Alors que le week-end se termine, que j'ai senti des odeurs de barbecue dans tout le quartier, on m'interroge sur la toxicité des aliments que l'on me dit "ultra transformés".
Je réponds évidemment en envoyant un article que j'avais publié à ce sujet et qui analysait une publication récente, scientifique, bien évaluée, montrant que les aliments "ultra transformés" n'existent pas, que ce sont des chimères au même titre que des "carrés ronds" ou les "Père Noël".
Or, avant de caractériser un objet, il s'agit d'en démontrer l'existence et oui, on peut parler de "carré rond" (la preuve : nous en parlons ici), mais cela ne prouve pas leur existence et on aura beau en parler pendant des années, les "carrés ronds" continueront de ne pas exister.
Le mot "ultra transformé" est un mot plein de pathos, ce qui n'a rien à voir avec la rigueur scientifique ou technologique. Il a été introduit par des chercheurs brésiliens que je n'aimerait pas avoir comme collègues (je veux de l'intelligence, de la bonté, de la droiture), qui, manifestement, avaient des comptes à rendre avec ce que certains nomment l'industrie alimentaire, mettant dans le même sac les coopératives qui produisent du lait ou de la farine et les fabricants d'aliments transformés que sont ces jambon, pizza, et cetera présents dans les supermarchés.
Une certaine idéologie veut s'opposer une cuisine plus domestique ou artisanale à l'industrie alimentaire, et cette idéologie utilise des arguments déplorables à ce propos, confondant industrie et additif, confondant également les différentes sortes d'additifs... car on n'oubliera pas que des gélifiants sont des produits de natures bien différentes des conservateurs, par exemple.
Mais surtout, s'il y a des questions de toxicité qui doivent être considérés, alors il y a lieu de les regarder honnêtement et par exemple, j'y reviens à propos du barbecue, il est utile de bien savoir que des viandes grillées au barbecue contiennent environ 2000 fois plus de benzopyrènes cancérogènes qu'il n'en est admis par la loi dans du saumon fumé vendu en supermarché.
D'ailleurs, dans le supermarché qui est près de mon domicile, le saumon fumé est produit par le poissonnier du supermarché, comme je le fais chez moi : avec les saumons qu'il ne vend pas, il fait du saumon fumé. Je ne suis pas certain que cet homme, qui utilise des techniques bien loin des techniques industrielles mise en œuvre pour faire le saumon fumé, soit garant de moins de toxicité que l'industrie : dans son fumoir local, il n'a aucun moyen de doser les benzopyrènes de ses saumons, ni d'en limiter la quantité, contrairement à l'industrie qui elle, à l'obligation de le faire et de noter sur le paquet les quantités correspondantes,.
Plus généralement, en matière de toxicité alimentaire, il faut redire que la question est bien mal traitée, notamment par ce qui croient pouvoir dire que la tradition (laquelle) ou la "nature" serait des garants d'innocuité. Car les viandes cuites à la braise sont chargées de base de benzopyrènes cancérogènes. Et la ciguë est parfaitement naturelle et parfaitement toxique.
Bref, la question est généralement très mal traitée, et elle fait l'objet de nauséabondes discussions idéologiques, ce qui est pire, car on cache quelque chose dans le débat, on ment en réalité sur la base d'idées que l'on veut promouvoir.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
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