphe suivant, ils parlent de "falsification généralisée du goût des aliments". Tiens, une question : la cuisine, qui donne du goût de poulet rôti au poulet, est-elle une méthode de falsification du goût ?
Un peu plus loin : la question des "doses homéopathiques". Surtout dans un dossier de ce type, ce serait bon de ne pas confondre des doses très petites, et des doses homéopathiques, où les préparations ne contiennent aucune des molécules actives (et on se demande bien, alors, comment elles pourraient agir, mais c'est une autre affaire).
Enfin, et c'est surtout le point qui me touche : non, il n'est pas exact que j'ai dit que du citral dans l'huile d'olive donne un arôme d'herbe coupée. Le citral a une odeur d'agrume. En revanche, le 3-cis-hexen-1-ol est merveilleux.
PS. Pour ceux qui le souhaitent, voici ma position quant à l'usage des termes, pour décrire le goût :
Goût,
saveur, odeur, arôme ?
Hervé
This
Le
29 avril 2009 s’est tenue à l’Académie d’agriculture de
France une séance publique où les mots du goût ont été discutés.
A l’origine de cette rencontre, deux observations et une idée.
La
première observation : lors de journées plénières du club ECRIN
« Arômes et formulation », des collègues pourtant
spécialistes des « arômes » ou de l’analyse
sensorielle ont désigné par le même mot « arôme » des
objets différents. Pour certains, il s’agissait de l’odeur
perçue par la voie rétronasale, qui relie le nez à l’arrière de
la bouche ; pour d’autres, il s’agissait de la sensation
donnée par les molécules odorantes ; pour d’autres encore,
le terme désignait un mélange de sensations données par les
récepteurs olfactifs et par les récepteurs des papilles, sur la
langue et dans la bouche ; pour d’autres encore… Quelle
confusion !
La
seconde observation : nombre d’articles, notamment dans le
Journal of Agricultural and Food Chemistry, une des revues
importantes dans le champ de la « chimie des aliments et du
goût », étudient les saveurs en conservant le point de vue de
la théorie des quatre saveursi…
alors que l’on sait cette théorie fausse depuis des décennies :
l’acide glycirrhiziqueii,
l’éthanol, le bicarbonate de sodium, l’acide glutamiqueiii…
ne sont ni salés, ni sucrés, ni acides, ni amers ; l’aspartame
n’a pas la même saveur que le saccharoseiv,
et les cellules qui réagissent au benzoate de dénatorium (un
composé « amer ») ne réagissent pas à d’autres
composés pourtant également considérés comme amersv.
Au
total, il y a donc beaucoup de confusion, notamment parce que les
termes sont insuffisants. Or le père de la chimie moderne,
Antoine-Laurent de Lavoisier, a bien mis en avant une idée
importante dans l’introduction de son Traité élémentaire de
chimievi :
«L'impossibilité
d'isoler la nomenclature de la science, et la science de la
nomenclature, tient à ce que toute science physique est
nécessairement fondée sur trois choses : la série des faits qui
constituent la science, les idées qui les rappellent, les mots qui
les expriment (...) Comme ce sont les mots qui conservent les idées,
et qui les transmettent, il en résulte qu'on ne peut perfectionner
les langues sans perfectionner la science, ni la science sans le
langage. »
La « chimie des aliments et du goût » doit donc assainir
sa terminologie pour progresser.
Les
molécules odorantes
Évidemment,
en matière sensorielle, ce sont les récepteurs qui doivent imposer
les motsvii,
et c’est la raison pour laquelle beaucoup de science est à faire.
Depuis longtemps, on sait que le nez comporte des récepteurs
olfactifsviii,
qui peuvent se lier, directement ou indirectement, à des molécules
présentes dans l’air. Directement, par un mécanisme clé-serrure,
ou indirectement, puisque l’on a découvert des olfactory binding
proteins, auxquelles des molécules se lient avant de se lier aux
récepteursix.
Quel
que soit le détail de la stimulation des récepteurs, on perçoit
une « odeur », et cela justifie que les molécules qui
suscitent une odeur soient dites « odorantes ». Pas
« aromatiques », toutefois, puisque l’arôme est
l’odeur d’une plante aromatique, dite encore aromate ! De
ce fait, il faut sans doute corriger nos pratiques… et nos
législations, puisqu’elles nomment très abusivement arômes des
choses qui n’en sont pas, que l’on parle des odeurs ou bien des
produits obtenus soit par assemblage de composés (synthétisés ou
extraits de matières végétales ou animales). Insistons,
d’ailleurs, pour refuser à tous ces produits, qu’ils contiennent
ou non des composés de synthèse, le qualificatif de « naturel » :
n’est naturel que ce qui n’a pas fait l’objet de transformation
par l’être humain. Ces « compositions odoriférantes »,
ou ces « extraits odoriférants » ne sont pas naturels,
et c’est tromper le consommateur que de le lui laisser croire.
