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mardi 5 septembre 2023

Comment se comporter devant un examinateur ?

En ces temps de d'examens, aidons les candidats. 

 

Je propose deux cas : celui où le candidat sait répondre à la question posée, et le cas où il ne sait pas. 

S'il sait répondre, son cas est assez facilement réglé, mais attention à ne pas laisser une perle dans le fumier. C'est parce que l'on sait répondre que l'on prendra le plus grand soin à bien mettre en valeur la réponse. Par oral, on ira droit au but, sans hésitations. Par écrit, on ne manquera pas de soigner l'écriture, la mise en page, l'orthographe... 

Si le candidat ne sait pas répondre, tout n'est pas perdu, car il y a toujours cette merveilleuse métaphore du taureau qui fonce quand on agit devant lui un torchon rouge. L'examinateur étant un enseignant, son but est de voir l'apprenant réussir à apprendre. Autrement dit, il faut lui montrer que l'on a appris, même si l'on n'a pas spécifiquement appris le point qu'il nous demande et que l'on ignore

Un exemple ? Soit la question « Combien de cheveux sur ma tête ? ». Une mauvaise réponse est un «  je ne sais pas », qui n'a que le mérite de l'honnêteté (2/20 ?). Une autre mauvaise réponse est « dix millions », parce que c'est du bluff idiot. Le mieux, c'est quand on analyse la question, qu'on la remâche. Des cheveux sur la tête ? Disons que les cheveux sont espacés de un millimètre, ce qui en fait 100 par centimètres carré. A raison d'une tête de 20 centimètres par 20 centimètres, cela fait 400 centimètres carrés, et l'on triplera pour considérer la nuque et les côtés, soit 1200 centimètres carrés, soit finalement 120000 cheveux. Là, l'ordre de grandeur est bon, et il faudrait être malintentionné pour récuser une telle réponse, surtout si elle est énoncée aimablement (autant être poli : cela ne coûte rien). D'accord, c'est un cas où l'on pouvait s'en tirer facilement. 

Un autre ? Je donne ici la question que je pose en Master 2 de chimie analytique, pour le cours de spectroscopie de résonance magnétique nucléaire que je fais : soit un spectre de résonance magnétique nucléaire, avec une résonance de hauteur égale à 10 (unités arbitraires). Le bruit a une intensité de 1. Quelle partie de la résonance est perdue dans le bruit ?
Dans un tel cas, il faut « remâcher la question », c'est-à-dire la faire sienne, notamment par un schéma. 
On voit ici une résonance et du bruit : une partie de la résonance se trouve effectivement dans le bruit. Toutefois un tel schéma mérite mieux : les examinateurs ont le réflexe de demander d'indiquer ce que sont les abscisses et les ordonnées. Alors autant commencer par mettre les axes, puis des libellés pour les deux axes. Souvent, alors, le problème est bien posé... et l'analyse conduit automatiquement à sa résolution. On commencera, par exemple, par considérer que c'est un problème général, qui se résout donc par des équations générales. La résonance ? Si l'on sait que les résonances de RMN sont des lorentziennes, de forme A/(B+x2), c'est tant mieux. Sinon, on écrira que la résonance est de la forme i=f(d), où i est l'intensité, et d le déplacement. Pour le bruit, on pourra considérer qu'il correspond à une bande entre i = 0 et i = e. Et l'on trouvera les intersection de la résonance en résolvant f(d)=e, ce qui conduira à deux valeurs d1 et d2. Enfin, on considérera des valeurs du signal avec les intégrales entre -∞ et d1, entre d1 et d2, puis entre d2 et +∞. Là, on le voit, il manque seulement les parties les plus mécaniques du calcul, mais l'idée y est. 

Pourquoi l'examinateur ne s'en satisferait-il pas ? Après tout, on a cherché à vraiment résoudre la question, sans le prendre pour un imbécile comme si l'on avait énoncé des choses sues sans rapport avec la question. Bref, il y a une stratégie des réponses, et autant la considérer avec autant d'attention que les matières elles-mêmes, n'est-ce pas ?

jeudi 27 juillet 2023

Anti plagiat ? Soyons plus positifs, s'il vous plaît

"Les étudiants pompent"... Voilà ce que l'on entend chez les enseignants, ou, du moins, chez certains. 

