Pour Karl Popper, la qualité essentielle de toute théorie scientifique est d'être "réfutable" : contrairement à la religion, qui admet l'existence du divin (c'est une question de foi, pas de preuves), la science veut dire des choses non pas "vraies", mais discutables autrement que par des sentiments. Popper, qui écrit en anglais, utilise le mot "falsifiability", mais il ne faut pas le traduire par "falsifiable", car toutes les théories scientifiques, modèles réduits de la réalité, ne peuvent prétendre à être vraies, de sorte qu'il serait idiot de chercher à montrer qu'elles ne sont pas vraies, qu'elles sont fausses. On ne dira jamais assez aux épistémologues médiocres (seulement ceux-là ; les autres sont de bons épistémologues) que la question de la science n'est pas la vérité, le vrai, le faux, mais que la seule question est l'adéquation des théories aux phénomènes. Ce que l'on cherche, c'est à réfuter les théories, les prétentions que nous avons à décrire le réel, et nous cherchons à réfuter non pas dans un esprit négatif, destructeur, mais parce que c'est la condition de proposer une théorie mieux appropriée. Toute théorie réfutée est alors éliminée, ou conservée seulement dans un champ d'application particulier. Par exemple, la loi d'Ohm, qui stipule la (fausse) proportionnalité de la différence de potentiel et de l'intensité du courant, entre les bornes d'une résistance électrique, est conservée quand la précision n'est pas grande, et elle ne cède la place à mieux, au deuxième ordre ce ce premier ordre, que si l'on a besoin d'une précision de l'ordre du deuxième ordre. Au total, on le voit, ce n'est une question de "falsifier" la science, ce qui laisse planer un doute sur l'honnêteté de l'entreprise ; non, "falsifiabilité" serait un anglicisme, et nous devons parler de "réfutabilité". Tiens, pour la bonne bouche, et si l'on allait y voir de plus près dans les acceptions de ce terme ? Voici ce que dit le Trésor de la langue française informatisé pour "réfutable" : Empl. pronom. réfl. Reconnaître ses erreurs, ses défauts ou ses fautes. M. de Lamartine, l'historien fascinateur des mêmes Girondins, annonce qu'il va se réfuter et se corriger à son tour, en revoyant après quinze ans d'épreuve ses éblouissants tableaux (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 1, 1862, p. 363).C. P. anal. [Le suj. désigne une chose] Infirmer, démentir ce qui était affirmé. Le temps qui passe réfute d'heure en heure nos pronostics (BUTOR, Passage Milan, 1954, p. 143).Empl. pronom. passif. Se démentir, se contredire. Une objection de ce genre se réfute elle-même (G. MARCEL, Journal, 1914, p. 102).REM. 1. Réfutable, adj. Qui peut être réfuté. Argument, raisonnement réfutable. Tout ce qui est réfutable est cent fois réfuté (ALAIN, Propos, 1929, p. 861). 2. Réfutateur, -trice, subst. Celui, celle qui réfute. S. Jean n'est ni un plagiaire de Platon, ni un réfutateur de ce même Platon. Il ne réfute pas Platon, il le continue (P. LEROUX, Humanité, 1840, p. 821).Prononc. et Orth.: [], (il) réfute [-fyt]. Ac. 1694, 1718: re-; dep. 1740: ré-. Étymol. et Hist. 1. Ca 1330 « repousser, renvoyer une personne qui vient d'exprimer un fait, une opinion, contester » (GUILLAUME DE DIGULLEVILLE, Vie hum., V, 1856 ds T.-L.); 1694 refuter un Autheur (Ac.); 2. a) 1546 « repousser, détruire une chose », refuter l'injure (Palmerin d'Olive, 176a, d'apr. H. VAGANAY ds Rom. Forsch. t. 32, p. 148); b) 1559 « id. en démontrant qu'elle n'est pas fondée » refuter ce point (AMYOT, trad. de PLUTARQUE, Hommes illustres, Compar. Démosthène-Cicéron, éd. G. Walter, t. 2, p. 797). Empr. au lat. refutare « refouler, repousser; réfuter »; cf. l'hapax refuded, parfait 3 sing. (fin Xe s. Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 147) qui est à rapprocher de l'a. prov. refudar « refuser, rejeter » (av. 1150 MARCABRU, Œuvres, éd. J. M. L. Dejeanne, V, 4; XL, 10). Fréq. abs. littér.: 433. Fréq. rel. littér.: a) 925, b) 419; XXe s.: a) 380, b) 594. Bbg. GOHIN 1903, p. 266 (s.v. réfutateur).
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