dimanche 16 octobre 2011

Les leçons d'un diner note à note

Lors du diner note à note servi par les chefs enseignants de l'Ecole du Cordon Bleu à Paris, il y a eu sans cesse la question lancinante de la reconnaissance et de la référence.

Par exemple, le menu indiquait à un moment donné le mot "viande" : nous avons tous comparé ce qui était servi à de la viande... alors que les cuisiniers avaient très inventivement mêlé de l'amylose à de la gélatine, pour donner une consistance mi végétale-mi animale, inconnue, remarquable.
Par exemple, le menu a évoqué la mozzarella, lors du "fromage" (encore une évocation): la consistance du mets servi n'avait rien à voir avec de la mozzarella (c'était bien mieux), mais nous avons tous comparé.
Le premier plat comportait une sphère jaune et tendre dans un "nid" blanc, foisonné: nous n'avons pas pu nous empêcher de penser à de l'oeuf... d'autant que le menu évoquait des oeufs en meurette.

Pour ce dernier met (qui fut le premier servi), il y avait une petite acidité... qui dérangeait pour un oeuf... mais qui était bien moindre que dans une salade. Au nom de quoi aurions-nous pu juger que le mets était trop, ou insuffisamment acide ?

Au total, ce fut un très étonnant diner, parce que, pour une fois, les repères étaient perdus.
Etait-ce "bon" ? La question me ramène plus de 20 ans en arrière, quand les premiers plats de cuisine moléculaire sont apparus. On était désarçonné. Ou quand le free jazz s'est introduit : la musique de John Coltrane a semblé d'une audace inouie ; on ne savait pas si c'était "beau", mais on savait que c'était nouveau, que nos repères étaient dépassés, inutiles.

Ce qui pose la question du beau (le "bon", pour la cuisine). Avez-vous entendu la musique composée par Varèse dans les années 1940 ?


(un immense "Merci!!!!!" aux chefs enseignants de l'Ecole du cordon bleu : Patrick Terrien, Patrick Caals, Philippe Clergue, Frédéric Lesourd, Patrick Lebouc, Franck Poupard, Bruno Stril et Marc Thivet, Jean-François Deguignet, Xavier Cotte, Nicolas Jordan and Jean-Jacques Tranchant.

1 commentaire:

  1. Une autre expérience pour troubler nos sens... le dîner dans le noir. Une expérience formidable qui nous montre bien que le goût commence par la vue. J'imagine que cela doit être encore plus déroutant avec de la cuisine note à note. A tester.

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