dimanche 8 mai 2022

A propos de cuisine note à note

 

Ce matin, des questions :

Avec une camarade, nous avons commencé à étudier la cuisine note à note pour notre sujet de tipe à mener en vue des concours de deuxième année.
Nous avons déjà prévu d'extraire un arôme de fruit. C'est pourquoi nous sommes maintenant à la recherche de composés tels que des protéines que nous pourrions extraire d'aliments comme des fruits ou des légumes afin de continuer notre étude.
Nous nous demandons avec ma camarade si vous pourriez nous donner des idées sur des composés que vous savez utiliser en cuisine note à note.

 

J'ai évidemment félicité ces étudiantes de s'intéresser à la cuisine note à note, plutôt qu'à la cuisine moléculaire, bien plus ancienne.
Mais, ensuite, je me suis posé des questions, stratégiques tout d'abord.

Tout d'abord faut-il faire l'extraction soi même ? En gros, la production ou la cuisine ?

Oui, mes interlocutrices ont pour projet de faire l'extraction d'un "arôme de fruit" (je discute plus loin les guillemets que j'ajoute), me disent-elles, mais cela est un sujet en soi, et ce travail ne serait pas de la cuisine, mais de la production d'ingrédients pour la cuisine.
La question est d'être bien clair avec le sujet du travail :
- soit c'est de faire de la "cuisine note à note", et il faut alors se procurer les ingrédients, et s'intéresser à la constitution des mets note à note ; en gros, le musicien de synthèse ne construit pas son synthétiseur, mais il l'utilise, et cela impose d'ailleurs beaucoup de compétences
- soit le travail consiste à préparer des ingrédients de la cuisine note à note, et ce n'est plus de la cuisine.
Bien sûr, on peut hybrider, mais nos interlocutrices y gagneront à avoir un projet bien clair, qu'elles exposeront en introduction, afin qu'elles soient évaluées sur le travail fait en réponse à la question posée. Oui, décidément, toujours bien poser la question centrale en introduction, bien définir l'objectif.


Le mot "arôme"

J'en arrive à un détail... important. Oui, la question terminologique qui était posée par mes guillemets, à "arôme de fruit" est un détail, par rapport à l'objectif, mais ce "détail" est important, parce que le grand Antoine Laurent de Lavoisier avait mille fois raisons de dire que la pensée et les mots vont ensemble.
Ici, on gagne a répéter que le mot "arôme", en français, signifie "odeur des plantes aromatiques". Il y a donc l'arôme du thym, du romarin, de la sauge... mais pas d'arômes de viande ni de poisson, par exemple. Pour les fruits, on peut hésiter.
Un des avantages de bien utiliser le mot "arôme", c'est que l'on évite la confusion avec l'odeur, d'une part, et avec les aromatisants, d'autre part.

Bref, nos deux interlocutrices veulent extraire des composés odorants de fruits. Et il y a mille façons d'obtenir des fractions odorantes... qui ne seront jamais, d'ailleurs, la totalité de l'odeur du fruits, soit parce que l'on n'aura pas extrait tous les composés, soit parce que l'on aura des proportions différentes des divers composés.
Mais... Au fait, la cuisine note à note vise à utiliser des composés purs pour construire les mets : pourquoi ne pas utiliser plutôt quelques composés purs, plutôt qu'un ensemble ?
En musique, quand on fait de la musique de synthèse pure, on utilise des ondes sonores pures, n'est-ce pas ?
Bien sûr, il n'y a pas de loi qui impose de faire de la cuisine note à note pure, plutôt que de la cuisine note à note pratique.
Mais, en tout cas, l'extraction de fractions odorantes des fruits est peut-être déjà un sujet de travail en soi.


Des composés ?