Experts, n’oublions pas que la base d’un commerce sain, ce sont
des produits « loyaux, marchands et francs » !
La
saveur, les sensations trigéminales
La
question de la saveur semble plus simple, à cela près que l’on
vient de découvrir, en plus des récepteurs des papilles, auxquelles
se lient des molécules qui peuvent se dissoudre dans la salive, des
récepteurs qui captent les acides gras insaturés à longue chaînex.
La découverte est tout à fait remarquable, parce qu’elle
s’accompagne de la mise en évidence de toute une chaîne
physiologique qui pourrait faire conclure qu’il existe une saveur
particulière des acides gras insaturés à longue chaîne. Cette
découverte impose-t-elle l’introduction d’un terme nouveau,
sachant que, contrairement aux autres molécules sapides que nous
reconnaissons plus classiquement, il n’y a pas de saveur
reconnaissable comme les autres ?
D’autre
part, comment nommer le sens correspondant à la perception des
saveurs ? On parle encore parfois de « gustation »,
mais la gustation devrait être la perception du goût… or nous
parlons ici de saveurs. Doit-on plutôt parler de « sapiction »,
par exemplexi ?
Et de papilles sapictives ?
D’autres
molécules ont des récepteurs qui ne sont ni olfactifs, ni
sapictives, mais associés à une voie nerveuse spécifique, le nerf
trijumeau. C’est ainsi que nous percevons le piquantxii,
le fraisxiii…
D’ailleurs, il faut indiquer que les molécules peuvent stimuler
les récepteurs de plusieurs façons. Par exemple, le menthol sent la
menthe, certes, mais il suscite aussi la sensation de fraîcheur.
L’éthanol a une odeur, mais pas seulement, etc.
D’ailleurs,
nous avons omis d’évoquer l’astringence, qui a fautivement été
considérée comme une saveur, pendant longtemps, et qui correspond à
une sensation d’assèchement de la bouche, notamment quand des
protéines salivaires se lient à des composés phénoliques, tels
ceux qui sont présents dans certains vins et qui sont souvent,
abusivement, nommés taninsxiv.
Le
goût, dans tout cela ? C’est un fait de langage classique de
dire que, quand on mange un aliment, on sent son goût. Le goût est
donc la sensation synthétique que nous avons quand nous mangonsxv,
et ce goût résulte donc de la stimulation de tous les récepteurs à
la fois : olfactifs, sapictifs, trigéminaux… mais aussi des
récepteurs mécaniques, qui nous donnent la sensation de la
consistance, des récepteurs thermiques, etc.
Perçoit-on
un « goût de banane » quand on boit un vin ? Ce
goût résulte à la fois des sensations olfactives, sapictives,
trigéminales, etc.
A
bas la flaveur
Faut-il
parler de « flaveur », comme cela a été proposéxvi ?
Une norme ISO la définit comme « l’ensemble complexe des
sensations olfactives, gustatives et trigéminales perçues au cours
de la dégustation »… mais nous devons critiquer la norme
ISO. Ne définit-elle pas la couleur comme « la sensation
produite par la stimulation de la rétine par des ondes lumineuses de
longueur d’onde variables » ? Quoi, des longueurs d’onde
variables ? Ce serait une belle découverte, si la lumière, en
se propageant, pouvait changer de longueur d’onde !
D’ailleurs, les incohérences abondent, dans cette norme, puisque,
par exemple, les « saveurs élémentaires » seraient des
saveurs « reconnues », ou que l’on nommerait
« renforçateur de flaveur (ou de goût) les substances
intensifiant la flaveur de certains produits sans posséder cette
flaveur ». Ici, les deux mots « flaveur » et
« goût » sont confondus ! Achevons avec la
définition de « transparent », qui évoque, comme il y a
plusieurs siècles, des « rayons lumineux » !
Faut-il
vraiment supporter ces définitions idiotes ? Et devons-nous
admettre le terme de « flaveur » ? Je crois que non,
et voici les raisons. D’une part, il faut savoir que le mot
« flavour » existe en langue anglaise, où il désigne…
la sensation synthétique… qu’est donc le goûtxvii.
