vendredi 10 mars 2023

Il faut justifier ses dires, ou être capable de le faire.


Je fais ce billet parce que cela fait quelques plusieurs fois en quelques jours que des correspondants me soumettent des récits sans justification et que je vois ainsi des personnes qui sont extérieures à la production de connaissance et qui délivrent des informations douteuses (ou manifestement fausse), et cela sans référence.

Par exemple, un de mes correspondants me signale qu' "un chimiste, vers 1930, aurait découvert la molécule qui fait synthétiser le récepteur de l'amertume des légumes" (je le dis tout de suite : la phrase est insensée !).

On passera sur la confusion entre la "molécule" et le composé", mais on aura lieu de s'étonner... parce que la physiologie humaine est si évoluée qu'il est vraiment très incertain (et en réalité faux) qu'un composé (plutôt qu'une seule molécule) puisse faire synthétiser un récepteur à l'organisme humain, car, en réalité, c'est l'ADN qui fait synthétiser les récepteurs que sont les protéines.

D'autre part, l'expression "le récepteur de l'amertume des légumes" est faux, et je renvoie à  de nombreux articles que j'ai écrits pour expliquer qu'il n'y a pas une amertume, mais des amertumes, et donc plusieurs  des amertumes. Voir, par exemple, mon livre Casseroles et éprouvettes où j'ai rapporté les résultats d'études de marquage fluorescent des calcium pour détecter de tels récepteurs.

Bref, l'expression que mon interlocuteur n'a pas de sens, et elle conduit à douter de la phrase où elle se trouve et plus généralement du texte où se trouve cette phrase.

Bref, je doute de toute l'information qui m'est envoyée, dans ma réponse à mon interlocuteur, je commence par lui conseiller de bien citer ses sources.

J'ai en arrière-pensée le fait que, dans nombre de mes billets de blog ou de mes articles de vulgarisation scientifique je ne cite pas moi-même mes sources... Mais cela ne signifie pas que je ne les ai pas. Au contraire !

D'ailleurs, souvent, dans mes conférences, la deuxième diapositive que je présente indique mon adresse email, et je discute le fait que, pour ne pas encombrer mes présentations, je ne cite pas mes sources mais que je les tiens à la disposition de toute personne qui me les demandera.

Tout ce que je dis, tout ce que j'écris, se fonde sur des références. Et des références primaires : je cite ceux qui ont établi les faits. Pas des sources secondaires, dont il y a lieu de douter.

Chaque fait que je délivre doit être fondé sur une référence solide qui établit le fait.

D'ailleurs, dans mes articles scientifiques, toutes les personnes qui ont publié avec toi pourront témoigner du fait que je réclame "une phrase = une référence ou plus ».

Oui, tout ce qui est écrit dans un article scientifique doit être sourcé, référencé, et avec des règles très particulières que j'ai exprimées dans des nombreux billets et texte sur les bonnes pratiques en sciences.

Je sais qu'il y a des groupes humains où des adultes sont poussés à s'améliorer, notamment par la production de textes sur des sujets qu'ils choisissent, réalisant ainsi ce que l'on pourrait nommer des mémoires, mais la qualité de ses textes ne peut se limiter au bon usage de l'orthographe, de la grammaire, voire de la rhétorique : il y a surtout lieu de bien considérer que la formation doit conduire celui qui s'exprime a bien référencer ses assertions, à chercher de telles références, à les comprendre, à les lire in extenso, mieux même à les évaluer, car si l'on cite une référence médiocre sans la critique, alors on en endosse la médiocrité.

La question des références est absolument essentielle en sciences, et l'on ne répétera jamais assez que cela doit concerner des références primaires :  on ne doit pas citer un auteur qui cite un auteur qui, etc. Car citer un auteur, cela signifie lire que cet auteur a publié, et s'assurer qu'il a correctement établi le fait que l'on citera !

Parfois, on peut hésiter, car on a le sentiment que plusieurs auteurs doivent être cités.
Par exemple, si une méthode d'analyse a été mise au point par le chercheur A, et que le chercheur B a utilisé cette méthode pour obtenir un résultat d'analyse particulier, alors on citer à la fois B, pour le fait établi, mais aussi A, parce que c'est sous sa plume que se trouve la méthode d'analyse, qui doit être bonne.

Ce que je viens de dire là n'est pas anodin, car la science demande des "moyens de la preuve", à savoir comment un résultat a été établi et si l'équipe A a cité l'équipe a pour la méthode qu'elle a mise en œuvre, alors il devient obligatoire de citer A ainsi que B.

J'en profite aussi pour signaler que nous n'avons pas le droit de choisir entre plusieurs publications que l'on cite. Il y en a une qui a établi le fait :  c'est celle-là qui doit être citée et nul autre, même si nous avons des amis que nous à qui nous voudrions faire plaisir les citant, même si un article de synthèse nous a mis sur la piste de l'établissement du fait.  

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