Ce blog contient: - des réflexions scientifiques - des mécanismes, des phénomènes, à partir de la cuisine - des idées sur les "études" (ce qui est fautivement nommé "enseignement" - des idées "politiques" : pour une vie en collectivité plus rationnelle et plus harmonieuse ; des relents des Lumières ! Pour me joindre par email : herve.this@inrae.fr
dimanche 31 mars 2019
La liaisons par des roux
Lors de notre séminaire de gastronomie moléculaire de mars 2019, nous avons exploré la question de la liaison des veloutés à l'aide des roux. Autrement dit, la question était la liaison par la farine et autres produits amylacés. Car c'est cela, un velouté : un liquide auquel on ajoute une matière amylacée (le plus souvent de la farine), et que l'on cuit en vue d'obtenir un épaississement plus ou moins notable. Ainsi, dans un potage, un léger épaississement suffit, alors qu'on veut une liaison plus forte pour une sauce blanche, par exemple.
Plus précisément, nous avons cherché à savoir si la cuisson soutenue d'un roux permet - ou pas- de mieux lier un velouté, et nous avons également cherché si le vinaigre conduisait à une refluidification des sauces.
Nous avons donc commencé par faire un roux très léger, en cuisant moitié beurre et moitié farine. Puis nous avons divisé ce roux unique en trois.
Le premier roux a été très peu cuit.
Le deuxième roux a été cuit jusqu'à apparition d'une couleur brune soutenue, et la disparition des bulles (de vapeur) dans la casserole, preuve que toute l'eau (du beurre) avait été évaporée, et que la température avait augmenté au delà de 100 degrés.
Commençons donc par expérience sur la cuisson des roux différemment cuits. Nous avons pris les deux premiers roux (léger, cuit brun) et nous leur avons ajouté la même quantité d'eau. Puis nous avons cuit le premier velouté jusqu'à l'épaississement maximal de la sauce, et nous avons cuit le velouté à base de roux brun dans les mêmes conditions, sur le même feu, et cette fois l'épaississement a été bien moindre : la cuisson poussée des roux ne permet pas un épaississement des velouté aussi important qu'avec un roux léger.
Enfin nous avons cuit le troisième roux, mais avec du vinaigre, et, cette fois-ci, nos amis cuisinier professionnel ont été surpris de voir que l'épaississement se faisait très bien, et que, même, le velouté (sauce poivrade) était d'un aspect plus engageant qu'avec un roux ordinaire et de l'eau.
L'observation est intéressante, parce que l'aspect est très important, en cuisine. Avec de l'eau ou du vinaigre cristal, on voyait mieux les différences que si on avait ajouté un bouillon.
Mais je sais combien les différences de température peuvent changer les résultats, de sorte que nous avons attendu que les trois roux soient à la même température pour véritablement comparer. Et finalement, le roux peu cuit est celui qui a conduit à la plus grande liaison,
peu supérieure à celle du velouté au vinaigre.
Évidemment, en cuisine, ce n'est ni de l'eau ni du vinaigre cristal que l'on utilise pour faire les sauces... mais j'ai vu des professionnels goûter deux fois la sauce poivrade, signe qu'il y avait là une base pour un travail gustatif.
J'y pense : nos travaux étaient-ils de nature "scientifique" ? Je réponds à cette question qui m'a été posée par un des participants du séminaire, en observant que la méthode scientifique commence par l'observation des phénomènes. Même si toutes les conditions de rigueur expérimentales n'étaient pas réunies, nous avons fait des observations que nous allons reprendre, afin de confirmer nos premières impressions.
samedi 30 mars 2019
Le beurre de cacaco, c'est du beurre de cacao, et le chocolat, c'est du chocolat : pas de traficotages !
Nous sommes bien d'acord : même si les mots "sain", "marchand" et "loyal", qui sont à la base de la loi sur le commerce des denrées alimentaires, sont à discuter, il ne faut pas tourner autout du pot : est loyal, honnête, ce qui est loyal, honnête. Et l'honnêteté départage les gens honnêtes des gens malhonnêtes, qui sont en réalité des salauds.
Tout cela en préambule d'une discussion à propos du chocolat. Le chocolat, c'est une préparation que l'on obtient à partir du cacao, lequel contient à la fois ce qui se nomme beurre de cacao et une partie végétale qui résulte de la torréfaction des graines de cacao. À cette préparation, on a appris à ajouter du sucre pour faire des tablettes de chocolat, qui sont donc faites de moitié beurre de cacao et de moitié de sucre, environ.
Il y a quelques années, sous le prétexte de régulariser les cours du cacao, des industriels peu scrupuleux ont conduit la réglementation a changer, et il a été admis que l'on pourrait ajouter au beurre de cacao trois pour cent de matière grasse quine soit pas du beurre de cacao. Par matière grasse végétale, il faut t'entendre de la matière grasse végétale qui n'était pas présente dans le cacao le nom de beurre de cacao pour ce mélange.
Je récuse absolument le nom de chocolat pour un tel produit ! Le prétexte du changement était que l'on voulait régulariser les cours du cacao, afin d'enrichir les cultivateurs. Mon oeil ! C'était surtout une manoeuvre malhonnête pour se faciliter la vie. Et puis, n'aurait-on pas pu utiliser un autre terme que chocolat pour désigner de tels produits ? Certains ont argumenté en disant que certains fabricants avaient déjà cette pratique... mais alors il fallait sévir contre ces fabricants malhonnêtes, qui avaient usurpé le nom du chocolat. Bref, au lieu de niveler par le bas, on aurait mieux fait de niveler par le haut.
> Je pense que le combat n'est pas perdu et que nous devons absolument militer, aujourd'hui encore, pour que le chocolat soit seulement confectionné à partir de cacao. Il en va de la pluie élémentaire honnêteté.
Tout cela en préambule d'une discussion à propos du chocolat. Le chocolat, c'est une préparation que l'on obtient à partir du cacao, lequel contient à la fois ce qui se nomme beurre de cacao et une partie végétale qui résulte de la torréfaction des graines de cacao. À cette préparation, on a appris à ajouter du sucre pour faire des tablettes de chocolat, qui sont donc faites de moitié beurre de cacao et de moitié de sucre, environ.
Il y a quelques années, sous le prétexte de régulariser les cours du cacao, des industriels peu scrupuleux ont conduit la réglementation a changer, et il a été admis que l'on pourrait ajouter au beurre de cacao trois pour cent de matière grasse quine soit pas du beurre de cacao. Par matière grasse végétale, il faut t'entendre de la matière grasse végétale qui n'était pas présente dans le cacao le nom de beurre de cacao pour ce mélange.
Je récuse absolument le nom de chocolat pour un tel produit ! Le prétexte du changement était que l'on voulait régulariser les cours du cacao, afin d'enrichir les cultivateurs. Mon oeil ! C'était surtout une manoeuvre malhonnête pour se faciliter la vie. Et puis, n'aurait-on pas pu utiliser un autre terme que chocolat pour désigner de tels produits ? Certains ont argumenté en disant que certains fabricants avaient déjà cette pratique... mais alors il fallait sévir contre ces fabricants malhonnêtes, qui avaient usurpé le nom du chocolat. Bref, au lieu de niveler par le bas, on aurait mieux fait de niveler par le haut.
> Je pense que le combat n'est pas perdu et que nous devons absolument militer, aujourd'hui encore, pour que le chocolat soit seulement confectionné à partir de cacao. Il en va de la pluie élémentaire honnêteté.
A propos de plagiat en sciences
A propos de plagiat, les choses sont plus compliquées que ne le disent les vendeurs de logiciels anti-plagiat !
En effet, les résultats sont difficiles à interpréter, et souvent faux. De nombreux programmes font apparaître de faux positifs pour des phrases communes, des noms d'institutions ou des références. Et ils produisent aussi de faux négatifs, par exemple quand la source d'un texte plagié n'a pas été numérisée, contient des erreurs d'orthographe ou n'est pas accessible au programme.
