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mercredi 14 juin 2023

Green washing : ne soyons pas naïf

L'industrie alimentaire doit vendre, et les citoyens ne sont pas naïfs au point de l'ignorer : ils se méfient. 

La publicité vient matraquer des messages, mais la presse ajoute sa voix au dialogue, en dénonçant des pratiques parfois contestables.
 

 

Ces temps-ci, les services de marketing ont une nouvelle idée, celle du  « clean label » : dans les listes d'ingrédients effectivement employés pour la fabrication des produits alimentaires, ils cherchent à éviter les ingrédients que la réglementation a classés dans la liste des E : E pour « européen ».
Il s'agit de ce que l'on nomme les "additifs". Comme il est interdit de ne pas signaler ces produits, certains industriels cherchent à ne pas employer les ingrédients de cette liste.
Et, comme on n'utilise pas ces ingrédients pour le plaisir, mais parce qu'ils ont des fonctions (épaissir, comme le fait la farine dans une sauce ; colorer comme le fait le safran dans une paëlla ; conserver, comme le vinaigre dans les cornichons...),  ces industriels cherchent à remplacer les ingrédients en E par des ingrédients « naturels ».
 

Par exemple, le  Centre technique de la conservation des produits agricoles (CTPCA) écrit que « la réduction des additifs est une attente des consommateurs pour des produits plus naturels ». En conséquence, il propose à ses adhérents de « substituer des additifs par des ingrédients naturels à fonctionnalité spécifique », tels l’huile de romarin ou  l’extrait de céleri comme conservateurs, des anthocyanes des végétaux comme colorants naturels, des extraits de thé vert comme antioxydants...
 

C'est pur mensonge ! L'huile de romarin, que l'on extrait du romarin par une étape d'extraction, n'est pas plus naturelle que du dioxyde de soufre, que l'on obtiendrait en brûlant du soufre ramassé sur les flans d'un volcan, par exemple, et le sel, que l'on obtient dans des marais salants ou dans des mines, n'est pas moins ni plus naturel. D'ailleurs, comment mesurerait-on le degré de naturel ?
 

Et c'est ainsi que l'on en vient à parler, très mensongèrement, de « clean label » ! Par exemple, en février 2012,  la revue P***s, qui donne une idée de l'industrie alimentaire, avait un article dont le titre était : « Salon CFIA : le plein de nouveautés clean label. » Et c'est vrai que de nombreuses industries cherchent à « faire naturel »... notamment afin de communiquer sur ce thème ! 

Considérons, par exemple, les farines  « fonctionnelles » du groupe L***n obtenues par traitement  des farines de blé par la chaleur : certes, on obtient ainsi de  bonnes capacités de liaison et de texturation, mais on ne me fera pas croire que ces farines sont « naturelles » ! D'ailleurs, le blé est une plante très artificielle, qui a été obtenue après de longs siècles de sélection (artificielle, donc). Et la farine a été obtenue après (1) culture ; (2) récolte ; (3) mouture : naturelle ? Non, au moins trois fois non ! 


Dans la pratique, que l'on me comprenne bien, je n'ai rien contre ces farines fonctionnelles, ou d'autres produits du même type, mais le remplacement des additifs classiques (amidons chimiquement modifiés, hydrocolloïdes) par ces farines n'est-il pas pure communication ? 


Et puis, méfions-nous des solutions « vertes » :  je suis heureux de faire état d'un appel à l'aide, hier, par une journaliste dont le plafond puait, parce qu'il avait été peint avec une peinture « verte », à la caséine : dans un endroit un peu humide, les micro-organismes qui se trouvent dans les bonnes conditions de température faisaient pourrir la peinture (je lui ai recommandé de poncer, de traiter à l'eau de Javel, et de repeindre avec une bonne peinture de synthèse... inventée précisément pour éviter ce genre de désagrément). 


Des fibres de peau  d’orange comme rétenteur et stabilisateur d’eau ? Pourquoi pas. Des fibres isolées du blé ou du lupin pour optimiser la texture de la viande hachée et des saucisses ? Pourquoi pas, mais quel nom donner aux produits ? Pardon, je me reprends : quel nom honnête ? Des protéines laitières pour la charcuterie ? Pourquoi pas, mais est-ce encore de la charcuterie ? Des fonds de sauce obtenus  par cuisson, puis réduction de matières premières « naturelles » (viandes, légumes, produits de la mer) : pourquoi pas, si les conditions de conservation s'y prêtent. 


Plus généralement, la tendance à plus de sécurité alimentaire ne peut être critiquée : ce serait idiot de le faire. En revanche, il faut de l'honnêteté, non ? Ce qui pose problème, c'est que du « clean label » au « greenwashing » (ou écoblanchiment) ou, pire, au « naturewashing » (naturoblanchiment), il n’y a qu’un pas que certaines entreprises n’hésitent pas à faire. Le greenwashing est un procédé marketing que des entreprises utilisent pour se donner une image (seulement une image : ne confondons pas avec la réalité) écologique et responsable. 