Pas besoin d’invoquer la flaveur, par conséquent, pour désigner
ce qui a déjà un nom en langue française. Faut-il réserver le nom
de « flaveur » à l’ensemble des « sensations
olfactives, gustatives et trigéminales » ? Il faut savoir
que cet ensemble de sensations n’est d’abord pas perceptible,
puisque l’on ne saurait les séparer des sensations de consistance
ou de chaleur, d’une part. D’autre part, cette « flaveur »
ne serait pas mesurable, puisqu’elle serait la résultante de
stimulations de récepteurs différents.
Je
propose de penser que quelque chose qui n’est ni mesurable ni
perceptible n’existe pas ! Il faut donc abattre le mot
« flaveur », le bannir de notre vocabulaire technique ou
courant.
Un
débat à organiser
Au
total, puisque je sais que les collègues sont des personnes
intelligentes auxquelles il est tout à fait maladroit de vouloir
imposer une solution, je crois qu’il n’est pas inutile de poser
la question des avantages et des inconvénients, afin que nous
décidions collectivement.
La
position qui consiste à penser que la flaveur existe, tout d’abord,
et que c’est la somme de la saveur, de l’odeur, des sensations
trigéminales, conduit à admettre que le goût serait la sensation
donnée par les papilles. Le mot « saveur » est alors
éliminé, alors que c’est un mot de la langue française.
L’avantage est que le mot « goût » est alors cohérent
avec « récepteurs gustatifs », pour parler des papilles
(mais ceux-ci sont encore mal connus : pensons aux acides gras
insaturés à longue chaîne). En revanche, l’inconvénient de
cette position, c’est que l’on élimine un mot classique, qui a
sa place, pour introduire un mot inconnu, sauf de spécialistes.
D’autre part, la flaveur désignerait alors quelque chose qui n’est
ni mesurable, ni perceptible, dans toute sa pureté.
Évidemment,
si l’on adopte maintenant la position qui stipule que le goût est
la sensation synthétique, il y a l’inconvénient que les
récepteurs des papilles doivent être nommés « sapictifs »,
ce qui est un mot nouveau, mais on retrouve alors dans « sapictif »
le mot « saveur », qui est bien attesté pour désigner
la sensation donnée par les papilles. De surcroît, on reste proche
de la langue classique et de la langue populaire.
D’autre
part, faut-il utiliser le mot « arôme » pour désigner
les odeurs, et utiliser l’expression « composé d’arôme »
pour désigner les molécules odorantes ? Il n’y a pas
d’avantage à cette solution, mais il y a beaucoup d’inconvénient,
comme on l’a vu déjà. Ajoutons seulement que, dans la discussion
précédente à ce propos, d’autre part, on a omis de signaler le
qualificatif « aromatique » qui serait alors donné aux
molécules odorantes viendrait heurter le qualificatif « aromatique »
donné par les chimistes au benzène et à ses cousins. Ajoutons
aussi que l’emploi du mot « arôme » pour le vin est…
faible, puisque le nom de l’odeur du vin est le « bouquet ».
Et signalons enfin qu’il n’existe pas d’inconvénient à
utiliser le mot « odorant », et non « aromatique »,
pour désigner les molécules qui stimulent les récepteurs
olfactifs… avec en outre une cohérence avec le monde anglo-saxon,
qui utilisent aujourd’hui, dans les publications scientifiques, le
terme « odorant », parlant de odorant molecules ,
ou simplement d’odorants.
Reste
la question des « arômes » des sociétés qui font des
extraits ou des compositions de molécules susceptibles de donner du
goût aux produits alimentaires. Je ne crois pas utile de revenir sur
l’emploi du terme « naturel », qui me semble tout à
fait condamnable, notamment parce que l’on nomme « artificiel »
(définition du dictionnaire) ce qui a fait l’objet d’une
préparation par l’être humain. Or ces produits sont des
préparations, et, de ce fait, ils ne sont certainement pas naturels,
qu’ils contiennent exclusivement des composés extraits, ou bien
qu’ils incluent des composés de synthèse.
Certes,
le mot « arôme » correspond à une réglementation…
mais je propose de changer les réglementations qui doivent l’être !
De surcroît, il y a la confusion de noms entre le produit, d’une
part, et la sensation, d’autre part. Confusion, donc possibilité
de tromperie… et le public ne s’y trompe pas, à critiquer
l’emploi de ces « arômes », supportant à peine ceux
qui sont dits « naturels ».
Quelle
terminologie employer ? L’anglais distingue la flavour, qui
est le goût, et les flavourings, qui sont ces compositions et
extraits. Au fait, pourquoi ne pas faire aussi la distinction ?