Cela dit, nous nous souvenons de nos études... et nous savons que cela est faux : si CERTAINS étudiants "pompent", d'autres ne le font pas. Donc, stricto sensu, cette déclaration est fausse, parce que trop générale. 

Pour autant, ceux qui font la faute de la généralisation abusive, réclament des "logiciels anti-plagiat", tels qu'il en est mis en action dans diverses universités ou grandes écoles. Est-ce judicieux ? 

Puisque tous les étudiants ne "pompent" pas, cette mesure s'apparente à une loi qui voudrait punir les mauvais élèves, et qui s'applique aussi aux bons. Or les lois générales posent des problèmes, parce que les mauvais sont précisément ceux qui font tout pour passer à travers les mailles du filet, de sorte qu'une loi supplémentaire, si elle n'est pas d'abord une incitation, devient un fardeau pour les bons, inutile pour lutter contre les mauvais. 

A priori, cela pose problème. En pratique, il y a bien pire (si l'on peut dire) : imaginons un groupe d'étudiants qui doit rendre un devoir, tous sur le même thème. Si le premier étudiant rend son devoir et si ce devoir est analysé par le logiciel anti plagiat, alors ce devoir vient dans la base de données, de sorte que les étudiants suivants, planchant sur le même devoir, vont se retrouver avec un taux de plagiat... engendré par la remise des devoirs. Le derniers étudiant à rendre son devoir (imaginons que ce soit quelqu'un de merveilleux, qui a voulu utiliser tout le temps disponible pour faire bien) sera considérablement pénalisé, et très injustement. 

De surcroît, en sciences de la nature, on ne doit rien introduire de soi-même, sauf des résultats expérimentaux. Sinon, on doit prendre des phrases dans des publications, et les citer.... de sorte que le taux de plagiat doit être environ de 100  % ! 

 

Bref, je crois que je vais continuer à ne jamais utiliser de tels logiciels... et je vais prendre la peine d'inventer des "devoirs", "sujets d'examen", etc. qui ne conduisent pas à la question du plagiat. Au fond, un examen qui conduit à cette question est-il vraiment un bon examen ? Et puis, arrêtons de manier le bâton sans cesse, apprenons à donner de l'enthousiasme, du goût pour l'Etude, pour les matières que nous enseignons... 

Ceux qui voient le mal doivent macérer bien misérablement. Cherchons de la LUMIERE ! Apprenons à faire confiance, à donner du bonheur autour de nous.

jeudi 8 décembre 2022

Il faut des contrats précis !

 
Je reviens sur la question des évaluations, au cours des études, et quelle que soit la discipline.

Dans un billet précédent, j'ai discuté la question des évaluations des professeurs par les étudiants, et j'évoquais une difficulté régulière, à savoir que les évaluations sont parfois mauvaises quand le contrat d'études n'est pas clair, quel que soit la qualité du professeur.

Et il est exact que, étudiant en formation initiale (si l'on peut dire), j'ai trouvé détestable l'arbitraire de certains professeurs. Je ne dis pas que ces professeurs étaient mauvais, qu'ils enseignaient des choses fausses sans rien comprendre (ce qui se rencontre !), mais je dis ici que la précision des consignes qu'ils donnaient pour les devoirs ou examens laissait un flou où il y avait place pour l'arbitraire. C'est cela surtout que nous leur reprochions.

Dans une évaluation, qui correspond donc à une sorte d'examen, il y a lieu que la commande soit claire. Et j'ai bien vu des collègues très dévoués, très gentils, très impliqués, qui étaient mal évalués parce que le contrat qu'ils proposaient ne pouvait pas être respecté...  et qu'il ne l'était donc pas.

