mardi 16 septembre 2025

Un gâteau de "plomb" ?

 Dans ses Eloges de la cuisine française, le cuisinier Édouard mignon donne une recette de petits gâteaux secs, faits d'une espèce de pâte sucrée, friable, ce que certains nommeraient aujourd'hui une pâte sablée,  mais agrémentée de poudre d'amande, par exemple. Le mot gâteau de plomb est un mot classique de la pâtisserie  et l'on peut s'interroger sur ce nom : pourquoi de "plomb" ? Ces gâteaux ne sont pas particulièrement lourds,  de sorte qu'il y a une espèce de paradoxe à les nommer ainsi et finalement, j'identifie dans des livres anciens que ces gâteaux seraient des cousins des plum-pudding,  des gâteaux de prunes, puisque plum signifie prune en anglais : plum, plomb... 

Dans un tel cas, quelle préparation devons-nous associer à un gâteau de plomb ? Quelle préparation est-elle légitime pour recevoir ce nom puisqu'il n'y a plus de prune ? J'ai proposé ailleurs que ce soit toujours le premier à utiliser un nom qui puisse légitimement définir le terme, tout comme en astronomie, c'est le découvreur d'un objet céleste qui donne son nom à l'objet, tout comme en chimie c'est le découvreur d'un élément qui donne son nom à l'élément, le découvreur d'un composé qui donne son nom au composé, le découvreur d'une plante qui lui donne son nom, et ainsi de suite. 

Il est légitime que les noms qui sont introduits correspondent aux préparations pour lesquelles auxquelles ils ont été initialement donnés,  et il est illégitime de changer ultérieurement ces correspondances entre les objets et les noms.

lundi 15 septembre 2025

Quand on invite les étudiants à prendre leurs études en main

Dans un de mes cours, je fais diriger les séances par des étudiants qui se portent volontaires. 

En effet, les futurs ingénieurs devront organiser des réunions et cela ne se fait pas n'importe comment : il faut cadrer la chose avec une démarche rationnelle et, surtout , efficace. 

D'une part, les réunions ne doivent pas traîner en longueur. Et, d'autre  part, il n'est pas agréable d'aller se faire diriger. 

Et c'est dans quelques sorte de cela que nos étudiants doivent apprendre : ils doivent apprendre  :
- à proposer un ordre du jour, écrit,
- à le soumettre à l'équipe et lui demandé ce qu'il y a lieu d'ajouter,
- à préparer le rendez-vous avec une date, une heure, un lieu,
- à prendre des notes pendant la réunion afin de préparer un compte-rendu 
- à émettre un projet de compte-rendu à tous afin d'obtenir d'éventuelles corrections :  savoir ce qui manque, ce qui est infidèle, ce qui est faux, et cetera;
- enfin à émettre le compte rendu corrigé avec une structuration bien particulière,
- à planifier la suite à donner. 

Bref il y a un ensemble de choses à apprendre pour bien diriger une réunion et le plus difficile est de faire quelque chose dans la foi efficace, rapide, amical, intelligent.

 

dimanche 14 septembre 2025

L'intrinsèque, l'intrinsèque, l'intrinsèque !

 Je me répète mais j'aime distinguer l'intrinsèque, l'extrinsèque et le concomitant. 

Lors du dernier concours de cuisine note à note, comme lors de la session de posters de la journée scientifique du Master Food innovation and product design, m'est revenue l'importance de cette distinction. 

Par exemple, pour la présentation des posters, un étudiant très enthousiaste nous avons vendu sa salade. Mais je sais que le travail qu'il a fait était très difficile et je ne crois pas que l'on puisse accorder une totale confiance aux résultats qu'il a présentés.
D'autre part, pour le concours de cuisine note à note, plusieurs des candidats ont expliqué le contexte, les raisons pour lesquelles ils avaient introduit une nouvelle préparation. Mais en réalité, le jury n'était pas intéressé par ces raisons et il devait juger le résultat. Le résultat c'est ce qui est intrinsèque  ; le baratin qui est autour, c'est extrinsèque, et la façon de le dire est  concomitante. 

