Si nous allons chez le poissonnier, nous voyons des crevettes de plusieurs sortes :
- rarement, et seulement chez les très bons poissonniers, il y a des crevettes encore vivantes, qui bougent, et celle-là sont évidemment bien préférables ;
- puis il y a des crevettes encore crues, mais qui ont été congelées et qui ont donc gardé une couleur grise une chair très tendre, presque transparente
- il y a enfin les crevettes déjà cuites, roses.
Évidemment, on ne cuira pas toutes ces crevettes de la même façon et, pour les crevettes déjà cuites, on évitera de recuire pour la raison qui s'applique aux trois cas : la chair des crevettes, comme comme les viandes très tendres initialement, durcit à la cuisson. Cest d'ailleurs le même phénomène que pour des œufs : quand on les cuit trop longtemps dans l'eau bouillante, le blanc devient caoutchouteux et le jaune sableux : un désastre que nous voulons éviter.
Donc si l'on se procure des crevettes déjà cuites, alors il n'y a qu'à les réchauffer et il ne faut pas les cuire une seconde fois.
Pour les crevettes crues, vivantes ou congelées, en revanche, la cuisson est la même dans les deux cas à savoir qu'il faut coaguler les chair, ce qui leur donnera de l'opacité (pensons au blanc d'oeuf cru qui devient blanc et opaque en coagulant) mais pas plus.
Et il y a la question de la carapace : elle est faite de carbonate de calcium, inerte chimiquement, et de chitine, qui est un composé cousin de l'amidon, de la cellulose...
Chauffée fortement, la chitine brunit, et elle prend un goût remarquable. C'est pourquoi je n'hésite pas personnellement à cuire les crevettes dans leur carapace, à feu très vif afin de brunir cette dernière, et en arrêtant après quelques instants, dès que je pressens que la chair est coagulée.
Alors, on peut servir les crevettes encore brûlantes, éventuellement salées, poivrées, flambées au whisky, nappées de crème fraîche, arrosées de quelques gouttes de jus de citron : les convives sont délecteront avant de se lécher les doigts.
Mais si l'on veut éviter à nos convives de ce salir, alors c'est en cuisine que l'on décortiquera les crevettes seulement à moitié cuites, que l'on réservera les carapaces pour poursuivre leur brunissement avant de les cuire dans de l'eau afin de produire une belle bisque, et que l'on terminera la cuisson des chairs afin qu'elles arrivent bien chaudes dans l'assiette.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
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