Vient alors la question des composés. Quels sont-ils ? Des protéines, des glucides, des lipides, des composés minéraux, et ainsi de suite.
Comme indiqué dans la fiche d'annonce du concours note à note, ces composés se trouvent facilement.
Les protéines : soit en pâtisserie, soit dans des boutiques diététiques, soit chez des sociétés telles que Louis François.
Les lipides : on prendra simplement de l'huile, puisque c'est quasiment réduit à des triglycérides.
Les glucides : la fécule de maïs, c'est de l'amylopectine quasi pure ; la cellulose, c'est le résidu solide obtenu par centrifugation de végétaux, puis lavage ; la pectine, c'est ce que l'on utilise pour faire des confitures, en plus du sucre ; d'ailleurs, à côté des polysaccharides, il y a des mono-, di- et oligo saccharides tels que glucose, fructose, saccharose, maltose, lactose, etc. ; des sels minéraux, pas difficile ; et ainsi de suite ; pour les colorants, on pendra des colorants alimentaires (bien sûr) ; pour les composés odorants, il y a des composés purs vendus par la société Iqemusu (en ligne : iqemusu.com).


Participer au concours ?

Et pendant que nous y sommes, pourquoi le travail de nos deux interlocutrices ne feraient-ils pas d'une pierre deux coups : pourquoi ne participeraient-elles pas au concours international de cuisine note à note, dont le thème, cette année est "des cubes salés avec des fibres" ? Les documents d'information et d'inscription sont là : http://www2.agroparistech.fr/The-10th-International-Contest-for-Note-by-Note-Cooking-is-announced.html

jeudi 5 mai 2022

Let's avoid using the word "polyphenoll"

Indeed there is no reason to speak of polyphenols, as the International Union of Chemistry decided : 


Phenols : Compounds having one or more hydroxy groups attached to a benzene or other arene ring, e.g. 2-naphthol:
Source : PAC, 1995, 67, 1307. (Glossary of class names of organic compounds and reactivity  intermediates based on structure (IUPAC Recommendations 1995)) on page 1357
https://doi.org/10.1351/goldbook.P04539

From now on, I shall speak of phenols. 

PS. By the way, tannins are very specific phenols.

mardi 3 mai 2022

Au fond, ces restaurants n'étaient pas pour moi


Je vois des restaurant sans nappe, et, au fond, je m'étonne un peu, car, chez moi, il y a une nappe ! 

C'est simplement du confort : plus moelleux qu'une surface solide, et, surtout, moins bruyant, quand les couverts sont reposés, par exemple. 

Je comprends que cela coûte moins cher aux restaurateurs... mais diminuent-ils le prix d'autant ? 

 


D'ailleurs, il y a des restaurants sans nappe avec des musiques bruyantes : cela oblige à parler fort pour que les commensaux s'entendent, ce qui engendre une sorte d'excitation... dont certains ont peut-être besoin pour avoir le sentiment d'exister ? 

Personnellement, je n'ai pas besoin de ce bruit. J'existe même dans le calme !


 

Il y a des restaurants où les serveurs sont familiers : évidemment, on hésite entre un fausse familiarité (parce que, en réalité, ils ne nous connaisent pas) et un manque de savoir vivre, en ce sens que ne sachant pas se comporter respectueusement, ils font comme ils peuvent, tout aussi bien pour le langage que pour le comportement. 

Mais ai-je vraiment besoin de "faire jeune" ? Après tout, je suis ce que je suis. 


 

Surtout, il y a l'assiette : qu'y a-t-il dedans ? Le service qui est rendu : lequel est-il ?

lundi 2 mai 2022

On reconnaît les chimistes à ses gestes


 
Il y a des gestes professionnels, que l'on apprend à faire, et sans doute dans tous les métiers,  mais pour la chimie en particulier, il y en a un qui consiste à ne pas poser sur la table le bouchon d'une bouteille.

Plus exactement, dans un laboratoire, n'y a pas de table, mais des paillasses, qui sont des tables professionnelles sur lesquelles on peut expérimenter sans dommage pour le meuble.
Souvent, elle sont couvertes de carreaux de céramique, ou, aujourd'hui, par des verres spéciaux.

