Affichage des articles dont le libellé est législation. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est législation. Afficher tous les articles

jeudi 28 février 2019

Dangers et risques

Dans les discussions sur la sécurité sanitaire des aliments, il y a deux mots essentiels, qui sont hélas trop souvent confondus, tout comme dans les cuisine, à propos de la méthode "HACCP", qui vise à produire dans des conditions de sécurité... qui éviteront que, comme aux Etats-Unis en 2017, la moitié des toxi-infections alimentaires résultent d'un passage au restaurant, où le lavage des mains est la première mesure à prendre.

Bref, les deux mots sont "danger" et "risque". 

Le danger est inhérent à la chose. Une chaise est dangereuse, par exemple, parce que si elle lâche, on peut tomber et se blesser. Une voiture est dangereuse, un couteau est dangereux, mais aussi une fourchette, une cuiller, une assiette, le sel, le poivre, l'eau : je vous laisse jouer au jeu d'imaginer dans quelles circonstances, mais voici des pistes.
La fourchette peut crever un oeil.
L'assiette peut, mal lavée, apporter des micro-organismes pathogènes.
L'eau trop pure (neige fondue, par exemple) peut provoquer des chocs osmotiques.

Bref, puisque le danger est partout, il serait imbécile de légiférer sur le danger, et, heureusement, certains de nos élus ont compris qu'il faut plutôt légiférer ou réglementer sur le risque.
Par exemple, le couteau ne pouvant être interdit, ce que la loi peut faire, c'est d'interdire des couteaux trop dangereux (pointus, à cran d'arrêt, plus long que la paume de la main) dans certains lieux publics. Ou encore, puisque la voiture est dangereuse, on réglementera ou on légiférera sur la vitesse maximale.
Et tout cela avec doigté, sans excès, sans prudence excessive qui immobiliserait toute notre société.

Donc il faut s'assurer des risques.

Ce qui vient d'être dit des voitures ou des couteaux vaut pour les composés variés que nous utilisons : les pesticides, les conservateurs des aliments, les additifs variés que nous utilisons.
Et cette législation, cette réglementation doit se faire, pour les aliments, dans le cadre de la loi sur le commerce des denrées alimentaires, dont on rappelle qu'elles doivent être saines, loyales et marchandes.

Bref, considérons moins les dangers que les risques !


vendredi 8 février 2019

Des arrêts contestables

Un ami me transmet un "arrêt de la cour (grande chambre)" du 13 novembre 2018, à propos d'un litige entre deux sociétés agroalimentaires, l'une étant accusée d'avoir plagié un produit de l'autre. Il s'agit, dit le texte, d'une plainte pour "violation des droits de propriété intellectuelle relatifs à la saveur d'un produit alimentaire".  Il y a, conformément au genre, un rappel des règles ou lois qui peuvent s'appliquer à propos des oeuvres d'art, plus un exposé du litige, dont voici un extrait : "le droit d'auteur sur une saveur renvoie à l'impression d'ensemble provoquée par la consommation d'un produit alimentaire sur les organes sensoriels du goût, en ce compris la sensation en bouche perçue par le sens du toucher". Et finalement, une directive européenne est interprétée, comme "s'opposer à ce que la saveur d'un produit alimentaire soit protégée par le droit d'auteur".

 Je veux discuter deux points :
1. les termes du document qui m'a été transmis... et qui sont très contestables, contradictoires, et formant une base sur laquelle les avocats ou la cour ne pouvaient pas prendre vraiment parti : je propose donc que cet arrêt soit invalidé
2.  la question du droit d'auteur pour les aliments.