Introduire un nom nouveau et le proposer aux législateurs ? Ce
n’est pas bien difficile, si la volonté est présente, de ne pas
tromper. Je propose « compositions gustatives », et
« extraits gustatifs ». Pourquoi pas « compositions
odoriférantes » et « extraits odoriférants » ?
Parce que, on le sait, nombre de molécules ne stimulent pas
seulement les récepteurs olfactifs. Évidemment, au passage, on
bannirait le mot « naturel »… et je crois que notre
pays y gagnerait.
i
Naissance et obscolescence du concept de quatre qualities en
gestation, Annick Faurion, Journ. D’Agric. Et de Bota. Appl., vol
XXXV, 1988, 1-19
ii
Belitz and Grosch, Food Chemistry, Springer
Verlag, Heidelberg, p. 412.
iii
An amino-acid taste
receptor, Greg Nelson, Jayaram Chandrashekar, Mark A. Hoon, Luxin
Feng, Grace Zhao, Nicholas J. P. Ryba, Charles Zuker, Nature, vol
416, 14 mars 2002, pp 199-202.
iv
Faurion
A. et Mac Leod P., Sweet
taste receptor mechanisms, Progress
in Sensory Physiology, vol 8.
v
Alejandro
Caicedo and Stephen D. Roper, Taste receptor cells that discriminate
between bitter stimuli, Science, vol 291, 23 february 2001,
1557-1560.
vi
A. L. de Lavoisier, Traité élémentaire de chimie, Cuchet, Paris,
1793.
vii
A. Uziel, J. G.
Smadja, A. Faurion, Physiologie
du goût, Encycl.
Med. Chir. (Paris, France), Otorhino-laryngologie, 2-1987, 20490
C10.
viii
K. Raming, J. Krieger, J. Strotmann, I. Boekhoff,
S. Kubick, C. Baumstark, H. Breer, Cloning
and expression of odorant receptors,
Nature, 28 janvier 1993, 361, 353-356.
ix
.
Briand, Loiec; Eloit, Corinne;
Nespoulous, Claude; Bezirard, Valerie; Huet, Jean-Claude; Henry,
Celine; Blon, Florence; Trotier, Didier; Pernollet, Jean-Claude ,
Evidence of an odorant binding protein in the human olfactory
mucus : location, structural characterization, and
odorant-binding properties, Biochimie et Structure des Proteines
Unite de Recherches INRA 477, Jouy-en-Josas, Fr. Biochemistry
(2002), 41(23), 7241-7252. CODEN: BICHAW
ISSN: 0006-2960. Journal written in English. CAN 137:105377
AN 2002:360381 CAPLUS
Isabelle
Niot, Jean-Pierre Montmayeur, Philippe Besnard, CD36,
un sérieux jalon
sur la piste du goût du gras, M/S n°
4, vol. 22, avril 2006.
xi
Hervé This, Casseroles et éprouvettes, Pour la Science, Paris,
2003.
xii
Pourquoi le piment brûle, Bernard Calvino, Marie Conrat. Pour la
Science, N0366, avril 2008, pp. 54-61
xiv
Binding
of selected phenolic compound to proteins, Harshadari M Rawel,
Karina Meidtner, Jürgen Kroll, J. Agric. Food Chem., 14 april 2005,
DOI 10.1021/jf0480290 5021-8561 (04)08029-X
xv
A brief history of electronic nose, Julian W.
Gardner, Philip N. Bartlett, Sensors and Actuators B, 18-19 (1994,
211-20.
xvi
A. Pierson and J. Le Magnen, Etude quantitative du
processus de régulation des réponses alimentaires chez l'homme,
Physiology & Behavior, Volume 4, Issue 1, January 1969, Pages
61-67.
xvii
Julie A Mennella, Gary K Beauchamp, Early flavor
experiences : when do they start ? Nutrition Today, vol
29, N°5, Sept/oct 1994, 25-31.
dimanche 6 septembre 2015
Les « fous scientiques », les imposteurs, les erreurs
Il y a parfois des prétentions pseudo scientifiques vraiment ahurissantes. Par exemple, un ami vient de m'interroger à propos d'un site internet où est exposée une méthode prétendue miraculeuse pour améliorer la croissance et l'état de bon développement des plantes. Evidemment cette méthode est vendue très cher : son auteur, parfaitement inconnu des milieux agronomiques, propose des formations, des diagnostics, des remèdes... Qu'en penser ? Et que penser, plus généralement, des propositions qui heurtent le bon sens rationnel ?
