Affichage des articles dont le libellé est résolution. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est résolution. Afficher tous les articles

vendredi 3 mars 2017

Résolution sur le progrès et la sciences


Résolution sur les sciences et le progrès dans la République (Assemblée nationale, 21 février 2017)

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant que la France, héritière d’une longue tradition scientifique, rationaliste et de la philosophie des Lumières, a toujours incarné le progrès et la science au service de l’humanité ;

Considérant, comme le souligne le rapport « L’avenir de la consultation scientifique pour les Nations Unies » publié par l’UNESCO le 18 septembre 2016, que : « Les sciences, la technologie et l’innovation ont la capacité de changer la donne pour relever pratiquement tous les défis mondiaux les plus urgents. » ;

Considérant que les discours partisans voire sectaires fondés sur une défiance croissante vis-à-vis de l’expertise scientifique constituent une grave remise en cause de cet esprit des Lumières en s’attaquant aux règles mêmes sur lesquelles repose l’institutionnalisation de toute science ;

Considérant que la confusion entre les connaissances et les opinions constitue une sérieuse menace pour le bon fonctionnement de notre démocratie en alimentant les processus sectaires et diverses formes de radicalisation ;

Considérant que la culture scientifique est à la base de toute recherche de connaissance vraie et que, par ce fait même, son respect est la condition indispensable à l’élaboration de politiques scientifiques cohérentes ;

Considérant que la recherche scientifique et technologique constitue un élément indispensable à la compétitivité de la France au niveau européen et même mondial ;

Considérant que la culture scientifique est le ferment indispensable pour des citoyens éclairés et responsables ;

Considérant que la démocratisation de l’accès aux savoirs scientifiques constitue un progrès social essentiel et génère des défis stimulants en matière de politiques culturelle et éducative ;

Considérant que l’enseignement des sciences, depuis l’école élémentaire jusqu’aux études supérieures, représente un enjeu considérable pour notre pays ;

Considérant qu’il revient aux chaînes de télévision et de radio du service public de l’audiovisuel de donner une place éminente aux émissions d’information et de transmission des connaissances scientifiques et des progrès technologiques ;

Considérant que l’expertise scientifique n’est plus assez prise en compte dans les processus de la décision politique ;

Considérant que les gouvernements successifs, depuis des décennies, n’ont pas su consacrer l’effort budgétaire indispensable dans le domaine de la recherche et du développement contrairement à d’autres pays voisins ;

Considérant que nos universités, nos écoles et nos organismes de recherche accomplissent un travail dédié à la défense et à la diffusion de la culture scientifique ;

Considérant que l’étude des sciences, de la philosophie et de l’épistémologie, et plus généralement des sciences humaines et sociales, joue un rôle éminent dans la construction de la culture scientifique ;

Considérant qu’en se dotant d’un Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), l’Assemblée nationale et le Sénat ont souhaité que l’action et les décisions du Parlement puissent être éclairées sur les conséquences des choix à caractère scientifique et technologique ;

1. Souhaite rappeler que la science, comme n’a cessé de le mentionner l’OPECST dans ses études touchant à la culture scientifique et technique, est un vecteur essentiel de l’innovation, dimension centrale du développement de l’économie et de l’emploi dans les sociétés développées contemporaines ; qu’elle constitue également un bien commun, comme le souligne un rapport de l’UNESCO, en ouvrant les perspectives culturelles des citoyens à la recherche d’une meilleure compréhension du monde ;

2. Suggère que l’initiation aux sciences à l’école élémentaire soit considérablement renforcée pour davantage sensibiliser les jeunes élèves à la démarche scientifique ;

3. Invite le Gouvernement à veiller à la qualité des enseignements scientifiques dispensés au collège et au lycée. De fait, les évolutions récentes apparaissent alarmantes ;

4. Souhaite, ainsi que le préconisent l’Académie des sciences, l’Académie des technologies et l’Académie des sciences morales et politiques, que le Gouvernement encourage une plus grande interaction entre enseignements en sciences technologiques et sciences humaines dès les classes de lycée, ainsi que dans la suite de tous les cursus scientifiques et inversement ;