Il y a quelques années, dans une école d'ingénieur que je ne citerai pas voulait acquérir de tels logiciels pour contrôler les devoirs des élèves, et je m'y étais fermement opposé, parce que, en réalité, je ne veux pas que les "collègues plus jeunes" (ma terminologie pour ce que le reste du monde appelle encore "étudiants") inventent des phrases ou des textes, et que je revendique qu'ils aient fait correctement la bibliographie, et qu'ils citent les textes consultés.
Plus généralement, dans les articles scientifiques, dans les rapports, dans les documents de thèse, etc., aucun fait ne peut tomber du ciel sans être référencé : une idée, une référence !
Certains estiment que le texte des auteurs cités ne peut être repris tel quel, mais je ne suis pas d'accord, car selon le bon principe condillacien (repris par Antoine Laurent de Lavoisier) qui veut qu'un mot soit homologue à une idée sans possibilité de synonymie, le changement du texte cité gauchit la pensée des auteurs cités !
Disons qu'il vaudrait mieux inviter à de l'intelligence, et, pour ce qui concerne les devoirs des élèves, par exemple, concevoir des exercices, des devoirs, des problèmes, des circonstances qui évitent la possibilité même du plagiat !
Une référence :
D. Weber-Wulff, Plagiarism detectors are a crutch, and a problem, Nature, Mars 2019, 567, 435.
En effet, les résultats sont difficiles à interpréter, et souvent faux. De nombreux programmes font apparaître de faux positifs pour des phrases communes, des noms d'institutions ou des références. Et ils produisent aussi de faux négatifs, par exemple quand la source d'un texte plagié n'a pas été numérisée, contient des erreurs d'orthographe ou n'est pas accessible au programme.
Il y a quelques années, dans une école d'ingénieur que je ne citerai pas voulait acquérir de tels logiciels pour contrôler les devoirs des élèves, et je m'y étais fermement opposé, parce que, en réalité, je ne veux pas que les "collègues plus jeunes" (ma terminologie pour ce que le reste du monde appelle encore "étudiants") inventent des phrases ou des textes, et que je revendique qu'ils aient fait correctement la bibliographie, et qu'ils citent les textes consultés.
Plus généralement, dans les articles scientifiques, dans les rapports, dans les documents de thèse, etc., aucun fait ne peut tomber du ciel sans être référencé : une idée, une référence !
Certains estiment que le texte des auteurs cités ne peut être repris tel quel, mais je ne suis pas d'accord, car selon le bon principe condillacien (repris par Antoine Laurent de Lavoisier) qui veut qu'un mot soit homologue à une idée sans possibilité de synonymie, le changement du texte cité gauchit la pensée des auteurs cités !
Disons qu'il vaudrait mieux inviter à de l'intelligence, et, pour ce qui concerne les devoirs des élèves, par exemple, concevoir des exercices, des devoirs, des problèmes, des circonstances qui évitent la possibilité même du plagiat !
Une référence :
D. Weber-Wulff, Plagiarism detectors are a crutch, and a problem, Nature, Mars 2019, 567, 435.
mardi 26 mars 2019
Disneyland, hélas !
Une idée me vient, alors que des collègues plus jeunes vont à Disneyland (ou world, je ne sais pas et cela ne m'intéresse guère de savoir) : je propose de toujours poser la question, lors des entretiens d'embauche : "Etes-vous déjà allé à Disneyxxx ?". Et l'on excluerait immédiatement ceux et celles qui y sont allés, car c'est le signe d'intérêts qui ne sont guère élevés !
Mais plus charitablement, je crois utile de rappeler - ou dire- à nos jeunes amis qu'il y a les oies que l'on gave, d'une part, et les gaveurs d'oies, de l'autre ; qu'il y a le "peuple" et ceux qui le dirigent...
Depuis au moins aussi longtemps que la Rome antique, il y a eu le pain et les jeux. En termes modernes, cela signifie qu'il n'y aura pas de révolution les soirs où des matchs de football seront retransmis à la télévision.
Il suffit de le savoir ;-)
Mais plus charitablement, je crois utile de rappeler - ou dire- à nos jeunes amis qu'il y a les oies que l'on gave, d'une part, et les gaveurs d'oies, de l'autre ; qu'il y a le "peuple" et ceux qui le dirigent...
Depuis au moins aussi longtemps que la Rome antique, il y a eu le pain et les jeux. En termes modernes, cela signifie qu'il n'y aura pas de révolution les soirs où des matchs de football seront retransmis à la télévision.
Il suffit de le savoir ;-)
lundi 25 mars 2019
Des connaissances peuvent-elles être "scientifiques" ?
Hier, à l'Académie d'Agriculture, lors d'une séance publique, deux intervenants ont dit l'expression "connaissance scientifique", et ma réflexion sur la méthode des sciences de la nature m'a conduit à m'interroger sur cette terminologie.
Qu'est-ce qu'une connaissance scientifique ? Et cela existe-t-il vraiment ?
Dans une telle circonstance, je crains immédiatement la faute du partitif, et aussi le cliché, série de mots que l'on répète sans l'interroger.
Une connaissance, je comprends bien de quoi il s'agit. Par exemple, un intervenant nous a montré des images de bois au microscope, et il nous a donc donné une nouvelle vision, une nouvelle description d'un objet dont nous avions une moindre connaissance : au lieu de voir simplement les fibres à l'oeil nu, nous avons pu comprendre qu'il y avait des cellules plus ou moins grosses selon les saisons, et également des canaux par où la sève peut circuler.
Mais où était la science dans cette affaire ? Certes il a fallu un microscope pour obtenir une telle l'image, mais le microscope est un objet ancien qui relève moins d'ailleurs de la science que la technique ou de la technologie. Certes il a fallu que quelqu'un ait l'idée d'utiliser le microscope pour regarder le bois afin de produire la description qui nous a été présentée... mais la connaissance n'a été scientifique que si ce quelqu'un était un scientifique, et pas si ce quelqu'un était un technicien ou un technologue. En l'occurrence, les connaissances qui étaient dites scientifiques étaient du naturalisme des siècles passés, et ces images auraient presque pu être produites par Antoni van Leuwenhoek.
Mais pour en revenir à la faute du partitif : il aurait fallu dire plutôt connaissance produite par des scientifiques, si cela avait été le cas. Au fait, toutes les connaissances ne sont-elles pas de produites par les scientifiques ? Non, car les grammairiens ont des connaissances qui ne relèvent pas des sciences de la nature, par exemple.
Une question pernicieuse : pourquoi nos intervenants, qui n'étaient pas scientifiques, ont-ils utilisé cette expression ? On devine que cela posait le discours, qu'il s'agissait d'un (mauvais) argument d'autorité !
Mais revenons maintenant au statut des sciences de la nature, et de leurs méthodes : il s'agit plutôt de réfutation que de démonstration. Que vaut alors une connaissance produite par un scientifique ? Sera-t-elle réfutée? Bien sûr, si l'on utilisait des techniques analytiques perfectionnées, on pourrait améliorer l'image qui nous a été montrée dans les détails, mais sans doute pas dans les grandes lignes, de sorte que l'image subsisterait malgré les réfutations successives.
Au fond, Henri Poincaré avait raison de dire que tout croire ou douter de tout sont deux attitudes également mauvaises. Les travaux scientifiques conduisent à des descriptions progressivement affinées, mais chaque stade conserve une certaine validité et quand je dis que la science produit des connaissances fausses, je me reprends généralement en disant que ces connaissances sont plutôt insuffisantes.
Je renvoie à des billets anciens ou j'évoquais la loi d'Ohm, relation de proportionnalité entre le potentiel électrique et l'intensité d'un courant : cette loi a été abattue par la découverte de l'effet hall quantique, Klaus von Klitzing ayant montré qu'il n'y a pas proportionnalité exacte, mais proportionnalité approchée : si on regarde de loin, on voit une ligne, mais si on regarde de très près, on voit une sorte d'escalier.