A propos de terminologie

 On peut bien sûr imaginer que la traduction de l'arrêt soit mauvaise, mais je propose d'observer qu'il y a le plus grand désordre dans les textes que je cite (des extraits, pour ne pas alourdir ce billet). Par exemple, il est question de "saveur"... mais je pressens qu'il était question de goût... mot utilisé ailleurs à propos d'"organes sensoriels" ! Finalement, de quoi parle-t-on ? Et pourquoi spécifier que la bouche perçoit des sensations tactiles (consistance) ? 
Cette cacophonie n'est pas neuve, comme si un dieu jaloux avait voulu mettre la discorde entre les constructeurs de la tour de Babel. Mais ma comparaison est tendancieuse, car si les constructeurs de ladite tour étaient fous (vouloir toucher le ciel!), la volonté de s'entendre sur les mots du goût est la condition d'avancées scientifiques, en même temps -on le voit- que la possibilité de réglementer et de juger de façon raisonnable (les gens de loi le veulent-ils vraiment, ou bien préfèrent-ils avoir de quoi exercer leurs talents pendant longtemps ?).

Je rappelle ma proposition :
1. quand nous approchons un aliment de la bouche, nous percevons ses couleurs, ses "textures visuelles" (brillant, mat, etc.), son odeur "anténasale" (quand les composés odorants qui vont de l'aliment à l'air arrivent dans nos narines), et jusqu'à son nom qui nous influence (le mot "citron" fait saliver).
2. puis, en bouche, nous sentons le "goût". Plus analytiquement :
 -  l'aliment est mastiqué, avec les dents qui perçoivent la consistance (et non la texture, mais c'est là un détail) ;
- cette mastication libère des composés qui se dissolvent dans la salive, et peuvent atteindre les récepteurs des papilles, ou bourgeons du goût, et c'est la perception des saveurs;
 - simultanément, la mastication, qui chauffe l'aliment (s'il est froid) libère des composés odorants, qui montent vers le nez, ce qui correspond à une odeur "rétronasale"
- et il y a toutes les autres sensations : température, trigéminal (piquants, frais...), calcium, acides gras insaturés à longue chaîne
Tout cela, c'est le goût, dont les saveurs ne sont qu'une composante pas isolable du reste. On comprend que le libellé de l'arrêt est d'une médiocrité indécente !
 

A propos de droit d'auteur

 Je sens les gens de loi  (certains) assez retors pour faire valoir que le droit d'auteur pourrait ne pas s'appliquer à des oeuvres d'art culinaire... puisque j'ai même rencontré des individus assez bornés pour penser que les productions culinaires ne soient pas de l'art. C'était un parti pris irréfléchi, voire idiot, car qu'est-ce que le "bon" sinon le "beau à manger" ? Je renvoie à mon livre, où je fais une "esthétique" du goût, le mot "esthétique" désignant une branche de la philosophie, et non le beau à regarder. 



Cela dit, je dois aussi témoigner (c'est du vrai, je peux produire des preuves) que j'ai été expert dans une affaire telle que celle-ci... et que c'était une mascarade où j'ai  perdu mon temps : il y avait, certes, la société X qui accusait la société Y de contrefaçon... mais, en vrai, ils se moquaient du fond de l'affaire et des arguments réels, car c'était seulement un retour du berger à la bergère, la société Y ayant fait plus tôt un procès à la société X... Et tout cela s'est terminé à l'amiable.
Alors qu'il y aurait eu lieu de trancher ! Je maintiens qu'il y a des contrefaçons, et même si l'on ne peut pas breveter une préparation culinaire, on peut parfaitement reconnaître une copie.

samedi 18 août 2012

Des questions de loyauté

Il y a quelques années, les règlements européens ont autorisé une petite quantité de matières grasses ajoutées au beurre de cacao afin :
- d'harmoniser les réglementations nationales au sein de la Communauté européenne
- de lisser les cours du cacao.

Dont acte... mais il y a d'abord une question de loyauté. Pour des Français, du chocolat à l'huile de palme n'est pas du chocolat. Si cela l'est pour d'autres pays, il faut en conséquence :
- soit donner des noms différents aux divers produits
- soit profiter des harmonisations pour remonter le niveau de qualité et d'exigence, pas le descendre !

Je propose que l'on ouvre à nouveau le dossier et que l'on règle cette question terrible !

Tant qu'on y sera, on pourra aussi faire cesser le scandale du Codex alimentarius, qui admet qu'on puisse faire de la sauce béarnaise sans jaunes d'oeufs ni échalotes ni beurre ! Qui m'épaule dans ce combat ?