Pour expliquer pourquoi la
vulgarisation ne fait pas parfaitement son travail, prenons un
exemple : la loi d'Ohm. Au XIXe siècle, le physicien allemand
Georg Simon Ohm mesure des différences de potentiel associé des
intensités de courant, en faisant passer divers courants dans un
même conducteur, et il découvre que le rapport, le quotient, de la
différence de potentiel par l'intensité du courant est constant,
pour un même conducteur : c'est la résistance électrique de
ce conducteur particulier.
Jusque là, la
vulgarisation-récit se tient. Et puis, pour expliquer la découverte,
il a suffi d'imposer aux interlocuteurs une simple division.
Pourquoi la loi d'Ohm ?
Pour arriver aux mécanismes qui sont derrière la loi, il faut
maintenant discuter la notion d'électrons et leur propagation dans
les conducteurs. Présenter des électrons ? On pourra encore
recourir à une expérience : celle d'un tube de Crookes, par
exemple, un tube où l'on fait le vide, et où l'on met une
différence de potentiel électrique entre deux électrodes, placées
aux extrémités du tube. Un récit. Et pour décrire le propagation
des électrons dans un conducteur ? n pourra sans doute se
limiter à une description en mots.
Toutefois, qui nous prouve
que ces récits sont exacts ? Que ce ne sont pas de
fantasmagoriques élucubrations, comme le sont les récits des
pseudo-sciences ? Les sciences quantitatives ont cela de
merveilleux que ce sont pas des récits au hasard, que ce ne sont pas
des divagations : parmi l'ensemble des possibilités de
mécanisme, c'est l'adéquation des mesures à la théorie qui
conduit à la sélection d'un ou de plusieurs mécanismes
admissibles.
Passons au second
exemple : l'effet photoélectrique, étudié par Albert
Einstein. On place deux plaques métalliques en vis-à-vis, à
l'intérieur d'un tube en verre où l'on a fait le vide, et l'on
applique une différence de potentiel modérée entre les deux
plaques. Rien ne se passe.
Puis on éclaire une des
plaques, à l'aide d'une lumière de longueur particulière, par
exemple du rouge. Rien ne se passe. On augmente l'intensité de la
lumière, ce qui correspond à une énergie de plus en plus grande,
et rien ne se passe. Puis on change de longueur d'onde de la lumière,
passant du rouge au bleu, par exemple et soudain, pour une longueur
de particulière, le courant se met à passer.
Jusque là, on a expliqué
le phénomène, par un recours à l'expérience, mais comment
expliquer le phénomène ? Le calcul, dans ce cas n'est pas
difficile ; il est à la portée d'un étudiant de baccalauréat.
Mais c'est le calcul qui dit tout ! Bien sur on aurait pu «
expliquer » que la lumière est faite de « grains »
nommés photons, chacun porteur d'une énergie particulière. Mais
comment expliquer l'effet photoélectrique ? Seul le calcul en
donne une explication, et ce n'est pas la transcription du calcul
avec des mots du langage naturel qui aide à comprendre, au
contraire même : les phrases deviennent très longues, les notions
s'enchaînent les unes aux autres, et l'on découvre à cette
occasion que le calcul formel, où des idées comme l'énergie, la
masse... sont remplacés par les lettres, M, E..., est bien est
bien plus efficace pour la compréhension que la description avec des
mots.
La description avec des
mots ne donne pas de compréhension des phénomènes, et seul le
calcul - très simple- permet de comprendre combien le travail
d'Albert Einstein, dans ces circonstances, était mervielleux. La
vraie tâche de la vulgarisation, c'est donc, dans ces cas-là,
d'expliquer les calculs !
Comment la vulgarisation
s'y prendra-t-elle pour s'améliorer ?