Mais qu'importe. Je veux surtout arriver à ce geste courant en chimie qui consiste à prendre un flacon de réactif pour en utiliser une partie.

C'est là que survient la question d'ouvrir la bouteille, et de verser une partie du réactif dans un récipient plus petit, qui sera utilisé pour l'expérience.

On prend la bouteille, on la pose donc sur la paillasse, et long dévisse le capuchon.

La pire des fautes consisterait à poser le capuchon directement sur la paillasse dans la même position qu'il avait sur la bouteille, car ce capuchon est vraisemblablement souillé du réactif et il souillerait la paillasse, en  même temps que des souillures de la paillasse viendraient sur le capuchon... qui contaminerait tout le réactif.

Autre possibilité : poser le capuchon à l'envers sur la paillasse : c'est guère mieux, car la pailasse souillerait ensuite le capuchon, et tout ceux qui manipuleraient le flacon.

C'est la raison pour laquelle les chimistes font différemment  : ayant ouvert la bouteille, ils conservent le capuchon dans le creux de la main pendant qu'ils utilisent la bouteille de réactif.

Ce n'est pas un geste difficile, mais c'est la signature la chimiste qui a réfléchit à ce qu'il fait. Une "compétence professionnelle", donc.

dimanche 1 mai 2022

Le travail du verre en chimie



Les chimistes utilisent beaucoup de verrerie pour leurs expérimentations, parce que l'on réduit ainsi les réactions possibles entre les réactifs que l'on étudie et les contenants où ils sont placés.

Souvent, il y a des liquides ou des gaz à conduire, ce qui se fait donc par des tubes en verre.

Ces tubes en verre doivent être coudés, ce qui s'apprend facilement.

Prenons donc une petite lampe à alcool comme celle d'un appareil à fondue, et prenons un tube en verre entre les deux mains espacées d'une vingtaine de centimètres.

Nous mettons la partie centrale du tube au-dessus de la flamme et nous le tournons afin de chauffer régulièrement toute la surface en un point particulier.

Progressivement, on voit la flamme jaunir : c'est le signe que le verre commence à devenir très chaud.

D'ailleurs, quand le verre est bien jaune, on peut s'amuser à le tirer doucement, en tirant  la main gauche vers la gauche et la main droite vers la droite : on voit le tube en verre s'affiner jusqu'à la rupture.

Si l'on casse l'extrémité  en la tapant contre la table, alors on obtient tube effilé.
Bien sûr, il y a des chances pour que l'on puisse faire mieux que ce premier essai,  surtout si l'on veut faire ce qu'on nomme  une pipette pasteur, c'est-à-dire un tube avec une effilure très longue.

Si l'on coude le tube chauffé, au lieu de l'étirer, on fait... un coude.

Là, il faut apprendre à obtenir  un coude régulier, car il y a  deux écueils. Le premier, c'est quand on coude le verre alors qu'il est trop froid : la partie externe vient faire une sorte de méplat qui réduit le diamètre du tube. Autre écueil : quand le verre est trop chaud, la partie de l'intérieur de la courbure fait une sorte de bourrelet, de repli.

Bref il y a lieu, encore une fois, à apprendre à repérer l'exacte température qui convient, en se fondant notamment sur la couleur de la flamme dans laquelle on tourne le tube avant de le travailler.

Il y a bien d'autres manipulation avec du verre, mais, en tout cas, en voici deux élémentaires qu'un jeunes chimiste pourrait s'amuser à obtenir.


NB : Sans se brûler, ce qui arrive par mégarde, car le verre chaud ne montre pas qu'il est chaud. Il y a alors des pommades contre les brûlures ;-)

samedi 30 avril 2022

 Comment la règle de Faraday à propos des vérifications lui a été utile

L'extraordinaire chimiste et physicien britannique Michael Faraday appliqua explicitement six règles, après avoir eu entre les mains un livre d' "amélioration de l'esprit".

