Le foie gras chantilly est une préparation que j'ai inventée dans les années 1995, et que j'ai déjà évoquée dans ce blog : il s'agit de former un système foisonné à partir d'une solution aqueuse et de foie gras.
Par exemple, on part d'un fonds de canard, on ajoute un foie gras, on chauffe pour faire une émulsion et l'on fouette celle-ci en la refroidissant de sorte que l'on obtient une consistance de Chantilly et sans crème : il y a le même mécanisme de formation que la crème chantilly puisqu'on a reproduit la composition de la crème laitière avec la matière grasse du foie gras et l'eau.
Dans la recette que j'avais données, j'avais même ajouté qu'il y
avait trois façons de rater mais que l'on pouvait toujours rattraper la
préparation.
1. On peut rater si la proportion de foie gras est excessive, auquel cas la préparation finale est trop dure.
2. On peut rater si la proportion de liquide est excessive, auquel cas, comme pour une crème qui aurait été diluée avec du lait, on obtient pas le foisonnement stable.
3. Et l'on peut rater en battant trop, ce qui conduit à une sorte de grainage, auquel cas il suffit de fondre la sauce doucement, avant de battre à nouveau (toujours en refroidissant, "sur glace").
À propos de ce "sur glace", je veux simplement dire qu'il suffit de refroidir la préparation, ce qui peut se faire en mettant la casserole sur des glaçons, ou dans de l'eau froide.
Bref, il me semblait avoir bien décrit le protocole, mais l'expérience a montré que c'était en réalité insuffisant car un de mes amis à essayé trois fois la recette sans y parvenir.
Comme je voulais en avoir le cœur net, j'ai refait moi la même la préparation dans la filmant, avec les proportions qui étaient bien celles que j'avais données : mon foie gras chantilly a été délicieux et tout à fait réussi.
Il s'est trouvé que j'ai envoyé les vidéos de mon travail à mon ami, qui a alors découvert qu'il battait trop peu de temps.
Il est vrai que, dans mon protocole, je ne je ne donnais pas la durée de foisonnement et je disais simplement que, au début du travail, on voit de grosses bulles d'air apparaître dans la préparation, que ces bulles disparaissent progressivement et que c'est seulement ensuite que l'on voit, plus tard, les branches du fouet laisser laisser une traîner permanente dans la préparation auquel cas il faut s'arrêter de battre.
Il y a le même type de difficultés de description que pour la crème chantilly : je me souviens d'un autre ami, il y a plus de 20 ans, qui m'avait demandé de l'aide pour réaliser une crème chantilly qu'il n'arrivait pas à faire : de même il battait trop peu.
Le problème, quand on rédige de tels protocoles, c'est que le temps est très variable selon la vitesse de refroidissement, selon l'ustensile que l'on utilise, selon la façon dont on le manie... et je vois avec la cuisine un exemple de ces métiers techniques qu'il est difficile de codifier rigoureusement. Au fond, quand un peintre broie des couleurs, quand un tisserand fait passer sa navette, quand un ébéniste utilise le marteau à bois, et ainsi de suite, il est bien difficile d'indiquer autrement que par exemple la façon exacte de procéder. Il y a donc la nécessité d'une transmission par répétition au moins pour partie.
Cela doit nous
conduire à discuter la question des référentiels techniques, les listes
de savoirs, de connaissances et de compétences exigibles pour les certificats
d'aptitude technique. Pour ces enseignements, il y a lieu d'indiquer des
objets théoriques, mais il faut aussi donner des indications sous
d'autres formes, et aujourd'hui, la vidéo s'imposent absolument.