5. Invite en particulier le Gouvernement à étoffer la partie du programme de philosophie consacrée aux sciences et à l’épistémologie au lycée et dans l’enseignement supérieur. En l’état, seuls les élèves de la filière littéraire abordent les chapitres consacrés au vivant, à la théorie et l’expérience. De tels développements seraient profitables à tous et plus particulièrement aux élèves des filières scientifiques qui pourraient acquérir davantage de connaissances épistémologiques sur les pratiques scientifiques et sur les rapports science-société ;

6. Souhaite que les travaux et les recommandations des académies soient davantage suivis, tant dans les domaines de l’enseignement que dans ceux de la décision politique et considère que celles-ci devraient avoir pour mission d’émettre des avis sur les propositions du Gouvernement en matière scientifique et technologique ;

7. Invite le Gouvernement à mettre en avant des stratégies de communication et de débats avec les citoyens adaptées à l’évaluation et à la gestion des risques technologiques. L’enjeu principal de l’expertise scientifique et technique consiste à fournir une évaluation en amont de la prise de décision politique. Il convient donc de développer des procédures d’examen propres à éclairer les débats sociétaux. Il convient également d’établir une distinction claire entre les éventuels dangers intrinsèques dus à une technologie donnée et les risques inhérents à son utilisation. Ces procédures d’examen doivent établir une balance bén éfices/risques (socio-économiques, sanitaires et environnementaux) liée autant à l’adoption d’une technologie que, le cas échéant, au renoncement à celle-ci ;

8. Souhaite que les chaînes de télévision et les stations de radio du service public renforcent l’offre d’émissions scientifiques, en particulier aux heures de plus grande écoute, et s’efforcent d’en faire de véritables espaces de savoir, en veillant notamment à y donner la parole aux membres de la communauté scientifique ;

9. Invite le Gouvernement à réfléchir à des pratiques pédagogiques fondées sur l’usage raisonné des technologies numériques, en particulier à l’apprentissage du tri de l’information qui faciliterait la distinction entre des savoirs établis et des opinions sans fondement scientifique ;

10. Invite le Gouvernement à donner plus d’importance aux études et rapports de l’OPECST dans l’élaboration et le suivi des politiques qui impliquent la science ou ses applications. Cela devrait se traduire, en particulier, par un renforcement de sa responsabilité dans l’organisation du travail parlementaire et dans le développement d’une politique culturelle attentive aux grands enjeux de la science contemporaine, via notamment un avis formel de l’OPESCT joint aux textes présentés et l’élargissement de ses missions à des études d’impact préalables pour tout projet ou proposition de loi impliquant des choix à caractère scientifique ou technologique.

Délibéré en séance publique, à Paris, le 21 février 2017.

Le Président,
Signé : Claude BARTOLONE
Voir : http://www.assemblee-nationale.fr/14/ta/ta0926.asp
Voir : http://www.marcel-kuntz-ogm.fr/
2017/02/sciences-et-progres-dans-la-republique-francaise.html


samedi 9 janvier 2016

Etre positif ? Il faut s'entraîner

En ce début d'année, juste après ma résolution d'être très positif,  je reçois une sorte de cadeau : une liste des "tendances food 2016". Rien que le libellé de cette liste monte du parisianisme, c'est-à-dire du snobisme, de la prétention, mais,  quand on creuse, ça devient bien pire :  dans la liste en question, on trouve les power bowls (on mange dans des bols plutôt que dans des assiettes, que c'est novateur !  ; les légumes spaghettis... et l'on croit à des vertus "santé" ; les graines anciennes... et le fantasme du végétarianisme ; le "bon gras qui fait mincir : vraiment ? ; la nouvelle world food... qui est la cuisine régionale : la terminologie anglaise fait-elle la nouveauté ? ; les pâtisseries avec moins de sucre : chiche ?  ; les infusions bio : pas de commentaire ; le dish crawl, à savoir changer d'endroit pour manger les divers plats du repas ; et j'en passe, et des meilleures...
Pourquoi cet envoi est-il un cadeau ? Parce qu'il teste  ma volonté d'être très positif. Dans le paragraphe précédent, j'ai esquissé une critique... mais sans insister, parce qu'on se souvient que j'ai décidé d'être positif ! Si des individus décident de manger des légumes spaghettis, ça les regarde, et l'on voit mal pourquoi je les en empêcherais ou pourquoi je leur ferais une morale, inutile de surcroît. Si nos amis veulent changer de siège en cours de repas, pourquoi pas, et la généralisation de ce comportement ne provoque pas de mort d'homme ; alors..