Dans certaines circonstances, ce qui est extrinsèque et gênant, nuisible.
En particulier, en science ou en technologie, je ne veux pas être convaincu par des arguments, mais par des faits. 

Pour les recettes, nous ne voulions pas être hypnotisés par un bon communicateur ; nous voulions nous extasier  devant une belle réalise réalisation. 

Pour les posters, il nous fallait une présentation serrés, technique, des matériels et des méthodes, avant que nous puissions  accepter les conclusions qui étaient proposées : intrinsèque, intrinsèque, intrinsèque !

samedi 13 septembre 2025

Le brunissement des aliments ? Cessons de parler de Maillard

 Le brunissement des aliments ? Ne soyons pas simpliste. 

Il y a une expérience à faire absolument pour ceux qui veulent parler de brunissement des aliments, qui veulent l'explorer, le comprendre : il s'agit de mettre dans une poêle chauffée un peu de fécule, un peu de farine, un peu de sucre, un peu de gélatine. On fait des petits tas distincts et l'on voit alors, dans l'ordre,  le sucre fondre et brunir très rapidement, la gélatine brunir aussi, un peu moins vite, puis c'est le tour de la farine,  tandis que l'amidon reste parfaitement blanc. 

Pour compléter l'expérience, il faut  faire un mélange d'un sucre réducteur et d'un acide aminé, par exemple du glucose et de la glycine, et l'on observerait également un brunissement très rapide. 

Pour le sucre, la réaction est nommée caramélisation. 

Pour les protéines, le brunissement résulte de réactions  de pyrolyse. 

Pour le mélange de glucose et de glycine, par exemple la réaction est nommée "amino carbonyle". 

Dans un aliment, ces trois réactions, ainsi que  d'autres (oxydation, etc.), contribuent au brunissement et la question à laquelle la chimie ne sait pas répondre aujourd'hui est de savoir dans quelle proportions ces diverses réactions ont lieu. 

En tout cas, il serait simpliste et faux de parler de réaction de Maillard parce que d'une part, un travail historique approfondi que j'ai fait a démontrer que Maillard n'est pas le découvreur des réactions amino-carbonyle, de sorte que ces réactions ne doivent pas être nommées d'après Maillard ; et, d'autre part, les réactions amino-carbonyle ne   se confondent pas avec les réactions de pyrolyse ou de caramélisation. 

C'est faire preuve d'une très grande insuffisance en chimie que de tout mélanger si l'on veut être juste, on parlera de réactions - au pluriel-  qui contribuent au brunissement de l'aliment .

vendredi 12 septembre 2025

Une question à propos de pâte royale ou de pâte à la reine (ce que certains nomment pâte à choux)

 On m'interroge à propos de "pâte à choux", mais cela me donne d'abord l'occasion d'indiquer que l'on devrait parler de pâte royale, ou à la reine, ou républicaines. Voir : https://nouvellesgastronomiques.com/apres-la-pate-a-la-reine-a-la-royale-voici-les-pates-republicaines/

 

Cela étant, voici la question : 

En cours, nous avons passé la pâte à choux sous vide avant de dresser, nous espérions un développement avec l’humidité de la pâte à choux. mais rien ? l'air à t-il de l'importance dans le développement des choux ?

 

Et la réponse est que ce n'est pas l'air qui fait gonfler les choux, mais l'eau qu'il contiennent et qui s'évapore au contact de la plaque à cuisson chauffée. 

On peut effectivement faire gonfler des choux à froid en les mettant sous vide, mais il faut un vide poussé, qui permette l'ébullition de l'eau. Et l'air n'a quasiment aucune influence. 

Mais j'explique un peu mieux :  dans une cocotte minute, l'eau bout à plus de 100 degrés ; par exemple 110 degrés. 

Mais, en altitude, l'eau bout à moins de 100 degrés. 

Or faire "du vide", c'est réduire la pression ressentie par de l'eau, par exemple. Cela étant, les machines à sous-vide ne font pas un grand vide : d'ailleurs, si l'on met de l'eau dans une poche et qu'on fait le vide, on ne voit pas l'eau bouillir. 

