Aucun de mes billets n'a suscité autant de discussions que celui qui concernait la vulgarisation scientifique, une indication qu'il y avait là une préoccupation commune. Il faut donc y revenir.
Ayant largement propagé l'idée selon laquelle la cuisine est d'abord du lien social, puis de l'art, puis de la technique, et ayant généralisé cet idée à l' enseignement, notamment l'enseignement des sciences, je ne peux évidemment pas proposer une méthode unique pour la vulgarisation, puisqu'il s'agit de littérature, d'art, donc.
Or l'art, par définition, échappe aux règles. Tout est d'exécution, et il n'y a pas un une méthode meilleure de vulgarisation. Autrement dit, toute analyse qui conclurait avec des recommandations serait fautive par principe.
Il faut donc le répéter, le répéter encore : l'art de la vulgarisation est un art, en cela qu'il doit vraiment produire de l'émotion. Ou, plus exactement, on peut sans doute faire de la vulgarisation artisanale, pour laquelle des canons techniques devront être respectés, et de la vulgarisation artistique, pour laquelle la technique est importante bien sûr, mais pas primordiale.
Je m'explique : si Rembrandt n'avait pas évité les coulures de la peinture sur ses toile, il n'aurait jamais fait oeuvre d'art, de sorte que l'artiste devait être un bon technicien. En revanche, éviter les coulures n'était pas son principal objectif, mais seulement une technique à l'appui d'une idée. Idem pour Proust, Mozart, Rabelais...
Tout cela étant dit, je me laisse maintenant aller à une analyse : je propose de bien repérer les moments de la science quantitative, en vue de chercher des méthodes de vulgarisation (de la technique, donc).
Je crois avoir bien identifié que les temps essentiels de la recherche scientifique sont :
l'observation du phénomène,
sa caractérisation quantitative,
la réunion des données en équations synthétiques,
la recherche de mécanismes, par induction, à partir de ces équations, qui cadrent les divagations,
la recherche de déductions à partir de la théorie en vue d'identifier un aspect que l'on pourrait tester,
et le test expérimental de cette conclusion ;
puis, on repart à l'infini, en focalisant de plus en plus.
Si l'on admet la description précédente, donc -et je n'ai entendu de contradicteurs-, alors on voit le grain que la vulgarisation doit moudre tient dans les temps identifiés : observation des phénomènes, caractérisations quantitatives, réunion des données en lois, etc.
De ce fait, on est conduit à penser que, s'il y a vulgarisation, il y a présentation d'un travail scientifique, de sorte que chaque aspect peut être montré... ce qui conduit à identifier des vulgarisations concernant les divers temps de la science quantitative. Evidemment on peut mêler des explications de plusieurs d'entre eux !
Faut-il que le discours vulgarisateur soit divisé en autant de parties qu'il ya de temps dans la science ? La réponse a été donnée plus haut : s'il y a art, chacun fait comme il veut... mais l'ouvrier sera finalement jugé à son ouvrage.
En tout cas, je ne fais pas preuve d'originalité en maintenant que ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, de sorte que je ne crois pas inutile d'avoir tenu le raisonnement précédent. Certes, un grand artiste, un grand orfèvre n'a pas besoin de conseils élémentaires, mais je connais bien peu de telles personnes, de sorte que je ne saurais trop, au moins pour moi-même, utiliser le précédent raisonnement.
Post scriptum : quand aux analyses a posteriori, par les nombreux exégètes de la science, qui passent leur vie à analyser les productions des autres au lieu de produire eux-mêmes, je me souviens avec hilarité de ce très long article où l'une de ces personnes avait analysé... un de mes articles de vulgarisation. C'était dans une vie antérieure, mais je me souviens très bien comment j'avais fait l'article, levé un matin du pied droit plutôt que du pied gauche, et comment rien de ce qui était décrit ne correspondait à la réalité ! De là à généraliser au autres œuvres : littéraires, musicales...
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