Le remède miracle doit toujours nous rendre soupçonneux, car la panacée n’existe pas (sans quoi les individus qui la possèdent seraient immortels). De surcroît, l'histoire de humanité a largement montré que des individus malhonnêtes ont toujours profité du désarroi des autres pour gagner de l'argent, malhonnêtement donc : cela allait du sorcier, auquel on confiait le soin de faire tomber la pluie, aux rebouteux variés et autres diseurs de bonne aventure.
Or un agriculteur, un vigneron, est quelqu'un d'exposé aux intempéries, aux vicissitudes du climat, aux attaques des micro-organismes, champignons ou moisissures, et, quand il voit le fruit de son travail menacé ou ruiné, il s'interroge, évidemment, sur des moyens d'éviter la catastrophe. Des malhonnêtes cherchent à profiter de ce désarroi.
Le cas qui m'était soumis récemment est intéressant, puisque le site en question évoquait des concepts scientifiques modernes inconnus (sauf le nom) de la majorité des agriculteurs. Or quand un concept très spécialisé est évoqué, nous sommes démunis pour juger du discours qui nous est proposé, de sorte que nous sommes exposés à la fraude éventuelle.
Ici, les concepts étaient (en apparence seulement, comme on va le voir) ceux de la mécanique quantique, ce qui n'est pas enseigné couramment dans les écoles d'agronomie : à beau mentir qui vient de loin). Et c'est pourquoi j'ai pris un long moment pour aller examiner les prétentions qui m'étaient soumises.
Le site évoquait donc la mécanique quantique, que je connais puisque je l'enseigne en master de physico-chimie, et il commençait par indiquer que la physique moderne avait découvert la « dualité onde-corpuscule ». Jusque là, je n'ai pas trop à redire, bien qu'une telle phrase soit « datée » d'au moins d'un demi siècle et qu'elle traîne un peu partout, de sorte qu'il n'a pas dû être difficile de faire un copier-coller. Ajoutons qu'un professeur de mécanique quantique, dans une université, pourrait prononcer une telle expression, mais il serait sans doute plus précis, puisque l'on comprend bien, aujourd'hui, que l'aspect sous lequel nous apparaissent les objets matériels (moléculaires, atomiques, sub-atomiques) sont déterminées par l'expérience que l'on fait sur lesdits objets : l'expression est datée d'au moins un siècle. Observons aussi que si « dualité onde-corpuscule » impressionne quelques clients potentiels crédule, l'expression me rend méfiant : je propose depuis longtemps, à mon entourage et à moi-même, d'être circonspect quand on prononce devant nous des mots de plus de trois syllabes.
Puis le site nous explique que, puisque les molécules sont des ondes selon la mécanique quantique (je répète que la phrase, dite ainsi, est fautive), il y a une fréquence de ces ondes : tel l'espacement entre les rides à la surface de l'eau. Je choisis volontairement cet exemple des rides (il n'est pas dans le site, lequel ne donne aucune explication ; ben tiens !), car il y a une différence entre la longueur d'onde, qui est un espacement spatial, et la fréquence, qui correspond à un espacement temporel. Entre les deux, il y a la vitesse de propagation, et ce n'est pas rien, mais il y a bien plus, comme on va le voir maintenant.
Bref, notre site nous dit que puisqu'il y a une possibilité d'associer une fréquence à un objet matériel, on peut agir sur l'objet avec des fréquences. Jusque-là, pas de problème, sauf que les phénomènes ondulatoires sont de nature très diverses, entre la propagation du son dans l'air, qui correspond à une onde de pression, qui nécessite donc de l'air pour se propager (et il y a au Palais de la découverte une expérience amusante où le son s'éteint quand fait le vide dans une cloche) et une onde électromagnétique, qui se propage même dans le vide. Ou encore, imaginons un groupe de personnes qui se donnent la main, et qui s'inclinent l'une après l'autre : une onde d'inclinaison se propagerait... mais émettre une lumière de longueur d'onde proportionnelle à la longueur d'onde de l'onde d'inclinaison permettrait-il d'agir sru l'inclinaison ? Non, bien sûr... d'autant que pour une proportion, il faut une constante de proportionnalité : ici, laquelle ?
Tout cela est donc parfaitement arbitraire, et comme le site en question fait de même, on doit penser que c'est du grand n'importe quoi... ce dont on se doutait. Pour en terminer sur ce point, selon les ondes, il y a une différence considérable, et la ressemblance entre les diverses ondes n'est qu' élémentaire, concernant l'ondularité du phénomène.