Le fait que la description en terme d'escalier soit faite par un scientifique récent ne change rien à l'affaire, du point de vue du principe. La connaissance donné par un scientifique récents ou par un scientifique ayant vécu il y a longtemps est du même type, c'est une connaissance produite par la science... et pas une connaissance scientifique.
Qu'est-ce qu'une connaissance scientifique ? Et cela existe-t-il vraiment ?
Dans une telle circonstance, je crains immédiatement la faute du partitif, et aussi le cliché, série de mots que l'on répète sans l'interroger.
Une connaissance, je comprends bien de quoi il s'agit. Par exemple, un intervenant nous a montré des images de bois au microscope, et il nous a donc donné une nouvelle vision, une nouvelle description d'un objet dont nous avions une moindre connaissance : au lieu de voir simplement les fibres à l'oeil nu, nous avons pu comprendre qu'il y avait des cellules plus ou moins grosses selon les saisons, et également des canaux par où la sève peut circuler.
Mais où était la science dans cette affaire ? Certes il a fallu un microscope pour obtenir une telle l'image, mais le microscope est un objet ancien qui relève moins d'ailleurs de la science que la technique ou de la technologie. Certes il a fallu que quelqu'un ait l'idée d'utiliser le microscope pour regarder le bois afin de produire la description qui nous a été présentée... mais la connaissance n'a été scientifique que si ce quelqu'un était un scientifique, et pas si ce quelqu'un était un technicien ou un technologue. En l'occurrence, les connaissances qui étaient dites scientifiques étaient du naturalisme des siècles passés, et ces images auraient presque pu être produites par Antoni van Leuwenhoek.
Mais pour en revenir à la faute du partitif : il aurait fallu dire plutôt connaissance produite par des scientifiques, si cela avait été le cas. Au fait, toutes les connaissances ne sont-elles pas de produites par les scientifiques ? Non, car les grammairiens ont des connaissances qui ne relèvent pas des sciences de la nature, par exemple.
Une question pernicieuse : pourquoi nos intervenants, qui n'étaient pas scientifiques, ont-ils utilisé cette expression ? On devine que cela posait le discours, qu'il s'agissait d'un (mauvais) argument d'autorité !
Mais revenons maintenant au statut des sciences de la nature, et de leurs méthodes : il s'agit plutôt de réfutation que de démonstration. Que vaut alors une connaissance produite par un scientifique ? Sera-t-elle réfutée? Bien sûr, si l'on utilisait des techniques analytiques perfectionnées, on pourrait améliorer l'image qui nous a été montrée dans les détails, mais sans doute pas dans les grandes lignes, de sorte que l'image subsisterait malgré les réfutations successives.
Au fond, Henri Poincaré avait raison de dire que tout croire ou douter de tout sont deux attitudes également mauvaises. Les travaux scientifiques conduisent à des descriptions progressivement affinées, mais chaque stade conserve une certaine validité et quand je dis que la science produit des connaissances fausses, je me reprends généralement en disant que ces connaissances sont plutôt insuffisantes.
Je renvoie à des billets anciens ou j'évoquais la loi d'Ohm, relation de proportionnalité entre le potentiel électrique et l'intensité d'un courant : cette loi a été abattue par la découverte de l'effet hall quantique, Klaus von Klitzing ayant montré qu'il n'y a pas proportionnalité exacte, mais proportionnalité approchée : si on regarde de loin, on voit une ligne, mais si on regarde de très près, on voit une sorte d'escalier.
Le fait que la description en terme d'escalier soit faite par un scientifique récent ne change rien à l'affaire, du point de vue du principe. La connaissance donné par un scientifique récents ou par un scientifique ayant vécu il y a longtemps est du même type, c'est une connaissance produite par la science... et pas une connaissance scientifique.
dimanche 24 mars 2019
La gastronomie moléculaire, c'est quoi ? Ce n'est pas quoi ?
Le flot des messages envoyés par des élèves en classe de première se tarit, parce qu'ils ont maintenant terminé et rendu leur travail, mais quelques attardés continuent d'écrire.
Par exemple, aujourd'hui :
Étant en élève de première S, j’ai dû comme beaucoup d’autres élèves travailler sur des travaux pratique encadrés. Le nôtre portait sur les phénomènes de dispersion dans les liquides, la mousse et la mayonnaise..
Nous nous sommes énormément aidé de vos travaux, et vous remercions..
Mais il nous trotte une dernière question, selon vous s’il on étudie la mayonnaise et la mousse ( émulsion, polarité, miscibilité et tensioactifs) de façon théorique, nous parlons de gastronomie moléculaire..
Mais si l’on effectue les recettes de mayonnaise et de mousse au chocolat dans le cadre de « test » comme vous avez pu le faire sur vos vidéos youtube, parlons nous de cuisine ou de gastronomie moléculaire ?
Nous hésitons énormément étant donné que la gastronomie moléculaire est la recherche des principes et phénomènes, tandis que la cuisine moléculaire est l’application théorique de ces principes.
J'avais initialement répondu :
Bonjour, et bravo pour votre distinction. Disons que la gastronomie moléculaire est l'étude (scientifique) des phénomènes qui se produisent quand on cuisine.
Et cuisiner, c'est préparer des aliments, à savoir des systèmes physico-chimiques qui sont destinés à la consommation humaine.
Si vous faites une mayonnaise, vous faites de la cuisine.
Si vous variez des paramètres de confection d'une mayonnaise en vue de voir le changement, vous faites de la technologie culinaire.
Si vous utilisez une sonde à ultrasons pour faire une mayonnaise, vous utilisez un ustensile nouveau, et vous faites de la cuisine moléculaire, c'est-à-dire de la technique.
Et si vous analysez la confection d'une émulsion qui se nomme mayonnaise, ou si vous testez une précision culinaire particulière, vous faites de la gastronomie moléculaire.
Je ferai un billet plus détaillé sur mon blog dans les jours qui viennent, notamment sur le dernier point, où je suivrai la méthode des sciences de la nature.
Bon courage
Mais reprenons.
La gastronomie moléculaire est donc la science qui s'intéresse aux phénomènes culinaires, en vue d'en chercher les mécanismes par la méthode classique des sciences, à savoir :
- identification d'un phénomène
- caractérisation quantitative du phénomène
- réunion des données de mesure en lois
- recherche de mécanismes, par introduction de concepts
- recherche de prévisions à partir du corpus théorique élaboré
- tests expérimentaux de ces prévisions théoriques.
Par exemple, imaginons que nous nous intéressions à la mayonnaise. Chercher s'il est vrai que la moindre trace de blanc fait rater la sauce est une expérience préliminaire qui permet d'identifier ou non un phénomène. En l'occurrence, le test montre que nous n'avons pas à nous demander si la moindre trace de blanc fait rater la sauce... parce que le blanc ne fait pas rater la sauce. Cette expérience préliminaire fait donc partie de la gastronomie moléculaire : on fait l'expérience en vue de comprendre les mécanismes, pas pour faire à manger (cuisine) ni pour perfectionner la sauce (technologie).
Un dernier commentaire : nos jeunes amis croient que "la gastronomie moléculaire est la recherche des principes et phénomènes, tandis que la cuisine moléculaire est l’application théorique de ces principes". Ce n'est pas juste.
La gastronomie moléculaire n'est pas la recherche des "principes et phénomènes", mais la recherche des mécanismes des phénomènes qui surviennent quand on cuisine.
D'autre part, la cuisine moléculaire n'est pas l' "application théorique de ces principes", mais la forme de cuisine qui fait usage de matériels venus des laboratoires, essentiellement d'ailleurs des laboratoires de chimie : thermocirculateurs, azote liquide, etc.
