Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
samedi 16 décembre 2017
L'innovation en matière de « cuisine » ?
Dans notre monde un peu snob, la « cuisine » est une activité bien prosaïque, bien peu « sérieuse »... mais l'industrie alimentaire fait-elle autre chose que de produire des aliments, tout comme les font les cuisiniers, mais à une autre échelle ?
Il suffit de regarder les rayonnages des boutiques pour constater que non : si innovation il y a, dans l'industrie alimentaire, elle concerne surtout les méthodes de production, leur sécurité, la régularité de la qualité, le conditionnement.
Donc que les cuisiniers ne soient pas timides : leurs « innovations » valent bien celles d'un monde « sérieux » (parce qu'il y a de l'argent en jeu).
Toute celle longue introduction pour observer qu'il est remarquable que l'on n'ait pas, pendant longtemps, véritablement tiré le meilleur parti des ingrédients alimentaires. Savez vous, par exemple, combien on peut faire de blanc en neige à partir d'un seul blanc d'oeuf ? Des litres et des litres, indique un calcul simple. En pratique, des élèves de lycée hôtelier parisien ont battu le record du monde, avec plus de 40 litres.
Comment cela est-il possible ? Partons d'un blanc d'oeuf, lequel est fait de 90 pour cent d'eau et de 10 pour cent de protéines. Battons : le fouet fait « foisonner » le liquide.
Autrement dit, le fouet introduit des bulles d'air dans le liquide, et l'on obtient une mousse. Pas beaucoup, il faut le dire.
Après un certain temps, les bulles deviennent si petites et serrées qu'on ne les voit plus, que la mousse est « ferme », mais le volume n'augmente plus. Pourquoi ?
Il peut manquer de l'eau, des protéines, de l'air. Lequel fait défaut ? Pour le savoir, il suffit d'essayer, par exemple en ajoutant de l'eau, et c'est ainsi que l'on constate que l'eau manquait effectivement. On bat, on ajoute de l'eau, on bat encore, on ajoute de l'eau... et ainsi de suite, le volume augmentant de plus en plus.
En novembre 2013, des élèves ont ainsi battu pendant plus de deux heures et demie, au Rectorat de Paris, et ils ont obtenu plus de 40 litres. A partir d'un seul blanc d'oeuf !
Au fait, si l'eau ajoutée a du goût (jus d'orange, par exemple), et si l'on sucre, alors la mousse obtenue peut être cuite comme une meringue, et l'on obtient l'invention que j'ai nommée « cristaux de vent ».
N'est-ce pas que les applications de la science quantitative sont belles ?
Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)
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