Toutefois l'objectif est toujours le même : « par ici mes belles oranges pas chêres ! ».  L’objectif est de promouvoir une marque ou un produit en mettant en avant des pratiques écologiques qui ne sont guère significatives. Il faut bien reconnnaître qu'il s'agit de manipulation marketing, et de mascarade écologique. Le « naturewashing », c’est la mise en œuvre de stratégies de communication pour faire  croire que les méthodes de fabrication  sont « traditionnelles » ou « naturelles ». C'est détourner le mot « naturel »  de sa signification.   Et, bien souvent, tout cela s'assortit de prix plus élevés : ne soyons pas naïfs !

samedi 30 mars 2019

Le beurre de cacaco, c'est du beurre de cacao, et le chocolat, c'est du chocolat : pas de traficotages !

Nous sommes bien d'acord : même si les mots "sain", "marchand" et "loyal", qui sont à la base de la loi sur le commerce des denrées alimentaires, sont à discuter, il ne faut pas tourner autout du pot : est loyal, honnête, ce qui est loyal, honnête. Et l'honnêteté départage les gens honnêtes des gens malhonnêtes, qui sont en réalité des salauds.



Tout cela  en préambule d'une discussion à propos du chocolat. Le chocolat, c'est une préparation que l'on obtient à partir du cacao, lequel contient à la fois ce qui se nomme beurre de cacao et une partie végétale qui résulte de la torréfaction des graines de cacao. À cette préparation, on a appris à ajouter du sucre pour faire des tablettes de chocolat, qui sont donc faites de moitié beurre de cacao et de moitié de sucre, environ.
Il y a quelques années, sous le prétexte de régulariser les cours du cacao, des industriels peu scrupuleux ont conduit la réglementation a changer, et il a été admis que l'on pourrait ajouter au beurre de cacao trois pour cent de matière grasse quine soit pas du beurre de cacao. Par matière grasse végétale, il faut t'entendre de la matière grasse végétale qui n'était pas présente dans le cacao le nom de beurre de cacao pour ce mélange.

Je récuse absolument le nom de chocolat pour un tel produit ! Le prétexte du changement était que l'on voulait régulariser les cours du cacao, afin d'enrichir les cultivateurs. Mon oeil ! C'était surtout une manoeuvre malhonnête pour se faciliter la vie. Et puis, n'aurait-on pas pu utiliser un autre terme que chocolat pour désigner de tels produits ? Certains ont argumenté en disant que certains fabricants avaient déjà cette pratique... mais alors il fallait sévir contre ces fabricants malhonnêtes, qui avaient usurpé le nom du chocolat. Bref, au lieu de niveler par le bas, on aurait mieux fait de niveler par le haut.
> Je pense que le combat n'est pas perdu et que nous devons absolument militer, aujourd'hui encore, pour que le chocolat soit seulement confectionné à partir de cacao. Il en va de la pluie élémentaire honnêteté.

jeudi 21 décembre 2017

On oublie trop souvent que l'on est protégé

On lit dans Aaron J. Ihde, The Development of Modern Chemistry (Dover, New York, USA, 1984, p 440) :

"Pendant 30 ans, après la publication d'Accum, la seule demande d'une réforme, en Angleterre, fut celle qui fut exprimée dans un tract à sensation publié anonymement en 1830. En 1850, Alphonse Normandy publia un livre qui eut du succès, Handbook of Commercial Analysis, qui recommendait une inspection au microscope des aliments et médicaments. Peu après, Arthul Hill Hassall raporta que, au microscope, on pouvait distinguer le café de la chicorée, du blé grillé, des poussières et des divers adultérants. Il fut chargé par Thomas Wakley, éditeur d'un journal médical indépendant, The Lancet, de diriger une Commission sanitaire analytique pour examiner les autres aliments. Des rapports furent publiés régulièrement. Sur 36 échantillons de café, seuls 3 étaient purs ; de l'alun était présent dans 49 échantillons de pain. Sur 28 échantillons de piment de Cayenne, 4 seulement étaient purs ; 13 contenaient du  minium (oxyde de plomb) et l'un contenait du vermillon (du sulfure de mercure). La quasi totalité des bonbons étaient colorés avec du chromate de plomb, du minium, du vermillon, de l'arsenate de cuivre, de la céruse (carbonate de plomb).

Qui a dit que des agences d'état telle que la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) étaient inutiles ?
Faisons confiance à nos experts, et ne laissons pas le commerce vendre n'importe quoi.








Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)