Surtout, pour être efficace, il faut  être positif. Comment ? Surtout ne pas réagir, mais partir des données soumises pour donner des faits, des analyses rationnelles, des clés pour la compréhension. Au lieu de faire des remontrances, il y a la possibilité de distribuer la connaissance, de la connaissance scientifique, fondée sur les faits, non pas de  la poésie, par de l'expression de fantasmes.

Reprenons, par exemple, à propos de légumes spaghettis. Savons-nous bien que, selon la façon dont on coupe des tissus végétaux, le goût peut changer ? Cela peut être tout aussi bien la façon de couper (transversalement, par rapport à l'axe d'un légume) que l'outil de découpe : dans notre équipe, nous avons montré qu'un scalpel fait un goût différent de celui  que produit un couteau médiocre qui abime les tissus.
Par exemple, à propos de matière grasse. C'est l'occasion de dire que nous ne mangeons pas des "acides gras", mais plutôt des "triglycérides", ou des "phospholipides", qui sont des composés différents. Dans le système digestif, ces composés sont décomposés, et les fragments que nous absorbons sont utilisés par notre organisme pour faire notamment les membranes de nos cellules. Surtout, il est exact que les divers composés de la catégorie des matières grasses ont des structures chimiques différentes, de sorte que leurs effets sur l'organismes sont différents. Font-ils mincir ? Stricto sensu, sans doute pas, mais la dénonciation de l'erreur est moins intéressante que la possibilité de signaler que les matières grasses sont les composés les plus énergétiques de notre alimentation, et de dire que des graisses en excès ne sont pas mieux éliminées, mais, au contraire, davantage stockées. En outre, si l'on calcule l'énergie qu'il faut à un individu adulte pour vivre sans efforts particuliers, on obtient environ 300 grammes de matière grasse, et donc plus pour d'autres composés. Ce qui réfute le fantasmes des "pilules nutritives".
Bref, chaque ânerie est l'occasion positive d'explications... qui finiront bien par être entendues ! C'est le début d'une longue explication, mais je crois cette dernière essentielle. Nos amis (je parle de nos concitoyens) méritent des explications simples, d'ailleurs plus détaillées que celles que j'ai données ici, à simple titre d'exemple. C'est à cela qu'il faut s'atteler maintenant, en nous souvenant que tout le monde n'est pas chimiste, et qu'il faudra expliquer, simplement, gentiment, avec un immense enthousiasme pour les connaissances de qualité !

lundi 28 décembre 2015

Ma bonne résolution

 Mes amis se perdent dans mes blogs : il y en a bien trop !
Et, moi, je vois que les billets ne sont pas toujours comme ils devraient être : certains sont insuffisamment positifs, ils manquent d'enthousiasme.