Et l'une d'entre elles était de vérifier ce qu'on lui disait.

Comment cette règle a-t-elle contribué à faire de Faraday le grand Faraday qu'il fut ?

Il y a mille exemples mais l'un des premiers fut le suivant :  Faraday, qui était apprenti relieur, eut à relier des Conversations chimique de Madame Marcet, un livre de vulgarisation de la chimie qui proposait des expériences élémentaires. Il les reproduisit, vérifiant ce qui est écrit, et c'est ainsi que, progressivement, il devint extraordinairement compétent en chimie, et qu'il fut à même de  parfaitement comprendre la conférence de Humphrey Davis à laquelle il assista un peu plus tard.

Il fut progressivement connu dans Londres précisément parce qu'il reproduisait de telles expériences : ce n'est pas si fréquent qu'un enfant se livre à des reproductions d'expérience de chimie... D'ailleurs, c'est cela aussi qui fit que Justus Liebig, en Allemagne, fut repéré par un chimiste qui passait dans sa ville et qui l'emmena comme assistant.

Oui, vérifions ce que l'on nous dit, avant d'en tirer des conséquences qui n'ont pas lieu d'être si ce que l'on nous dit est faux !

Et c'est pour cette raison précise que, depuis le 24 mars 1980, je teste les "précisions culinaires"... avec des surprises presque chaque fois !

vendredi 29 avril 2022

Entretenir une correspondance

Parmi les six règles que le chimiste et physicien anglais Michael Faraday s'imposait depuis tout jeune, il y avait celle-ci  : entretenir une correspondance.
Pourquoi le fait d'avoir une correspondance permet-il de devenir un excellent scientifique ? Bien sûr, il y a manière et manière d'avoir une correspondance, et de vagues messages, par email, sms ou autre  ne nous feront guère grandir.

Mais il y a aussi des façon intelligentes de faire et, évidemment, c'est ce que fit Faraday : il avait compris que cette règle visait à élaborer un discours de qualité.

Il y a mille raisons pour lesquelles cela est utile, des raisons le fond et des raisons de communication.

Pour les raisons de fond, on doit évoquer à ce propos l'introduction du Traité élémentaire de chimie par lequel Antoine de Lavoisier réforma la chimie et engendra  la chimie moderne :  dans le tout début de son livre, il cite Condillac en faisant observer que la pensée, c'est les mots.

Et c'est d'ailleurs ce qui était un des objectifs de Faraday  : entretenir une correspondance pour être en position d'explorer les mots, c'est-à-dire les pensées.

Il écrivait à son ami Abott... alors que celui-ci vivait à quelques centaines de mètres... et grâce à cette correspondance d'ailleurs, nous avons des traces du développement de la pensée de ce scientifique extraordinaire que fut Faraday.

Il apprit, en écrivant de façon "élevée", la précision dans les termes, qui épaula sa précision dans les manipulations.

Plus tard, d'ailleurs, quand il enseigna à tes frères et soeur, il insista sur ce point essentiel qui consiste à ne pas passer trop vite sur les mots qu'on ne comprend pas, mais, au contraire, à les examiner, à l'aide d'un dictionnaire, à les recopier, à recopier leur définition, à apprendre ces mots les uns à la suite des autre.

C'est ainsi que l'on communique bien, par oral ou par écrit, mais c'est aussi ainsi que l'on calcule bien, car le calcul est une façon abrégé d'écrire.

C'est aussi par les mots justes que l'on pense bien comme l'avait justement fait observer Lavoisier, et et c'est pour cette raison que ce conseil aida tant notre jeune Faraday, dont on ne doit pas oublier qu'il venait d'une famille extrêmement pauvre.

Faisons notre miel de son conseil : entretenons des correspondances !