On m'interroge à propos de crème pâtissière... en me donnant une recette qui comporte de la maïzena : c'est manifestement une recette moderne, mais, pour ce qui me concerne, je cherche toujours à avoir une idée fondée des recettes, et je consulte les livres anciens pour trouver la plus ancienne, car selon la règle internationale, c'est celle-là qui doit s'imposer. Et quand une recette s'en écarte, il faut le dire.
Bref, c'est dans le traité de pâtisserie de Pierre Lacam (1878), que j'ai trouvé ma plus ancienne recette de crème pâtissière, ainsi libellée : "500 gr. de farine et 8 œufs dans une casserole, puis les détremper avec 1 litre et 1/2 de lait, sel. La cuire 20 minutes sur le feu. "
Là, l'ordre est très clair : farine, oeufs, lait. Pas de fioriture.
Puis, avec Joseph Favre, une indication importante est donnée : "Crèmes pâtissière : terme générique embrassant toutes les crèmes liées sur le feu et usitées pour les entremets et les pâtisseries. " Nous devons conclure que Favre n'est pas légitime.
Mais viennent Darenne et Duval, en 1911, qui indiquent : Darenne et Duval, 1911 :
"Crème pâtissière. — 5oo gr. sucre en poudre travaillé dans une terrine avec 12 jaunes d’œufs, ajouter ensuite 100 gr. farine, vanille. un grain de sel, un litre de lait bouillant ; faire donner un bouillon sur le feu en remuant à l’aide d’une spatule pour éviter d’attacher. Débarrasser pour l’usage et beurrer la surface pour empêcher la formation d’une croûte."
Cette fois, et seulement cette fois, le sucre est présent. D'ailleurs, cette fois aussi vient la précision culinaire de fouetter les jaunes avec les sucres, afin de faire un ruban, une préparation qui blanchit parce qu'elle est "foisonnée" (plein de bulles d'air dispersées dans le liquide où le sucre se dissout), ce qui donnera à la sauce plus de moelleux.
Ainsi, quand mon interlocuteur se demande s'il faut mettre la maïzena ou la farine avant ou après le ruban, je commence par observer que la question est la même, pour la farine et pour la maïzena, car ces deux matières sont principalement faites d'amidon, même si la farine contient aussi des protéines.
Et, n'ayant pas fait d'expérience pour l'établir expérimentalement, j'ajouterais personnellement ces ingrédients après le ruban, car je ne vois pas comment ils l'amélioreraient.
Mais rien ne vaut une expérience... Enfin, une série de plusieurs expériences, car un seul test ne vaut pas grand chose. Il faudra diviser les ingrédients en deux moitiés égales, pesées, et comparer :
- un mélange de jaune et sucre qu'on aura battu (pendant un temps déterminé, avec une machine régulière), avant d'ajouter la farine ou la maïzena
- un mélange de farine/maïzena et jaune, auquel on ajoutera le sucre avant de battre à l'identique.
D'ailleurs, il faut sans doute dédoubler ces expériences, en les faisant d'une part pour la farine, et d'autre part pour la maïzena.
Et, comme je l'ai indiqué plus haut, il faudra répéter ces comparaisons plusieurs fois, avant de pouvoir commencer à tirer des conclusions.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
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