Le site, lui franchit allègrement le pas, et prétend que faire entendre des sons de fréquence appropriée aux plantes permet d'activer des molécules particulières, de les faire synthétiser (je passe sur les détails qui sont donnés) et donc de stimuler leurs défenses, de stimuler leur croissance, etc.
Je vous épargne une série d'autres observations qui montrent à l'évidence que le sujet de la mécanique quantique n'est pas maitrisé par les auteurs du site en question, pas plus que la biologie moléculaire, qui constitue le second gros morceau de l'affaire. N'empêche que ce site prétend avoir des clients, pour lesquels il prétend évidemment avoir obtenu des résultats spectaculaires. Tout cela doit nous faire immédiatement penser à Cyrano de Bergerac, le vrai, qui vécut au 17e siècle, qui disait que chaque fois qu'on lui avait parlé de sorciers qui avaient de bons résultats, c'était à plus de 400 lieues de là ! Les prétentions de panacées sont de ce type, jamais vérifiables ou jamais vérifiées, et l'histoire des sciences montre que chaque fois que l'Académie des sciences pris la peine de tester les prétentions des charlatans, on a vérifié que l'or n'était que de la pacotille. C'était donc du temps perdu !
Se pose finalement la question essentielle, pour toutes les affaires de ce type : quand une prétention ahurissante est-elle du charlatanisme ? quand une découverte scientifique extraordinaire est-elle vraiment une découverte scientifique extraordinaire ?
La question est difficile et, dans le temps, je proposais de "tenir le probable pour faux jusqu'à preuve du contraire", que ce soit en science, ou en médecine ou en agronomie, etc. Si j'ai changé pour une formulation plus positive, l'idée me semble conserver son intérêt, notamment ici. Ajoutons que ce n'est pas à nous qui recevons l'information d'une action prétendument merveilleuse d'aller prouver qu'elle est justifiée ou non, mais c'est plutôt à ceux qui évoquent la chose d'établir la véracité de leurs dires.
En sciences, il a le mot essentiel de « validation », insuffisamment enseigné, et qui fonde la bonne science. Les validations sont bien difficiles, au point que, ces dernières années, plusieurs découvertes faites par des scientifiques raisonnables ont été finalement réfutées, alors que la communauté se penchait avec bienveillance sur les possibilités de leurs découvertes. Au CERN, à Genève, on a cru voir une propagation plus rapide que la vitesse de la lumière, et la communauté s'est émue jusqu'à ce que, finalement, on s'aperçoive que les calculs étaient erronés, et que la vitesse de la lumière restait la vitesse limite ; de même, il y a plusieurs années, la fusion froide (pourtant décrite complaisamment par des journalistes médiocres d'un grand quotidien national) en est restée aux annonces (on me signale en commentaire que la chose aurait été confirmée, de sorte qu'il faut voir très prudemment) ; la prétendue mémoire de l'eau, aussi, a fait perdre beaucoup de temps (là, aucun doute), et ainsi de suite. Pour autant, il y a devant nous des découvertes extraordinaires qui nous attendent, et il nous faut donc bien séparer le bon grain de l'ivraie.
Je ne règle donc pas la question posée, mais je propose de ne jamais accepter d'idées qui n'aient pas été testée, non pas par ceux qui soutiennent des choses ahurissantes et qui nous disent ce qu'ils veulent bien nous dire, mais par des instances indépendantes, qui n'ont pas d'intérêt financier dans la mise en œuvre de ces propositions. En médecine, la question se pose souvent, car les rapports entre le corps et l'esprit sont compliqués, et l'effet placebo existe, sans que son mécanisme soit encore connu (il y a donc lieu d'explorer ce mécanisme, mais cela est difficile, car l'être humain n'est pas un cobaye ; il faudra également apprendre à connaître les limites de cet effet, car il semble n'être que probabiliste contrairement à l'action d'un antibiotique sur des micro-organismes).
Je termine en signalant que j'ai encore, sous mon bureau, une caisse pleine de propositions délirantes qui m'ont été envoyées au fil des décennies : des théories du tout, de prétendues démonstrations du théorème de Fermat, de prétendues explications de l'attraction des corps célestes à l'aide de particules qui n'ont jamais été détectées, par des individus isolés, qui n'ont aucun moyen de le faire, des théories entièrement imaginées, et qui s'apparentent à du délire…
Bref on cause beaucoup au café du commerce, mais ce ce n'est pas là que se construit le savoir, et nous perdons notre temps à considérer les élucubrations des désoeuvrés avec plus qu'un oeil désolé... ou furieux, quand des prétentions malhonnêtes veulent gruger nos amis.
