Il
y a ce moine chinois du 18e siècle, Shitao (ce qui signifie citrouille
amère) qui produisit un extraordinaire traité de peinture intitulé L'unique trait de pinceau. Le
livre est merveilleux et l'un de ses arguments est que l'on ne peut peindre correctement que si l'on est capable de faire du premier coup un
trait qui ne sera pas corrigé, l'unique trait de pinceau.
L'auteur
prétend qu'il n'y a pas de correction possible et il dit en également
que, pour arriver à cette maîtrise, il est nécessaire de méditer beaucoup
et de se débarrasser de ce qu'il nomme la poussière du monde.
Évidemment,
tout ce qui n'est est écrit dans les livres n'est pas nécessairement
juste, et, d'autre part, il n'est pas suffisant de dire des choses pour
les faire exister : on pensera au Père Noël ou au carré rond,
par exemple.
Bien sûr, on connaît cette certaine catégorie de discours qui nous
abaissent, nous salissent : certaines personnes sécrètent la poussière du monde... mais je me reprends car faut-il conserver l'expression "poussière du
monde" ou bien simplement poussière ? Poussière du monde ne se
soutiendrait que si le monde avait une acception comme le "grand
monde", par exemple.
Mais on me connaît et je n'aime pas avoir le nez vers la boue ; je suis de ceux qui proposent de montrer le bleu du ciel.
Certes, je ne dis pas que le ciel est toujours entièrement bleu mais je propose d'apprendre à voir le bleu qui est dans le ciel, je propose d'apprendre à faire bleuir le ciel, je propose d'apprendre à voir le bleu derrière d'éventuels nuages, je propose d'apprendre à chasser les nuages pour voir le bleu.
J'ignore si la considération du bleu permettra
effectivement de faire de meilleurs traits de pinceau mais je sais que
l'observation du bleu du ciel nous met dans un état d'esprit plein
d'entrain qui nous permet de nous mettre en chemin. Une fois en route,
nous cheminons, nous nous préoccupons du chemin et nous oublions l'état d'esprit initial (le bleu du ciel) pour nous concentrer sur le chemin, ses aspérités, et cetera.
Mais au moins nous serons en route au lieu de craindre la poussière. Décidément, je préfère voir le bleu du ciel