Par exemple, aujourd'hui :
Étant en élève de première S, j’ai dû comme beaucoup d’autres élèves travailler sur des travaux pratique encadrés. Le nôtre portait sur les phénomènes de dispersion dans les liquides, la mousse et la mayonnaise..
Nous nous sommes énormément aidé de vos travaux, et vous remercions..
Mais il nous trotte une dernière question, selon vous s’il on étudie la mayonnaise et la mousse ( émulsion, polarité, miscibilité et tensioactifs) de façon théorique, nous parlons de gastronomie moléculaire..
Mais si l’on effectue les recettes de mayonnaise et de mousse au chocolat dans le cadre de « test » comme vous avez pu le faire sur vos vidéos youtube, parlons nous de cuisine ou de gastronomie moléculaire ?
Nous hésitons énormément étant donné que la gastronomie moléculaire est la recherche des principes et phénomènes, tandis que la cuisine moléculaire est l’application théorique de ces principes.
J'avais initialement répondu :
Bonjour, et bravo pour votre distinction. Disons que la gastronomie moléculaire est l'étude (scientifique) des phénomènes qui se produisent quand on cuisine.
Et cuisiner, c'est préparer des aliments, à savoir des systèmes physico-chimiques qui sont destinés à la consommation humaine.
Si vous faites une mayonnaise, vous faites de la cuisine.
Si vous variez des paramètres de confection d'une mayonnaise en vue de voir le changement, vous faites de la technologie culinaire.
Si vous utilisez une sonde à ultrasons pour faire une mayonnaise, vous utilisez un ustensile nouveau, et vous faites de la cuisine moléculaire, c'est-à-dire de la technique.
Et si vous analysez la confection d'une émulsion qui se nomme mayonnaise, ou si vous testez une précision culinaire particulière, vous faites de la gastronomie moléculaire.
Je ferai un billet plus détaillé sur mon blog dans les jours qui viennent, notamment sur le dernier point, où je suivrai la méthode des sciences de la nature.
Bon courage
Mais reprenons.
La gastronomie moléculaire est donc la science qui s'intéresse aux phénomènes culinaires, en vue d'en chercher les mécanismes par la méthode classique des sciences, à savoir :
- identification d'un phénomène
- caractérisation quantitative du phénomène
- réunion des données de mesure en lois
- recherche de mécanismes, par introduction de concepts
- recherche de prévisions à partir du corpus théorique élaboré
- tests expérimentaux de ces prévisions théoriques.
Par exemple, imaginons que nous nous intéressions à la mayonnaise. Chercher s'il est vrai que la moindre trace de blanc fait rater la sauce est une expérience préliminaire qui permet d'identifier ou non un phénomène. En l'occurrence, le test montre que nous n'avons pas à nous demander si la moindre trace de blanc fait rater la sauce... parce que le blanc ne fait pas rater la sauce. Cette expérience préliminaire fait donc partie de la gastronomie moléculaire : on fait l'expérience en vue de comprendre les mécanismes, pas pour faire à manger (cuisine) ni pour perfectionner la sauce (technologie).
Un dernier commentaire : nos jeunes amis croient que "la gastronomie moléculaire est la recherche des principes et phénomènes, tandis que la cuisine moléculaire est l’application théorique de ces principes". Ce n'est pas juste.
La gastronomie moléculaire n'est pas la recherche des "principes et phénomènes", mais la recherche des mécanismes des phénomènes qui surviennent quand on cuisine.
D'autre part, la cuisine moléculaire n'est pas l' "application théorique de ces principes", mais la forme de cuisine qui fait usage de matériels venus des laboratoires, essentiellement d'ailleurs des laboratoires de chimie : thermocirculateurs, azote liquide, etc.
samedi 23 mars 2019
Recherche scientifique et relations humaines : les bonnes pratiques
En matière de relations humaines, il y a de bonnes et de mauvaises pratiques, pour ceux qui font de la recherche scientifique. Le plus souvent, dans mes billets, j'ai considéré les bonnes pratiques du point de vue "technique", mais la pratique de la science est une façon de vivre, et il y a des comportements humains qui font que la société des savants est si importante à préserver. Examinons la chose.
Pour Michael Faraday, la science rend aimable. Je ne sais si cela est vrai, et je crois que non, mais qu'importe : ce qu'il faut retenir, quand on n'est pas du mauvais côté des choses, c'est que nous avons là un objectif, que nous atteignons d'autant plus facilement que nous sommes plus passionnés par les sciences de la nature. A part découvrir soi-même quelque chose, lever un coin du grand voile, quoi de plus émerveillant que de découvrir la beauté du résultat obtenu par un ou une collègue ? Que de plus merveilleux qu'un mécanisme de plus ? Ce sentiment d'éblouissement s'accompagne d'un immense bonheur, qui ne laisse la place à aucune mesquinerie, à aucune bassesse. Jorge Luis Borgès évoquait l'envie, qui peut être noire (on détruit ce que l'on n'a pas), ou blanche : de l'émulation. Oui, l'exposé d'un beau résultat par un ou une collègue, c'est une émulation splendide.
Et puis, l'objectif : la rationalité ; ce n'est pas rien !
Pour faire bien cela, il faut une collaboration internationale : je revendique que les scientifiques puissent traverser le monde pour aller rencontrer ceux ou celles qui font bien. Dans le temps, on avait des cartes de visite pré-imprimées pour demander des tirés-à-part des articles de nos collègues. L'esprit est le même, et tout cela est un héritage du début des académies, par exemple quand le père Marin Mersenne, à Paris, écrivait aux "savants" pour échanger des nouvelles des découvertes.
Bien sûr, il y a eu des querelles de priorité, qui sont nées de ces échanges. Mais, inversement, il y avait ce but commun, merveilleux, de production scientifique, de communauté du savoir ou de l'étude.
Aujourd'hui, alors que les scientifiques sont payés par les États, on pourrait se dire qu'il se doivent à la communauté qui les paye : les scientifiques français devraient réserver leurs résultats aux Français, les scientifiques allemands aux Allemands... mais ne voulons-nous pas construire l'Europe ? Et le monde ? Ne voulons-nous pas, aussi, abattre les frontières ? Réunir les hommes et les femmes dans une collectivité animée d'une même mission ?
Parfois, les institutions scientifiques émettent, à l'attention de leur personnel, des messages d'alerte à propos d'espions qui seraient dans leurs laboratoire pour le compte d'un pays étranger... Est-ce vraiment ainsi que l'on parviendra à lutter contre la malhonnêteté ? Je ne crois pas.
Mais pour en revenir à la question des bonnes pratiques en relations humaines, plus je m'interroge, plus je converge vers cette conclusion à savoir que le sommet de l'intelligence, c'est la bonté et la droiture. Laissons l'ambition aux ambitieux... et l'on voit bien quel mépris j'ai pour ces gens-là.
Pour Michael Faraday, la science rend aimable. Je ne sais si cela est vrai, et je crois que non, mais qu'importe : ce qu'il faut retenir, quand on n'est pas du mauvais côté des choses, c'est que nous avons là un objectif, que nous atteignons d'autant plus facilement que nous sommes plus passionnés par les sciences de la nature. A part découvrir soi-même quelque chose, lever un coin du grand voile, quoi de plus émerveillant que de découvrir la beauté du résultat obtenu par un ou une collègue ? Que de plus merveilleux qu'un mécanisme de plus ? Ce sentiment d'éblouissement s'accompagne d'un immense bonheur, qui ne laisse la place à aucune mesquinerie, à aucune bassesse. Jorge Luis Borgès évoquait l'envie, qui peut être noire (on détruit ce que l'on n'a pas), ou blanche : de l'émulation. Oui, l'exposé d'un beau résultat par un ou une collègue, c'est une émulation splendide.
Et puis, l'objectif : la rationalité ; ce n'est pas rien !