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Le remède miracle doit toujours nous rendre soupçonneux, car la panacée n’existe pas (sans quoi les individus qui la possèdent seraient immortels). De surcroît, l'histoire de humanité a largement montré que des individus malhonnêtes ont toujours profité du désarroi des autres pour gagner de l'argent, malhonnêtement donc : cela allait du sorcier, auquel on confiait le soin de faire tomber la pluie, aux rebouteux variés et autres diseurs de bonne aventure.
Or un agriculteur, un vigneron, est quelqu'un d'exposé aux intempéries, aux vicissitudes du climat, aux attaques des micro-organismes, champignons ou moisissures, et, quand il voit le fruit de son travail menacé ou ruiné, il s'interroge, évidemment, sur des moyens d'éviter la catastrophe. Des malhonnêtes cherchent à profiter de ce désarroi.
Le cas qui m'était soumis récemment est intéressant, puisque le site en question évoquait des concepts scientifiques modernes inconnus (sauf le nom) de la majorité des agriculteurs. Or quand un concept très spécialisé est évoqué, nous sommes démunis pour juger du discours qui nous est proposé, de sorte que nous sommes exposés à la fraude éventuelle.
Ici, les concepts étaient (en apparence seulement, comme on va le voir) ceux de la mécanique quantique, ce qui n'est pas enseigné couramment dans les écoles d'agronomie : à beau mentir qui vient de loin). Et c'est pourquoi j'ai pris un long moment pour aller examiner les prétentions qui m'étaient soumises.
Le site évoquait donc la mécanique quantique, que je connais puisque je l'enseigne en master de physico-chimie, et il commençait par indiquer que la physique moderne avait découvert la « dualité onde-corpuscule ». Jusque là, je n'ai pas trop à redire, bien qu'une telle phrase soit « datée » d'au moins d'un demi siècle et qu'elle traîne un peu partout, de sorte qu'il n'a pas dû être difficile de faire un copier-coller. Ajoutons qu'un professeur de mécanique quantique, dans une université, pourrait prononcer une telle expression, mais il serait sans doute plus précis, puisque l'on comprend bien, aujourd'hui, que l'aspect sous lequel nous apparaissent les objets matériels (moléculaires, atomiques, sub-atomiques) sont déterminées par l'expérience que l'on fait sur lesdits objets : l'expression est datée d'au moins un siècle. Observons aussi que si « dualité onde-corpuscule » impressionne quelques clients potentiels crédule, l'expression me rend méfiant : je propose depuis longtemps, à mon entourage et à moi-même, d'être circonspect quand on prononce devant nous des mots de plus de trois syllabes.
Puis le site nous explique que, puisque les molécules sont des ondes selon la mécanique quantique (je répète que la phrase, dite ainsi, est fautive), il y a une fréquence de ces ondes : tel l'espacement entre les rides à la surface de l'eau. Je choisis volontairement cet exemple des rides (il n'est pas dans le site, lequel ne donne aucune explication ; ben tiens !), car il y a une différence entre la longueur d'onde, qui est un espacement spatial, et la fréquence, qui correspond à un espacement temporel. Entre les deux, il y a la vitesse de propagation, et ce n'est pas rien, mais il y a bien plus, comme on va le voir maintenant.
Bref, notre site nous dit que puisqu'il y a une possibilité d'associer une fréquence à un objet matériel, on peut agir sur l'objet avec des fréquences. Jusque-là, pas de problème, sauf que les phénomènes ondulatoires sont de nature très diverses, entre la propagation du son dans l'air, qui correspond à une onde de pression, qui nécessite donc de l'air pour se propager (et il y a au Palais de la découverte une expérience amusante où le son s'éteint quand fait le vide dans une cloche) et une onde électromagnétique, qui se propage même dans le vide. Ou encore, imaginons un groupe de personnes qui se donnent la main, et qui s'inclinent l'une après l'autre : une onde d'inclinaison se propagerait... mais émettre une lumière de longueur d'onde proportionnelle à la longueur d'onde de l'onde d'inclinaison permettrait-il d'agir sru l'inclinaison ? Non, bien sûr... d'autant que pour une proportion, il faut une constante de proportionnalité : ici, laquelle ?
Tout cela est donc parfaitement arbitraire, et comme le site en question fait de même, on doit penser que c'est du grand n'importe quoi... ce dont on se doutait. Pour en terminer sur ce point, selon les ondes, il y a une différence considérable, et la ressemblance entre les diverses ondes n'est qu' élémentaire, concernant l'ondularité du phénomène.
