Je retrouve ce texte qui me dit "il faut utiliser le terme "superstition" avec beaucoup de prudence"... et je me dis qu'il commence mal : "il faut", "on doit", "il ne faut pas", "on ne doit pas"... sont des termes... interdits ;-) dans notre Groupe de gastronomie moléculaire, où nous préconisons plutôt l'usage de la raison.
D'ailleurs le texte en question continue avec "Il convient", qui n'est guère mieux.
Plus loin, le texte nous dit "Les recettes "médicales" à base de tisane que l'on peut trouver chez certains guérisseurs relèvent-elles de la superstition ou d'une connaissance séculaire des vertus médicinales de plantes" ? Là, j'ai répondu, dans un billet précédent, que les médecines anciennes méritent de ne pas être dénommées des "médecines" avec des guillemets, mais simplement des "médecines". Et ces dernières se jugent à leur efficacité. L'aspirine est une modification d'une connaissance ancienne, à savoir que les extraits de saule étaient (un peu) efficaces contre les fièvres. Mais la pharmacie a appris à faire mieux, en transformant l'acide salicylique en acide acétylsalicylique. De même pour la digitaline, des digitales : la pharmacie a appris à l'extraire et la doser mieux que dans des tisanes !
Plus loin : "Les "prophéties" concernant le temps à venir relèvent-elles de la superstition ou d'une connaissance intuitive de certains mécanismes naturels?" Là, on peut observer que notre auteur met des guillemets (à nouveau) à "prophétie"... mais sont-ils nécessaires ? Une prophétie, dès 1119, c'est une prédiction faite par inspiration divine. Le terme est donc mal employé. A moins que l'usage ait été voulu, auquel cas ce serait la rhétorique du dragon chinois : on crée un dragon de papier, puis on le pourfend afin de montrer que l'on est l'égal de Saint Georges. Pour le point technique, il est mal venu de parler de prophétie, car il s'agit seulement d'observations répétées, et de l'observation de régularités. Là encore, on retrouve une situation analogue à celle de la pharmacie... et là encore, on peut s'émerveiller des progrès de la météorologie moderne, par rapport aux savoirs anciens, souvent périmés.
Mais j'arrive maintenant au point essentiel : "Les "esprits forts" qui aiment utiliser le mot de superstition en parlant des croyances populaires feraient bien de constater que ce qu'ils appellent "la superstition" et que nous préférons appeler quête de l'irrationnel, se retrouve dans toutes les couches sociales de la population. La cause principale de ces phénomènes n'est pas l'ignorance, comme le pensent ces descendants des philosophes du siècle des Lumières. Si ces croyances populaires, que l'on trouve surtout aux grandes étapes de la vie, aux grands moments du calendrier traditionnel, et qui concernent la ferme et ses dépendances, ont gardé une certaine vitalité, c'est parce qu'elles apportent une réponse à des questions vitales que les nommes se posent. A notre avis, à la base de nombreuses croyances populaires, il y a l'angoisse de l'homme."
Voilà un gros morceau, qui mérite des commentaires. D'abord, notre homme fait une pétition de principe, en accusant tous les "esprits forts" de confondre superstition et croyances populaires. On peut être un esprit fort un peu subtil, et bien distinguer les superstitions, d'une part, et les croyances populaires... mais notre homme ne savait pas utiliser les bons mots, quand il s'agissait de prévision, de prédiction ou de prophétie, alors pourquoi serait-il plus subtil ici ?
Je propose de distinguer les trois termes superstition, croyances populaires, quête de l'irrationnel. La quête, c'est une quête ; pas un simple besoin, comme il aurait pu le dire si sa pensée avait été plus aiguisée.
Ce penchant (d'accord, je connote) pour l'irrationnel, cette forme de la pensée magique (d'accord, j’interprète) est-il de toutes les couches sociales ? Pourquoi pas : on voit mal pourquoi il ne serait pas répandu partout... d'autant que je suis de ceux qui ne voient pas dans la "richesse" un parallèle avec l'intelligence, la raison, etc.
Autre pétition de principe, quand il accuse les "esprits forts" de croire que les superstitions seraient fondées sur l'ignorance. Ne pourrait-on invoquer l'insécurité fondamentale de l'individu, plus simplement ? Ou la pensée magique ?
Enfin, et surtout, il nous dit que les croyances apportent une réponse à des questions "vitales" : vitales, vraiment ? Pardonnez à quelques esprits forts de bien vivre sans ces réponses ! D'autre part, une réponse mauvais reste une réponse mauvaise : n'aurions-nous pas intérêt à chercher de bonnes réponses ?
Et puis, pour en terminer : l' "angoisse de l'homme"... Ah, la fameuse angoisse de l'homme : je ne dénie pas à cet homme d'être angoissé, mais qu'il me pardonne de ne pas l'être. Le pape Jean-Paul II avait bien raison à de dire à des hommes de ce type "N'ayons pas peur"... mais je crois que le conseil est inutile. Mon père parle bien de "sécurité de base", ce sentiment de bien être dans la vie qu'ont certains individus qui ont été aimés convenablement quand ils étaient enfants. Les autres auront-ils peur toute leur vie ? Si c'est le cas, je les plains. Vive le verre (plus qu') à moitié plein. Trink, comme disait notre bon Rabelais !
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