Pour faire bien cela, il faut une collaboration internationale : je revendique que les scientifiques puissent traverser le monde pour aller rencontrer ceux ou celles qui font bien. Dans le temps, on avait des cartes de visite pré-imprimées pour demander des tirés-à-part des articles de nos collègues. L'esprit est le même, et tout cela est un héritage du début des académies, par exemple quand le père Marin Mersenne, à Paris, écrivait aux "savants" pour échanger des nouvelles des découvertes.
Bien sûr, il y a eu des querelles de priorité, qui sont nées de ces échanges. Mais, inversement, il y avait ce but commun, merveilleux, de production scientifique, de communauté du savoir ou de l'étude.
Aujourd'hui, alors que les scientifiques sont payés par les États, on pourrait se dire qu'il se doivent à la communauté qui les paye : les scientifiques français devraient réserver leurs résultats aux Français, les scientifiques allemands aux Allemands... mais ne voulons-nous pas construire l'Europe ? Et le monde ? Ne voulons-nous pas, aussi, abattre les frontières ? Réunir les hommes et les femmes dans une collectivité animée d'une même mission ?
Parfois, les institutions scientifiques émettent, à l'attention de leur personnel, des messages d'alerte à propos d'espions qui seraient dans leurs laboratoire pour le compte d'un pays étranger... Est-ce vraiment ainsi que l'on parviendra à lutter contre la malhonnêteté ? Je ne crois pas.
Mais pour en revenir à la question des bonnes pratiques en relations humaines, plus je m'interroge, plus je converge vers cette conclusion à savoir que le sommet de l'intelligence, c'est la bonté et la droiture. Laissons l'ambition aux ambitieux... et l'on voit bien quel mépris j'ai pour ces gens-là.
vendredi 22 mars 2019
Les fausses sciences, la charlatanerie médicale ? Une question d'inculture !
Je vois des amis qui tombent dans les panneaux des faux sciences et des fausses médecines, et je me désole un peu. Mais je n'oublie pas que l'humanité a toujours imaginé des explications surnaturelles pour expliquer ce qu'elle ne comprenait pas : la foudre, les marées, les variations de l'apparence de la lune... Chaque fois, on y mettait un dieu, une naïade... Et je n'oublie pas non plus que les forces à distance sont un des mystères de la physique même moderne. Un aimant qui attire de la limaille sans contact ? Alors que l'on ne voit rien entre l'aimant et la limaille ? Il y a là vraiment quelque chose de merveilleux. Tout comme la coagulation d'un blanc d'oeuf, liquide jaunâtre qui, chauffé, devient solide blanc et opaque ! Mais ce ne sont que des exemple : l'ensemble des phénomènes qui surviennent lors des transformations culinaires est extraordinaire ; tout est merveilleux. Le brunissement du steak, le gonflement du soufflé, le changement de couleur des haricots quand on les cuit...
Au fond, c'est l'honneur de l'esprit humain que de ne pas s'arrêter à l'observation des phénomènes, et de chercher les mécanismes sous-jacents, leur compréhension.
Tout cela étant dit, il y a une question de culture, et notamment de culture scientifique, laquelle est très largement sous-développée, même dans des pays comme le nôtre. Et si des amis tombent dans les panneaux tendus par les malhonnêtes ou les ignorants, c'est bien que nous n'avons pas assez fait l'effort de transmettre les connaissances qui permettent d'interpréter ce monde qui nous entoure.
Les exemples abondent. L'influence du cosmos sur la croissance des plantes ? La biodynamie ? Pour qui manque de connaissances en physiologie végétale et en physique, on trouvera bien un charlatan qui ira revendre quelque application coûteuse. La cherté des vins vieux ? On se souvient de ces pyramides qui étaient censées faire vieillir les bouteilles de vin en quelques instants : stricto sensu, les bouteille ont vieilli... mais seulement de la durée qu'elles passaient sous les pyramides, exactement comme elles auraient vieilli dans une cave, sauf peut-être que si la pyramide était à température ambiante, alors le vin a vieilli plus vite.
Avec les vaccins, c'est une question plus grave. C'est une faute terrible que d'oublier ou d'ignorer tous ces malades et tous ces morts qui n'avaient pas bénéficié - je dis bien bénéficié - de la vaccination. On se souvient des combats qu'il a fallu pour imposer la vaccination : le roi dut le faire publiquement ! Et nos amis qui s'opposent à la vaccination sont en réalité comme les sectes qui s'opposent aux prises de sang : ils condamnent leurs congénères, ces derniers étant parfois même leurs familles ou eux-mêmes ! Je me souviens du cas d'une personne atteinte d'un cancer du sein qui refusait les traitements et voulait se soigner par naturopathie : elle est morte alors qu'elle aurait pu être sauvée.
Mais j'y reviens : tous ces adeptes des fausses sciences et des fausses médecines sont d'une navrante naïveté, d'une terrible inculture. Renforçons l'Ecole !
En vrac : bien être holistique, naturopathie, iridologie, homéopathie, médiumnité, occultisme, astrologie, voyance, phrénologie, mesmérisme, lithothérapie, iridologie...
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Au fond, c'est l'honneur de l'esprit humain que de ne pas s'arrêter à l'observation des phénomènes, et de chercher les mécanismes sous-jacents, leur compréhension.
Tout cela étant dit, il y a une question de culture, et notamment de culture scientifique, laquelle est très largement sous-développée, même dans des pays comme le nôtre. Et si des amis tombent dans les panneaux tendus par les malhonnêtes ou les ignorants, c'est bien que nous n'avons pas assez fait l'effort de transmettre les connaissances qui permettent d'interpréter ce monde qui nous entoure.
Les exemples abondent. L'influence du cosmos sur la croissance des plantes ? La biodynamie ? Pour qui manque de connaissances en physiologie végétale et en physique, on trouvera bien un charlatan qui ira revendre quelque application coûteuse. La cherté des vins vieux ? On se souvient de ces pyramides qui étaient censées faire vieillir les bouteilles de vin en quelques instants : stricto sensu, les bouteille ont vieilli... mais seulement de la durée qu'elles passaient sous les pyramides, exactement comme elles auraient vieilli dans une cave, sauf peut-être que si la pyramide était à température ambiante, alors le vin a vieilli plus vite.
Avec les vaccins, c'est une question plus grave. C'est une faute terrible que d'oublier ou d'ignorer tous ces malades et tous ces morts qui n'avaient pas bénéficié - je dis bien bénéficié - de la vaccination. On se souvient des combats qu'il a fallu pour imposer la vaccination : le roi dut le faire publiquement ! Et nos amis qui s'opposent à la vaccination sont en réalité comme les sectes qui s'opposent aux prises de sang : ils condamnent leurs congénères, ces derniers étant parfois même leurs familles ou eux-mêmes ! Je me souviens du cas d'une personne atteinte d'un cancer du sein qui refusait les traitements et voulait se soigner par naturopathie : elle est morte alors qu'elle aurait pu être sauvée.
Mais j'y reviens : tous ces adeptes des fausses sciences et des fausses médecines sont d'une navrante naïveté, d'une terrible inculture. Renforçons l'Ecole !
En vrac : bien être holistique, naturopathie, iridologie, homéopathie, médiumnité, occultisme, astrologie, voyance, phrénologie, mesmérisme, lithothérapie, iridologie...
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N'est pas "scientifique" quelqu'un qui ne pratique pas la recherche scientifique
Qui est scientifique ? La question semble simple : un scientifique, c'est quelqu'un qui fait un travail scientifique. Pour les sciences de la nature, cela signifie chercher le mécanisme des phénomènes à l'aide d'une méthode que j'ai décrite déjà plusieurs fois. Autrement dit, toute personne qui cherche les mécanismes des phénomènes à l'aide de cette méthode a une activité scientifique, et est donc un(e) scientifique.
A côté de ce noyau fait d'individus, qui, seuls, méritent le nom de "scientifiques", il y a tout une constellation de personnes... qui ne sont pas scientifiques. Il y a par exemple des journalistes scientifiques, qui ne font pas un travail scientifique, mais un travail de journaliste. Il y a des administrateurs, qui ne font pas un travail scientifique, mais un travail d'aministration. Il y a des auteurs, des communicateurs variées, qui ne sont pas scientifiques mais qu'ils font un travail de communication.
