mercredi 5 octobre 2022

Et encore à propos de représentations 4/3



Dans un billet précédent à propos de représentations,  et,  en particulier,  d'images calculées par ordinateur, j'avais alerté sur le fait qu'un objet représenté peut très bien ne pas exister, tout comme il ne suffit pas de dire "Père Noël" pour que celui-ci existe vraiment.

Ici je veux insister un peu parce qu'il y a là quelque chose de d'utile, chaque fois que nous regardons des images.

Commençons par l'affaire du Père Noël. Une dénomination, c'est un ensemble de lettres, et ces lettres peuvent être trompeuses quand elles s'assemblent pour faire le mot "père", tout d'abord, puis pour faire le mot "Noël",  et, enfin, pour faire l'ensemble "Père Noël".
Bien sûr, il existe des pères ; bien sûr, Noël est quelque chose de réel. Mais le Père Noël n'existe pas, et l'utilisation de deux mots qui renvoient à des objets réels est à l'origine de la tromperie.

Ici, ce sont les mots qui ont trompé, mais les images font de même, tout comme les diverses autres sensations.

Pour les sensations, considérons par exemple un ensemble de molécules qui reproduirait l'odeur d'une truffe :  un chien ou un cochon iraient vers l'origine de l'émission d'odorants, croyant à la présence d'une truffe... qui pourtant n'existe pas.

Pour un son, de même, un chat pourrait chercher à chasser un oiseau qui ne serait pas présent, si l'on émettait un enregistrement de chant d'oiseau.

Les data gloves,  qui sont des gants muni de capteurs de pression, permettent d'entrer dans un monde virtuel qui peut-être utile par exemple pour l'enseignement de la chimie : on peut "sentir" des forces entre  des atomes ou des molécules  alors que ceux-ci sont absents, et seulement ne sont représentés sur des lunettes spéciales.

Sons, odeurs... Pour les images et des films calculés par ordinateur il en va de même et il faut être bien naïf pour croire à l'existence d'objet représentés, alors qu'en réalité des pixels colorés ont été assemblés par un ordinateur, sous la commande de celui ou de celle qui savait déposer les pixels au bon endroit.

Dans nos études scientifiques, une image est une représentation, donc une interprétation et je viens encore d'en avoir un exemple avec un article consacré aux gels : il y avait des images de microscopie à force atomique, pour lesquelles j'ai dit précédemment qu'il fallait les interpréter, car on ne voyait en réalité, sous forme d'image, que l'interaction d'une pointe mobile avec la surface d'un échantillon.

Mais ce n'est pas ici le point qui me retient:  je veux surtout signaler qu'une de ces images était associée à un schéma qui semblait d'un réalisme parfait  : on avait l'impression de voir des atomes, avec des distances, des angles, des volumes. Mais qui dit distance, qui dit volume dit codage de l'image à partir d'informations... venues d'où ?Obtenues comment ?

Les images scientifiques sont particulièrement trompeuses parce qu'elles sont fondées sur des mesures innombrables, interprétées, et interprétées à l'aide d'interprétations, qui, elles-mêmes, résultent d'interprétations, et ainsi de suite.

Il y a donc lieu d'être particulièrement prudent et, peut-être, de préférer un schéma manifestement faux à une image trop réaliste et donc trop trompeuse.

Mais, inversement ta gueule on aurait évidemment tort de se priver d'une représentation que nous maîtrisons et qui nous conduit à nous poser des questions :  des questions précisément relatives à l'interprétation, à sa nécessaire amélioration.

Il faut donc douter et douter encore jusqu'à savoir ce que l'on voit, à juger de degré de confiance que l'on décide d'accorder, à l'issue d'un long chemin de renseignements pris sur l'image que nous contemplons.

Et c'est ainsi que la science est belle !

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