Vive les sciences
quantitatives : l'identification d'un phénomène
Dans la méthode des
sciences quantitatives, la première étape est la sélection d'un
phénomène. L'existence d'une montagne, le bleu du ciel, le vert du
feuillage, le gonflement des soufflé... Ce sont là des phénomènes
courants, quotidiens, manifestes, mais il en existe de plus cachés,
qui ne se révèlent que lors d'expérimentation : par exemple la
déviation d'un faisceau d'atomes d'argent, dans le vide, lorsque
l'on applique un champ magnétique ; par exemple, l'effet
photoélectrique, déjà considéré dans un précédent billet ; par
exemple, le fait que les réactions dites d'addition, en chimie, ne
se fassent pas pour ce composé étrange qu'est le benzène...
Quel phénomène est-il
judicieux de sélectionner ? Les phénomènes, les particularités du
monde, sont en nombre infini, et les scientifiques ont évidemment
intérê à apprendre à n'en sélectionner que quelques-uns.
Lesquels ? Selon quels critères ? Il semble logique de penser
que les critères de sélection doivent être appropriés à
l'objectif général de la science, c'est-à-dire trouver les
mécanismes des phénomènes. Toutefois, on voit que, pour les
exemples précédemment considérés, de simples observations ne
suffisent pas à définir un vrai critère. Il semble admis, il est
peut-être justifiable, que les phénomènes les plus « fréquents »
soient ceux que les scientifiques ont intérêt à sélectionner,
puisque l'élucidation du mécanisme s'appliquera à un grand nombre
de cas. Le gonflement de soufflés ? On peut le voir comme un
phénomène particulier relevant de la catégorie du gonflement des
produits alimentaires. On peut le voir aussi comme un cas particulier
du gonflement de systèmes colloïdaux, alimentaires ou non ; par
exemple une mousse non alimentaire que l'on chauffe... Toutefois,
nous avons des raisons de craindre que les explorations
expérimentales et scientifiques qui seront consacrés à un tel
phénomène ne conduiront qu'à des mécanismes déjà connus,
auxquels car le travail scientifique est un peu inutile. Il ne
conduira pas à un changement de paradigme, à une rénovation
générale du savoir sur la nature.
C'est la raison pour
laquelle de nombreux physiciens du XXIe siècle se consacrent plutôt
à l'exploration des particules subatomiques, à la recherche
d'objets tels que le boson de Higgs, dans ces gigantesques
accélérateurs de particules que l'on construit dans quelques rares
endroits du monde, tel le CERN, à Genève.
Doit-on penser qu'il n'y a
point de salut scientifique hors de ces recherches coûteuses ? Le
prix Nobel qui fut attribué à Pierre Gilles de Gennes il y a moins
de dix ans était, au contraire, la reconnaissance, par le comité
du prix Nobel, de la possibilité d'explorations de systèmes
physico-chimiques à notre portée, et c'est ainsi que grandit
l'exploration de la « matière molle ». Il n'est pas inutile de
rappeler que Pierre Gilles de Gennes avait également étudié les
cristaux liquides, objets également à notre portée, la
supraconduction, qui concernent des matériaux que l'on fabrique avec
de simples poudres minérales...
Il y a donc lieu en de ne
pas baisser les bras si nous travaillons ailleurs que dans un centre
de physique des particules. Il y a lieu de s'étonner du moindre
phénomène, et de faire du travail scientifique une oeuvre d'une
intelligence telle qu'elle puisse être sans rougir mise en regard de
celle de Pierre Gilles de Gennes.