Certains de mes amis sont un peu perdus, et c'est la raison pour laquelle je mets les choses au point.
Dans certains cas, la question est bien plus intéressante que celle avec laquelle je commence ce billet. Par exemple, Léonard de Vinci était-il un scientifique ? Ou bien était-il peintre et dessinateur ? Ou bien était-il ingénieur ?
La définition que je viens de donner permet de regarder posément les choses, clairement. Quand on examine en détail le travail de Léonard de Vinci, on voit par exemple de remarquables descriptions anatomiques ou physiologiques, qui valaient largement celles qui étaient faites de son temps par des anatomistes ou par des physiologistes plus patentés. De ce point de vue, Léonard de Vinci n'a pas démérité. On pourrait dire la même chose à propos de physique, mais évidemment, Léonard de Vinci n'est pas le géant qu'était Galilée et qui su créer la science moderne, en mélangeant le calcul et l'expérience.
On sait que Léonard de Vinci était intéressé par les mathématiques, mais il ne fuit pas à la hauteur d'un Galilée ou d'un Huygens par exemple. Les compétences en mécanique ou ou en ingénierie ? Là, la question est résolue facilement, puisque la technologie n'est pas la science.
Finalement, on voit clairement que Léonard de Vinci n'a pas démérité, mais qu'il est resté à une science assez naturaliste et non pas moderne, puisque cette science moderne qui repose sur l'expérience et le calcul n'avait pas encore été inventée. Léonard de Vinci était donc une sorte de scientifique d'avant la science moderne, ce qui doit nous conduire quand même à faire cette différence essentielle : il y a la science, d'une part, et la science moderne, d'autre part, cette dernière ayant été véritablement inventée, avec le calcul qui lui donne toute sa puissance, tout son intérêt, toute sa beauté.
PS. Je renvoie ceux qui sont intéressés vers le dossier Léonard de Vinci dans la série "Les génies de la science" de la revue Pour la science.
samedi 16 mars 2019
Le carré de Pasteur : ne gardez aucun souvenir de cette image pernicieuse, et voyez plutôt celle que je produis en fin de bille
Ce matin, je retrouve cette image, dont je ne sais plus d'où elle sort, en tout cas pour la version française, et j'en suis très mécontent. Mais, écrivant un terme négatif, je m'en veux aussitôt, non pas de mon jugement, mais de ne pas avoir présenté du positif à mes amis... de sorte que, en fin de billet, l'analyse étant faite, je donnerai un carré plus juste. Entre temps, j'aurai expliqué pourquoi Louis Pasteur lui-même n'aurait guère apprécié l'idée transmise derrière l'image que voici :
Il s'agit de "financer la recherche". Dont acte... mais quand même, cela vaut sans doute la peine que nous nous arrêtions sur le mot "recherche", qui est une porte ouverte à toutes les âneries, toutes les confusions. Non pas que la "recherche" n'existe pas, mais surtout que c'est la possibilité de confondre science et technologie, et pourquoi pas ingénierie, ou génie, tant que nous y sommes. Chaque terme renvoie à une entité bien particulière, qui ne se confond pas avec les autres.
Commençons par éclaircir les choses :
- sciences de la nature : la recherche des mécanismes des phénomènes par une méthode expliquée moult fois ici, mais dont je redonne pour mémoire les grandes lignes :
- technologie : l'amélioration des techniques, souvent avec l'aide des résultats des sciences
- ingénierie : ensemble des fonctions allant de la conception et des études à la responsabilité de la construction et au contrôle des équipements d'une installation technique ou industrielle
- génie : ensemble des techniques concernant les travaux de déblaiement, de fortification, de l'aménagement des moyens de communication, des transmissions, puis par extension, la mise en œuvre de transformations moléculaires, par exemple.
Pour toutes ces activités, il peut y avoir de la "recherche", puisqu'on ne se contente pas de faire (sauf peut-être dans le génie), et qu'on cherche des moyens nouveaux de faire. D'ailleurs, un artiste aussi fait de la "recherche", mais pas de la recherche scientifique, bien sûr !
Puis, il y a la question du financement. Cette fois, on comprend que cela concerne soit des individus, soit des institutions, soit l’État. Ici, il s'agissait clairement d'une référence à l’État, et la question est de savoir où bien placer les financements donnés par l’État : à la science, ou à la technologie ?
"Choisir le bon carré" : rien que cette expression est minable... parce que cela me fait penser à ces questions d'enfant, à savoir "tu préfères la fraise ou la banane?", pour lesquelles ma réponse est invariablement "le cassis" ! Pourquoi l’État choisirait-il un seul carré ? Et pourquoi les quatre carrés ne s'imposeraient-ils pas ?
Recherche appliquée : si c'est appliqué, ce n'est pas de la science ! Et Pasteur lui-même a hurlé de rage une bonne partie de sa vie, s'évertuant à expliquer qu'il avait été initialement scientifique, quand il a fait ses travaux sur la chiralité (de l'acide tartrique, pour commencer), puis qu'il avait été conduit à quitter la science pour la technologie, la "recherche appliquée", avec la microbiologie, les vaccins... Oui, c'est Pasteur lui-même qui a bien distingué science et technologie, et aussi technique, tout comme le faisait bien Claude Bernard à la même époque (reconnaissant que la médecine est une technique, tandis que la recherche clinique est de la technologie, et la physiologie une science de la nature).
Mais ici, dans cette figure idiote, la "recherche appliquée" renvoie à la "recherche fondamentale"... et cette terminologie est détestable. En effet, la science n'est pas "fondamentale ; c'est la science. Et il n'y a pas d'opposition recherche appliquée-recherche fondamentale, mais une différence entre science et technologie. D'ailleurs, tant que nous y sommes, il faut signaler que la science et la technologie ne peuvent pas être mises sur un axe continu, car il y a solution de continuité entre les deux !
De ce fait, les travaux technologiques de Pasteur ne sont pas de plus grande "qualité" que ceux de Niels Bohr, et ceux de Pasteur ne sont pas plus "scientifiques" que ceux d'Edison.
Faut-il éviter une "zone" ? Comme l'organisation proposée ici est idiote, le "carré à éviter" n'est pas à éviter... puisqu'il n'existe pas.
Et, enfin, Pasteur n'est pas un "carré magique", parce qu'il conduirait à exclure les travaux scientifiques, dont on ne répétera pas assez qu'ils n'ont pas seulement la technique comme champ d'applications, mais aussi l’École (de la Maternelle à l'Université, et au-delà), la Culture, qui est l'honneur de l'esprit humain.
Bref, ce schéma est bête, pernicieux, à combattre. Faisons donc bien plus positif :
Ici, il y a la technique, qui produit nos biens et services, et dont l'Etat aurait intérêt à encadrer les productions de façon éclairée, avec encouragement. Il y a la technologie, qui prend les résultats des sciences, pour les faire passer en technique. L’État ne doit pas faire le travail lui-même, mais encourager le transfert, par des industriels (petits ou grands) qui s'enrichiront, produiront de l'emploi et de la richesse nationale. Là encore, de l'encouragement.
Enfin, il y a la science, qui n'est pas de la technologie, et qui est une activité d'appoint de l’État à la nation... et c'est donc seulement la case Bohr qui devrait être financée, en matière de production directe de l’État (par opposition à l'encouragement que j'évoquais précédemment). On observera que les trois activités représentées ici le sont au même niveau : je maintiens qu'un bon technicien est mieux qu'un mauvais scientifique, mais qu'un bon scientifique est mieux qu'un mauvais technicien. En réalité, on ne peut pas comparer des activités différentes !