Là, je sors d'un examen de cuisine, où j'ai retrouvé ce même flou, qui était d'ailleurs aggravé par des différences entre les différents membres du jury.

D'une part, quand les mots de l'énoncé ne sont pas justes, ou quand ils sont flous, ou discutables, les membres du jury ne peuvent pas s'accorder sur les évaluations qu'ils font puisqu'ils n'évaluent pas les mêmes chose.
Par exemple si l'on demande d'évaluer la "saveur" d'un plat, alors quelqu'un qui n'a pas un usage affuté des mots jugera le sans doute le goût tandis que quelqu'un qui sait ce qu'est la saveur jugera... la saveur. Ce n'est pas la même chose !

De ce fait on comprend bien que les mots utilisés dans le contrat didactique sont suprêmement importants. Mais au-delà des mots, il y a les contenus, et là encore, la question se pose, car si l'on demande, par exemple, de respecter une disposition dans une assiette, les choses sont claires : la disposition est respectée ou pas. En revanche, si l'on ne stipule pas qu'une sauce doit être conforme à un canon très spécifique, par exemple celui de Joseph Favre, ou celui d'Edouard Nignon, ou celui de Bocuse, alors les étudiants sont parfaitement habilités à produire des choses différentes selon les bases qu'ils utiliseront. Et, en conséquence, les professeurs ne seront pas habilités à  les sanctionner de ne pas avoir utilisé la base qu'il avait implicitement en tête.

Il y a donc lieu d'être le plus précis possible, dans la commande.

D'ailleurs j'ajouterai volontiers que, dans l'évaluation, les critères et leur pondération doivent être explicites, parce que si, dans un plat, on ne stipule pas que le goût est essentiel, alors on peut obtenir une sauce parfaitement exécutée du point de l'exécution, et parfaitement ratée du point de vue du goût.

Oui, je veux des référentiels explicites, des critères d'évaluation explicites.

Un plat imposé, dans un examen de cuisine : n'oublions pas les "commandements" de la cuisine

C'est ici que se trouve l'analyse que je fais d'un examen de cuisine que je présidais hier : https://scilogs.fr/vivelaconnaissance/un-plat-impose-dans-un-examen-de-cuisine/

Pour un examen de cuisine

 J'analyse l'examen de cuisine que j'ai présidé hier : je ne suis pas un artiste, mais il y a lieu de bien penser la technique, d'abord. 


Voir ici https://scilogs.fr/vivelaconnaissance/a-propos-de-concours-de-cuisine/


samedi 4 octobre 2014

Ne prenons pas les examinateurs pour des idiots


Le « pari de Pascal »  (Pensées, 1670) est célèbre : « Vous avez deux choses à perdre : le vrai et le bien, et deux choses à engager : votre raison et votre volonté, votre connaissance et votre béatitude ; et votre nature a deux choses à fuir : l'erreur et la misère. Votre raison n'est pas plus blessée, en choisissant l'un que l'autre, puisqu'il faut nécessairement choisir. Voilà un point vidé. Mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu'il est, sans hésiter. »

Ne pourrions-nous proposer, de même, de faire le pari de la bienveillance, de l'intelligence et de la culture, sans prétention ? D'une part, il y a les malfaisants, les jaloux, les méchants, les malhonnêtes, les paresseux, les autoritaires…  qui nous nuiront quoi que nous fassions. D'autre part,  il y les bienveillants et ceux qui n'ont pas d'idée a priori de nos travaux. Si nous mettons de l'intelligence dans nos productions, les individus de cette seconde catégorie, les seuls à qui il soit digne de s'adresser, nous seront redevables  des pétillements que nous aurons glissés dans notre version des faits.
Là, il faut que je demande pardon à mes amis, et que je rectifie une erreur que j'ai faite dans un de mes livres et quelques articles : ébloui par le moine Shitao, ce théoricien chinois de la peinture et de la calligraphie, je l'avais suivi quand il évoquait la « poussière du monde »