C'est bien différent des évaporateur rotatif des laboratoires de chimie : avec ces équipements, par exemple, on peut faire bouillir de l'eau à la température ambiante. Et c'est d'ailleurs avec des systèmes de vide de laboratoire que j'ai montré à la télévision, en 1984, un soufflé que je faisais gonfler sans le chauffer. J'avais d'ailleurs une résistance chauffante dans la cloche à vide, pour cuire le soufflé ainsi gonflé, afin qu'il ne retombe pas. J'avais fait de même avec des choux (des gougères, plus précisément).

Faire un calcul ?

Comment faire un calcul ? J'ai détaillé la chose dans des billets précédents, dans des cours rédigés, mis en ligne, et dans un livre intitulé Calculating and Problem Solving through Culinary Demonstration


 

 

Mais il faut répéter la "colonne vertébrale" de la méthode : 

1. Commençons par bien poser la question, la répétant, la ruminant, jusqu'à ce  que nous puissions l'énonce de façon concise et précise à la fois. 

2. Puis soliloquons en utilisant les mots de la question finalement énoncée, ce qui signifie que nous devons chercher à expliquer toutes les notions qui sont dans la question. 

3. Puis faisons un schéma. 

4. Cherchons à simplifier

5. Décrivons tout ce qui se trouve sur le schéma, introduisons les symboles algébriques, caractérisons quantitativement tous les éléments qui apparaissent, soit de façon physique (masse, densité, vitesses, etc.), soit de façon mathématique (volume, dimensions, etc.), soit de façon chimique (composition, etc.), soit de façon biologique et cetera. 

6. Puis cherchons des relations entre ces quantités

Il ne reste plus qu'à faire le calcul,  qu'il faudra d'ailleurs valider.

jeudi 11 septembre 2025

Quel beau master que notre master "Food Innovation and Product Design" !

Cela fait maintenant 94 ans que avec TU Dublin, l'Université de Naples et l'Université de Lund, nous recevrons des étudiants du monde entier pour un programme de Master intitulé Food d'innovation and product design

Il y a des centaines de demandes, et nous acceptons 30 étudiants chaque année, avec une rude sélection. 

Initialement, nous avions un soutien de l'Europe dans le cadre des programmes Erasmus, mais nous fonctionnons maintenant avec des étudiants qui payent leurs études. Ils payent très peu en réalité et des bourses sont proposés à certains. 

Les études durent  2 ans avec 6 mois à Paris et  6 mois à Dublin pour la première année, puis au choix un an soit à Paris, soit à Naples, soit à Lund : à Paris, ils auront des capacités plus techniques en terme de nouveaux produits, de structure des aliments, de goût ; à Naples ils se focaliseront surtout sur des questions de nutrition et de diététique ; à Lund, il s'intéresseront principalement aux emballages. 

Tous nos étudiants trouvent un travail dès leur sortie du master, et nous n'avons guère qu'à nous féliciter de cette construction européenne. 

Mais nous risquons de ronronner  :  après la crise du covid et le déménagement d'AgroParisTech sur notre nouveau campus, au milieu des grandes écoles, des universités, des entreprises, des centres de recherche,  il est temps d'observer que nous pouvons passer à  un niveau supérieur, : puisque nous avons des professeurs remarquables, pourquoi nous limiter à des enseignements à seulement 30 étudiants ? Pourquoi ne pas proposer des formations aux industriels, chez qui nous plaçons nos étudiants et pour lesquels nous voyons des besoins théoriques ? 

D'autre part, pourquoi ne pas améliorer la promotion de notre diplôme, le mieux  faire connaître et peut-être accepter plus d'étudiants si l'industrie en a besoin comme cela semble être le cas ? Pourquoi ne pas accepter de nouveaux partenaires au-delà des 4 fondateurs ? 

 

Bien sûr, on ne change pas une équipe qui gagne mais pourrions-nous faire mieux ?  Voilà des questions passionnantes que nous devons nous poser.