Il s'agit de "financer la recherche". Dont acte... mais quand même, cela vaut sans doute la peine que nous nous arrêtions sur le mot "recherche", qui est une porte ouverte à toutes les âneries, toutes les confusions. Non pas que la "recherche" n'existe pas, mais surtout que c'est la possibilité de confondre science et technologie, et pourquoi pas ingénierie, ou génie, tant que nous y sommes. Chaque terme renvoie à une entité bien particulière, qui ne se confond pas avec les autres.
Commençons par éclaircir les choses :
- sciences de la nature : la recherche des mécanismes des phénomènes par une méthode expliquée moult fois ici, mais dont je redonne pour mémoire les grandes lignes :
- technologie : l'amélioration des techniques, souvent avec l'aide des résultats des sciences
- ingénierie : ensemble des fonctions allant de la conception et des études à la responsabilité de la construction et au contrôle des équipements d'une installation technique ou industrielle
- génie : ensemble des techniques concernant les travaux de déblaiement, de fortification, de l'aménagement des moyens de communication, des transmissions, puis par extension, la mise en œuvre de transformations moléculaires, par exemple.
Pour toutes ces activités, il peut y avoir de la "recherche", puisqu'on ne se contente pas de faire (sauf peut-être dans le génie), et qu'on cherche des moyens nouveaux de faire. D'ailleurs, un artiste aussi fait de la "recherche", mais pas de la recherche scientifique, bien sûr !
Puis, il y a la question du financement. Cette fois, on comprend que cela concerne soit des individus, soit des institutions, soit l’État. Ici, il s'agissait clairement d'une référence à l’État, et la question est de savoir où bien placer les financements donnés par l’État : à la science, ou à la technologie ?
"Choisir le bon carré" : rien que cette expression est minable... parce que cela me fait penser à ces questions d'enfant, à savoir "tu préfères la fraise ou la banane?", pour lesquelles ma réponse est invariablement "le cassis" ! Pourquoi l’État choisirait-il un seul carré ? Et pourquoi les quatre carrés ne s'imposeraient-ils pas ?
Recherche appliquée : si c'est appliqué, ce n'est pas de la science ! Et Pasteur lui-même a hurlé de rage une bonne partie de sa vie, s'évertuant à expliquer qu'il avait été initialement scientifique, quand il a fait ses travaux sur la chiralité (de l'acide tartrique, pour commencer), puis qu'il avait été conduit à quitter la science pour la technologie, la "recherche appliquée", avec la microbiologie, les vaccins... Oui, c'est Pasteur lui-même qui a bien distingué science et technologie, et aussi technique, tout comme le faisait bien Claude Bernard à la même époque (reconnaissant que la médecine est une technique, tandis que la recherche clinique est de la technologie, et la physiologie une science de la nature).
Mais ici, dans cette figure idiote, la "recherche appliquée" renvoie à la "recherche fondamentale"... et cette terminologie est détestable. En effet, la science n'est pas "fondamentale ; c'est la science. Et il n'y a pas d'opposition recherche appliquée-recherche fondamentale, mais une différence entre science et technologie. D'ailleurs, tant que nous y sommes, il faut signaler que la science et la technologie ne peuvent pas être mises sur un axe continu, car il y a solution de continuité entre les deux !
De ce fait, les travaux technologiques de Pasteur ne sont pas de plus grande "qualité" que ceux de Niels Bohr, et ceux de Pasteur ne sont pas plus "scientifiques" que ceux d'Edison.
Faut-il éviter une "zone" ? Comme l'organisation proposée ici est idiote, le "carré à éviter" n'est pas à éviter... puisqu'il n'existe pas.
Et, enfin, Pasteur n'est pas un "carré magique", parce qu'il conduirait à exclure les travaux scientifiques, dont on ne répétera pas assez qu'ils n'ont pas seulement la technique comme champ d'applications, mais aussi l’École (de la Maternelle à l'Université, et au-delà), la Culture, qui est l'honneur de l'esprit humain.
Bref, ce schéma est bête, pernicieux, à combattre. Faisons donc bien plus positif :
Ici, il y a la technique, qui produit nos biens et services, et dont l'Etat aurait intérêt à encadrer les productions de façon éclairée, avec encouragement. Il y a la technologie, qui prend les résultats des sciences, pour les faire passer en technique. L’État ne doit pas faire le travail lui-même, mais encourager le transfert, par des industriels (petits ou grands) qui s'enrichiront, produiront de l'emploi et de la richesse nationale. Là encore, de l'encouragement.
Enfin, il y a la science, qui n'est pas de la technologie, et qui est une activité d'appoint de l’État à la nation... et c'est donc seulement la case Bohr qui devrait être financée, en matière de production directe de l’État (par opposition à l'encouragement que j'évoquais précédemment). On observera que les trois activités représentées ici le sont au même niveau : je maintiens qu'un bon technicien est mieux qu'un mauvais scientifique, mais qu'un bon scientifique est mieux qu'un mauvais technicien. En réalité, on ne peut pas comparer des activités différentes !
samedi 9 mars 2019
Egalement en français
Quand vient le printemps, tout fleurit... même les dénominations les
plus absurdes. Il n'est pas inutile de rappeler clairement et
honnêtement que :
1. les sciences de la nature sont des activités où l'on cherche les mécanismes des phénomènes, par une méthode que j'ai déjà exposée mille fois, mais que nous pouvons résumer dans l'image jointe
2. la technologie est l'activité qui consiste à améliorer les techniques (souvent en utilisant les résultats produits par les sciences de la nature
3. il n'existe pas de "sciences appliquées" (horrible expression disait déjà Louis Pasteur) : il y a la science, qui n'est pas "appliquée", et les applications de la science ; l'activité qui cherche des application a pour nom technologie
Plus focalisé, maintenant :
4. les sciences des aliments explorent scientifiquement les aliments
5. la technologie alimentaire améliore l'aliment, sa production, souvent avec les résultats des sciences des aliments
6. parmi les sciences des aliments, certaines se consacrent aux ingrédients (qui ne sont donc pas des aliments)
7. la science qui cherche les mécanismes des phénomènes qui ont lieu pendant la préparation des aliments a pour nom "gastronomie moléculaire et physique", ce que l'on nomme aussi, plus brièvement, "gastronomie moléculaire"
Se tiendra à Paris, en juin, le neuvième "International Workshop on Molecular and Physical Gastronomy". Le thème est : Flavour through Cooking.
1. les sciences de la nature sont des activités où l'on cherche les mécanismes des phénomènes, par une méthode que j'ai déjà exposée mille fois, mais que nous pouvons résumer dans l'image jointe
2. la technologie est l'activité qui consiste à améliorer les techniques (souvent en utilisant les résultats produits par les sciences de la nature
3. il n'existe pas de "sciences appliquées" (horrible expression disait déjà Louis Pasteur) : il y a la science, qui n'est pas "appliquée", et les applications de la science ; l'activité qui cherche des application a pour nom technologie
Plus focalisé, maintenant :
4. les sciences des aliments explorent scientifiquement les aliments
5. la technologie alimentaire améliore l'aliment, sa production, souvent avec les résultats des sciences des aliments
6. parmi les sciences des aliments, certaines se consacrent aux ingrédients (qui ne sont donc pas des aliments)
7. la science qui cherche les mécanismes des phénomènes qui ont lieu pendant la préparation des aliments a pour nom "gastronomie moléculaire et physique", ce que l'on nomme aussi, plus brièvement, "gastronomie moléculaire"
Se tiendra à Paris, en juin, le neuvième "International Workshop on Molecular and Physical Gastronomy". Le thème est : Flavour through Cooking.
inscriptions : icmg@agroparistech.fr
Dear Friends
When spring comes, new words flourish, but indeed, it is perhaps not unnecessary to say clearly that :
1.
Sciences of nature (sometimes called natural sciences) are activities
where you look for phenomena using the scientific method (observing a
phenomenon, measuring it, grouping the data into equations, looking for a
theory, trying to refute the theory)
2. Technologies are activities of improving the technique (often using the results of sciences of nature).
3.