 Un  bilan, pour commencer :
 - d'abord, il y a le blog "Hervé This", à l'adresse http://hervethis.blogspot.fr/. Il s'agit d'un espace où je peux analyser des questions variées, qui ne trouveraient pas leur place sur le site d'AgroParisTech  (que je décris ci-dessous)
 - ensuite, il y a le site "Gastronomie moléculaire", http://gastronomie-moleculaire.blogspot.fr/. Il donnait des tas d'informations relatives à la gastronomie moléculaire... mais celui-là pouvait migrer vers l'AgroParisTech... et les billets correspondants ont effectivement migré
 - puis la revue Pour la Science m'a proposé de faire http://www.scilogs.fr/vivelaconnaissance/. Pendant plusieurs mois, ce blog n'a pas démérité, parce qu'il était conçu pour être positif, et il discutait des questions de science, de technologie, de connaissance...
 - enfin, est arrivée la proposition d'AgroParisTech, de transférer des billets sur le site de l'Ecole, en même temps qu'a été créé le Centre International de gastronomie moléculaire AgroParisTech-Inra, http://www.agroparistech.fr/-Le-blog-de-Herve-This-Vive-la-connaissance-.html, ce qui a suscité la création de plusieurs "sous-blogs" :
            - des réflexions sur l'enseignement supérieur http://www.agroparistech.fr/-A-propos-d-enseignement-superieur-mais-pas-seulement-.html
            - des réflexions "épistémologiques" : http://www.agroparistech.fr/-A-propos-de-recherche-scientifique-de-sciences-de-la-nature-de-technologie-.html
            - des questions de communication http://www.agroparistech.fr/-Des-questions-de-communication-scientifique-.html
             - des questions morales : http://www.agroparistech.fr/-Il-s-agit-d-agir-de-facon-responsable-.html
             - des réflexions  sur les bonnes pratiques scientifiques : http://www.agroparistech.fr/-Les-bonnes-pratiques-scientifiques-.html
 -  puis des informations variées sont données sur  http://www.agroparistech.fr/-1-Les-travaux-de-recherche-scientifique-ou-technologique-.html ;
              - des informations de gastronomie moléculaire sur http://www.agroparistech.fr/-Quelques-exemples-d-applications-de-la-gastronomie-moleculaire-.html
              - des informations sur la toxicologie sur  http://www.agroparistech.fr/1-Comment-ce-site-est-organise.html
 - il y a aussi des blogs moins fournis, tel le blog sur la cuisine note à note, qui a migré vers AgroParisTech, ou encore le blog Molecular gastronomy, qui a également migré... Et je n'évoque pas des pages de site telles celles qui sont consacrées à la toxicité des produits naturels, sur le site d'AgroParisTech, et qui ne s'apparentent pas à du blog.

Nous sommes bien d'accord : cela est trop ! Mais c'est secondaire, et la remise en ordre se fait progressivement. D'autant  que chaque blog est fait pour intéresser (j'espère) des amis particuliers : les questions de bonnes pratiques en science ne sont pas pour les mêmes amis que les questions de communication scientifique, par exemple.

Ce qui est plus grave, c'est que je m'aperçois aujourd'hui que certains billets sont bien trop négatifs ! Par exemple, les billets consacrés aux bonnes pratiques en science sont excessivement moralisateurs. Pour un tel sujet, où je sais que des amis craignent que  les réflexions ne se transforment en lois assorties de sanction, il importe de bien présenter les propositions comme des possibilités de tendre vers la perfection sans y prétendre, et dans la joie !
Pour les billets de blog "politiques", je vois  que j'exprime parfois un mécontentement. Ce n'est pas utile, cherchons plutôt à améliorer, par des propositions. Que faire des pisse vinaigre qui nous empêtrent un peu ? Rabelais avait résolu d'en rire. La carricature est une solution... mais faut-il prendre du temps à réagir  ? C'est bien trop d'honneur, et je viens de comprendre que la meilleure lutte contre la bêtise, c'est la promotion de la beauté, de l'intelligence, de l'enthousiasme !
L'idée du blog de Pour la Science, elle, était d'emblée positive, puisque le blog était fondé sur des "catégories prédéfinies d'enthousiasmes". Ca, c'est bon !

Ma bonne résolution, c'est donc de me cantonner à des catégories positives. Lesquelles ?
Les bonnes pratiques en science : bien fait, ce blog est sans doute utile.
Vive les  sciences de la nature : j'ai renommé cela "épistémologie", mais l'idée demeure, très positive.
Les merveilleuses applications des  sciences ? Jamais on ne dira assez à nos jeunes amis que le métier d'ingénieur, fait avec intelligence, activité et éthique, est extraordinaire !
La connaissance par la lorgnette de la gourmandise : oui, une belle façon d'aller de l'avant.
Les questions sont des promesses de réponses : c'est bien ce que l'on demande à un intellectuel, non ?
La beauté est dans l'oeil de celui qui regarde : là, on est immédiatement positif !
J'ai lu pour vous un livre merveilleux : ah, le partage des émotions, cela nous fait bien humain.
Apprendre ! : quelle question ! Elle mérite certainement que l'on s'y arrête un peu, que l'on analyse.

Et, pour conclure, je crois que j'ai compris quelque chose d'important, qui a de nouveau un rapport au Ragnarok, cette fin du monde des dieux, contre laquelle Wotan et ses guerriers combattent les géants, à partir du Valhalla : la meilleure  façon de combattre, c'est de construire.