La poussière du monde ? Ce sont les modes, les « chiens écrasés », les potins, les agissements des grenouilles qui veulent se faire plus grosses que le  bœuf (ceux qui prétendent diriger, alors qu'il n'est pas certain qu'ils se dirigent eux-mêmes : je pense aux « dirigeants » dont les enfants  sont délinquants, ou s'entretuent pour des histoires de mœurs  sordides, sans compter ceux qui affichent  impudiquement leur vie publique… minable). Bref, il y aurait la « poussière du monde ».
Toutefois, dire un mot ne fait pas exister l'objet « matériellement » ! Le manteau  du père Noël n'est ni rouge ni bleu… puisque le père Noël, n'existant pas, n'a pas de manteau. La poussière du monde ? L'idée est fascinante, mais si nous nous efforçons de mettre de l'intelligence dans nos actes, pensées, discours, rien n'est anodin, rien n'est poussière.
Et  c'est ainsi que nos productions seront plus belles, adressées à des « amis ».

samedi 20 avril 2013

Nu !

Note ajoutée quelques jours après avoir fait le billet : n'hésitez pas à aller voir le commentaire qui a été placé par "patricedusud".


Le billet lui-même :

Alors que je cherchais à savoir ce qu'un étudiant de fin de "master en agro-alimentaire" (j'utilise l'expression pour simplifier) doit avoir comme compétences, j'avais dressé une liste :
- expression du potentiel chimique
- expression de l'enthalpie libre
- relation de de Broglie
- expression d'une gaussienne
- loi des gaz parfaits
- expression de la force de Stokes
- loi fondamentale de la dynamique
- loi d'Einstein pour la viscosité de systèmes dispersés
- divers colloïdes
- expression de la tension de surface
- lois de Fick
- définition du module d'élasticité
- règle de Hückel pour l'aromaticité
- équation de Schrödinger
-..

Dans cette liste, figuraient des questions comme :
- quel est le pH d'un acide faible en solution dans l'eau ?
- quelle est la primitive de la fonction sin(x).cos(x) ?

Toutefois, je viens de comprendre que nous sommes au XXI e siècle, et que des choses qui semblent importantes aux enseignants ne le sont peut-être pas.
Ainsi, des logiciels de calcul formel donnent en un clic la primitive de sin(x).cos(x)... ou de toute autre fonction. Ne sommes nous donc pas en train de demander d'extraire à la main des racines carrées, à des gens qui disposent de calculettes ?
Pour le calcul du pH d'un acide faible dans l'eau, de même : la formule classique (qui n'est pas inutile) s'obtient après avoir effectué des approximations, mais les calculs de pH ont longtemps été des moments difficiles de l'enseignement de la physico-chimie, parce que, derrière la partie de compréhension, il y avait une partie de calcul qui coinçait.
Pour établir les équations dont la résolution donne le pH d'une solution, il faut écrire :
- la loi de conservation de la masse
- la loi de conservation de la charge électrique
- la loi de conservation de l'énergie (Ka)
- les équilibres chimiques en jeu
Ensuite, on calcule... ou bien, au XXI e siècle, on dit au logiciel de résoudre le système d'équations, et, avec 200 décimales, on obtient un résultat bien meilleur que celui que l'on aurait en faisant des approximations. Surtout, cette méthode moderne évite les contorsions que l'on trouve parfois dans des livres de chimie des solutions, où l'on enchaîne les cas plus ou moins particuliers, et tous sans intérêts : après tout, c'est la physico-chimie qui nous intéresse, pas les calculs qu'une machine peut faire, non ?

Tout cela pour dire que, même si les enseignants en ont bavé à apprendre des choses devenues inutiles, il semble... inutile d'encombrer les programmes avec ces dites choses rendues inutiles par l'avènement de l'informatique.

Ce qui m'a fait comprendre le sentiment qu'ont certains cuisiniers dont le savoir est réfuté par les explorations scientifiques. Oui, nous avons le sentiment d'avoir perdu notre temps, à apprendre des choses devenues sans intérêt, périmées. Mais quel bonheur, au fond, de pouvoir apprendre davantage, mieux !