"Applied sciences" cannot exist : the tree is not the fruit. If it is a
science, it is not "applied", and if it is applied, this is technique
or technology (and there, whereas applied sciences don't exist, there
are applications of sciences)
More focused, now :
4. Food sciences are activities about studying food scientifically.
2. Food technology is the activity of improving food (often using the result of food sciences)
3. Among food sciences, there are sciences for ingredients (finding new compounds in food ingredients),
4.
The science for looking for mechanisms occuring during cooking is
called "molecular and physical gastronomy", shortened in "molecular
gastronomy".
And this is why I invite you to distribute
the announcement of the next "International Workshop on Molecular and
Physical Gastronomy", in Paris (France), June 5-7.
The topic will be : Flavour through Cooking.
application to : icmg@agroparistech.fr
The new workshop on Molecular Gastronomy
Dear Friends
When spring comes, new words flourish, but indeed, it is perhaps not unnecessary to say clearly that :
1.
Sciences of nature (sometimes called natural sciences) are activities
where you look for phenomena using the scientific method (observing a
phenomenon, measuring it, grouping the data into equations, looking for a
theory, trying to refute the theory)
2. Technologies are activities of improving the technique (often using the results of sciences of nature).
3.
"Applied sciences" cannot exist : the tree is not the fruit. If it is a
science, it is not "applied", and if it is applied, this is technique
or technology (and there, whereas applied sciences don't exist, there
are applications of sciences)
More focused, now :
4. Food sciences are activities about studying food scientifically.
2. Food technology is the activity of improving food (often using the result of food sciences)
3. Among food sciences, there are sciences for ingredients (finding new compounds in food ingredients),
4.
The science for looking for mechanisms occuring during cooking is
called "molecular and physical gastronomy", shortened in "molecular
gastronomy".
And
this is why I invite you to distribute the announcement of the next
"International Workshop on Molecular and Physical Gastronomy", in Paris
(France), June 5-7.
The topic will be : Flavour through Cooking.
application to : icmg@agroparistech.fr
vendredi 8 mars 2019
Science et cuisine... Drôle de terminologie fourre tout
Je vois des congrès "science et cuisine"... et cela me fait penser instantanément à ces rencontres "sciences et art", ou "femme et santé"... Dans chaque cas, de quoi d'agit-il ?
Avec "science et cuisine", je comprends bien que les organisateurs veulent attirer des cuisiniers en leur faisant miroiter de la science, et attirer des scientifiques en faisant miroiter de la cuisine. Mais , en réalité, les cuisiniers ne sont pas intéressés par la science, même s'ils ont parfaitement le droit de ne pas être ignorants. Notamment, certains sont souvent intéressés par nos travaux de gastronomie moléculaire. Mais en pratique (professionnelle), ils sont en réalité plus intéressés par la technologie, c'est-à-dire par les applications de la science à la cuisine, et, de fait, les congrès intitulés "science et cuisine" ont souvent un nom usurpé, car ce ne sont pas des congrès où l'on parle de science, mais des congrès de technologie culinaire.
Invité dans un tel congrès, récemment, je n'ai évidemment parlé que de ce que je fais, c'est-à-dire de la science, et plus exactement une science qui a pour nom la gastronomie moléculaire. Bien sûr, j'ai parlé aussi d'applications, mais en les distinguant bien des questions scientifiques. La science est une chose, la technologie en est une autre !
J'ajoute enfin que, dans ce congrès, des collègues physiciens me faisaient observer que le nom "gastronomie moléculaire" était restrictif, parce que, la physique, la biologie... En réalité, le titre complet de la discipline est « gastronomie moléculaire et physique », et cela inclut tout aussi bien de la biologie, par exemple.
Certains diront qu’il faut aussi des sciences de l’humain et de la société… proposant « gastronomie scientifique », mais je ne suis jamais bien certain qu’il faille mêler les sciences de l’humain et de la société avec les sciences de la nature… sans quoi le mot « science » verse dans une acception mollassonne, où l’on trouve tout et n’importe quoi. Bref, science et cuisine : j’y vois de la gastronomie moléculaire et physique, ce que nous avons raccourci en « gastronomie moléculaire ».
Et je termine en observant que, sous le terme de science se cache beaucoup de technologie, ce qui n’est pas la même chose. Il y a des milliers d’articles prétendus scientifiques qui sont en réalité de la technologie… au point que dans un numéro récent dde la revue Food Chemistry, je n’ai vu que très peu de science, et toute cette science là visait l’élucidation de la composition des ingrédients… et non des aliments. En réalité, le titre du journal était donc usurpé, puisque la chimie est une science, et non une application de la science, laquelle a pour nom la technologie chimique (éventuellement).
En tout cas, rien sur la science qui explore les mécanismes des transformations des ingrédients en aliments (gastronomie moléculaire), et rien non plus sur l’analyse des véritables aliments… mais en vue de quoi, d’ailleurs, d’un point de vue scientifique, ferait-on ces analyses ? Au fond, la question se pose : quelle est cette prétendue science des aliments dont on ne cesse de nous rebattre les oreilles ?
Avec "science et cuisine", je comprends bien que les organisateurs veulent attirer des cuisiniers en leur faisant miroiter de la science, et attirer des scientifiques en faisant miroiter de la cuisine. Mais , en réalité, les cuisiniers ne sont pas intéressés par la science, même s'ils ont parfaitement le droit de ne pas être ignorants. Notamment, certains sont souvent intéressés par nos travaux de gastronomie moléculaire. Mais en pratique (professionnelle), ils sont en réalité plus intéressés par la technologie, c'est-à-dire par les applications de la science à la cuisine, et, de fait, les congrès intitulés "science et cuisine" ont souvent un nom usurpé, car ce ne sont pas des congrès où l'on parle de science, mais des congrès de technologie culinaire.
Invité dans un tel congrès, récemment, je n'ai évidemment parlé que de ce que je fais, c'est-à-dire de la science, et plus exactement une science qui a pour nom la gastronomie moléculaire. Bien sûr, j'ai parlé aussi d'applications, mais en les distinguant bien des questions scientifiques. La science est une chose, la technologie en est une autre !
J'ajoute enfin que, dans ce congrès, des collègues physiciens me faisaient observer que le nom "gastronomie moléculaire" était restrictif, parce que, la physique, la biologie... En réalité, le titre complet de la discipline est « gastronomie moléculaire et physique », et cela inclut tout aussi bien de la biologie, par exemple.
Certains diront qu’il faut aussi des sciences de l’humain et de la société… proposant « gastronomie scientifique », mais je ne suis jamais bien certain qu’il faille mêler les sciences de l’humain et de la société avec les sciences de la nature… sans quoi le mot « science » verse dans une acception mollassonne, où l’on trouve tout et n’importe quoi. Bref, science et cuisine : j’y vois de la gastronomie moléculaire et physique, ce que nous avons raccourci en « gastronomie moléculaire ».
Et je termine en observant que, sous le terme de science se cache beaucoup de technologie, ce qui n’est pas la même chose. Il y a des milliers d’articles prétendus scientifiques qui sont en réalité de la technologie… au point que dans un numéro récent dde la revue Food Chemistry, je n’ai vu que très peu de science, et toute cette science là visait l’élucidation de la composition des ingrédients… et non des aliments. En réalité, le titre du journal était donc usurpé, puisque la chimie est une science, et non une application de la science, laquelle a pour nom la technologie chimique (éventuellement).
En tout cas, rien sur la science qui explore les mécanismes des transformations des ingrédients en aliments (gastronomie moléculaire), et rien non plus sur l’analyse des véritables aliments… mais en vue de quoi, d’ailleurs, d’un point de vue scientifique, ferait-on ces analyses ? Au fond, la question se pose : quelle est cette prétendue science des aliments dont on ne cesse de nous rebattre les oreilles ?