Pourquoi ne peut-on pas cuire une mousse au chocolat ? Répondons d'abord rapidement que l'on peut cuire une mousse au chocolat, si l'on sait s'y prendre.
Mais pour la question initiale, elle est de celles qui montrent la supériorité d'une compréhension de la microstructure (la structure physique et chimique) des aliments.
Quand ne sais rien de la constitution physique et chimique des aliments, alors tout est incompréhensible.
En l'occurrence, on serait réduit à faire cuire une mousse au chocolat et à voir qu'elle s'effondre. On ne peut pas prévoir le résultat d'opérations que l'on n'a pas encore faites, sauf quand elle sont très semblables à des opérations qu'on a faites.
Inversement, en comprenant, je suis certain du résultat que j'aurais, et, mieux, je peux faire cuire une mousse au chocolat si je la construis de façon que je puisse la faire cuire.
Mais commençons par la mousse au chocolat on l'a produit généralement à partir de blanc d'oeuf que l'on bat en neige, et que l'on ajoute à du chocolat fondu (éventuellement additionné de beurre et de jaune d'oeuf).
Là, la phase "dispersante", c'est-à-dire la matière où l'on disperse quelque chose, c'est la matière grasse. A l'intérieur, il y a de la mousse qui a été divisée, et que l'on voit d'ailleurs à l'oeil nu quand la division n'a pas été parfaitement homogène.
Si l'on cuit cette préparation, la phase dispersante, le chocolat fondu, va fondre à nouveau ; il va donc couler comme la matière grasse fondue, et la mousse qui est à l'intérieur va donc s'effondrer.
Notons qu'on aurait pu s'y prendre très différemment en dispersant plutôt le chocolat fondu dans la mousse. Dans ce cas, on aurait pu cuire la mousse au chocolat et obtenir une sorte de gâteau : en effet, une mousse de blanc d'oeuf peut se cuire au four à micro-ondes, par exemple, parce que la phase dispersante est de l'eau : il y a des bulles d'air qui sont dispersées dans l'eau, entourées par des protéines. Or ces protéines peuvent coaguler et, lors d'une cuisson micro-ondes, l'ensemble des protéines coagule et fige la mousse.
Si l'on a dispersé du chocolat dans la mousse, il peut fondre localement, mais la mousse au chocolat continuera de se tenir, puisque le réseau global aura été formé.
Il en va de même npour une mayonnaise et plus généralement pour les gibbs que j'ai introduits il y a plusieurs années et qui sont des émulsions dans du blanc d'oeuf, que l'on passe au four pendant quelques instants pour faire comme des soufflés qui tiennent très bien... parce que les protéines autour des gouttes d'huile sont coagulées par la chaleur.
Décidément, c'est la compréhension de la microscopie des aliments qui permet de prévoir leur comportement, alors que se reposer sur des recettes nous laisse bien démunis !
N'hésitons pas : réfléchissons toujours à la microscopie des aliments que nous préparons.
Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
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