Le site, lui franchit allègrement le pas, et prétend que faire entendre des sons de fréquence appropriée aux plantes permet d'activer des molécules particulières, de les faire synthétiser (je passe sur les détails qui sont donnés) et donc de stimuler leurs défenses, de stimuler leur croissance, etc.
Je vous épargne une série d'autres observations qui montrent à l'évidence que le sujet de la mécanique quantique n'est pas maitrisé par les auteurs du site en question, pas plus que la biologie moléculaire, qui constitue le second gros morceau de l'affaire. N'empêche que ce site prétend avoir des clients, pour lesquels il prétend évidemment avoir obtenu des résultats spectaculaires. Tout cela doit nous faire immédiatement penser à Cyrano de Bergerac, le vrai, qui vécut au 17e siècle, qui disait que chaque fois qu'on lui avait parlé de sorciers qui avaient de bons résultats, c'était à plus de 400 lieues de là ! Les prétentions de panacées sont de ce type, jamais vérifiables ou jamais vérifiées, et l'histoire des sciences montre que chaque fois que l'Académie des sciences pris la peine de tester les prétentions des charlatans, on a vérifié que l'or n'était que de la pacotille. C'était donc du temps perdu !
Se pose finalement la question essentielle, pour toutes les affaires de ce type : quand une prétention ahurissante est-elle du charlatanisme ? quand une découverte scientifique extraordinaire est-elle vraiment une découverte scientifique extraordinaire ?
La question est difficile et, dans le temps, je proposais de "tenir le probable pour faux jusqu'à preuve du contraire", que ce soit en science, ou en médecine ou en agronomie, etc. Si j'ai changé pour une formulation plus positive, l'idée me semble conserver son intérêt, notamment ici. Ajoutons que ce n'est pas à nous qui recevons l'information d'une action prétendument merveilleuse d'aller prouver qu'elle est justifiée ou non, mais c'est plutôt à ceux qui évoquent la chose d'établir la véracité de leurs dires.
En sciences, il a le mot essentiel de « validation », insuffisamment enseigné, et qui fonde la bonne science. Les validations sont bien difficiles, au point que, ces dernières années, plusieurs découvertes faites par des scientifiques raisonnables ont été finalement réfutées, alors que la communauté se penchait avec bienveillance sur les possibilités de leurs découvertes. Au CERN, à Genève, on a cru voir une propagation plus rapide que la vitesse de la lumière, et la communauté s'est émue jusqu'à ce que, finalement, on s'aperçoive que les calculs étaient erronés, et que la vitesse de la lumière restait la vitesse limite ; de même, il y a plusieurs années, la fusion froide (pourtant décrite complaisamment par des journalistes médiocres d'un grand quotidien national) en est restée aux annonces (on me signale en commentaire que la chose aurait été confirmée, de sorte qu'il faut voir très prudemment) ; la prétendue mémoire de l'eau, aussi, a fait perdre beaucoup de temps (là, aucun doute), et ainsi de suite. Pour autant, il y a devant nous des découvertes extraordinaires qui nous attendent, et il nous faut donc bien séparer le bon grain de l'ivraie.
Je ne règle donc pas la question posée, mais je propose de ne jamais accepter d'idées qui n'aient pas été testée, non pas par ceux qui soutiennent des choses ahurissantes et qui nous disent ce qu'ils veulent bien nous dire, mais par des instances indépendantes, qui n'ont pas d'intérêt financier dans la mise en œuvre de ces propositions. En médecine, la question se pose souvent, car les rapports entre le corps et l'esprit sont compliqués, et l'effet placebo existe, sans que son mécanisme soit encore connu (il y a donc lieu d'explorer ce mécanisme, mais cela est difficile, car l'être humain n'est pas un cobaye ; il faudra également apprendre à connaître les limites de cet effet, car il semble n'être que probabiliste contrairement à l'action d'un antibiotique sur des micro-organismes).
Je termine en signalant que j'ai encore, sous mon bureau, une caisse pleine de propositions délirantes qui m'ont été envoyées au fil des décennies : des théories du tout, de prétendues démonstrations du théorème de Fermat, de prétendues explications de l'attraction des corps célestes à l'aide de particules qui n'ont jamais été détectées, par des individus isolés, qui n'ont aucun moyen de le faire, des théories entièrement imaginées, et qui s'apparentent à du délire…
Bref on cause beaucoup au café du commerce, mais ce ce n'est pas là que se construit le savoir, et nous perdons notre temps à considérer les élucubrations des désoeuvrés avec plus qu'un oeil désolé... ou furieux, quand des prétentions malhonnêtes veulent gruger nos amis.
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